Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1859-08-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 août 1859 15 août 1859
Description : 1859/08/15 (A4,N76). 1859/08/15 (A4,N76).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k65295118
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 251
le fait, son intention Le poursuivre ses armements
quand même. C'est le cas, ou jamais, selon nous, de
vider la question qui est au fond de ce débat, question
d'indépendance et de dignité nationale qu'il ne con-
viendrait pas de soulever inutilement. Il ne faut pas
que du désarmement d'aujourd'hui il puisse naître
demain un danger pour notre pays. Sans réciprocité
la confiance deviendrait de l'imprudence. L'Angleterre
et la France ne sauraient vouloir se tromper.
Pour les besoins de la cause et pour agiter l'opinion
chez nos voisins, on s'est efforcé de représenter la
France comme beaucoup plus menaçante et beaucoup
moins menacée que l'Angleterre. On a goupé bien des
chiffres depuis quinze jours, compté birn des vaisseaux
à voiles ou à vapeur, bien des canons rayés ou non
rayés, personne ne s'est avisé de demander tout sim-
plement àla géographie et à l'histoire quelques rensei-
gnements util s; on se serait épargné de l'arithmétique
et ùe. comparaisons qui ont peut-être plus embrouillé
la question qu'elles n'ont aidé a la résoudre.
L'Agleterre est uneîie; elle a même lhabitudede s'en
prévaloir et non sans quelque raison. Grâce a ce privi-
lège, elle est dispensée d'entretenir une nombreuse et
coûteuse armée permanente. Retranchée derrière ses
murailles de bois, suivant l'expression affectionnée de
nos voisins, elle conseille fréquemment au continent de
désarmer, de réduire ses budgets militaires, et traite vo-
lontiers avec un certain dédain les nécessités onéreuses
imposées à l'Europe continentale, et dont elle est af-
franchie. Et cependant, toute île qu'elle est, l'Angleterre
n'a pas cessé depuis plusieurs années d'augmenter son
armée régulière, de créer un matériel de guerre consi-
dérable, d'organiser ses milices sur une large base,
sans lien retrancher pour cela à son budget naval, loin
de là, en appliquant à la marine à vapeur sur la plus
grande échelle les ressources inépuisables de son indus-
trie çt de ses capitaux. Est-ce à dire que nous trouvons
mauvais qu'il en soit ainsi? En aucuae façon. Mais nous
connaissons l'armée et la marine anglaises, nous les
tenons en trop haute estim pour ne pas compter tou-
jours avec elles. Nous ne saurions oublier que c'est sur
le continent que nous avons rencontré les soldats an-
glais en face de nom depuis le commencement de ce
siècle, et non dans leur île défendue par la mer sur la-
quelle la fortune nous fut si longtemps contraire. La
position insulaire de l'Angleterre a encore cet avantage
dont elle sait aussi profiter, de lui permettre d'isoler sa
politique, de se préparer à l'action dans la neutralité,
d'attendre son heure, et de ne se présenter sur le terrain
du combat ou de la diplomatie, auprès du vainqueur ou
du vaincu, qu'au moment favorable et pour faire pen-
cher la balance du côté de ses intérêts. Nous ne l'en
blâmons pas, nous constatons. L'histoire et la géographie
ne nous démentiront pas.
Voyons la France maintenant. La France n'est pas
une île et elle ne s'en plaint pas , mais elle ne nous
semble pas devoir s'en applaudir dans la question qui
nous occupe. La France est placée dans une position
exceptionnelle : baignée par trois mers, elle est plus
vulnérable que l'Angleterre, sur des côtes plus étendues
et plus éloignées du secours mutuel de ses flottes dans
la Manche, l'Océan et la Méditerranée. Elle a de plus
des frontières continentales que n'a pas l'Angleterre.
La France peut être attaquée en même temps par terre
et par mer. Elle pourrait avoir plusieurs ennemis à la
fois. Cela s'est vu. Cette position de notre pays, unique
au monde, qui fait sa richesse et sa grandeur, fait
aussi son danger, et lui impose la vigilance et la force
rour son honneur et sa sécurité.
L'Angleterre et la France ont toutes deux des colo-
nies , l'Angleterre en a beaucoup plus que nous. Mais
sans convoiter les siennes, ne pouvons-nous souhaiter
de conserver les nôtres? Sans entrer dans de plus longs
déve'oppements, nous pensons que l'histoire et la géo-
graphie continuent de nous donner raison.
