Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-03-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 mars 1860 01 mars 1860
Description : 1860/03/01 (A5,N89). 1860/03/01 (A5,N89).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529955t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 75;
bles de maisons qui se détachent du milieu de bois de
palmiers touffus et d'un vert sombre ; en face les trois
pyramides de Gigez à environ 8 kilomètres de distance,
et entre le Nil et ces monuments une plaine d'une teinte
verte et d'immense étendue. C'est dans cette plaine que
Bonaparte livra, en 1199, la célèbre bataille des Pyra-
mides.
» Au sud et dans le lointain, les trois pyramides de
Zaara, et un peu plus loin, à l'ouest, les trois pyramides
Darfour.
» Rien n'est beau comme l'ensemble de cette vue, qui
vient se compléter par l'aspect de toute la ville, qui
s'étend au loin avec ses innombrables minarets, dont
les pointes aiguës semblent menacer le ciel.
» Mais il faut déjà s'arracher à cette contemplation
pleine d'attraits, et rejoindre l'hôtel où se pressent de
nombreuses voitures qui doivent nous conduire au che-
min de fer.
« On monte effectivement dans le train à dix heures
un quart.
» A quatre kilomètres du Caire on est déjà dans le
désert. Des chaines de moniagnes d'un sable blanc
comme de la neige s'enchevêtrent, se fondent les unes
dans les autres, et semblent vous entourer de toutes
parts ; le rayonnement de la lumière colore l'espace
de teintes dont on n'a pas l'idée en Europe.
» La distance du Caire à Suez est d'environ trente
lieues, ou, en langage décimal, 120 kilomètres, qu'on
parcourt en quatre heures et demie environ. Du Caire
à Suez la physionomie du pays est toujours la même;
c'est toujours le désert de salie, avec ses mêmes hori-
zons de montagnes blanches, dont la monotonie et la
réverbération finissent par fatiguer l'esprit et les yeux.
t En sortant des wagons on se rend immédiatement
à bord d'un petit bateau à vapeur, qui vous transporte
à deux ou trois milles en mer, où est mouillé le steamer;
celui sur lequel je m'embarque se nomme la Némésis ;
c'est un magnifique navire qui, en un instant, reçoit
plus de deux cents passagers avec leurs bagages. Cha-
cun prend possession de sa cabine et s'y installe. Nous
avons toute une série de nouvelles figures à bord ; ce
sont les passagers qui sont arrivés d'Alexandrie, venant
de Southampton, en destination, comme nous, des Indes
orientales. Il y a parmi eux toute une classe de jeunes
gens de dix-huit à vingt ans, qui vont dans les Indes
pour la première fois ; on leur donne en Angleterre le
nom particulier de Griffin, qui signifie petits animaux
absurdes ; ils sont assez bien désigné-s, car ils se don -
nent beaucoup de mouvement pour rien, s'agitent dans
le vide, portent des voiles gris et verts autour de leur
chapeau, et ont une sorte de satisfaction d'eux-mêmes,
amusante à considérer.
« Lorsqu'on navigue dans ces régions, déjà si éloi-
gnées des centres de civilisation, on est frappé de la
grandeur de l'Angleterre et des moyens qu'elle emploie
pour maintenir sa domination des mers. La mer Rouge
est un véritable lac anglais où on ne rencontre aucune
trace de Français ; tous les mois plus de quinze grands
steamers viennent jeter à Suez ou en emporter des
masses d'Anglais, qui ont le monopole de toutes les
affaires avec les Indes orientales, et ces affaires, qui
sont considérables, sont la source de fortunes immenses.
» L'extrémité du monde apparaît aux Anglais comme
un horizon très-rapproché. En France, au contraire, on
a si peu l'habitude des voyages, qu'un déplacement un
peu long jette dans des doutes qui sont entretenus par
les appréhensions de tous ceux que l'on quitte. « Un
voyage en Chine! s'écrie-t-on, quelle aventure! quelle
folie ! » Eh bien ! les Anglais font ce voyage comme on
va de Paris à Marseille.
» Quant à moi, qui ai l'esprit naturellement entrepre-
nant, je regrette que mon pays ne soit pas plus lancé
dans la voie de ces lointaines excursions, et je me rallie
de plus en plus à l'idée de l'Empereur, qui veut établir
l'influence de la France dans les contrées les plus éloi-
gnées, là où le nom de l'Angleterre est seul connu.
