Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1859-10-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 octobre 1859 15 octobre 1859
Description : 1859/10/15 (A4,N80). 1859/10/15 (A4,N80).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529515x
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 311
sortira de cette agitation féconde, et régénérera une
politique épuisée et qui n'est plus à la hauteur des as-
pirations contemporaines. Ou il faudra que l'Angle
terre rajeunie adopte au dehors une ligne de conduite
qui ne la constitue pas en hostilité flagrante avec le
genre humain tout entier, ou elle verrait se former
contre elle une de ces coalitions formidables qui sont
le châtiment des tyrannies séculaires, et qui vengerait
d'un coup le monde entier des iniquités accumulées de
la moderne Carthage.
« AD. GUÉROULT. »
ALGER. - SUEZ.
Il
Nous avons dit comment la conquête d'Alger s'ac-
complit sans altérer la paix générale, avec l'adhésion
de l'Europe, moralement coalisée contre le mauvais
vouloir des Wellington et des Aberdeen; grande page
d'histoire contemporaine que tout homme d'un âge un
peu mûr a vu remplir dans l'espace d'un mois. La ques-
tion de Suez peut fournir aujourd'hui à notre pays une
page.semblable, non moins belle et non moins rapide-
ment tracée. C'est à l'épée de Solferino qu'il appartien-
drait de l'écrire, ou plutôt, ne parlons pas d'épée ; dans
une question si essentiellement pacifique, elle peut et
doit rester au fourreau, et il suffirait que lord Pal-
merston sût bien qu'elle est là, prête à protéger, dans
un cas extrême, les intérêts qui ont eu foi dans cette
haute protection. Le jour où notre diplomatie s'empa-
rera publiquement de cette affaire, parvenue désormais
à maturité, et voudra invoquer les adhésions déjà don-
nées par tous les autres peuples, le fantôme d'une
guerre s'évanouira, et l'Angleterre acceptera encore une
fois le fait accompli, en attendant de se féliciter bientôt
elle-même d'un progrès qui ne menace aucune posses-
sion, mais qui doit, au contraire, rapprocher de leurs
colonies toutes les nations européennes,
Pendant deux ans, la formidable insurrection des
Indes a fait cruellement sentir à l'Angleterre le danger
d'un éloignement qui rendait les secours aussi coûteux
que tardifs ; et ce long détour auquel sont soumis ses
vaisseaux n'a pu qu'affaiblir la défense et enhardir la
rébellion. Aujourd'hui même le péril, pour être moins
imminent, n'est cependant pas dissipé, de l'aveu des
plus importants organes de la presse anglaise, et nul
assurément n'en accusera une main étrangère. Mais ces
hommes d'État imprévoyants qui craignent de rapprocher
les Indes de la prétendue ambition des Français, ne
veulent ou n'osent pas s'avouer que ce dépérissement
d'une puissance démesurée provient uniquement de ses
vices intérieurs. Plus rapprochés, ils auraient peut-être
mieux surveillé l'administration coloniale et mieux pré-
venu cette double désorganisation de l'armée indigène
d'abord, et maintenant de l'armée anglaise. Ce qu'il y
a de certain, c'est que jamais la France ne fut assez
folle pour vouloir joindre à sa colonie africaine cet
empire lointain, dont les monstrueuses proportions
sont devenues un fléau pour ses maîtres. Vingt isthmes
de Suez seraient ouverts sans changer, à cet égard, la
modération obligée et la politique naturelle de notre
pays.
Des deux guerres maritimes que ia France vient de
faire dans l'extrême Orient, elle n'a rapporté que deux
traités de commerce, l'un avec la Chine, l'autre avec le
Japon ; elle en négocie aujourd'hui un troisième avec
la Cochinchine, et là seulement elle revendique un fai -
ble avantage territorial, la possession de la ville et de
la baie de Tourane, non pas même comme prix de cette
dernière campagne, mais comme exécution de la ces-
sion qui en fut faite à Louis XVI, et comme garantie
que nos escadres n'auront plus à revenir dans ces para-
ges venger l'effusion du sang chrétien. C'est donc, à
vrai dire, une pensée de défense plutôt que d'attaque,
une politique d'humanité plutôt que d'exploitation, qui
dominera à Tourane. Loin d'alarmer les autres peuples
par son avidité, la France a toujours mérité le reproche
contraire, et puur calomnier son désintéressement, il
faut en vérité oublier toute son histoire.
