Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1859-02-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 février 1859 01 février 1859
Description : 1859/02/01 (A4,N63). 1859/02/01 (A4,N63).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6529498v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 05/07/2013
MARDI 1er FÉVRIER. JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 43
qu'un ingénieur pour rire? Est-ce que quelque novice des
ponts et chaussées lui aurait fait apercevoir le grotesque des
terrains de l'isthme dragués à 3 francs le mètre et de ses je-
tées de 5 mètres de fond à 10,000 francs le mètre? Est-ce
que l'infaillible oracle se serait évanoui en fumée comme
Asmodée? Dans tous les cas, M. de Coninck est-il guéri de
cette infaillibilité ? S'il renonce aux termes démonstratifs du
problème, comment peut-il persister dans ses conclusions,
et s'il a dû supprimer de sa publication tout ce qui fait la
substance et la réalité de son ingénieur, comme ingénieur,
n'en devait-il pas du même trait effacer toute la fantasma-
gorie !
L'existence de l'ingénieur de M. de Coninck restera-t-elle
un problème historique comme celle d'Homère et d'Ossian!
Quoi qu'il en soit, M. de Coninck vient de se prouver à lui-
même par lui-même que les jetées du canal ne pouvaient pas
coûter plus de 2,000 francs par mètre. Elles forment en-
semble une étendue d'un peu moins de 10,000 mètres : —
6,000 mètres à Péluse, 3,800 mètres à Suez. 10,000 mètres
à 2,000 francs le mètre donnent la somme de 20 millions de
francs. Voilà le chiffre Coninck, voilà le résultat de ses
propres données.
Et cependant, dans sa première brochure, M. de Coninck
trouve dangereusement incertain le chiffre de 47,750,000 fr.
indiqué primitivement par les ingénieurs du vice-roi.
Nous pourrions en finir ici avec M. de Coninck en lui ap-
pliquant sa propre loi, legem quantfecisti. En effet, pour la
fameuse et seule affaire de la baie du Lion, MM. Linant-Bey
et Mougel-Bey devaient être déchus de toute autorité. Ils s'é-
taient trompés une fois, donc ils ne méritaient plus aucune
créance. Ils ont été accusés d'avoir cité fautivement la construc-
tion d'une jetée de 8,000 mètres au cap de Bonne- Espérance.
Après une erreur de cette force, il est permis de ne pas
» prendre leur dire pour parole d'Evangile, et il est prudent
» de les éplucher (p. 12). » — On ne doit recueillir leurs
renseignements que « sous bénéfice d'inventaire (p. 13). »
M. de Lesseps a eu le tort de leur accorder" une aveugle
confiance (p. 10). »
La théorie de M. de Coninck est donc, et dans une certaine
mesure elle a du vrai, que les gens qui se sont lourdement
trompés devant le public sont malvenus à prétendre le ré-
genter et à lui donner des leçons de conduite ou de science.
Comptons, non toutes les erreurs, mais les erreurs consta-
tées de M. de Coninck.
Il s'est trompé à propos de la jetée hollandaise en attri,
buant à MM. Linant et Mougel, après une rectification pu-
blique et péremptoire, une responsabilité qui ne leur appar-
tenait pas.
Il s'est trompé en criant i aux petites bourses » et « aux
» braves ouvriers » que les jetées à Péluse avaient 6,000 et à
Suez 4,T)00 mètres.
Il s'est trompé en supposant l'Egypte labourée par des
chameaux.
Il s'est trompé en acceptant de son ingénieur ou de son
mystificateur l'évaluation du mètre dragué à 3 francs.
Il s'est trompé en ignorant qu'un mètre courant de jetée
variait de prix proportionnellement aux profondeurs dans
lesquelles il doit plonger.
Il s'est trompé en croyant que les jetées de Péluse devaient
coûter 10,000 francs, parce que celles de Cherbourg avaient
coûté 18,000 francs.
Il s'est trompé en jugeant imprudente et légère une esti-
mation à 47,750,000 francs pour les jetées de Péluse et de
Suez , lorsque ses propres chiffres et ses propres arguments
en réduisent la dépense à moins de 20 millions de francs.
Nous montrerons plus tard que, dans la solidité de ses
connaissances nautiques, il s'est trompé en plaçant en mer
Rouge le nord au midi et le midi au nord, ce qui est un af-
freux désastre pour un maître en navigation.
Et contre combien d'autres erreurs n'allons-nous pas en-
core avoir à nous heurter !
IV.
L'ingénieur de M. de Coninck ne lui a pas seulement en-
voyé des devis merveilleux et des estimations étonnantes; il
lui a expédié par le même ordinaire une ligne du rapport de
la Commission internationale.
Cette ligne a jeté M. de Coninck dans le ravissement.
« J'aurais émis, dit-il avec candeur, beaucoup plus de doutes
» sur le chiffre de 200 millions, si, lorsque j'ai écrit ma bro-
» chure, j'avais su ce que l'on a eu la bonté de m apprendre
» depuis. »
M. de Coninck est toujours le même ; il ne sait pas ; il faut
tout lui apprendre, in vertu de quoi il tranche sur tout.