Si nos malheurs et plus encore nos fautes nous ont
fait déchoir pendant trop longtemps sur les mers, aucun
des gouvernements qui se sont succédé en France n'a
jamais accepté comme irréparable cette déchéance fa-
tale. Il faut que l'Angleterre s'accoutume à voir désor-
mais sans défiance et sans jalousie la France re levenir
ce qu'elle n'< ût jamais dû cesser d'être, une sérieuse
puissance maritime. L'équilibre des forces entre les
grands empires nous parait être encore un des plus
sûrs garants de leurs bons procédés les uns envers les
autres.
Dans l'ordre matériel et laissant en dehors pour un
moment toute autre considération, nous restons con-
vaincus que si depuis quarante ans, à travers les diffi-
cultés que chacun a présentes à l'esprit, la guerre a pu
être évitée entre l'Angleterre et la France, ce résultat
heureux est dû en grande partie à la mutuelle et juste
appréciation de leurs forces et des immenses ressources
que chacun des deux peuples eût apportées dans cette
déplorable lutte. La certitude des désastres et l'incer-
titude du résultat ont dû contribuer à la faire ajourner.
Mais pour l'ajourner indéfiniment nous préférons cher-
cher dans l'ordre moral de meilleurs et plus nobles mo-
tifs. L'Europe en ce moment a plus besoin que jamais
de notre intervention pacifique. Pour trouver le repos
dans des conditions durables, il lui faut le sincère et
puissant accord de l'Angleterre et de la France, parce
que seules elles sont assez fortes dans leur union pour
pouvoir être justes.
Et si nous portons plus loin nos regards, le monde en-
tier nous convie à la paix et à l'entente. L'Occident
chaque jour tend à s'épancher de plus en plus vers
l'Orient. A la tète de ce mouvement désormais irrésis-
tible, l'Angleterre et la France voient s'ouvrir devant
elles des horizons sans bornes. Ne craignons pas de
nous rencontrer dans ces champs de l'avenir, et n'al-
lons pas nous attarder dans des rivalités stériles ou des
luttes coupables. L'Inde orientale semble réclamer sans
retard et pour longtemps peut-être toute l'habileté, l'ex-
périence et les efforts de FAng-lete re. Pourquoi risque-
rait-elle de s'aliéner les sympathies de la France? Si
nous devons absolument lutter, que ce soit au moins au
profit de la civilisation et de l'humanité! Luttons d'in-
fluence et de généreuse initiative, perçons les isthmes,
abrégeons les distances, répandons partout à l'envi
notre langue, notre religion et nos mœurs, les produits
de nos arts et de nos industries. Il y a place au soleil,
le fait, son intention Le poursuivre ses armements
quand même. C'est le cas, ou jamais, selon nous, de
vider la question qui est au fond de ce débat, question
d'indépendance et de dignité nationale qu'il ne con-
viendrait pas de soulever inutilement. Il ne faut pas
que du désarmement d'aujourd'hui il puisse naître
demain un danger pour notre pays. Sans réciprocité
la confiance deviendrait de l'imprudence. L'Angleterre
et la France ne sauraient vouloir se tromper.
Pour les besoins de la cause et pour agiter l'opinion
chez nos voisins, on s'est efforcé de représenter la
France comme beaucoup plus menaçante et beaucoup
moins menacée que l'Angleterre. On a goupé bien des
chiffres depuis quinze jours, compté birn des vaisseaux
à voiles ou à vapeur, bien des canons rayés ou non
rayés, personne ne s'est avisé de demander tout sim-
plement àla géographie et à l'histoire quelques rensei-
gnements util s; on se serait épargné de l'arithmétique
et ùe. comparaisons qui ont peut-être plus embrouillé
la question qu'elles n'ont aidé a la résoudre.
L'Agleterre est uneîie; elle a même lhabitudede s'en
prévaloir et non sans quelque raison. Grâce a ce privi-
lège, elle est dispensée d'entretenir une nombreuse et
coûteuse armée permanente. Retranchée derrière ses
murailles de bois, suivant l'expression affectionnée de
nos voisins, elle conseille fréquemment au continent de
désarmer, de réduire ses budgets militaires, et traite vo-
lontiers avec un certain dédain les nécessités onéreuses
imposées à l'Europe continentale, et dont elle est af-
franchie. Et cependant, toute île qu'elle est, l'Angleterre
n'a pas cessé depuis plusieurs années d'augmenter son
armée régulière, de créer un matériel de guerre consi-
dérable, d'organiser ses milices sur une large base,
sans lien retrancher pour cela à son budget naval, loin
de là, en appliquant à la marine à vapeur sur la plus
grande échelle les ressources inépuisables de son indus-
trie çt de ses capitaux. Est-ce à dire que nous trouvons
mauvais qu'il en soit ainsi? En aucuae façon. Mais nous
connaissons l'armée et la marine anglaises, nous les
tenons en trop haute estim pour ne pas compter tou-
jours avec elles. Nous ne saurions oublier que c'est sur
le continent que nous avons rencontré les soldats an-
glais en face de nom depuis le commencement de ce
siècle, et non dans leur île défendue par la mer sur la-
quelle la fortune nous fut si longtemps contraire. La
position insulaire de l'Angleterre a encore cet avantage
dont elle sait aussi profiter, de lui permettre d'isoler sa
politique, de se préparer à l'action dans la neutralité,
d'attendre son heure, et de ne se présenter sur le terrain
du combat ou de la diplomatie, auprès du vainqueur ou
du vaincu, qu'au moment favorable et pour faire pen-
cher la balance du côté de ses intérêts. Nous ne l'en
blâmons pas, nous constatons. L'histoire et la géographie
ne nous démentiront pas.
