Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-09-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 01 septembre 1860 01 septembre 1860
Description : 1860/09/01 (A5,N101). 1860/09/01 (A5,N101).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k65299671
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 283
Ont été tués par les Druses près de la rivière Damoor,
entre cette rivière et Damas, et leurs parents ont tué
deux Druses, conformément aux coutumes de vendetta
qui existent chez toutes ces nations.
» A ce moment, si le gouvernement avait fait les moin-
dres efforts, il aurait pu empêcher la guerre de s'éten-
dre. Je me trouvais auprès de Said-Bek-Jumblad, le
grand chef des Druses de Maktarah, non loin de Bled-
din, le même palais de l'émir Beshir, lorsque ces évé-
nements s'accomplirent, et je le pressai de faire tout ce
qu'il pourrait pour arrêter l'effusion du sang.
» Le 28 mai, la guerre a éclaté dans toute sa fureur.
Pendant la nuit trente-deux villages ont été aperçus en
flammes de Beyrouth, et quelques-unes des localités les
plus florissantes du Liban étaient inhabitées et en rui-
nes le 29.
» Les Druses se sont même avancés jusqu'à quarante
minutes de marche de Beyrouth, en présence du pacha
et de son camp (car il était sorti de la ville sous pré-
texte d'arrêter la guerre) ; ils ont brûlé, pillé et mas-
sacré dans le riche village de Hadad, résidence des
émirs. C'est là qu'on prétend (et il y a lieu de croire
que le fait est exact) que les soldats turcs ont tiré sur
les chrétiens qui fuyaient.
» Le 29 mai, Hasbeya, grande ville située au pied du
mont Hermon, a été attaquée par les Druses. Un émir
musulman de la famille de Shehab y résidait ; il était
depuis longtemps mal vu pur les pachas de Damas,
parce que son autorité était très-grande. L'année der-
nière, Ahmed-Pacha, gouverneur de Damas, a envoyé
un détachement de troupes cccuper les villes situées au
pied du Hermon, et il avait récemment envoyé des
renforts commandés par Othman Bey, dont le nom sera
éternellement en horreur aux chrétiens. Cet homme, le
jour de l'attaque d'Hasbeya, a dit aux chrétiens qu'il
avait été envoyé pour les protéger contre les Druses,
qu'ils devaient déposer les armes, sans quoi ils encour-
raient le déplaisir du gouvernement. Ils ont donc obéi,
croyant qu'il tiendrait sa parole. Pour plus de sécurité,
il les a invités à venir au seraï qui sert de caserne, et
les hommes, les femmes et les enfants se sont entassés
dans ce bâtiment. Les armes qu'ils avaient livrées ont
été chargées sur des mules et envoyées à Damas sous
escorte ; mais cette escorte était si faible que c'est une
dérision de lui donner ce nom. Avant que les mules ne
fussent sorties de la vallée de Hasbeya, les Druses se
sont présentés (et c'était là ce qu'on voulait); les soldats
n'ont pas fait de résistance, et les armes sont tombées
aux mains des Druses.
» Les chrétiens, pendant ce temps, enfermés dans le
serai sans aliments et sans eau, étaient dans une grande
détresse.
» Le 5 juin, ils ont commencé à ressentir des craintes,
voyant que le harem du gouvernement se préparait au
départ. 11s ne recevaient, aux questions qu'ils faisaient
à ce sujet, que des réponses évasives.
» Le ô juin, les soldats ont commencé à se mettre en
route, et les malheureux chrétiens ont vu clairement
qu'il était trop tard, qu'ils avaient été honteusement
trompés. Ils se sont précipités dans la cour, demandant
qu'on les laissât sortir. Mais le signal fut donné, les
portes s'ouvrirent, et les Druses, armés de tout ce qui
leur était tombé sous la main, commencèrent un mas-
sacre général de tous les hommes. Quelques-uns de ces
derniers parvinrent à franchir la porte, mais seulement
pour être suivis par les soldats turcs qui ne se sont pas
bornés à un rôle passif. Plusieurs chrétiens que j'ai in-
terrogés m'ont juré qu'ils ont vu les soldats prendre part
au massacre, et la conduite de ces troupes brutales en
vers les femmes a été sauvage. D'après les blessures
que j'ai vues tant sur les vivants que sur les morts, il
me paraît que les assassins ont agi avec une cruauté
systématique ; dix, douze et quatorze blessures profon-
des se voient fréquemment, et quelques-unes de ces
b'essures ont été faites avec des instruments conton-
dans. En un mot, on s'est servi de tout ce qu'on a trou-
vé, et selon la nature des armes, les mains et les jam-
bes ont été coupées, les têtes ont été fendues ou les
corps meurtrie.
