Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-07-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juillet 1860 15 juillet 1860
Description : 1860/07/15 (A5,N98). 1860/07/15 (A5,N98).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529964s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 239
Office par rapport à Saïd-Pacha, ainsi que dans ses no-
minations de représentants anglais en Egypte. Il est
très-certain que la politique décidée de lord Palmerston,
en 1810 et 41, quoique hostile et humiliante pour Me-
hemed-Ali, avait complétement détruit le prestige de
la puissance française, et conséquemment affaibli l'in-
fluence de la France. C'est un trait de caractère fort
connu des potentats orientaux qu'un déploiement éner-
gique de force, même contre eux, attire leur attache-
ment. AinsiJIehemedAli aussi bien qu'Ibrahim-Pacha,
qui étaient témoins oculaires du déploiement de puis-
sance anglaise à cette époque, conservèrent jusqu'à la
fin de leur vie un grand respect équivalant à de l'atta-
chement pour l'Angleterre. Ils prêtaient une oreille
attentive aux conseils de l'Angleterre et étaient tou-
jours disposés à favoriser les intérêts anglais en Egypte ;
ils comprenaient parfaitement que ces intérêts corres-
pondaient tout à fait à leurs propres vues pour le main-
tien du statu quo établi en 1841, et pour l'extension des
relations commerciales avec l'Angleterre qui devaient
développer les grandes ressources agricoles de l'Egypte.
Les grandes prospérités et richesses du pays, et l'ac-
croissement des revenus sont les meilleures preuves pra-
tiques de la sagesse de ces conseils et de la prévoyance
et du discernement de ceux qui les appréciaient. Mais
malheureusement le vice-roi actuel était alors trop
jeune pour tirer profit de l'expérience acquise ainsi par
ses prédécesseurs. Il a été élevé par des professeurs
français dans des idées françaises et imbu de prédilec-
tions françaises. Il est libéral dans ses opinions et
éclairé dans ses efforts pour encourager le progrès du
pays en y introduisant les ressources de la civilisation
européenne ; très-peu semblable à cet égard à son pré-
décesseur, Abbas Pacha, qui était un musulman bigot.
Mais Saïd-Pacha, très-enclin à s'occuper beaucoup d'af-
faires militaires, est naturellement frappé de la pré-
pondérance et grandeur militaires déployées par la
France sous le gouvernement actuel, et il ne manque
pas autour de lui de gens qui l'encouragent à se fier
exclusivement à la protection d'un souverain qui peut
ébranler des trônes d'un seul mot et partager des
royaumes avec son épée. Depuis l'avènement de Saïd-
Pacha à la vice-royauté, on n'a pas eu la moindre at-
tention pour lui, on ne lui a manifesté aucune recon-
naissance publique pour les grands services rendus aux
intérêts anglais par l'achèvement du chemin de fer et
du télégraphe de Suez, ainsi que pour la concession du
passage des troupes anglaises lors de l'insurrection in-
dienne ; pas même le joujou royal d'une décoration,
qu'il priserait tant, ne lui a été conféré, à lui, le sou-
verain réel du pays avec lequel l'Angleterre a des rela-
tions politiques et commerciales plus importantes et
des rapports plus intimes que presque avec aucun autre
pays de l'Europe.
» En outre, les représentants anglais accrédités jus-
qu'ici auprès de lui ont fait très-peu pour gagner sa
bienveillance ou pour tourner sa prédilection vers l'An-
gleterre, et peut-être serait-il trop pénible de mettre le
laisser-faire de leurs procédés en parallèle avec les
égards prononcés, conciliants et flatteurs que les agents
français ont toujours eus pour le vice-roi, sans doute
par ordre de leur gouvernement, qui lui a conféré de-
puis longtemps le grand cordon de la Légion d'honneur.
