Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-10-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 01 octobre 1860 01 octobre 1860
Description : 1860/10/01 (A5,N103). 1860/10/01 (A5,N103).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529969v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 309
abord, les choses ne se présentent point favorablement
à cet égard, car la baie de Péluse et celle de Suez ap-
partiennent l'une et l'autre à des mers peu profondes,
et entourées presque partout de plages fort plates, qui
s'abaissent insensiblement sous les flots. Pour la baie
de Péluse en particulier, sa réputation était très-enta-
chée par le voisinage des bouches du Nil. Le fleuve
portant des torrents de limon jusqu'à la Méditerranée,
on s'imaginait qu'il convertissait les fonds voisins du
littoral de l'est en abîmes de fange où disparaîtraient
tous les matériaux des digues, et que les machines se-
raient incapables de curer.
» Aussi l'attention des promoteurs de l'entreprise
s'est portée spécialement sur le golfe de Péluse. La na-
ture et la disposition des fonds et du rivage, la direc-
tion des vents dominants et du courant littoral venant
de l'ouest et auquel on attribuait l'apport incessant des
atterrissements fluviatiles, enfin les vicissitudes de l'at-
mosphère aux diverses saisons, ont été longuement et
scrupuleusement observés par les ingénieurs du vice-
roi et la commission scientifique, puis à l'aide d'un sé-
jour très prolongé sur la rade par MI. Lieussou, La-
rousse, Philigret, àbord de navires français et égyptiens.
Grâce à un examen qui n'a laissé échapper aucune
circonstance importante, le régime de la baie de Péluse
est aujourd'hui l'un des mieux connus parmi les para-
ges d'Orient, et cet examen, en redressant les idées
fausses répandues chez beaucoup de géographes et de
navigateurs, a ramené à sa juste valeur la plus grave
de toutes les objections matérielles opposées à la cana-
lisation de l'isthme. La prétendue impossibilité d'ouvrir
au canal de Suez une entrée praticable pour les navires
sur la Méditerranée, ayant été soutenue par des hommes
dont l'opinion fait souvent loi en telle matière, et en-
tre autres par le capitaine Spratt, de la marine anglaise,
fort cité dans la question des bouches du Danube, nous
croyons utile de nous étendre à ce sujet plus que ne
l'autorise peut-être un simple article de Revue, afin
d'édifier complètement le lecteur.
» L'établissement si désirable de ports dans le voisi-
nage des fleuves est combattu d'ordinaire par les modi-
fications continuelles auxquelles est assujettie l'embou-
chure des grands cours d'eau. Entre toutes les régions
physiques, l'estuaire des fleuves et des rivières est la
patrie de la mobilité. D'un côté, les dépôts terreux et
sablonneux arrachés des rives et charriés au fil de
l'eau; de l'autre, l'action des vaguss et des marées pro-
digieusement accrue par l'impulsion des vents de mer,
tantôt comblent d'anciens lits, tantôt ouvrent de nou-
velles bouches aux eaux continentales, tantôt font dis-
paraître les plaines sous des inondations permanentes.
On voit souvent des bancs sablonneux s'étendre avec le
temps vis-a-vis d'une côte qui bordait auparavant une
mer libre d'obstacles ; d'autres fois, les fleuves élevés
au-dessus des terres avoisinantes par les dépôts qu'ils
accumulent sur leur lit primitif, rompent les digues
qu'on avait construites afin de les resserrer entre leurs
rives, et convertissent en lacs et lagunes de grands
espaces, livrés d'abord à la culture ou aux pâturages.
Pendant la durée des âges, ces révolutions changent
les contrées basses au point d'en rendre l'aspect mécon-
naissable et d'y renverser toutes les conditions maté-
rielles du commerce et de la navigation. Il arrive que
ces graves changements se portent de préférence sur
les côtes, et, en ce cas. les atterrissements accroissent
le domaine du continent aux dépens de celui des mers.
Le fleuve Jaune, le Gange, l'Indus, le Niger, le Pô, le
Mississipi, nous en fournissent des exemples. 11 arrive
aussi que, dans cette longue lutte des deux éléments,
qui dure autant que les siècles, la victoire reste indé-
cise ; le profil des côtes n'accuse alors que des variations
relativement légères, parce que le fort des altérations
s'est passé à l'intérieur des terres.
» La Flandre et la Hollande, où se rendent de con-
cert l'Escaut, la Meuse et le Rhin, offrent un exemple
des plus intéressants, et dont les détails ont été supé-
rieurement critiqués et enchaînés dans un beau travail
encore inachevé d'un savant ingénieur de ce pays. Inu-
tile de faire observer combien ces perturbations du sol
marin et fluviatile menacent la prospérité et l'existence
même des ports. La chose parle de soi-même, et elle est
en ce moment, bien qu'à des degrés différents, l'objet
de sérieuses inquiétudes pour les villes de Hambourg,
d'Amsterdam, d'Anvers et du Havre.
