Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1859-09-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 septembre 1859 15 septembre 1859
Description : 1859/09/15 (A4,N78). 1859/09/15 (A4,N78).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k65295133
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
286 L'ISTHME DE SUEZ,
eux-mêmes du cabinet est réduite inévitablement à se
soumettre à l'empire de lord Palmerston.
Je n'avance pas ces allégations sans avoir de fortes
preuves écrites de ce que je dis ; ma correspondance
récente avec le ministre actuel des affaires étrangères
est le témoignage de ce que j'énonce ici.
Messieurs, si je pensais que l'ouverture du canal de
Suez fût réellement un projet hostile aux intérêts de
notre pays, je serais le premier à me laver les mains
de cette affaire et à n'en plus parler. Que si cette dé-
claration semblait dure à ceux qui sont associés avec
moi dans cette entreprise, tout ce que je pourrais dire,
c'est que j'en éprouverais un profond regret. Mais je
n'ai pas cru prudent de m'en rapporter à ma propre
opinion en matière de si grave importance. J'ai donc
saisi toute occasion de recueillir des informations capa-
bles de me mettre à même de former un jugement sûr
et impartial. C'est de votre bouche que j'ai appris la
véritable valeur du canal de Suez pour le commerce de
notre pays ; c'est par les publications et les manus-
crits des plus éminents ingénieurs de l'Europe que j'ai
été convaincu de la praticabilité du projet, et quoique
ce côté de l'affaire soit étranger aux questions qui vous
sont soumises, je puis mentionner que ma conviction a
été fortifiée dans le sens le plus pratique par des propo-
sitions émanant de l'entrepreneur des travaux récem-
ment revenu d'Egypte, et qui s'est trouvé prêt à les
soumissionner à un chiffre très-inférieur aux estimations
des ingénieurs, en s'obligeant à une indemnité propor-
tionnée au capital financier de cet important travail,
dans le cas où il ne remplirait pas les conditions de son
contrat.
Le jugement influencé par les préjugés les plus pro-
fonds, l'esprit le plus prévenu par l'acceptation trop
facile des idées qu'ont mises en circulation certains de nos
oracles politiques et scientifiques, ne peut pas en der-
nière analyse s'empêcher d'aboutir à la conclusion à
laquelle je suis graduellement arrivé ; savoir : qu'il n'y
a pas de difficultés d'art à ouvrir et maintenir le canal.
Je n'avais plus dès lors qu'à rechercher jusqu'à quel
point la politique permanente de l'Angleterre » pou-
vait être en désaccord avec «les intérêts permanents de
l'Angleterre, » et si ce qui est bon au commerce, ce
« pionnier de la civilisation.), est opposé à « la politi-
que permanente de notre pays. "Je devais donc désirer
de voir la question discutée devant le tribunal le plus
compétent, c'est-à-dire devant la chambre des Commu-
nes ; non que j'eusse l'espoir, en agissant ainsi, d'ob-
tenir un vote contre le gouvernement, puisque je n'au-
rais pu y parvenir sans courir le risque de renverser
le cabinet lui-même, mais simplement dans le but de
recueillir des informations par la discussion des mem-
bres indépendants dont je considérais les opinions comme
de la plus grande valeur pour m'aider à former un ju-
gement exact sur les véritables aspects politiques de la
question:
Ce fut de ces débats et de mes entrevues privées avec
plusieurs des ministres du cabinet et des membres du
parlement que j'acquis la pleine conviction que l'inter-
vention du gouvernement en Orient était entièrement
contraire à la véritable politique de notre pays. Cette
intervention fut désignée comme une politique sans u-
cune générosité, sagesse ni prudence, et très-mal con-
- çue en ce qui touchait les intérêts de l'Angleterre.
