Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-10-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 octobre 1860 01 octobre 1860
Description : 1860/10/01 (A5,N103). 1860/10/01 (A5,N103).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529969v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 313
LETTRES SUR LE HEDJAZ.
(Lettre II.)
Djeddah, le 10 février 1849.
Mon cher ami,
Je reprends la suite de cc que je vous écrivais le
5 janvier dernier.
Et, d'abord, quelle est la véritable signification du
nom de Djeddah ? Je vous ferai grâce d'une longue dis-
sertation grammaticale arabe à ce sujet, et je vous dirai
tout de suite que les dictionnaires donnent à ce nom
les significations suivantes : Être neuve, être heureuse,
être renouvelée, aïeule, bord, côte, littoral. Or, l'ap-
plication de ces diverses interprétations à la ville qui
nous occupe, peut également se trouver justifiée. En
effet, Djeddab, suivant les annales indigènes, fut une
ville de fondation relativement récente. Dans l'esprit
des Arabes, elle dut être considérée comme une cité
exceptionnellement fortunée, puisqu'elle se trouvait
placée à proximité de la ville sainte de la Mecque et
qu'elle en était en quelque sorte la clef maritime.
Elle s'élève à 6 ou 800 mètres d'un tombeau que la
tradition locale assure être ce'.ui de notre mère Ève,
l'aïeule du genre humain. Enfin elle est située au
bord de la mer, sur la côte du Hedjaz et le long du lit-
toral arabique de la mer Rouge.
L'historien arabe que j'ai déjà cité dans ma précé-
dente lettre, El Seid el Fassy, dit quelque part dans
son ouvrage : « Cette ville a été appelée du nom de
» Djeddah parce que c'est là que notre première mère,
» Ève (Settona Haoua), notre aïeule commune, est
» descendue du ciel sur la terre, et que c'est également
» là que se trouve son tombeau, » Un autre chro-
niqueur qui écrivait au commencement du¿ XIIlC siècle
de notre ère, Ez-Edding Hm el Athir, dit dans son
livre intitulé El Nehaya : ç El Djouddah et El Djiddad
» signifient le rivage de la mer ; c'est pour ce motif
» qu'on a donné ce nom à la ville qui est près de la
» Mecque. » Ces deux citations confirment ce qui
précède. Quant à la tradition qui veut que notre mère
Eve soit venue prendre pied à Djeddah lorsqu'elle fut
chassée du Paradis, et qu'elle y a même été enterrée ;
j'en parlerai un peu plus loin dans cette lettre.
J'ai déjà dit que Djeddah est située par 21°,32" de
latitude N. et 36°,26" de longitude E. Nous sommes
donc placés ici un peu au-dessous du tropique du
Cancer et guère au-dessus de la latitude du Sénégal ;
c'est dire que les chaleurs y sont d'ordinaire passable-
ment torréfiantes.
La ville, entourée de sables, est bâtie sur une rive
d'une stérilité morne et désespérante, rive qui tend
insensiblement à s'éloigner de la mer par suite d'un
travail madréporique qui se fait lentement, il est vrai,
mais qui se fait sans cesse le long du littoral ara-
bique. Les nombreux bancs de coraux recouverts
d'une couche de sable que la mer y dépose et qui
rendent l'accès du port de Djeddah assez difficile aux
gros navires, en sont une preuve évidente. Les ap-
proches du mouillage de Djeddah, au dire de plusieurs
de ses habitants que j'ai consultés, vieillards qui l'a-
vaient entendu dire à leurs pères, étaient, il y a une
centaine d'années, bien loin de ressembler à ce qu'ils
sont aujourd'hui ; l'ancrage des navires était plus pro-
fond et l'on s'apercevait à peine de l'existence des
bancs qui, maintenant, à la marée basse, restent com-
plètement à découvert. Voici encore une preuve de
l'exhaussement latent, mais constant cependant, du
littoral arabique et, par suite, de l'éloignement progres-
sif de la mer. On voit à Djeddah, dans la grande rue
du Bazar et formant le côté ouest des vastes magasins
de la Chouna, ou greniers du gouvernement, une an-
cienne bâtisse autrement solide que le reste des bâti-
ments de la ville et qui, il n'y a guère plus d'un siècle, .,.
