Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-12-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 décembre 1864 15 décembre 1864
Description : 1864/12/15 (A9,N204). 1864/12/15 (A9,N204).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203335v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 487
le site le mieux adapté à une scène de brigands
assemblés pour quelque hideuse entreprise. Les
Vouangouana étaient eux-mêmes sous le charme;
pas un ne fit mine de s'éloigner jusqu'au moment
où la faim nous avertit que la nuit allait venir- et
qu'il était temps de chercher un abri.
26 juillet, — Kirindi.
Nous repartons après avoir appris que, par suite
du meurtre commis à Kari, on a mis la main sur
trois Vouakoungou de cette localité. Notre guide
prétend que la journée est trop avancée pour tra-
verser les jungles qui nous séparent encore, soit de
la source du Nil, soit du palais de Mtésa ; puis
quand il nous a décidés à faire halte jusqu'au.len-
demain, il nous quitte sous prétexte de quelque
affaire et disparait sans retour. Une petite mouche
noire, à larges épaules et à tête arrondie est, pour
les gens de ce pays qu'elle harcèle de piqûres inces-
santes, un véritable fléau.
27 juillet. — Un domaine de Mainmorte.
Le district que j'appelle ainsi, et où nous sommes
parvenus après une marche pénible, se trouve dédié,
je ne sais comment, à Loubari (l'Etre Tout-Puissant);
lit, bien que le roi conserve une certaine autorité
sur quelques-uns de ses habitants, il en est d'autres
que leur caractère semble mettre au-dessus de l'au-
torité purement civile, et je ne pense pas que la
terre elle même soit à la disposition du monarque.
De cinq en cinq milles on y trouve de petits villages,
entre lesquels n'existe aucune route, et on compren-
dra aisément que, n'ayant personne pour nous gui-
der nous devions nous égarer presque à chaque
pas. Nous commençons à nous douter que Budja,
quand il niait qu'il existât au bord du Nil un grand
chemin latéral, avait surtout en vue de ne pas se
compromettre avec le pouvoir ecclésiastique en fai-
sant passer, sur des terres appartenant au clergé,
"gel
une caravane comme la nôtre, composée de gens
assez peu scrupuleux. Le fait est que si je n'avais
pas maintenu, jusqu'à un certain point, l'autorité de
la discipline, il nous eût été assez difficile de résider
ici ; mais, voyant que je me portais garant de toute
espèce de larcins commis à leur préjudice, les natu-
rels se chargèrent de nous loger et de tous alimen-
ter, ce qu'ils firent, en somme, de la manière la plus
obligeante.
Un pauvre diable à moitié fou, — il l'est, me dit-
on, par suite des traitements rigoureux que le roi
lui a fait subir, — vient, dès notre arrivée, déposer
à mes pieds toute sorte de présents dérisoires. Ses
chants, ses danses insensées, ses alternatives d'or-
gueil ou de timidité, ses plaintes sur l'existence misé-
rable qu'il mène dans une habitation écartée, en com-
pagnie des éléphants et des lions, faisaient de lui un
véritable type de ce que nous appelons en Angleterre
« l'idiot de la paroisse. »
28 juillet. — Chutes Ripon.
Enfin, après bien des peines et en traversant un
pays complétement ravagé par les éléphants qui,
après avoir mangé tout ce qui était mangeable,
n'ont laissé debout ni une cabane ni un bananier,
nous sommes arrivés au but final du voyage, sous la
même latitude que le palais du roi Mtisa, et juste-
ment à 40 milles de cette royale demeure, dans la
direction de l'est.
Nous étions bien payés de nos peines, car « les
Pierres », c'est le nom que les Vouayanda donnent
aux chutes, nous offraient le spectacle le plus digne
d'intérêt que j'ai rencontré dans le cours de mes
voyages en Afrique. Bien que la marche eût été lon-
gue et fatigante, chacun a pris sa course pour en
jouir plus vite. Le paysage, si beau qu'il fût, n'était
pas exactement tel que je l'avais imaginé, car la
grande nappe du lac nous était dérobée par une
pointe, un promontoire des hauteurs adjacentes ; et
les chutes, qui ont environ 12 pieds de profon-
deur sur 4 à 500 de large, sont coupées çà et
là par des rochers. Néanmoins, le tumulte des
eaux, le bond fréquent des poissons voyageurs, les
pêcheurs de l'Ousoga et de l'Ouganda, venus en
ZD Zn
bateau, et postés la ligne en main sur toutes les
saillies de la roche, les hippopotames et les crocodi-
les promenant sur l'onde leur oisiveté endormie ; au-
dessus des chutes, le passage d'une rive à l'autre des
troupeaux qu'on menait boire aux bords du lac, tous
ces détails, ajoutant leur charme vivant à celui d'une
riante nature, composaient un ensemble aussi at-
trayant que possible.
L'expédition avait désormais atteint son but. Je
voyais l'antique Nil sortir du Victoria-N'yanza. Je
m'assurais que, selon toutes mes prévisions, ce
grand lac donne naissance à la rivière sacrée sur
laquelle a flotté Moïse enfant. Je regrettais, il est
vrai, que mille et mille retards inévitables m'eus-
sent empêché d'aller examiner, à l'angle nord-est
du N'yanza, ce détroit mentionné si fréquemment,
qui l'unit à un autre lac où les gens de l'Ouganda
vont chercher leur sel, et d'où s'écoule vers le nord
un second fleuve entourant l'Ousoga d'une véritable
ceinture d'eau. Mais je n'en étais pas moins recon-
naissant envers la Providence pour ce qu'elle m'a-
vait permis d'accomplir, car enfin j'avais vu par
moi-même une bonne moitié du lac, et sur le reste,
je m'étais procuré des renseignements qui me per-
mettaient d'éclaircir les points essentiels à la science
géographique.