Venant à considérer que ces paroles étaient pronon-
cées par des membres qui sont l'ornement du sénat
britannique et font aujourd'hui partie du cabinet, je pen-
sai que je n'avais pas le droit de fermer les yeux et
les oreilles à des déclarations provenant d'une pareille
source, affranchies qu'elles étaient de toute entrave
gouvernementale; ces débats en un mot tendirent
très-matériellement à confirmer mes impressions pré-
conçues, c'est-à-dire que, au point de vue politique et mili-
taire, une route maritime vers nos possessions indiennes serai t
pour l'Angleterre un incalculable avantage. En même temps,
je sentais aussi que les grands projets destinés à servir
l'humanité ont immémorialement rencontré la plus opi-
niâtre opposition des peuples même qui avaient à en
retirer les plus grands bénéfices. Ainsi, lorsque Wil-
liam Hedley inventa et en 1812 construisit la première
locomotive, il fut regardé comme un fou, et on lui
criait de toute part: « Abandonnez votre projet vision-
naire ; d'abord il est impraticable, et ensuite il est hos-
tile aux intérêts permanents des classes ouvrières; ja-
mais elles ne souffriront qu'il soit exécuté. » Ainsi,
encore le célèbre plan pour la voie ferrée à établir sur
la route de Chatmoss dû originairement aux études
de MM. George et John Rennie, renpontra la résistance
la plus acharnée ; en réponse aux objections élevées
contre l'emploi des locomotives, ces Messieurs eurent la
plus grande difficulté à persuader au gouvernement que
leur projet était d'une haute utilité publique; en fait,
l'opposition du gouvernement fut d'abord insurmonta-
ble, et après une lutte de plusieurs années contre le plus
grand de tous les maux, « une politique égoïste et
étroite, » la présente génération a pu cueillir les fruits
du développement de ces projets qui, il y a vingt-cinq
1 ans, étaient condamnés comme visionnaires et absurdes.
Avec de telles expériences sous nos yeux, nous devons
certainement réfléchir avant de nous exposer aux re-
proches d'avoir arrêté le courant du trafic désiré par
la communauté des nations avec les plus profonds sen-
timents d'attente et d'anxiété, et vers lequel est dirigé
le doigt du commerce avec la moins douteuse des si-
gnifications. Qui sait si le temps n'est pas proche où
traînés devant le jugement des générations nous vien-
drons à découvrir que nous sommes retombés dans les
préjugés du passé et que nous avons recommencé la ré-
pétition de ces mêmes erreurs qui, pour le bien de l'hu-
manité, avaient été écartées par la nation. Espérons
toutefois, pour l'honneur et la dignité de notre pays, que
nous ne nous laisserons pas entraîner trop avant dans
une marche qui est constamment insoutenable.
Rien ne peut être moins sage ou plus mortel que la
tentative de soutenir l'intégrité ou l'indépendance de
l'empire turc en rendant onéreuse la connexion de l'É -
gypte avec les provinces de la Turquie. La Turquie est
favorable au projet du canal et pour la meilleure de
toutes les raisons : parce qu'elle voit dans sa réalisation
la perspective des plus grands avantages pour elle. Le
sultan comprend parfaitement que le percement du ca-
nal donnera une plus grande stabilité à l'empire otto-
man que l'Europe aura tout intérêt à maintenir, comme
elle l'a à conserver la neutralité du détroit des IMrda-
eux-mêmes du cabinet est réduite inévitablement à se
soumettre à l'empire de lord Palmerston.
Je n'avance pas ces allégations sans avoir de fortes
preuves écrites de ce que je dis ; ma correspondance
récente avec le ministre actuel des affaires étrangères
est le témoignage de ce que j'énonce ici.
Messieurs, si je pensais que l'ouverture du canal de
Suez fût réellement un projet hostile aux intérêts de
notre pays, je serais le premier à me laver les mains
de cette affaire et à n'en plus parler. Que si cette dé-
claration semblait dure à ceux qui sont associés avec
moi dans cette entreprise, tout ce que je pourrais dire,
c'est que j'en éprouverais un profond regret. Mais je
n'ai pas cru prudent de m'en rapporter à ma propre
opinion en matière de si grave importance. J'ai donc
saisi toute occasion de recueillir des informations capa-
bles de me mettre à même de former un jugement sûr
et impartial. C'est de votre bouche que j'ai appris la
véritable valeur du canal de Suez pour le commerce de
notre pays ; c'est par les publications et les manus-
crits des plus éminents ingénieurs de l'Europe que j'ai
été convaincu de la praticabilité du projet, et quoique
ce côté de l'affaire soit étranger aux questions qui vous
sont soumises, je puis mentionner que ma conviction a
été fortifiée dans le sens le plus pratique par des propo-
sitions émanant de l'entrepreneur des travaux récem-
ment revenu d'Egypte, et qui s'est trouvé prêt à les
soumissionner à un chiffre très-inférieur aux estimations
des ingénieurs, en s'obligeant à une indemnité propor-
tionnée au capital financier de cet important travail,
dans le cas où il ne remplirait pas les conditions de son
contrat.
Le jugement influencé par les préjugés les plus pro-
fonds, l'esprit le plus prévenu par l'acceptation trop
facile des idées qu'ont mises en circulation certains de nos
oracles politiques et scientifiques, ne peut pas en der-
nière analyse s'empêcher d'aboutir à la conclusion à
laquelle je suis graduellement arrivé ; savoir : qu'il n'y
a pas de difficultés d'art à ouvrir et maintenir le canal.
