Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-08-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 août 1860 15 août 1860
Description : 1860/08/15 (A5,N100). 1860/08/15 (A5,N100).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529966m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
270 L'ISTHME DE SUEZ,
erreur qui retarda, sans doute, l'accomplissement de
cette œuvre grandiose, et qui n'aurait pas Réchappé à
M. Lepère, s'il avait pu explorer l'isthme en toute sé-
curité et consacrer le temps nécessaire à cet important
travail.
Il Mais la différence de niveau eût-elle réellement
existé qu'elle n'aurait pas été un obstacle à la canali-
sation de l'isthme. Je dis plus, elle en aurait singulière-
ment facilité l'exécution. Une pente étant donnée de
Suez à Péluse, il aurait suffi de creuser une simple
rigole et de laisser agir les eaux, qui, d'elles-mêmes,
auraient contribué, par leur courant, à agrandir peu à
peu leur lit. Je dis peu à peu, vu que l'inclinaison que
l'on donnait au sol était presque insignifiante, par rap-
port à l'étendue du parcours. Pouvait-on sérieusement
craindre de submerger l'Egypte, lorsque l'on voyait le
Nil, à l'époque de ses grandes crues, charier à la Mé-
diterranée une masse d'eau plus considérable que le
canal n'en pourrait apporter, sans accroître pour cela
d'un millimètre le niveau de cette mer?
Il Cette erreur était encore admise par les ingénieurs
en 1832. Néanmoins, elle n'empêcha pas le célèbre Cor-
dier de croire possible un canal direct, en remédiant
par des écluses à la pente qu'il supposait exister. Lors
de mon séjour à Paris, en 1833, il me confia un mémoire
relatif à ce projet, en me chargeant de le soumettre à
Méhémet-Aly.
» En 1841, M. Linant-Bey, attaché au service de Son
Altesse, et deux ingénieurs anglais, firent des études
sur les lieux, et furent amenés à déclarer que la diffé-
rence de niveau n'existait point. Ces recherches éveil-
lèrent l'attention de l'Europe savante.
» En 1847, sous la présidence de M. Paulin Talabot,
plusieurs ingénieurs, à la tête desquels se trouvait
M. Bourdaloue, se transportèrent sur les lieux et con-
firmèrent par un nouveau nivellement que la mer
Rouge n'avait pas plus de hauteur que la Méditer-
ranée.
J) Néanmoins, ce ne fut qu'en 1835 que la question du
canal prit un caractère sérieux par les démarches de
M. Ferdinand de Lessops et les concessions du vice-roi
dont il avait l'estime et l'amitié. Il fallait, comme lui,
réunir à l'intelligence et aux lumières, la persévérance
et l'énergie ; il fallait être revêtu de cet honorabilité
qu'il s'est si justement acquise; il fallait enfin se trou-
Ter dans la haute position qu'occupe notre illustre com-
patriote pour donner à ce projet le caractère qu'il a
aujourd'hui. Par ses soins, l'élite du monde savant, les
ingénieurs les plus éminents des différentes puissances
se sont transportés sur les lieux; le littoral, l'isthme
tout entier ont été explorés, et la question scientifique
résolue d'une manière irrévocable. Le percement n'est
pas seulement possible, il rentre, quant à son exécution,
dans l'ordre des travaux ordinaires.
» Comme corollaire, conséquence nécessaire du canal
maritime, un autre canal dérivé du Nil, près du Caire,
et venant au lac Timsah, était naturellement indiqué
pour fournir d'eau douce les établissements formés sur
le parcours du canal maritime, la ville de Suez, et
fertiliser les 40,000 hectares de terrain concédés à
la Compagnie, et actuellement déserts. Ce canal, navi-
gable comme le Nil, aurait à peu près la même étendue
que celui des deux mers, mais sa largeur ne serait que
de 20 mètres. Cette voie de navigation mettrait le
centre de l'Égypte en rapport avec Suez et offrirait au
commerce de l'intérieur de précieuses ressources.
» Parlerons-nous des avantages que le canal maritime
offre aux relations internationales ? Tous les peuples les
ont reconnus et proclamés. Ce serait donner aux tran-
sactions le moyen de doubler leurs résultats, et diminuer
de moitié les dangers des voyages; ce serait ouvrir à la
civilisation l'Amérique, la Chine, l'Inde et les côtes orien-
tales de l'Afrique. Là, entre l'Égypte musulmane au
nord et les nègres idolâtres au sud, se trouve l'Abyssi.
nie où vivent trois millions de chrétiens qui n'atendent
que l'assistance de l'Europe pour se défendre contre les
rapts odieux des marchands d'esclaves qui leur enlèvent
chaque année un grand nombre de leurs enfants. Le
canal de Suez, en ouvrant au monde civilisé un chemin
vers ce peuple aborigène si intéressant par sa douceur
et son intelligence, améliorerait sensiblement son état
physique et moral.