» Cette difficulté de l'accumulation des sables devant
les ports se présente à son tour dans la question de
l'isthme. Le Nil, en s'avançant à travers les plaines sans
bornes de la basse Egypte, projette sur la Méditerranée
par ses dérivatifs et ses atterrissements, un éventail
sablonneux dont le pourtour à la côte compte 70 lieues
environ depuis Alexandrie jusqu'à Péluse, et ce vaste
espace, connu sous le nom de Delta, est célèbre par les
altérations qu'il a subies depuis l'antiquité. Ce n'est pas
ici le lieu d'en présenter l'histoire, très-discutée par les
critiques; disons seulement que les sept bouches impor-
tantes connues des anciens, il en reste deux essen-
tielles, celle de Damiette et celle de Rosette, les autres
n'étant plus retrouvables ou étant réduites a des canaux
fangeux.
» On tombe d'accord que le Nil, avec ses sables et la
couche de limon dont il revêt chaque année les champs
qu'il fertilise, est ici la cause principale des modifica-
tions. Mais il ne semble pas que le grand fleuve, en
se déversant dans la Méditerranée, puisse respecter à
la longue le contour extérieur de son delta et ne pas
agrandir peu à peu celui-ci par l'accumulation des dé-
pôts au fond de la mer. C'est pourtant le vrai nœud
de la difficulté dans la fameuse question de l'avant-port;
car, nous l'avons dit plus haut, ce n'est point sur les
branches du Nil qu'il faut l'établir, mais bien à la côte
orientale du delta, et auprès de l'ancienne branche pé-
lusiaque, maintenant obstruée et dépourvue d'action
sur le littoral. En effet, l'on ne peut songer à creuser
de gaieté de cœur et avec d'immenses efforts un vaste
bassin artificiel dans le voisinage du delta, s'il est
prouvé que les alluvions du Nil, semblables à celles de
plusieurs fleuves d'Europe, comblent incessamment les
passes environnantes, de manière à fermer l'accès de la
côte aux navires de fort tonnage. C'est là un point ca-
pital duquel dépend l'entreprise entière. Or, la géologie
et la critique, interrogées sur les progrès du delta vers
la mer, donnent une réponse fort inattendue et très-
abord, les choses ne se présentent point favorablement
à cet égard, car la baie de Péluse et celle de Suez ap-
partiennent l'une et l'autre à des mers peu profondes,
et entourées presque partout de plages fort plates, qui
s'abaissent insensiblement sous les flots. Pour la baie
de Péluse en particulier, sa réputation était très-enta-
chée par le voisinage des bouches du Nil. Le fleuve
portant des torrents de limon jusqu'à la Méditerranée,
on s'imaginait qu'il convertissait les fonds voisins du
littoral de l'est en abîmes de fange où disparaîtraient
tous les matériaux des digues, et que les machines se-
raient incapables de curer.
» Aussi l'attention des promoteurs de l'entreprise
s'est portée spécialement sur le golfe de Péluse. La na-
ture et la disposition des fonds et du rivage, la direc-
tion des vents dominants et du courant littoral venant
de l'ouest et auquel on attribuait l'apport incessant des
atterrissements fluviatiles, enfin les vicissitudes de l'at-
mosphère aux diverses saisons, ont été longuement et
scrupuleusement observés par les ingénieurs du vice-
roi et la commission scientifique, puis à l'aide d'un sé-
jour très prolongé sur la rade par MI. Lieussou, La-
rousse, Philigret, àbord de navires français et égyptiens.
Grâce à un examen qui n'a laissé échapper aucune
circonstance importante, le régime de la baie de Péluse
est aujourd'hui l'un des mieux connus parmi les para-
ges d'Orient, et cet examen, en redressant les idées
fausses répandues chez beaucoup de géographes et de
navigateurs, a ramené à sa juste valeur la plus grave
de toutes les objections matérielles opposées à la cana-
lisation de l'isthme. La prétendue impossibilité d'ouvrir
au canal de Suez une entrée praticable pour les navires
sur la Méditerranée, ayant été soutenue par des hommes
dont l'opinion fait souvent loi en telle matière, et en-
tre autres par le capitaine Spratt, de la marine anglaise,
fort cité dans la question des bouches du Danube, nous
croyons utile de nous étendre à ce sujet plus que ne
l'autorise peut-être un simple article de Revue, afin
d'édifier complètement le lecteur.
