Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1860-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 février 1860 15 février 1860
Description : 1860/02/15 (A5,N88). 1860/02/15 (A5,N88).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529954d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 53
le vieux Caire. Les obstacles rencontrés dans cette oc-
casion et dans d'autres semb!ables décidèrent le vice-
roi à ne pas se fier entièrement à la route de terre,
mais à suppléer à ses défauts en renouvelant le canal.
A l'aide des indigènes, toutes les blessures du grand canal
furent cicatrisées en six mois. Il fut détruit, en 161, par
un motif assez odieux. Dans cette année, un certain
Hassan s'étant révolté à M édine contre le calife Mahomm ed-
al-Mansour, le calife ordonna que le canal fût comblé
pour couper aux rebelles leurs approvisionnements. Cet
acte barbare ne fut pas pourtant regretté par les Egyp-
tiens; car, pour eux, le canal n'était qu'un instrument
par lequel tom les produits de l'Egypte s'écoulaient en
Arabie. Le canal dès lors resta dans son lamentable
état de ruine, quoique tout le moyen âge en eût con-
servé une noble et active tradition.
» Breydenbach, voyageur allemand, qui visita l'isthme
de Suez en 1483, s'exprime avec une éloquence tou-
chante sur la grande mémoire de ces ruines puis-
santes, et une carte existant dans la bibliothèque du-
cale de Weimar, sous la date de 1424, nous retrace le
canal quoique, les sables dussent l'avoir en grande par-
tie envahi.
» Il paraît que le vice-roi Amrou conçut le dessein
d'exécuter un canal direct entre la Méditerranée et la
mer Rouge ; canal qu'ont encore à créer le génie et la
valeur de l'homme. Mais on craignait l'invasion des
chrétiens; le calife Haroun-al-Raschid renonça à exé-
cuter son projet d'un canal intermaritime par la notion
alors courante, et réfutée par de récentes investigations,
qu'il y avait entre les deux mers une extrême diffé-
rence de niveau. Les Vénitiens voulurent rouvrir le
canal; mais les sultans de l'Egypte, encore défiants
des Européens et des chrétiens, ne voulurent point les
écouter. Après la conquête de l'Egypte par les Turcs,
plusieurs de leurs sultans rêvèrent d'accroître leur
gloire, leur puissance et leurs richesses en joignant
les deux mers, comme, sans aucun doute, elles l'avaient
été originairement avant qu'on eût pensé à aucune es-
pèce de canalisation. Plus tard le percement de l'isthme
de Suez fut l'une des sublimes visions dont Napoléon
Bonaparte nourrit son cœur fertile et hardi dans ses
projets sur l'Orient et au profit de l'Orient. Il fut,
comme on le sait, sur le point d'être noyé par le retour
soudain de la marée au moment où il examinait les
lieux. Comme beaucoup d'autres projets, il a dû laisser
celui-là sans réalisation. Mehemet-Ali, un Bonaparte à
sa mode, aspira à dépasser Bonaparte lui-même en cette
affaire. Mais la crainte d'attirer sur lui la vengeance
des Anglais le détourna de mettre sa main vigoureuse
à l'exécution de ce merveilleux travail. Toutefois sous
le règne de Mehemet-Ali commença cette agitation qui
ne cessera jamais jusqu'à ce que l'Asie et l'Afrique de-
viennent des continents séparés par les flots des deux
mers. »
» Il serait fatigant de donner l'histoire de tout ce que
les hommes scientifiques, isolés ou réunis en commis-
sion, ont fait relativement à la canalisation de l'isthme ;
il y a eu dans le parlement des débats marqués par
beaucoup d'ignorance, il y a eu dans la presse des dé-
bats marqués par une ignorance plus grossière encore.
» Ferdinand de Lesseps s'est efforcé de s'élever en
une sorte de héros du canal de Suez; mais qu'il soit un
charlatan et un aventurier ou un philanthrope énergique
et désintéressé, c'est ce que nous n'avons pas les
moyens de décider. Quoi qu'il en soit de Ferdinand de
Lesseps, l'Angleterre, ce rOJ aume célèbre du bon sens,
doit être capable de juger par elle-même de la meil-
leure route à suivre sans s'occuper de ce Français. Un
canal de Suez diminuerait de moitié notre éloignement
maritime de Bombay. Les millions de tonnes, les mil-
liers d'émigrants, de passagers, de soldats que l'Angle-
terre expédie par le cap de Bonne-Espérance, elle pour
rait les expédier par une route beaucoup plus courte.