» Les résultats du percement de l'isthme sont donc
d'enrichir, d'unir et de faire prospérer tous les peuples.
Mohammed-Saïd, en donnant à M. de Les seps le firnnm
qui lui assure son concours, a compris les avantages
particuliers qu'il retirerait du canal des deux mers, et
son adhésion spontanée sera dans l'avenir son plus beau
titre de gloire. L'Egypte deviendrait l'entrepôt du com-
merce de la terre. Alexandrie, avec ses dt ux ports ou-
verts aux vaisseaux du monde entier, verrait renaître,
plus splendides qu'ils ne le furent jamais, les beaux
jours de son antique prospérité.
» Il y aurait cependant une nation qui gagnerait plus
que toute autre au percement de l'isthmedc Suez, c'est
l'Angleterre. Aussi le commerce anglais n'a-t-il poussé
qu'un cri d'adhésion dans les nombreux meetings qui
ont eu lieu. Mais à l'élan du peuple le gouvernement
britannique a opposé la flegmatique résistance de son
égoïsme exclusif et de sa jalousie chronique. Toutes les
raisons qu'il a alléguées pour justifier cette opposition
insolite sont dépourvues de fondement. Si le canal est
impraticable, comme il persiste à le dire, il peut sans
crainte laisser faire la tentative, puisque les capitaux de
l'Angleterre et sa responsabilité ne s'y trouvent point
engagés; et dans le cas où l'entreprise réussirait, il en
retirerait tous les bénéfices sans avoir couru aucune
chance, car le canal est universel et non point l'apanage
d'une puissance européenne.
» L'isthme percé, les Anglais redouteraient-ils que,
dans l'éventualité d'une guerre avec la France, leurs
possessions de l'Inde ne fussent en danger? Mais com-
ment supposer qu'on les allât chercher à six mi.le
lieues quand nous n'aurions qu'à franchir un simple
détroit pour porter la guerre chez eux? Non, le véri-
table motif de sa résistance, le cabinet de Londres le
déguise sous de spécieux raisonnements.
Il est avéré que de tout temps l'Angleterre a con
voité l'Egypte. Que l'entreprise du canal se réalise, et
erreur qui retarda, sans doute, l'accomplissement de
cette œuvre grandiose, et qui n'aurait pas Réchappé à
M. Lepère, s'il avait pu explorer l'isthme en toute sé-
curité et consacrer le temps nécessaire à cet important
travail.
Il Mais la différence de niveau eût-elle réellement
existé qu'elle n'aurait pas été un obstacle à la canali-
sation de l'isthme. Je dis plus, elle en aurait singulière-
ment facilité l'exécution. Une pente étant donnée de
Suez à Péluse, il aurait suffi de creuser une simple
rigole et de laisser agir les eaux, qui, d'elles-mêmes,
auraient contribué, par leur courant, à agrandir peu à
peu leur lit. Je dis peu à peu, vu que l'inclinaison que
l'on donnait au sol était presque insignifiante, par rap-
port à l'étendue du parcours. Pouvait-on sérieusement
craindre de submerger l'Egypte, lorsque l'on voyait le
Nil, à l'époque de ses grandes crues, charier à la Mé-
diterranée une masse d'eau plus considérable que le
canal n'en pourrait apporter, sans accroître pour cela
d'un millimètre le niveau de cette mer?
Il Cette erreur était encore admise par les ingénieurs
en 1832. Néanmoins, elle n'empêcha pas le célèbre Cor-
dier de croire possible un canal direct, en remédiant
par des écluses à la pente qu'il supposait exister. Lors
de mon séjour à Paris, en 1833, il me confia un mémoire
relatif à ce projet, en me chargeant de le soumettre à
Méhémet-Aly.
» En 1841, M. Linant-Bey, attaché au service de Son
Altesse, et deux ingénieurs anglais, firent des études
sur les lieux, et furent amenés à déclarer que la diffé-
rence de niveau n'existait point. Ces recherches éveil-
lèrent l'attention de l'Europe savante.
» En 1847, sous la présidence de M. Paulin Talabot,
plusieurs ingénieurs, à la tête desquels se trouvait
M. Bourdaloue, se transportèrent sur les lieux et con-
firmèrent par un nouveau nivellement que la mer
Rouge n'avait pas plus de hauteur que la Méditer-
ranée.