» De tous les hommes qui étaient dans le seraï, qua
rante ou cinquante seulement ont pu s'échapper ; plu-
sieurs d'entre eux auraient été grièvement blessés et
laissés pour morts; quelques-uns se sont cachés au
milieu des cadavres et se sont enfuis pendant la nuit. Il
en est venu à Beyrouth. Leurs vêtements étaient littéra-
lement saturés du sang des cadavres sous lesquels ils
s'étaient cachés.
» Les Druses n'ont pas tué des femmes, et ils ne les
ont en général pas maltraitées ; cette tâche a été laissée
aux Turcs et aux musulmans.
» Des petits enfants de quatre à cinq ans ont été
saisis dans les bras de leurs mères, jetés à terre ou dé-
chirés en pièces ; quand leurs mères les tenaient trop
fortement, ils étaient tués sur leurs genoux ; quelque-
fois pour épargner le temps les mères et les enfants
ont été massacrés ensemble. Plusieurs femmes m'ont
assuré que les soldats turcs avaient saisi leurs enfants
par les deux jambes et les avaient déchirés en deux.
» Ainsi au coucher du soleil, le 6 juin, il ne restait
plus un mâle de la nombreuse population du mont
Hermon ; car le même jour et de la même manière, des
chrétiens de Hasbeya ont été massacrés.
» Dans toute cette guerre il n'y a eu peut-être qu'une
seule exception remarquable à cette barbarie.
» La sœur du grand chef druse, avant que le mas-
sacre ne commençât, conseilla aux chrétiens de ne pas
se rendre au seraï : elle connaissait probablement le
sort qui les attendait, et elle leur offrit un abri dans sa
maison. Malheureusement on s'est méfié d'elle ; mais
cependant quatre cents malheureux se sont rendus
dans sa maison ; et lorsque les meurtriers, altérés de
sang, ont demandé qu'on leur livrât ces chiens de
chrétiens, elle dit : « Entrez, si vous l'osez, et prenez-
les. » Même à ce moment les Druses n'ont pas osé vio-
ler la sainteté du harem de l'un de leurs grands prin-
ces, et ils sont partis en étouffant leurs malédictions.
Cette femme a escorté elle même les malheureux
chrétiens jusqu'à Montarah, d'où ils ont été envoyés à
Sidon et transportés par un de nos bâtiments à Bey-
routh
Ont été tués par les Druses près de la rivière Damoor,
entre cette rivière et Damas, et leurs parents ont tué
deux Druses, conformément aux coutumes de vendetta
qui existent chez toutes ces nations.
» A ce moment, si le gouvernement avait fait les moin-
dres efforts, il aurait pu empêcher la guerre de s'éten-
dre. Je me trouvais auprès de Said-Bek-Jumblad, le
grand chef des Druses de Maktarah, non loin de Bled-
din, le même palais de l'émir Beshir, lorsque ces évé-
nements s'accomplirent, et je le pressai de faire tout ce
qu'il pourrait pour arrêter l'effusion du sang.
» Le 28 mai, la guerre a éclaté dans toute sa fureur.
Pendant la nuit trente-deux villages ont été aperçus en
flammes de Beyrouth, et quelques-unes des localités les
plus florissantes du Liban étaient inhabitées et en rui-
nes le 29.
» Les Druses se sont même avancés jusqu'à quarante
minutes de marche de Beyrouth, en présence du pacha
et de son camp (car il était sorti de la ville sous pré-
texte d'arrêter la guerre) ; ils ont brûlé, pillé et mas-
sacré dans le riche village de Hadad, résidence des
émirs. C'est là qu'on prétend (et il y a lieu de croire
que le fait est exact) que les soldats turcs ont tiré sur
les chrétiens qui fuyaient.
» Le 29 mai, Hasbeya, grande ville située au pied du
mont Hermon, a été attaquée par les Druses. Un émir
musulman de la famille de Shehab y résidait ; il était
depuis longtemps mal vu pur les pachas de Damas,
parce que son autorité était très-grande. L'année der-
nière, Ahmed-Pacha, gouverneur de Damas, a envoyé
un détachement de troupes cccuper les villes situées au
pied du Hermon, et il avait récemment envoyé des
renforts commandés par Othman Bey, dont le nom sera
éternellement en horreur aux chrétiens. Cet homme, le
jour de l'attaque d'Hasbeya, a dit aux chrétiens qu'il
avait été envoyé pour les protéger contre les Druses,
qu'ils devaient déposer les armes, sans quoi ils encour-
raient le déplaisir du gouvernement. Ils ont donc obéi,
croyant qu'il tiendrait sa parole. Pour plus de sécurité,
il les a invités à venir au seraï qui sert de caserne, et
les hommes, les femmes et les enfants se sont entassés
dans ce bâtiment. Les armes qu'ils avaient livrées ont
été chargées sur des mules et envoyées à Damas sous
escorte ; mais cette escorte était si faible que c'est une
dérision de lui donner ce nom. Avant que les mules ne
fussent sorties de la vallée de Hasbeya, les Druses se
sont présentés (et c'était là ce qu'on voulait); les soldats
n'ont pas fait de résistance, et les armes sont tombées
aux mains des Druses.