Mais le canal de Suez doit être le travail de l'Angle-
terre et la possession de l'Angleterre. Il est absurde de
supposer que le canal une fois fait resterait longtemps
sous la main du vice-roi d'Egypte; le pauvre vice-roi
n'est qu'une marionnette française. A moins que l'Angle-
terre n'agisse sans retard, l'Egypte et le canal seront
aussi entièrement français que l'Algérie. Si l'Angle.
terre ne se saisit pas de l'Egypte en pleine paix, elle
sera contrainte à l'arracher par la guerre de la main
avide de la France.
» Amers. »
LA REVUE DES DEUX MONDES.
Un jeune ingénieur des mines, M. Auguste Laugel,
a publié, dans le dernier numéro de la Revue des
Deux Mondes, un éloge des deux Stephenson qu'il
termine par les appréciations suivantes :
« Quand il fut question de percer l'isthme de Suez,
» Robert Stephenson se prononça nettement contre
» ce projet à la Chambre des communes. Il n'avait, il
» est vrai, visité que très-rarement l'isthme, et il faut
» croire aujourd'hui, sur le témoignage de personnes
» qui ont pu l'explorer à loisir, que les difficultés d'exé-
» cution entrevues par l'éminent ingénieur anglais ne
» sont point insurmontables, comme il le pensait : ce
» qui ne saurait être douteux:, c'est qu'elles ne peu-
» vent être surmontées qu'au prix de très-lourds sa-
» crifices. Quand on aura écarté du débat toutes les
» considérations qui, pendant longtemps, en ont en-
» tretenu la vivacité, il restera à examiner si ces sa-
» crifices peuvent être suffisamment compensés. Dans
» ce jugement impartial et définitif, il faudra tenir
» compte de la concurrence du chemin de fer égyp-
» tien, mettre en balance l'économie du temps obtenu,
» dans certains cas, en traversant l'isthme, et la dé-
» pense résultant du péage du canal, noter enfin
» l'accroissement graduel du tonnage des navires
» qui font le commerce de l'Inde et des mers do la
» Chine, les délais inévitables dans la navigation sur
» canaux. En discutant ces éléments complexes, on
» sera peut-être ramené à l'avis de Robert Stephen-
» son, et il serait possible qu'en Egypte comme dans
le vieux Caire. Les obstacles rencontrés dans cette oc-
casion et dans d'autres semb!ables décidèrent le vice-
roi à ne pas se fier entièrement à la route de terre,
mais à suppléer à ses défauts en renouvelant le canal.
A l'aide des indigènes, toutes les blessures du grand canal
furent cicatrisées en six mois. Il fut détruit, en 161, par
un motif assez odieux. Dans cette année, un certain
Hassan s'étant révolté à M édine contre le calife Mahomm ed-
al-Mansour, le calife ordonna que le canal fût comblé
pour couper aux rebelles leurs approvisionnements. Cet
acte barbare ne fut pas pourtant regretté par les Egyp-
tiens; car, pour eux, le canal n'était qu'un instrument
par lequel tom les produits de l'Egypte s'écoulaient en
Arabie. Le canal dès lors resta dans son lamentable
état de ruine, quoique tout le moyen âge en eût con-
servé une noble et active tradition.
» Breydenbach, voyageur allemand, qui visita l'isthme
de Suez en 1483, s'exprime avec une éloquence tou-
chante sur la grande mémoire de ces ruines puis-
santes, et une carte existant dans la bibliothèque du-
cale de Weimar, sous la date de 1424, nous retrace le
canal quoique, les sables dussent l'avoir en grande par-
tie envahi.