D'autres peuples, moins puissants et mieux partagés
dans ces mers lointaines, y possèdent de magnifiques
colonies. C'est l'Espagne qui voit aujourd'hui ses îles
Philippines doubler d'importance en présence de l'Em-
pire du Milieu et de la Cochinchine ouverts au com-
merce dont ces iles seront un des grands entrepôts,
C'est la Hollande qui a si largement développé la pros-
périté agricole et commerciale de Java, mais qui trouve
dans le fanatisme musulman un péril inattendu. L'avant-
dernier courrier des Indes nous apportait la nouvelle
de deux massacres où les colons hollandais ont péri en
masse près de Bornéo. La Hollande, toujours si sympa-
thique à l'entreprise de M. de Lesseps, aurait donc, au-
tant que l'Angleterre même, à profiter de cette voie
nouvelle pour porter plus promptement secours à ses
possessions.
Ne parlons pas de l'intérêt de toutes les nations à
descendre rapidement vers les contrées inexplorées de
l'Afrique orientale, de Madagascar, des archipels, de la
Birmanie, de toute l'Indo-Chine; la question commer-
ciale n'est pas contestée, et ce n'est qu'à l'aide d'une
vaine fantasmagorie de conquêtes françaises, de colli-
sions militaires et navales, que l'Angleterre officielle a
déplacé jusqu'à ce jour le débat de Suez. D'ailleurs, un
traité de neutralisation ne serait-il pas le corollaire obligé
de la création d'une voie semblable; neutralisation plus
facile encore à maintenir que celle des Dardanelles et
du Bosphore, et dont la meilleure garantie résiderait
dans la puissance navale de la nation même qui affecte
la peur, tandis que c'est à elle que l'Europe aurait à
demander des sûretés contre l'usurpation d'une telle
voie, par un nouveau Nelson et à la suite d'un nouvel
Aboukir?
Eh bien! cette création si utile pour tous, si .m.oiien-
sive pour les Anglais, lè gouvernement britannique re-
fuse de la sanctionner. Seul, il commande à Constanti-
nople le retard du firman définitif et suscite en Egypte
les difficultés qui heureusement n'ont été que momen-
tanées, et qui ont cédé aussitôt devant l'énergie de
M. de Lesseps s'adressant à la loyauté du vice-roi.
Dans cette question, comme en 1830 dans l'affaire
d'Alger, l'opinion du monde s'est hautement, unrversel-
sortira de cette agitation féconde, et régénérera une
politique épuisée et qui n'est plus à la hauteur des as-
pirations contemporaines. Ou il faudra que l'Angle
terre rajeunie adopte au dehors une ligne de conduite
qui ne la constitue pas en hostilité flagrante avec le
genre humain tout entier, ou elle verrait se former
contre elle une de ces coalitions formidables qui sont
le châtiment des tyrannies séculaires, et qui vengerait
d'un coup le monde entier des iniquités accumulées de
la moderne Carthage.
« AD. GUÉROULT. »
ALGER. - SUEZ.
Il
Nous avons dit comment la conquête d'Alger s'ac-
complit sans altérer la paix générale, avec l'adhésion
de l'Europe, moralement coalisée contre le mauvais
vouloir des Wellington et des Aberdeen; grande page
d'histoire contemporaine que tout homme d'un âge un
peu mûr a vu remplir dans l'espace d'un mois. La ques-
tion de Suez peut fournir aujourd'hui à notre pays une
page.semblable, non moins belle et non moins rapide-
ment tracée. C'est à l'épée de Solferino qu'il appartien-
drait de l'écrire, ou plutôt, ne parlons pas d'épée ; dans
une question si essentiellement pacifique, elle peut et
doit rester au fourreau, et il suffirait que lord Pal-
merston sût bien qu'elle est là, prête à protéger, dans
un cas extrême, les intérêts qui ont eu foi dans cette
haute protection. Le jour où notre diplomatie s'empa-
rera publiquement de cette affaire, parvenue désormais
à maturité, et voudra invoquer les adhésions déjà don-
nées par tous les autres peuples, le fantôme d'une
guerre s'évanouira, et l'Angleterre acceptera encore une
fois le fait accompli, en attendant de se féliciter bientôt
elle-même d'un progrès qui ne menace aucune posses-
sion, mais qui doit, au contraire, rapprocher de leurs
colonies toutes les nations européennes,
Pendant deux ans, la formidable insurrection des
Indes a fait cruellement sentir à l'Angleterre le danger
d'un éloignement qui rendait les secours aussi coûteux
que tardifs ; et ce long détour auquel sont soumis ses
vaisseaux n'a pu qu'affaiblir la défense et enhardir la
rébellion. Aujourd'hui même le péril, pour être moins
imminent, n'est cependant pas dissipé, de l'aveu des
plus importants organes de la presse anglaise, et nul
assurément n'en accusera une main étrangère. Mais ces
hommes d'État imprévoyants qui craignent de rapprocher
les Indes de la prétendue ambition des Français, ne
veulent ou n'osent pas s'avouer que ce dépérissement
d'une puissance démesurée provient uniquement de ses
vices intérieurs. Plus rapprochés, ils auraient peut-être
mieux surveillé l'administration coloniale et mieux pré-
venu cette double désorganisation de l'armée indigène
d'abord, et maintenant de l'armée anglaise. Ce qu'il y
a de certain, c'est que jamais la France ne fut assez
folle pour vouloir joindre à sa colonie africaine cet
empire lointain, dont les monstrueuses proportions
sont devenues un fléau pour ses maîtres. Vingt isthmes
de Suez seraient ouverts sans changer, à cet égard, la
modération obligée et la politique naturelle de notre
pays.