était, en quelque sorte, baignée par la mer ; on y re-
connaît parfaitement la forme de deux tours qui dé-
fendaient l'ancienne porte de la ville s'ouvrant sur le
port; or, ces restes d'ancienne construction sont au-
jourd'hui à une distance de plus de 700 mètres de la
mer. En supposant qu'il y eût alors entre le pied
même de ces ouvrages de défense et les eaux de la
mer un espace de terrain de 50 mètres réservé pour le
quai et le mouvement d'embarquement et de débar-
quement des marchandises, et en assignant approxi-
mativement à cette époque, suivant l'opinion locale,
la date de 1770, on voit que dans un espace de moins
de cent ans la mer s'est retirée de l'ancien rivage de
Djeddah de près de 650 mètres. Il est vrai d'ajouter
que, selon toute probabilité, les dépôts de décombres
provenant des démolitions et des constructions nou-
velles de la ville qui ont pu être ordonnés en cet en-
droit, ont dû aider, dans une certaine mesure, à ce
travail de la nature.
Cet empiétement du sol sur l'élément liquide est
considérable sans doute, mais il ne doit point sur-
prendre au point d'en nier l'existence. On peut le con-
stater aisément sur plusieurs autres points de la mer
Rouge, où des dépôts d'alluvions et de coquillages at-
teignent, comme à El Oued je, par exemple, sur la côte
du Hedjaz, la hauteur de 30 et 35 pieds au-dessus du
niveau de la mer.
Le travail madréporique qui se continue toujours
sur ces rives peut ne pas être la seule cause de cette
ascension du sol ; on peut aussi l'attribuer à des sou-
lèvements volcaniques sous-marins qui ont eu lieu,
incontestablement, à une époque reculée et dont les
phénomènes pourraient bien se reproduire de nos jours
d'une manière insensible. A l'appui de cette opinion,
qui est également celle de plusieurs voyageurs et
savants explorateurs, je rappellerai l'existence de di-
verses sources thermales sur les deux rives de la mer
Rouge, notamment en Abyssinie ; l'île de Djebel Zeït,
en dedans du détroit de Jubal, où coule une fontaine
d'huile de pétrole autrefois avantageusement exploitée,
l'île volcanique de Seberket, célèbre autrefois, dit-
on, par ses mines d'émeraudes; la solfatara du Djebel
Dokhan ou Djebel Teïr, île située presque en face de
Loheïa, par 15°,20' de latitude N. \t 39°,32' de longi-
tude E.; les groupes de Zouker et de Harniches, plus
au sud, qui sont cbuvérts de produits volcaniques;
enfin presque touilla CÔtê-d'^tbiopiei qui offre de fré-
LETTRES SUR LE HEDJAZ.
(Lettre II.)
Djeddah, le 10 février 1849.
Mon cher ami,
Je reprends la suite de cc que je vous écrivais le
5 janvier dernier.
Et, d'abord, quelle est la véritable signification du
nom de Djeddah ? Je vous ferai grâce d'une longue dis-
sertation grammaticale arabe à ce sujet, et je vous dirai
tout de suite que les dictionnaires donnent à ce nom
les significations suivantes : Être neuve, être heureuse,
être renouvelée, aïeule, bord, côte, littoral. Or, l'ap-
plication de ces diverses interprétations à la ville qui
nous occupe, peut également se trouver justifiée. En
effet, Djeddab, suivant les annales indigènes, fut une
ville de fondation relativement récente. Dans l'esprit
des Arabes, elle dut être considérée comme une cité
exceptionnellement fortunée, puisqu'elle se trouvait
placée à proximité de la ville sainte de la Mecque et
qu'elle en était en quelque sorte la clef maritime.
Elle s'élève à 6 ou 800 mètres d'un tombeau que la
tradition locale assure être ce'.ui de notre mère Ève,
l'aïeule du genre humain. Enfin elle est située au
bord de la mer, sur la côte du Hedjaz et le long du lit-
toral arabique de la mer Rouge.
L'historien arabe que j'ai déjà cité dans ma précé-
dente lettre, El Seid el Fassy, dit quelque part dans
son ouvrage : « Cette ville a été appelée du nom de
» Djeddah parce que c'est là que notre première mère,
» Ève (Settona Haoua), notre aïeule commune, est
» descendue du ciel sur la terre, et que c'est également
» là que se trouve son tombeau, » Un autre chro-
niqueur qui écrivait au commencement du¿ XIIlC siècle
de notre ère, Ez-Edding Hm el Athir, dit dans son
livre intitulé El Nehaya : ç El Djouddah et El Djiddad
» signifient le rivage de la mer ; c'est pour ce motif
» qu'on a donné ce nom à la ville qui est près de la
» Mecque. » Ces deux citations confirment ce qui
précède. Quant à la tradition qui veut que notre mère
Eve soit venue prendre pied à Djeddah lorsqu'elle fut
chassée du Paradis, et qu'elle y a même été enterrée ;
j'en parlerai un peu plus loin dans cette lettre.