« Vers minuit, vendredi 20 janvier, le steamer se met
en route. Nous ne nous arrêterons qu'à Aden, après avoir
franchi toute la mer Rouge, à la sortie du détroit de
Bab-el-Mandeb ; total : cinq jours de marche.
» Dès le matin du samedi je suis sur le pont pour
saisir tout ce que les yeux me permettront de voir au
loin. A droite, nous longeons la côte d'Egypte, à gauche
celle d'Asie ; toutes deux sont très-élevées, et les mon-
tagnes qui les surplombent sont, comme celles du dé-
sert, desséchées par le soleil. Le temps est magnifique,
la température douce et calme remplace les frimats de
l'Europe; l'air, d'une limpidité parfaite, permet de dis-
tinguer les moindres détails de la côte.
D Depuis deux ou trois jours, nous avons un vent du
sud extrêmement fatigant ; la mer, très-houleuse, ne
permet pas de laisser les fenêtres des cabines ouvertes;
dans l'intérieur, la chaleur est suffocante ; tout le monde
campe pêle-mêle sur le pont.
» Aujourd'hui 25, le vent a fraîchi en tournant un
peu à l'ouest. Je pense que nous arriverons cette nuit à
Aden; on doit y passer la journée pendant que l'on
fera du charbon à bord ; puis on repart pour Ceylan,
où l'on arrive après onze jours de mer. Je serai donc
probablement à Ceylan vers le 6 février. Là, les voyar
geurs pour l'extrême Orient quittent le bateau pour en
prendre un autre qui doit les conduire àSingapoor; et
la Némésis, bateau sur lequel nous sommes en ce mo-
ment, continuera sa route pour Madras et Calcutta.
» Ces steamers sont de véritables villages flottants.
Nous sommes cent. cinquante à table; on mange et on
boit toute la journée, jusqu'à dix heures du soir, heure
à laquelle on éteint toutes les lumières à bord.
» Ma cabine, placée près de la machine à vapeur,
est inhabitable, à cause de la chaleur qui est insup-
portable. Elle est remplie de cancrelas longs comme le
doigt, et qui, dit-on, mangent les ongles des pieds et
sucent le sang. Quant à moi, je ne me suis pas encore
aperçu de la voracité de ces affreux animaux. »
NOUVELLE MANIFESTATION DE LA CHAMBRE DE COMMERCE
DE BARCELONE.
La chambre de commerce de Barcelone a voulu
donner à l'entreprise du canal de Suez et à son pro-
bles de maisons qui se détachent du milieu de bois de
palmiers touffus et d'un vert sombre ; en face les trois
pyramides de Gigez à environ 8 kilomètres de distance,
et entre le Nil et ces monuments une plaine d'une teinte
verte et d'immense étendue. C'est dans cette plaine que
Bonaparte livra, en 1199, la célèbre bataille des Pyra-
mides.
» Au sud et dans le lointain, les trois pyramides de
Zaara, et un peu plus loin, à l'ouest, les trois pyramides
Darfour.
» Rien n'est beau comme l'ensemble de cette vue, qui
vient se compléter par l'aspect de toute la ville, qui
s'étend au loin avec ses innombrables minarets, dont
les pointes aiguës semblent menacer le ciel.
» Mais il faut déjà s'arracher à cette contemplation
pleine d'attraits, et rejoindre l'hôtel où se pressent de
nombreuses voitures qui doivent nous conduire au che-
min de fer.
« On monte effectivement dans le train à dix heures
un quart.
» A quatre kilomètres du Caire on est déjà dans le
désert. Des chaines de moniagnes d'un sable blanc
comme de la neige s'enchevêtrent, se fondent les unes
dans les autres, et semblent vous entourer de toutes
parts ; le rayonnement de la lumière colore l'espace
de teintes dont on n'a pas l'idée en Europe.
» La distance du Caire à Suez est d'environ trente
lieues, ou, en langage décimal, 120 kilomètres, qu'on
parcourt en quatre heures et demie environ. Du Caire
à Suez la physionomie du pays est toujours la même;
c'est toujours le désert de salie, avec ses mêmes hori-
zons de montagnes blanches, dont la monotonie et la
réverbération finissent par fatiguer l'esprit et les yeux.