Des deux guerres maritimes que ia France vient de
faire dans l'extrême Orient, elle n'a rapporté que deux
traités de commerce, l'un avec la Chine, l'autre avec le
Japon ; elle en négocie aujourd'hui un troisième avec
la Cochinchine, et là seulement elle revendique un fai -
ble avantage territorial, la possession de la ville et de
la baie de Tourane, non pas même comme prix de cette
dernière campagne, mais comme exécution de la ces-
sion qui en fut faite à Louis XVI, et comme garantie
que nos escadres n'auront plus à revenir dans ces para-
ges venger l'effusion du sang chrétien. C'est donc, à
vrai dire, une pensée de défense plutôt que d'attaque,
une politique d'humanité plutôt que d'exploitation, qui
dominera à Tourane. Loin d'alarmer les autres peuples
par son avidité, la France a toujours mérité le reproche
contraire, et puur calomnier son désintéressement, il
faut en vérité oublier toute son histoire.
D'autres peuples, moins puissants et mieux partagés
dans ces mers lointaines, y possèdent de magnifiques
colonies. C'est l'Espagne qui voit aujourd'hui ses îles
Philippines doubler d'importance en présence de l'Em-
pire du Milieu et de la Cochinchine ouverts au com-
merce dont ces iles seront un des grands entrepôts,
C'est la Hollande qui a si largement développé la pros-
périté agricole et commerciale de Java, mais qui trouve
dans le fanatisme musulman un péril inattendu. L'avant-
dernier courrier des Indes nous apportait la nouvelle
de deux massacres où les colons hollandais ont péri en
masse près de Bornéo. La Hollande, toujours si sympa-
thique à l'entreprise de M. de Lesseps, aurait donc, au-
tant que l'Angleterre même, à profiter de cette voie
nouvelle pour porter plus promptement secours à ses
possessions.
Ne parlons pas de l'intérêt de toutes les nations à
descendre rapidement vers les contrées inexplorées de
l'Afrique orientale, de Madagascar, des archipels, de la
Birmanie, de toute l'Indo-Chine; la question commer-
ciale n'est pas contestée, et ce n'est qu'à l'aide d'une
vaine fantasmagorie de conquêtes françaises, de colli-
sions militaires et navales, que l'Angleterre officielle a
déplacé jusqu'à ce jour le débat de Suez. D'ailleurs, un
traité de neutralisation ne serait-il pas le corollaire obligé
de la création d'une voie semblable; neutralisation plus
facile encore à maintenir que celle des Dardanelles et
du Bosphore, et dont la meilleure garantie résiderait
dans la puissance navale de la nation même qui affecte
la peur, tandis que c'est à elle que l'Europe aurait à
demander des sûretés contre l'usurpation d'une telle
voie, par un nouveau Nelson et à la suite d'un nouvel
Aboukir?
Eh bien! cette création si utile pour tous, si .m.oiien-
sive pour les Anglais, lè gouvernement britannique re-
fuse de la sanctionner. Seul, il commande à Constanti-
nople le retard du firman définitif et suscite en Egypte
les difficultés qui heureusement n'ont été que momen-
tanées, et qui ont cédé aussitôt devant l'énergie de
M. de Lesseps s'adressant à la loyauté du vice-roi.
Dans cette question, comme en 1830 dans l'affaire
d'Alger, l'opinion du monde s'est hautement, unrversel-
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