Voyons la France maintenant. La France n'est pas
une île et elle ne s'en plaint pas , mais elle ne nous
semble pas devoir s'en applaudir dans la question qui
nous occupe. La France est placée dans une position
exceptionnelle : baignée par trois mers, elle est plus
vulnérable que l'Angleterre, sur des côtes plus étendues
et plus éloignées du secours mutuel de ses flottes dans
la Manche, l'Océan et la Méditerranée. Elle a de plus
des frontières continentales que n'a pas l'Angleterre.
La France peut être attaquée en même temps par terre
et par mer. Elle pourrait avoir plusieurs ennemis à la
fois. Cela s'est vu. Cette position de notre pays, unique
au monde, qui fait sa richesse et sa grandeur, fait
aussi son danger, et lui impose la vigilance et la force
rour son honneur et sa sécurité.
L'Angleterre et la France ont toutes deux des colo-
nies , l'Angleterre en a beaucoup plus que nous. Mais
sans convoiter les siennes, ne pouvons-nous souhaiter
de conserver les nôtres? Sans entrer dans de plus longs
déve'oppements, nous pensons que l'histoire et la géo-
graphie continuent de nous donner raison.
Si nos malheurs et plus encore nos fautes nous ont
fait déchoir pendant trop longtemps sur les mers, aucun
des gouvernements qui se sont succédé en France n'a
jamais accepté comme irréparable cette déchéance fa-
tale. Il faut que l'Angleterre s'accoutume à voir désor-
mais sans défiance et sans jalousie la France re levenir
ce qu'elle n'< ût jamais dû cesser d'être, une sérieuse
puissance maritime. L'équilibre des forces entre les
grands empires nous parait être encore un des plus
sûrs garants de leurs bons procédés les uns envers les
autres.
Dans l'ordre matériel et laissant en dehors pour un
moment toute autre considération, nous restons con-
vaincus que si depuis quarante ans, à travers les diffi-
cultés que chacun a présentes à l'esprit, la guerre a pu
être évitée entre l'Angleterre et la France, ce résultat
heureux est dû en grande partie à la mutuelle et juste
appréciation de leurs forces et des immenses ressources
que chacun des deux peuples eût apportées dans cette
déplorable lutte. La certitude des désastres et l'incer-
titude du résultat ont dû contribuer à la faire ajourner.
Mais pour l'ajourner indéfiniment nous préférons cher-
cher dans l'ordre moral de meilleurs et plus nobles mo-
tifs. L'Europe en ce moment a plus besoin que jamais
de notre intervention pacifique. Pour trouver le repos
dans des conditions durables, il lui faut le sincère et
puissant accord de l'Angleterre et de la France, parce
que seules elles sont assez fortes dans leur union pour
pouvoir être justes.
Et si nous portons plus loin nos regards, le monde en-
tier nous convie à la paix et à l'entente. L'Occident
chaque jour tend à s'épancher de plus en plus vers
l'Orient. A la tète de ce mouvement désormais irrésis-
tible, l'Angleterre et la France voient s'ouvrir devant
elles des horizons sans bornes. Ne craignons pas de
nous rencontrer dans ces champs de l'avenir, et n'al-
lons pas nous attarder dans des rivalités stériles ou des
luttes coupables. L'Inde orientale semble réclamer sans
retard et pour longtemps peut-être toute l'habileté, l'ex-
périence et les efforts de FAng-lete re. Pourquoi risque-
rait-elle de s'aliéner les sympathies de la France? Si
nous devons absolument lutter, que ce soit au moins au
profit de la civilisation et de l'humanité! Luttons d'in-
fluence et de généreuse initiative, perçons les isthmes,
abrégeons les distances, répandons partout à l'envi
notre langue, notre religion et nos mœurs, les produits
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