t En sortant des wagons on se rend immédiatement
à bord d'un petit bateau à vapeur, qui vous transporte
à deux ou trois milles en mer, où est mouillé le steamer;
celui sur lequel je m'embarque se nomme la Némésis ;
c'est un magnifique navire qui, en un instant, reçoit
plus de deux cents passagers avec leurs bagages. Cha-
cun prend possession de sa cabine et s'y installe. Nous
avons toute une série de nouvelles figures à bord ; ce
sont les passagers qui sont arrivés d'Alexandrie, venant
de Southampton, en destination, comme nous, des Indes
orientales. Il y a parmi eux toute une classe de jeunes
gens de dix-huit à vingt ans, qui vont dans les Indes
pour la première fois ; on leur donne en Angleterre le
nom particulier de Griffin, qui signifie petits animaux
absurdes ; ils sont assez bien désigné-s, car ils se don -
nent beaucoup de mouvement pour rien, s'agitent dans
le vide, portent des voiles gris et verts autour de leur
chapeau, et ont une sorte de satisfaction d'eux-mêmes,
amusante à considérer.
« Lorsqu'on navigue dans ces régions, déjà si éloi-
gnées des centres de civilisation, on est frappé de la
grandeur de l'Angleterre et des moyens qu'elle emploie
pour maintenir sa domination des mers. La mer Rouge
est un véritable lac anglais où on ne rencontre aucune
trace de Français ; tous les mois plus de quinze grands
steamers viennent jeter à Suez ou en emporter des
masses d'Anglais, qui ont le monopole de toutes les
affaires avec les Indes orientales, et ces affaires, qui
sont considérables, sont la source de fortunes immenses.
» L'extrémité du monde apparaît aux Anglais comme
un horizon très-rapproché. En France, au contraire, on
a si peu l'habitude des voyages, qu'un déplacement un
peu long jette dans des doutes qui sont entretenus par
les appréhensions de tous ceux que l'on quitte. « Un
voyage en Chine! s'écrie-t-on, quelle aventure! quelle
folie ! » Eh bien ! les Anglais font ce voyage comme on
va de Paris à Marseille.
» Quant à moi, qui ai l'esprit naturellement entrepre-
nant, je regrette que mon pays ne soit pas plus lancé
dans la voie de ces lointaines excursions, et je me rallie
de plus en plus à l'idée de l'Empereur, qui veut établir
l'influence de la France dans les contrées les plus éloi-
gnées, là où le nom de l'Angleterre est seul connu.
« Vers minuit, vendredi 20 janvier, le steamer se met
en route. Nous ne nous arrêterons qu'à Aden, après avoir
franchi toute la mer Rouge, à la sortie du détroit de
Bab-el-Mandeb ; total : cinq jours de marche.
» Dès le matin du samedi je suis sur le pont pour
saisir tout ce que les yeux me permettront de voir au
loin. A droite, nous longeons la côte d'Egypte, à gauche
celle d'Asie ; toutes deux sont très-élevées, et les mon-
tagnes qui les surplombent sont, comme celles du dé-
sert, desséchées par le soleil. Le temps est magnifique,
la température douce et calme remplace les frimats de
l'Europe; l'air, d'une limpidité parfaite, permet de dis-
tinguer les moindres détails de la côte.
D Depuis deux ou trois jours, nous avons un vent du
sud extrêmement fatigant ; la mer, très-houleuse, ne
permet pas de laisser les fenêtres des cabines ouvertes;
dans l'intérieur, la chaleur est suffocante ; tout le monde
campe pêle-mêle sur le pont.
» Aujourd'hui 25, le vent a fraîchi en tournant un
peu à l'ouest. Je pense que nous arriverons cette nuit à
Aden; on doit y passer la journée pendant que l'on
fera du charbon à bord ; puis on repart pour Ceylan,
où l'on arrive après onze jours de mer. Je serai donc
probablement à Ceylan vers le 6 février. Là, les voyar
geurs pour l'extrême Orient quittent le bateau pour en
prendre un autre qui doit les conduire àSingapoor; et
la Némésis, bateau sur lequel nous sommes en ce mo-
ment, continuera sa route pour Madras et Calcutta.
» Ces steamers sont de véritables villages flottants.
Nous sommes cent. cinquante à table; on mange et on
boit toute la journée, jusqu'à dix heures du soir, heure
à laquelle on éteint toutes les lumières à bord.
» Ma cabine, placée près de la machine à vapeur,
est inhabitable, à cause de la chaleur qui est insup-
portable. Elle est remplie de cancrelas longs comme le
doigt, et qui, dit-on, mangent les ongles des pieds et
sucent le sang. Quant à moi, je ne me suis pas encore
aperçu de la voracité de ces affreux animaux. »
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