» Les chrétiens, pendant ce temps, enfermés dans le
serai sans aliments et sans eau, étaient dans une grande
détresse.
» Le 5 juin, ils ont commencé à ressentir des craintes,
voyant que le harem du gouvernement se préparait au
départ. 11s ne recevaient, aux questions qu'ils faisaient
à ce sujet, que des réponses évasives.
» Le ô juin, les soldats ont commencé à se mettre en
route, et les malheureux chrétiens ont vu clairement
qu'il était trop tard, qu'ils avaient été honteusement
trompés. Ils se sont précipités dans la cour, demandant
qu'on les laissât sortir. Mais le signal fut donné, les
portes s'ouvrirent, et les Druses, armés de tout ce qui
leur était tombé sous la main, commencèrent un mas-
sacre général de tous les hommes. Quelques-uns de ces
derniers parvinrent à franchir la porte, mais seulement
pour être suivis par les soldats turcs qui ne se sont pas
bornés à un rôle passif. Plusieurs chrétiens que j'ai in-
terrogés m'ont juré qu'ils ont vu les soldats prendre part
au massacre, et la conduite de ces troupes brutales en
vers les femmes a été sauvage. D'après les blessures
que j'ai vues tant sur les vivants que sur les morts, il
me paraît que les assassins ont agi avec une cruauté
systématique ; dix, douze et quatorze blessures profon-
des se voient fréquemment, et quelques-unes de ces
b'essures ont été faites avec des instruments conton-
dans. En un mot, on s'est servi de tout ce qu'on a trou-
vé, et selon la nature des armes, les mains et les jam-
bes ont été coupées, les têtes ont été fendues ou les
corps meurtrie.
» De tous les hommes qui étaient dans le seraï, qua
rante ou cinquante seulement ont pu s'échapper ; plu-
sieurs d'entre eux auraient été grièvement blessés et
laissés pour morts; quelques-uns se sont cachés au
milieu des cadavres et se sont enfuis pendant la nuit. Il
en est venu à Beyrouth. Leurs vêtements étaient littéra-
lement saturés du sang des cadavres sous lesquels ils
s'étaient cachés.
» Les Druses n'ont pas tué des femmes, et ils ne les
ont en général pas maltraitées ; cette tâche a été laissée
aux Turcs et aux musulmans.
» Des petits enfants de quatre à cinq ans ont été
saisis dans les bras de leurs mères, jetés à terre ou dé-
chirés en pièces ; quand leurs mères les tenaient trop
fortement, ils étaient tués sur leurs genoux ; quelque-
fois pour épargner le temps les mères et les enfants
ont été massacrés ensemble. Plusieurs femmes m'ont
assuré que les soldats turcs avaient saisi leurs enfants
par les deux jambes et les avaient déchirés en deux.
» Ainsi au coucher du soleil, le 6 juin, il ne restait
plus un mâle de la nombreuse population du mont
Hermon ; car le même jour et de la même manière, des
chrétiens de Hasbeya ont été massacrés.
» Dans toute cette guerre il n'y a eu peut-être qu'une
seule exception remarquable à cette barbarie.
» La sœur du grand chef druse, avant que le mas-
sacre ne commençât, conseilla aux chrétiens de ne pas
se rendre au seraï : elle connaissait probablement le
sort qui les attendait, et elle leur offrit un abri dans sa
maison. Malheureusement on s'est méfié d'elle ; mais
cependant quatre cents malheureux se sont rendus
dans sa maison ; et lorsque les meurtriers, altérés de
sang, ont demandé qu'on leur livrât ces chiens de
chrétiens, elle dit : « Entrez, si vous l'osez, et prenez-
les. » Même à ce moment les Druses n'ont pas osé vio-
ler la sainteté du harem de l'un de leurs grands prin-
ces, et ils sont partis en étouffant leurs malédictions.
Cette femme a escorté elle même les malheureux
chrétiens jusqu'à Montarah, d'où ils ont été envoyés à
Sidon et transportés par un de nos bâtiments à Bey-
routh
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