J'ai déjà dit que Djeddah est située par 21°,32" de
latitude N. et 36°,26" de longitude E. Nous sommes
donc placés ici un peu au-dessous du tropique du
Cancer et guère au-dessus de la latitude du Sénégal ;
c'est dire que les chaleurs y sont d'ordinaire passable-
ment torréfiantes.
La ville, entourée de sables, est bâtie sur une rive
d'une stérilité morne et désespérante, rive qui tend
insensiblement à s'éloigner de la mer par suite d'un
travail madréporique qui se fait lentement, il est vrai,
mais qui se fait sans cesse le long du littoral ara-
bique. Les nombreux bancs de coraux recouverts
d'une couche de sable que la mer y dépose et qui
rendent l'accès du port de Djeddah assez difficile aux
gros navires, en sont une preuve évidente. Les ap-
proches du mouillage de Djeddah, au dire de plusieurs
de ses habitants que j'ai consultés, vieillards qui l'a-
vaient entendu dire à leurs pères, étaient, il y a une
centaine d'années, bien loin de ressembler à ce qu'ils
sont aujourd'hui ; l'ancrage des navires était plus pro-
fond et l'on s'apercevait à peine de l'existence des
bancs qui, maintenant, à la marée basse, restent com-
plètement à découvert. Voici encore une preuve de
l'exhaussement latent, mais constant cependant, du
littoral arabique et, par suite, de l'éloignement progres-
sif de la mer. On voit à Djeddah, dans la grande rue
du Bazar et formant le côté ouest des vastes magasins
de la Chouna, ou greniers du gouvernement, une an-
cienne bâtisse autrement solide que le reste des bâti-
ments de la ville et qui, il n'y a guère plus d'un siècle, .,.
était, en quelque sorte, baignée par la mer ; on y re-
connaît parfaitement la forme de deux tours qui dé-
fendaient l'ancienne porte de la ville s'ouvrant sur le
port; or, ces restes d'ancienne construction sont au-
jourd'hui à une distance de plus de 700 mètres de la
mer. En supposant qu'il y eût alors entre le pied
même de ces ouvrages de défense et les eaux de la
mer un espace de terrain de 50 mètres réservé pour le
quai et le mouvement d'embarquement et de débar-
quement des marchandises, et en assignant approxi-
mativement à cette époque, suivant l'opinion locale,
la date de 1770, on voit que dans un espace de moins
de cent ans la mer s'est retirée de l'ancien rivage de
Djeddah de près de 650 mètres. Il est vrai d'ajouter
que, selon toute probabilité, les dépôts de décombres
provenant des démolitions et des constructions nou-
velles de la ville qui ont pu être ordonnés en cet en-
droit, ont dû aider, dans une certaine mesure, à ce
travail de la nature.
Cet empiétement du sol sur l'élément liquide est
considérable sans doute, mais il ne doit point sur-
prendre au point d'en nier l'existence. On peut le con-
stater aisément sur plusieurs autres points de la mer
Rouge, où des dépôts d'alluvions et de coquillages at-
teignent, comme à El Oued je, par exemple, sur la côte
du Hedjaz, la hauteur de 30 et 35 pieds au-dessus du
niveau de la mer.
Le travail madréporique qui se continue toujours
sur ces rives peut ne pas être la seule cause de cette
ascension du sol ; on peut aussi l'attribuer à des sou-
lèvements volcaniques sous-marins qui ont eu lieu,
incontestablement, à une époque reculée et dont les
phénomènes pourraient bien se reproduire de nos jours
d'une manière insensible. A l'appui de cette opinion,
qui est également celle de plusieurs voyageurs et
savants explorateurs, je rappellerai l'existence de di-
verses sources thermales sur les deux rives de la mer
Rouge, notamment en Abyssinie ; l'île de Djebel Zeït,
en dedans du détroit de Jubal, où coule une fontaine
d'huile de pétrole autrefois avantageusement exploitée,
l'île volcanique de Seberket, célèbre autrefois, dit-
on, par ses mines d'émeraudes; la solfatara du Djebel
Dokhan ou Djebel Teïr, île située presque en face de
Loheïa, par 15°,20' de latitude N. \t 39°,32' de longi-
tude E.; les groupes de Zouker et de Harniches, plus
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