Il écrit contre le canal de Suez, et il ne s'est point donné
la peine de lire cette œuvre collective du talent et de la con-
science, le rapport de la Commission internationale, base,
exposé des motifs, explication et justification de l'entreprise
dans son ensemble et ses détails ! Nous le savions déjà ; mais
il est bon d'en recueillir de lui-même l'aveu édifiant.
Quelle discussion sérieuse est possible avec une pareille
tête ?
Rétablissons toutefois dans son intégrité le passage dont
M. de Coninck ne cite qu'un fragment :
« La fixation des prix de chaque sorte d'ouvrage est une
» affaire d'expérience et dépend des localités où les travaux
n s'exécutent. La Commission ne pouvait donc ni l'établir
» ni la contester. Elle a chargé par conséquent l'un des in-
"génieurs de S. A. le Vice-roi, M. Mougel-Bey, de faire
» ce travail, d'après la longue pratique acquise par lui dans les
» grands chantiers qu'il a dirigés en Egypte. C'est ce travail
» que la Commission a adopté et qui est joint à son rapport. »
(Rapp. de la Comm. intern., p. 162.)
Nous ne pensons pas qu'il fût possible de choisir un mode de
procéder plus sage et offrant de meilleures garanties. La Com-
mission commence par poser les principes qui ont été sa règle
de conduite. Elle en exprime les motifs très-sensés. Modestes,
parce qu'ils sont forts, ses membres ont appelé le concours de
l'expérience acquise, de la pratique des localités. C'était pour
leur concience le plus grand élément de sécurité et de certi-
tude. Ils ont donc déféré à M. Mougel la mission qu'entre eux
tous il était le plus capable de remplir. M. Mougel, en effet,
avait exécuté pendant les dernières vingt années les plus grands
travaux de l'Egypte; il avait dirigé des armées de soixante et
quatre-vingt mille ouvriers. Par un long séjour et une longue
étude du pays, il connaît l'Egypte intus et in cute. Cette con-
fiance de tant d'esprits supérieurs peut le consoler un peu
de l'anathème de M. de Coninck. Il a présenté son travail et
il a été « adopté ».
Cette « adoption" est-elle un acte machinal et sans portée?
La Commission a-t-elle discuté-les vraisemblances, apprécié
la valeur du travail? M. de Coninck cite les lignes, mais ne lit
pas les pages. S'il avait achevé la lecture de celle d'où il extrait
sa ligne, il y aurait vu, au contraire, que la Commision était
entrée dans la discussion des détails; qu'elle donnait les motifs
de son adoption, desquels il résultait que les évaluations de
M. Mougel étaient plutôt élevées qu'atténuées.
qu'un ingénieur pour rire? Est-ce que quelque novice des
ponts et chaussées lui aurait fait apercevoir le grotesque des
terrains de l'isthme dragués à 3 francs le mètre et de ses je-
tées de 5 mètres de fond à 10,000 francs le mètre? Est-ce
que l'infaillible oracle se serait évanoui en fumée comme
Asmodée? Dans tous les cas, M. de Coninck est-il guéri de
cette infaillibilité ? S'il renonce aux termes démonstratifs du
problème, comment peut-il persister dans ses conclusions,
et s'il a dû supprimer de sa publication tout ce qui fait la
substance et la réalité de son ingénieur, comme ingénieur,
n'en devait-il pas du même trait effacer toute la fantasma-
gorie !
L'existence de l'ingénieur de M. de Coninck restera-t-elle
un problème historique comme celle d'Homère et d'Ossian!
Quoi qu'il en soit, M. de Coninck vient de se prouver à lui-
même par lui-même que les jetées du canal ne pouvaient pas
coûter plus de 2,000 francs par mètre. Elles forment en-
semble une étendue d'un peu moins de 10,000 mètres : —
6,000 mètres à Péluse, 3,800 mètres à Suez. 10,000 mètres
à 2,000 francs le mètre donnent la somme de 20 millions de
francs. Voilà le chiffre Coninck, voilà le résultat de ses
propres données.
Et cependant, dans sa première brochure, M. de Coninck
trouve dangereusement incertain le chiffre de 47,750,000 fr.
indiqué primitivement par les ingénieurs du vice-roi.
Nous pourrions en finir ici avec M. de Coninck en lui ap-
pliquant sa propre loi, legem quantfecisti. En effet, pour la
fameuse et seule affaire de la baie du Lion, MM. Linant-Bey
et Mougel-Bey devaient être déchus de toute autorité. Ils s'é-
taient trompés une fois, donc ils ne méritaient plus aucune
créance. Ils ont été accusés d'avoir cité fautivement la construc-
tion d'une jetée de 8,000 mètres au cap de Bonne- Espérance.
Après une erreur de cette force, il est permis de ne pas
» prendre leur dire pour parole d'Evangile, et il est prudent
» de les éplucher (p. 12). » — On ne doit recueillir leurs
renseignements que « sous bénéfice d'inventaire (p. 13). »
M. de Lesseps a eu le tort de leur accorder" une aveugle
confiance (p. 10). »
La théorie de M. de Coninck est donc, et dans une certaine
mesure elle a du vrai, que les gens qui se sont lourdement
trompés devant le public sont malvenus à prétendre le ré-
genter et à lui donner des leçons de conduite ou de science.