Il n'est donc pas surprenant que Saïd-Pacha soutienne
le projet du canal de Suez du moment qu'on lui fait sa-
voir officiellement qu'il serait ainsi agréable à l'Em-
pereur Napoléon ; il n'est pas non plus incompréhen-
sible que M. de Lesseps ait eu ass z d'influence auprès
de lui pour lui persuader d'accorder le firman de con-
cession et de prêter son appui matériel en faisant de
larges avances, quoique le projet eût été combattu par
le gouvernement anglais. Mais où était le représentant
anglais en Egypte pour représenter les vues et justifier
l'opposition du gouvernement quand M. de Lesseps lança
pour la première fois ce projet magnifique? L'honorable
M. Bruce laissa aller les choses, et après son départ
d'Egypte, en 1857, il n'y eut personne pendant deux ans
pour le remplacer. M. Green, consul anglais à Alexandrie
où il y avait déjà assez de besogne à faire, fut laissé seul
pour agir en l'absence de M. Bruce. Ainsi donc on aban-
donna à M. de Lesseps, soutenu déjà par l'influence fran-
çaise, toute facilitépourdéfendre ses vues à proposdu pro-
jet du canal, l'opposition anglaise étant réellement à
son minimum en Egypte où, comme il est manifeste à
présent, était la décision réelle de la question, du moins
la décision de la question de savoir s'il fallait permettre
ou non à une compagnie française, avec un capital de
200 millions, de faire une tentative pour la construction
du canal. Si Saïd-Pacha a enfin résolu lui-même la ques-
tion en prenant des actions pour 86 millions, et qu'il sou-
haite à M. de Lesseps de réussir promptement, qui peut
l'en blâmer? Il est notoire ici que le représentant an-
glais n'a fait aucune opposition réelle quand M. de Les-
seps et ses compagnons proposèrent pour la première
fois leur fameux projet à Saïd-Pacha, peu de temps
après son avènement à la vice-royauté, et quand ils
parvinrent à l'engager non-seulement de donner la con-
cession, mais aussi de prêter un concours matériel. Il
faut cependant regretter que le vice-roi n'ait pas percé
le mince voile qui couvre à peine aujourd'hui le véri-
table but politique du projet, et qu'il se soit laissé en-
jôler pour soutenir la fortune en déclin de la Compagnie
universelle par le dernier effort que vient d'obtenir
M. de Lesseps avec tant de succès. En Egypte ceux
qui auront le plus à souffrir sous le rapport pécuniaire
sont les princes, les propriétaires et le peuple, qui pro-
testent en silence contre le projet, et Saïd-Pacha, qui
prête imprudemment son concours matériel à la pour-
suite du projet chimérique de M. de Lesseps, dont les
seuls résultats certains seront la dilapidation stérile du
travail déjà trop rare et d'une grande partie des revenus
du pays; mais les complications politiques auxquelles
l'entreprise donnera lieu, si elle est poussée à l'extré-
mité, ne peuvent être que désastreuses pour le vice-roi
actuel et peut-être aussi pour les droits héréditaires de
sa famille. »
LES ACTIONNAIRES DU CANAL ET LA PRESSE ANGLAISE.
Parmi les nombreux témoignages de satisfaction
et de confiance que ne cessent de nous adresser les
Office par rapport à Saïd-Pacha, ainsi que dans ses no-
minations de représentants anglais en Egypte. Il est
très-certain que la politique décidée de lord Palmerston,
en 1810 et 41, quoique hostile et humiliante pour Me-
hemed-Ali, avait complétement détruit le prestige de
la puissance française, et conséquemment affaibli l'in-
fluence de la France. C'est un trait de caractère fort
connu des potentats orientaux qu'un déploiement éner-
gique de force, même contre eux, attire leur attache-
ment. AinsiJIehemedAli aussi bien qu'Ibrahim-Pacha,
qui étaient témoins oculaires du déploiement de puis-
sance anglaise à cette époque, conservèrent jusqu'à la
fin de leur vie un grand respect équivalant à de l'atta-
chement pour l'Angleterre. Ils prêtaient une oreille
attentive aux conseils de l'Angleterre et étaient tou-
jours disposés à favoriser les intérêts anglais en Egypte ;
ils comprenaient parfaitement que ces intérêts corres-
pondaient tout à fait à leurs propres vues pour le main-
tien du statu quo établi en 1841, et pour l'extension des
relations commerciales avec l'Angleterre qui devaient
développer les grandes ressources agricoles de l'Egypte.
Les grandes prospérités et richesses du pays, et l'ac-
croissement des revenus sont les meilleures preuves pra-
tiques de la sagesse de ces conseils et de la prévoyance
et du discernement de ceux qui les appréciaient. Mais
malheureusement le vice-roi actuel était alors trop
jeune pour tirer profit de l'expérience acquise ainsi par
ses prédécesseurs. Il a été élevé par des professeurs
français dans des idées françaises et imbu de prédilec-
tions françaises. Il est libéral dans ses opinions et
éclairé dans ses efforts pour encourager le progrès du
pays en y introduisant les ressources de la civilisation
européenne ; très-peu semblable à cet égard à son pré-
décesseur, Abbas Pacha, qui était un musulman bigot.