Je n'avais plus dès lors qu'à rechercher jusqu'à quel
point la politique permanente de l'Angleterre » pou-
vait être en désaccord avec «les intérêts permanents de
l'Angleterre, » et si ce qui est bon au commerce, ce
« pionnier de la civilisation.), est opposé à « la politi-
que permanente de notre pays. "Je devais donc désirer
de voir la question discutée devant le tribunal le plus
compétent, c'est-à-dire devant la chambre des Commu-
nes ; non que j'eusse l'espoir, en agissant ainsi, d'ob-
tenir un vote contre le gouvernement, puisque je n'au-
rais pu y parvenir sans courir le risque de renverser
le cabinet lui-même, mais simplement dans le but de
recueillir des informations par la discussion des mem-
bres indépendants dont je considérais les opinions comme
de la plus grande valeur pour m'aider à former un ju-
gement exact sur les véritables aspects politiques de la
question:
Ce fut de ces débats et de mes entrevues privées avec
plusieurs des ministres du cabinet et des membres du
parlement que j'acquis la pleine conviction que l'inter-
vention du gouvernement en Orient était entièrement
contraire à la véritable politique de notre pays. Cette
intervention fut désignée comme une politique sans u-
cune générosité, sagesse ni prudence, et très-mal con-
- çue en ce qui touchait les intérêts de l'Angleterre.
Venant à considérer que ces paroles étaient pronon-
cées par des membres qui sont l'ornement du sénat
britannique et font aujourd'hui partie du cabinet, je pen-
sai que je n'avais pas le droit de fermer les yeux et
les oreilles à des déclarations provenant d'une pareille
source, affranchies qu'elles étaient de toute entrave
gouvernementale; ces débats en un mot tendirent
très-matériellement à confirmer mes impressions pré-
conçues, c'est-à-dire que, au point de vue politique et mili-
taire, une route maritime vers nos possessions indiennes serai t
pour l'Angleterre un incalculable avantage. En même temps,
je sentais aussi que les grands projets destinés à servir
l'humanité ont immémorialement rencontré la plus opi-
niâtre opposition des peuples même qui avaient à en
retirer les plus grands bénéfices. Ainsi, lorsque Wil-
liam Hedley inventa et en 1812 construisit la première
locomotive, il fut regardé comme un fou, et on lui
criait de toute part: « Abandonnez votre projet vision-
naire ; d'abord il est impraticable, et ensuite il est hos-
tile aux intérêts permanents des classes ouvrières; ja-
mais elles ne souffriront qu'il soit exécuté. » Ainsi,
encore le célèbre plan pour la voie ferrée à établir sur
la route de Chatmoss dû originairement aux études
de MM. George et John Rennie, renpontra la résistance
la plus acharnée ; en réponse aux objections élevées
contre l'emploi des locomotives, ces Messieurs eurent la
plus grande difficulté à persuader au gouvernement que
leur projet était d'une haute utilité publique; en fait,
l'opposition du gouvernement fut d'abord insurmonta-
ble, et après une lutte de plusieurs années contre le plus
grand de tous les maux, « une politique égoïste et
étroite, » la présente génération a pu cueillir les fruits
du développement de ces projets qui, il y a vingt-cinq
1 ans, étaient condamnés comme visionnaires et absurdes.
Avec de telles expériences sous nos yeux, nous devons
certainement réfléchir avant de nous exposer aux re-
proches d'avoir arrêté le courant du trafic désiré par
la communauté des nations avec les plus profonds sen-
timents d'attente et d'anxiété, et vers lequel est dirigé
le doigt du commerce avec la moins douteuse des si-
gnifications. Qui sait si le temps n'est pas proche où
traînés devant le jugement des générations nous vien-
drons à découvrir que nous sommes retombés dans les
préjugés du passé et que nous avons recommencé la ré-
pétition de ces mêmes erreurs qui, pour le bien de l'hu-
manité, avaient été écartées par la nation. Espérons
toutefois, pour l'honneur et la dignité de notre pays, que
nous ne nous laisserons pas entraîner trop avant dans
une marche qui est constamment insoutenable.
Rien ne peut être moins sage ou plus mortel que la
tentative de soutenir l'intégrité ou l'indépendance de
l'empire turc en rendant onéreuse la connexion de l'É -
gypte avec les provinces de la Turquie. La Turquie est
favorable au projet du canal et pour la meilleure de
toutes les raisons : parce qu'elle voit dans sa réalisation
la perspective des plus grands avantages pour elle. Le
sultan comprend parfaitement que le percement du ca-
nal donnera une plus grande stabilité à l'empire otto-
man que l'Europe aura tout intérêt à maintenir, comme
elle l'a à conserver la neutralité du détroit des IMrda-
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