Résumons maintenant les noiions acquises, et
voyons au juste ce qu'elles valent.
le site le mieux adapté à une scène de brigands
assemblés pour quelque hideuse entreprise. Les
Vouangouana étaient eux-mêmes sous le charme;
pas un ne fit mine de s'éloigner jusqu'au moment
où la faim nous avertit que la nuit allait venir- et
qu'il était temps de chercher un abri.
26 juillet, — Kirindi.
Nous repartons après avoir appris que, par suite
du meurtre commis à Kari, on a mis la main sur
trois Vouakoungou de cette localité. Notre guide
prétend que la journée est trop avancée pour tra-
verser les jungles qui nous séparent encore, soit de
la source du Nil, soit du palais de Mtésa ; puis
quand il nous a décidés à faire halte jusqu'au.len-
demain, il nous quitte sous prétexte de quelque
affaire et disparait sans retour. Une petite mouche
noire, à larges épaules et à tête arrondie est, pour
les gens de ce pays qu'elle harcèle de piqûres inces-
santes, un véritable fléau.
27 juillet. — Un domaine de Mainmorte.
Le district que j'appelle ainsi, et où nous sommes
parvenus après une marche pénible, se trouve dédié,
je ne sais comment, à Loubari (l'Etre Tout-Puissant);
lit, bien que le roi conserve une certaine autorité
sur quelques-uns de ses habitants, il en est d'autres
que leur caractère semble mettre au-dessus de l'au-
torité purement civile, et je ne pense pas que la
terre elle même soit à la disposition du monarque.
De cinq en cinq milles on y trouve de petits villages,
entre lesquels n'existe aucune route, et on compren-
dra aisément que, n'ayant personne pour nous gui-
der nous devions nous égarer presque à chaque
pas. Nous commençons à nous douter que Budja,
quand il niait qu'il existât au bord du Nil un grand
chemin latéral, avait surtout en vue de ne pas se
compromettre avec le pouvoir ecclésiastique en fai-
sant passer, sur des terres appartenant au clergé,
"gel
une caravane comme la nôtre, composée de gens
assez peu scrupuleux. Le fait est que si je n'avais
pas maintenu, jusqu'à un certain point, l'autorité de
la discipline, il nous eût été assez difficile de résider
ici ; mais, voyant que je me portais garant de toute
espèce de larcins commis à leur préjudice, les natu-
rels se chargèrent de nous loger et de tous alimen-
ter, ce qu'ils firent, en somme, de la manière la plus
obligeante.
Un pauvre diable à moitié fou, — il l'est, me dit-
on, par suite des traitements rigoureux que le roi
lui a fait subir, — vient, dès notre arrivée, déposer
à mes pieds toute sorte de présents dérisoires. Ses
chants, ses danses insensées, ses alternatives d'or-
gueil ou de timidité, ses plaintes sur l'existence misé-
rable qu'il mène dans une habitation écartée, en com-
pagnie des éléphants et des lions, faisaient de lui un
véritable type de ce que nous appelons en Angleterre
« l'idiot de la paroisse. »
28 juillet. — Chutes Ripon.
Enfin, après bien des peines et en traversant un
pays complétement ravagé par les éléphants qui,
après avoir mangé tout ce qui était mangeable,
n'ont laissé debout ni une cabane ni un bananier,
nous sommes arrivés au but final du voyage, sous la
même latitude que le palais du roi Mtisa, et juste-
ment à 40 milles de cette royale demeure, dans la
direction de l'est.
Nous étions bien payés de nos peines, car « les
Pierres », c'est le nom que les Vouayanda donnent
aux chutes, nous offraient le spectacle le plus digne
d'intérêt que j'ai rencontré dans le cours de mes
voyages en Afrique. Bien que la marche eût été lon-
gue et fatigante, chacun a pris sa course pour en
jouir plus vite. Le paysage, si beau qu'il fût, n'était
pas exactement tel que je l'avais imaginé, car la
grande nappe du lac nous était dérobée par une
pointe, un promontoire des hauteurs adjacentes ; et
les chutes, qui ont environ 12 pieds de profon-
deur sur 4 à 500 de large, sont coupées çà et
là par des rochers. Néanmoins, le tumulte des
eaux, le bond fréquent des poissons voyageurs, les
pêcheurs de l'Ousoga et de l'Ouganda, venus en
ZD Zn
bateau, et postés la ligne en main sur toutes les
saillies de la roche, les hippopotames et les crocodi-
les promenant sur l'onde leur oisiveté endormie ; au-
dessus des chutes, le passage d'une rive à l'autre des
troupeaux qu'on menait boire aux bords du lac, tous
ces détails, ajoutant leur charme vivant à celui d'une
riante nature, composaient un ensemble aussi at-
trayant que possible.
L'expédition avait désormais atteint son but. Je
voyais l'antique Nil sortir du Victoria-N'yanza. Je
m'assurais que, selon toutes mes prévisions, ce
grand lac donne naissance à la rivière sacrée sur
laquelle a flotté Moïse enfant. Je regrettais, il est
vrai, que mille et mille retards inévitables m'eus-
sent empêché d'aller examiner, à l'angle nord-est
du N'yanza, ce détroit mentionné si fréquemment,
qui l'unit à un autre lac où les gens de l'Ouganda
vont chercher leur sel, et d'où s'écoule vers le nord
un second fleuve entourant l'Ousoga d'une véritable
ceinture d'eau. Mais je n'en étais pas moins recon-
naissant envers la Providence pour ce qu'elle m'a-
vait permis d'accomplir, car enfin j'avais vu par
moi-même une bonne moitié du lac, et sur le reste,
je m'étais procuré des renseignements qui me per-
mettaient d'éclaircir les points essentiels à la science
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