» Il paraît que le vice-roi Amrou conçut le dessein
d'exécuter un canal direct entre la Méditerranée et la
mer Rouge ; canal qu'ont encore à créer le génie et la
valeur de l'homme. Mais on craignait l'invasion des
chrétiens; le calife Haroun-al-Raschid renonça à exé-
cuter son projet d'un canal intermaritime par la notion
alors courante, et réfutée par de récentes investigations,
qu'il y avait entre les deux mers une extrême diffé-
rence de niveau. Les Vénitiens voulurent rouvrir le
canal; mais les sultans de l'Egypte, encore défiants
des Européens et des chrétiens, ne voulurent point les
écouter. Après la conquête de l'Egypte par les Turcs,
plusieurs de leurs sultans rêvèrent d'accroître leur
gloire, leur puissance et leurs richesses en joignant
les deux mers, comme, sans aucun doute, elles l'avaient
été originairement avant qu'on eût pensé à aucune es-
pèce de canalisation. Plus tard le percement de l'isthme
de Suez fut l'une des sublimes visions dont Napoléon
Bonaparte nourrit son cœur fertile et hardi dans ses
projets sur l'Orient et au profit de l'Orient. Il fut,
comme on le sait, sur le point d'être noyé par le retour
soudain de la marée au moment où il examinait les
lieux. Comme beaucoup d'autres projets, il a dû laisser
celui-là sans réalisation. Mehemet-Ali, un Bonaparte à
sa mode, aspira à dépasser Bonaparte lui-même en cette
affaire. Mais la crainte d'attirer sur lui la vengeance
des Anglais le détourna de mettre sa main vigoureuse
à l'exécution de ce merveilleux travail. Toutefois sous
le règne de Mehemet-Ali commença cette agitation qui
ne cessera jamais jusqu'à ce que l'Asie et l'Afrique de-
viennent des continents séparés par les flots des deux
mers. »
» Il serait fatigant de donner l'histoire de tout ce que
les hommes scientifiques, isolés ou réunis en commis-
sion, ont fait relativement à la canalisation de l'isthme ;
il y a eu dans le parlement des débats marqués par
beaucoup d'ignorance, il y a eu dans la presse des dé-
bats marqués par une ignorance plus grossière encore.
» Ferdinand de Lesseps s'est efforcé de s'élever en
une sorte de héros du canal de Suez; mais qu'il soit un
charlatan et un aventurier ou un philanthrope énergique
et désintéressé, c'est ce que nous n'avons pas les
moyens de décider. Quoi qu'il en soit de Ferdinand de
Lesseps, l'Angleterre, ce rOJ aume célèbre du bon sens,
doit être capable de juger par elle-même de la meil-
leure route à suivre sans s'occuper de ce Français. Un
canal de Suez diminuerait de moitié notre éloignement
maritime de Bombay. Les millions de tonnes, les mil-
liers d'émigrants, de passagers, de soldats que l'Angle-
terre expédie par le cap de Bonne-Espérance, elle pour
rait les expédier par une route beaucoup plus courte.
Mais le canal de Suez doit être le travail de l'Angle-
terre et la possession de l'Angleterre. Il est absurde de
supposer que le canal une fois fait resterait longtemps
sous la main du vice-roi d'Egypte; le pauvre vice-roi
n'est qu'une marionnette française. A moins que l'Angle-
terre n'agisse sans retard, l'Egypte et le canal seront
aussi entièrement français que l'Algérie. Si l'Angle.
terre ne se saisit pas de l'Egypte en pleine paix, elle
sera contrainte à l'arracher par la guerre de la main
avide de la France.
» Amers. »
LA REVUE DES DEUX MONDES.
Un jeune ingénieur des mines, M. Auguste Laugel,
a publié, dans le dernier numéro de la Revue des
Deux Mondes, un éloge des deux Stephenson qu'il
termine par les appréciations suivantes :
« Quand il fut question de percer l'isthme de Suez,
» Robert Stephenson se prononça nettement contre
» ce projet à la Chambre des communes. Il n'avait, il
» est vrai, visité que très-rarement l'isthme, et il faut
» croire aujourd'hui, sur le témoignage de personnes
» qui ont pu l'explorer à loisir, que les difficultés d'exé-
» cution entrevues par l'éminent ingénieur anglais ne
» sont point insurmontables, comme il le pensait : ce
» qui ne saurait être douteux:, c'est qu'elles ne peu-
» vent être surmontées qu'au prix de très-lourds sa-
» crifices. Quand on aura écarté du débat toutes les
» considérations qui, pendant longtemps, en ont en-
» tretenu la vivacité, il restera à examiner si ces sa-
» crifices peuvent être suffisamment compensés. Dans
» ce jugement impartial et définitif, il faudra tenir
» compte de la concurrence du chemin de fer égyp-
» tien, mettre en balance l'économie du temps obtenu,
» dans certains cas, en traversant l'isthme, et la dé-
» pense résultant du péage du canal, noter enfin
» l'accroissement graduel du tonnage des navires
» qui font le commerce de l'Inde et des mers do la
» Chine, les délais inévitables dans la navigation sur
» canaux. En discutant ces éléments complexes, on
» sera peut-être ramené à l'avis de Robert Stephen-
» son, et il serait possible qu'en Egypte comme dans
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