J) Néanmoins, ce ne fut qu'en 1835 que la question du
canal prit un caractère sérieux par les démarches de
M. Ferdinand de Lessops et les concessions du vice-roi
dont il avait l'estime et l'amitié. Il fallait, comme lui,
réunir à l'intelligence et aux lumières, la persévérance
et l'énergie ; il fallait être revêtu de cet honorabilité
qu'il s'est si justement acquise; il fallait enfin se trou-
Ter dans la haute position qu'occupe notre illustre com-
patriote pour donner à ce projet le caractère qu'il a
aujourd'hui. Par ses soins, l'élite du monde savant, les
ingénieurs les plus éminents des différentes puissances
se sont transportés sur les lieux; le littoral, l'isthme
tout entier ont été explorés, et la question scientifique
résolue d'une manière irrévocable. Le percement n'est
pas seulement possible, il rentre, quant à son exécution,
dans l'ordre des travaux ordinaires.
» Comme corollaire, conséquence nécessaire du canal
maritime, un autre canal dérivé du Nil, près du Caire,
et venant au lac Timsah, était naturellement indiqué
pour fournir d'eau douce les établissements formés sur
le parcours du canal maritime, la ville de Suez, et
fertiliser les 40,000 hectares de terrain concédés à
la Compagnie, et actuellement déserts. Ce canal, navi-
gable comme le Nil, aurait à peu près la même étendue
que celui des deux mers, mais sa largeur ne serait que
de 20 mètres. Cette voie de navigation mettrait le
centre de l'Égypte en rapport avec Suez et offrirait au
commerce de l'intérieur de précieuses ressources.
» Parlerons-nous des avantages que le canal maritime
offre aux relations internationales ? Tous les peuples les
ont reconnus et proclamés. Ce serait donner aux tran-
sactions le moyen de doubler leurs résultats, et diminuer
de moitié les dangers des voyages; ce serait ouvrir à la
civilisation l'Amérique, la Chine, l'Inde et les côtes orien-
tales de l'Afrique. Là, entre l'Égypte musulmane au
nord et les nègres idolâtres au sud, se trouve l'Abyssi.
nie où vivent trois millions de chrétiens qui n'atendent
que l'assistance de l'Europe pour se défendre contre les
rapts odieux des marchands d'esclaves qui leur enlèvent
chaque année un grand nombre de leurs enfants. Le
canal de Suez, en ouvrant au monde civilisé un chemin
vers ce peuple aborigène si intéressant par sa douceur
et son intelligence, améliorerait sensiblement son état
physique et moral.
» Les résultats du percement de l'isthme sont donc
d'enrichir, d'unir et de faire prospérer tous les peuples.
Mohammed-Saïd, en donnant à M. de Les seps le firnnm
qui lui assure son concours, a compris les avantages
particuliers qu'il retirerait du canal des deux mers, et
son adhésion spontanée sera dans l'avenir son plus beau
titre de gloire. L'Egypte deviendrait l'entrepôt du com-
merce de la terre. Alexandrie, avec ses dt ux ports ou-
verts aux vaisseaux du monde entier, verrait renaître,
plus splendides qu'ils ne le furent jamais, les beaux
jours de son antique prospérité.
» Il y aurait cependant une nation qui gagnerait plus
que toute autre au percement de l'isthmedc Suez, c'est
l'Angleterre. Aussi le commerce anglais n'a-t-il poussé
qu'un cri d'adhésion dans les nombreux meetings qui
ont eu lieu. Mais à l'élan du peuple le gouvernement
britannique a opposé la flegmatique résistance de son
égoïsme exclusif et de sa jalousie chronique. Toutes les
raisons qu'il a alléguées pour justifier cette opposition
insolite sont dépourvues de fondement. Si le canal est
impraticable, comme il persiste à le dire, il peut sans
crainte laisser faire la tentative, puisque les capitaux de
l'Angleterre et sa responsabilité ne s'y trouvent point
engagés; et dans le cas où l'entreprise réussirait, il en
retirerait tous les bénéfices sans avoir couru aucune
chance, car le canal est universel et non point l'apanage
d'une puissance européenne.
» L'isthme percé, les Anglais redouteraient-ils que,
dans l'éventualité d'une guerre avec la France, leurs
possessions de l'Inde ne fussent en danger? Mais com-
ment supposer qu'on les allât chercher à six mi.le
lieues quand nous n'aurions qu'à franchir un simple
détroit pour porter la guerre chez eux? Non, le véri-
table motif de sa résistance, le cabinet de Londres le
déguise sous de spécieux raisonnements.
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