Mais Saïd-Pacha, très-enclin à s'occuper beaucoup d'af-
faires militaires, est naturellement frappé de la pré-
pondérance et grandeur militaires déployées par la
France sous le gouvernement actuel, et il ne manque
pas autour de lui de gens qui l'encouragent à se fier
exclusivement à la protection d'un souverain qui peut
ébranler des trônes d'un seul mot et partager des
royaumes avec son épée. Depuis l'avènement de Saïd-
Pacha à la vice-royauté, on n'a pas eu la moindre at-
tention pour lui, on ne lui a manifesté aucune recon-
naissance publique pour les grands services rendus aux
intérêts anglais par l'achèvement du chemin de fer et
du télégraphe de Suez, ainsi que pour la concession du
passage des troupes anglaises lors de l'insurrection in-
dienne ; pas même le joujou royal d'une décoration,
qu'il priserait tant, ne lui a été conféré, à lui, le sou-
verain réel du pays avec lequel l'Angleterre a des rela-
tions politiques et commerciales plus importantes et
des rapports plus intimes que presque avec aucun autre
pays de l'Europe.
» En outre, les représentants anglais accrédités jus-
qu'ici auprès de lui ont fait très-peu pour gagner sa
bienveillance ou pour tourner sa prédilection vers l'An-
gleterre, et peut-être serait-il trop pénible de mettre le
laisser-faire de leurs procédés en parallèle avec les
égards prononcés, conciliants et flatteurs que les agents
français ont toujours eus pour le vice-roi, sans doute
par ordre de leur gouvernement, qui lui a conféré de-
puis longtemps le grand cordon de la Légion d'honneur.
Il n'est donc pas surprenant que Saïd-Pacha soutienne
le projet du canal de Suez du moment qu'on lui fait sa-
voir officiellement qu'il serait ainsi agréable à l'Em-
pereur Napoléon ; il n'est pas non plus incompréhen-
sible que M. de Lesseps ait eu ass z d'influence auprès
de lui pour lui persuader d'accorder le firman de con-
cession et de prêter son appui matériel en faisant de
larges avances, quoique le projet eût été combattu par
le gouvernement anglais. Mais où était le représentant
anglais en Egypte pour représenter les vues et justifier
l'opposition du gouvernement quand M. de Lesseps lança
pour la première fois ce projet magnifique? L'honorable
M. Bruce laissa aller les choses, et après son départ
d'Egypte, en 1857, il n'y eut personne pendant deux ans
pour le remplacer. M. Green, consul anglais à Alexandrie
où il y avait déjà assez de besogne à faire, fut laissé seul
pour agir en l'absence de M. Bruce. Ainsi donc on aban-
donna à M. de Lesseps, soutenu déjà par l'influence fran-
çaise, toute facilitépourdéfendre ses vues à proposdu pro-
jet du canal, l'opposition anglaise étant réellement à
son minimum en Egypte où, comme il est manifeste à
présent, était la décision réelle de la question, du moins
la décision de la question de savoir s'il fallait permettre
ou non à une compagnie française, avec un capital de
200 millions, de faire une tentative pour la construction
du canal. Si Saïd-Pacha a enfin résolu lui-même la ques-
tion en prenant des actions pour 86 millions, et qu'il sou-
haite à M. de Lesseps de réussir promptement, qui peut
l'en blâmer? Il est notoire ici que le représentant an-
glais n'a fait aucune opposition réelle quand M. de Les-
seps et ses compagnons proposèrent pour la première
fois leur fameux projet à Saïd-Pacha, peu de temps
après son avènement à la vice-royauté, et quand ils
parvinrent à l'engager non-seulement de donner la con-
cession, mais aussi de prêter un concours matériel. Il
faut cependant regretter que le vice-roi n'ait pas percé
le mince voile qui couvre à peine aujourd'hui le véri-
table but politique du projet, et qu'il se soit laissé en-
jôler pour soutenir la fortune en déclin de la Compagnie
universelle par le dernier effort que vient d'obtenir
M. de Lesseps avec tant de succès. En Egypte ceux
qui auront le plus à souffrir sous le rapport pécuniaire
sont les princes, les propriétaires et le peuple, qui pro-
testent en silence contre le projet, et Saïd-Pacha, qui
prête imprudemment son concours matériel à la pour-
suite du projet chimérique de M. de Lesseps, dont les
seuls résultats certains seront la dilapidation stérile du
travail déjà trop rare et d'une grande partie des revenus
du pays; mais les complications politiques auxquelles
l'entreprise donnera lieu, si elle est poussée à l'extré-
mité, ne peuvent être que désastreuses pour le vice-roi
actuel et peut-être aussi pour les droits héréditaires de
sa famille. »
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