Comptons, non toutes les erreurs, mais les erreurs consta-
tées de M. de Coninck.
Il s'est trompé à propos de la jetée hollandaise en attri,
buant à MM. Linant et Mougel, après une rectification pu-
blique et péremptoire, une responsabilité qui ne leur appar-
tenait pas.
Il s'est trompé en criant i aux petites bourses » et « aux
» braves ouvriers » que les jetées à Péluse avaient 6,000 et à
Suez 4,T)00 mètres.
Il s'est trompé en supposant l'Egypte labourée par des
chameaux.
Il s'est trompé en acceptant de son ingénieur ou de son
mystificateur l'évaluation du mètre dragué à 3 francs.
Il s'est trompé en ignorant qu'un mètre courant de jetée
variait de prix proportionnellement aux profondeurs dans
lesquelles il doit plonger.
Il s'est trompé en croyant que les jetées de Péluse devaient
coûter 10,000 francs, parce que celles de Cherbourg avaient
coûté 18,000 francs.
Il s'est trompé en jugeant imprudente et légère une esti-
mation à 47,750,000 francs pour les jetées de Péluse et de
Suez , lorsque ses propres chiffres et ses propres arguments
en réduisent la dépense à moins de 20 millions de francs.
Nous montrerons plus tard que, dans la solidité de ses
connaissances nautiques, il s'est trompé en plaçant en mer
Rouge le nord au midi et le midi au nord, ce qui est un af-
freux désastre pour un maître en navigation.
Et contre combien d'autres erreurs n'allons-nous pas en-
core avoir à nous heurter !
IV.
L'ingénieur de M. de Coninck ne lui a pas seulement en-
voyé des devis merveilleux et des estimations étonnantes; il
lui a expédié par le même ordinaire une ligne du rapport de
la Commission internationale.
Cette ligne a jeté M. de Coninck dans le ravissement.
« J'aurais émis, dit-il avec candeur, beaucoup plus de doutes
» sur le chiffre de 200 millions, si, lorsque j'ai écrit ma bro-
» chure, j'avais su ce que l'on a eu la bonté de m apprendre
» depuis. »
M. de Coninck est toujours le même ; il ne sait pas ; il faut
tout lui apprendre, in vertu de quoi il tranche sur tout.
Il écrit contre le canal de Suez, et il ne s'est point donné
la peine de lire cette œuvre collective du talent et de la con-
science, le rapport de la Commission internationale, base,
exposé des motifs, explication et justification de l'entreprise
dans son ensemble et ses détails ! Nous le savions déjà ; mais
il est bon d'en recueillir de lui-même l'aveu édifiant.
Quelle discussion sérieuse est possible avec une pareille
tête ?
Rétablissons toutefois dans son intégrité le passage dont
M. de Coninck ne cite qu'un fragment :
« La fixation des prix de chaque sorte d'ouvrage est une
» affaire d'expérience et dépend des localités où les travaux
n s'exécutent. La Commission ne pouvait donc ni l'établir
» ni la contester. Elle a chargé par conséquent l'un des in-
"génieurs de S. A. le Vice-roi, M. Mougel-Bey, de faire
» ce travail, d'après la longue pratique acquise par lui dans les
» grands chantiers qu'il a dirigés en Egypte. C'est ce travail
» que la Commission a adopté et qui est joint à son rapport. »
(Rapp. de la Comm. intern., p. 162.)
Nous ne pensons pas qu'il fût possible de choisir un mode de
procéder plus sage et offrant de meilleures garanties. La Com-
mission commence par poser les principes qui ont été sa règle
de conduite. Elle en exprime les motifs très-sensés. Modestes,
parce qu'ils sont forts, ses membres ont appelé le concours de
l'expérience acquise, de la pratique des localités. C'était pour
leur concience le plus grand élément de sécurité et de certi-
tude. Ils ont donc déféré à M. Mougel la mission qu'entre eux
tous il était le plus capable de remplir. M. Mougel, en effet,
avait exécuté pendant les dernières vingt années les plus grands
travaux de l'Egypte; il avait dirigé des armées de soixante et
quatre-vingt mille ouvriers. Par un long séjour et une longue
étude du pays, il connaît l'Egypte intus et in cute. Cette con-
fiance de tant d'esprits supérieurs peut le consoler un peu
de l'anathème de M. de Coninck. Il a présenté son travail et
il a été « adopté ».
Cette « adoption" est-elle un acte machinal et sans portée?
La Commission a-t-elle discuté-les vraisemblances, apprécié
la valeur du travail? M. de Coninck cite les lignes, mais ne lit
pas les pages. S'il avait achevé la lecture de celle d'où il extrait
sa ligne, il y aurait vu, au contraire, que la Commision était
entrée dans la discussion des détails; qu'elle donnait les motifs
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