» L'établissement si désirable de ports dans le voisi-
nage des fleuves est combattu d'ordinaire par les modi-
fications continuelles auxquelles est assujettie l'embou-
chure des grands cours d'eau. Entre toutes les régions
physiques, l'estuaire des fleuves et des rivières est la
patrie de la mobilité. D'un côté, les dépôts terreux et
sablonneux arrachés des rives et charriés au fil de
l'eau; de l'autre, l'action des vaguss et des marées pro-
digieusement accrue par l'impulsion des vents de mer,
tantôt comblent d'anciens lits, tantôt ouvrent de nou-
velles bouches aux eaux continentales, tantôt font dis-
paraître les plaines sous des inondations permanentes.
On voit souvent des bancs sablonneux s'étendre avec le
temps vis-a-vis d'une côte qui bordait auparavant une
mer libre d'obstacles ; d'autres fois, les fleuves élevés
au-dessus des terres avoisinantes par les dépôts qu'ils
accumulent sur leur lit primitif, rompent les digues
qu'on avait construites afin de les resserrer entre leurs
rives, et convertissent en lacs et lagunes de grands
espaces, livrés d'abord à la culture ou aux pâturages.
Pendant la durée des âges, ces révolutions changent
les contrées basses au point d'en rendre l'aspect mécon-
naissable et d'y renverser toutes les conditions maté-
rielles du commerce et de la navigation. Il arrive que
ces graves changements se portent de préférence sur
les côtes, et, en ce cas. les atterrissements accroissent
le domaine du continent aux dépens de celui des mers.
Le fleuve Jaune, le Gange, l'Indus, le Niger, le Pô, le
Mississipi, nous en fournissent des exemples. 11 arrive
aussi que, dans cette longue lutte des deux éléments,
qui dure autant que les siècles, la victoire reste indé-
cise ; le profil des côtes n'accuse alors que des variations
relativement légères, parce que le fort des altérations
s'est passé à l'intérieur des terres.
» La Flandre et la Hollande, où se rendent de con-
cert l'Escaut, la Meuse et le Rhin, offrent un exemple
des plus intéressants, et dont les détails ont été supé-
rieurement critiqués et enchaînés dans un beau travail
encore inachevé d'un savant ingénieur de ce pays. Inu-
tile de faire observer combien ces perturbations du sol
marin et fluviatile menacent la prospérité et l'existence
même des ports. La chose parle de soi-même, et elle est
en ce moment, bien qu'à des degrés différents, l'objet
de sérieuses inquiétudes pour les villes de Hambourg,
d'Amsterdam, d'Anvers et du Havre.
» Cette difficulté de l'accumulation des sables devant
les ports se présente à son tour dans la question de
l'isthme. Le Nil, en s'avançant à travers les plaines sans
bornes de la basse Egypte, projette sur la Méditerranée
par ses dérivatifs et ses atterrissements, un éventail
sablonneux dont le pourtour à la côte compte 70 lieues
environ depuis Alexandrie jusqu'à Péluse, et ce vaste
espace, connu sous le nom de Delta, est célèbre par les
altérations qu'il a subies depuis l'antiquité. Ce n'est pas
ici le lieu d'en présenter l'histoire, très-discutée par les
critiques; disons seulement que les sept bouches impor-
tantes connues des anciens, il en reste deux essen-
tielles, celle de Damiette et celle de Rosette, les autres
n'étant plus retrouvables ou étant réduites a des canaux
fangeux.
» On tombe d'accord que le Nil, avec ses sables et la
couche de limon dont il revêt chaque année les champs
qu'il fertilise, est ici la cause principale des modifica-
tions. Mais il ne semble pas que le grand fleuve, en
se déversant dans la Méditerranée, puisse respecter à
la longue le contour extérieur de son delta et ne pas
agrandir peu à peu celui-ci par l'accumulation des dé-
pôts au fond de la mer. C'est pourtant le vrai nœud
de la difficulté dans la fameuse question de l'avant-port;
car, nous l'avons dit plus haut, ce n'est point sur les
branches du Nil qu'il faut l'établir, mais bien à la côte
orientale du delta, et auprès de l'ancienne branche pé-
lusiaque, maintenant obstruée et dépourvue d'action
sur le littoral. En effet, l'on ne peut songer à creuser
de gaieté de cœur et avec d'immenses efforts un vaste
bassin artificiel dans le voisinage du delta, s'il est
prouvé que les alluvions du Nil, semblables à celles de
plusieurs fleuves d'Europe, comblent incessamment les
passes environnantes, de manière à fermer l'accès de la
côte aux navires de fort tonnage. C'est là un point ca-
pital duquel dépend l'entreprise entière. Or, la géologie
et la critique, interrogées sur les progrès du delta vers
la mer, donnent une réponse fort inattendue et très-
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