Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-06-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juin 1864 15 juin 1864
Description : 1864/06/15 (A9,N192). 1864/06/15 (A9,N192).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203323n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
270 L'ISTHME DE SUEZ.
plus en Turquie, alors que nous avons tous les jours
sous les yeux la preuve du contraire. Ces abus ont été
de tout temps, et ils sont tellement enracinés dans les
habitudes que, quand bien même elle voudrait s'en
débarrasser, elle ne le pourrait véritablement pas.
» La vérité exige cependant que je reconnaisse
que chrétiens et musulmans des provinces, en général,
ont à souffrir à peu près des mêmes abus. Le régime
de la corvée est commun aux uns et aux autres Il y
a une telle communauté de douleurs entre musulmans
et chrétiens à cet égard, que dans les provinces
où ce système est en pleine vigueur, on voit le pay-
san turc donner la main au paysan chrétien et com-
battre à côté de celui-ci pour se soustraire à un état
de choses qui devient, chaque jour, de plus en plus in-
tolérable.
» Les populations murmureraient beaucoup moins
pourtant, si le gouvernement employait le régime de la
corvée exclusivement aux travaux publics. Mais ce dont
elles se plaignent, qu'on le remarque, c'est qu'on ne
l'applique qu'aux travaux militaires, ou aux entreprises
d'utilité privée, tels que la construction des forteresses
ou l'exploitation des fermes du sultan et de celles de
ses ministres, comme nous le prouverons si l'on vient
à nous y inviter, ne demandant pas mieux, du reste,
que d'appeler le débat soulevé par la philanthropie de
la Porte sur ce terrain, et d'engager une polémique à
ce sujet avec les défenseurs à la solde du gouverne-
ment turc. Il ne peut que profiter aux populations chré-
tiennes et musulmanes elles-mêmes entre lesquelles,
s'il n'y a pas égalité de situation politique, il y a du
moins similitude de douleurs, comme nous venons de
le dire.
» D'ailleurs n'allons pas si loin, et voyons ce qui se
passe tout près de Constantinople et dans la capitale
même des sultans.
» On comprend, d'après le système en usage dans la
Bulgarie, en Herzegovine et dans toute la Turquie
d'Europe, ce qui doit se pratiquer dans les provinces
de la Turquie d'Asie. Les pachas de ces contrées éloi-
gnées vivent à peu près indépendants et gouvernent
en maîtres absolus. Leur bon plaisir fait loi, et les ha-
bitants sont soumis à toutes sortes de lourdes et oné-
reuses obligations. On ne l'ignore point en Angle-
terre, où les blue-books, du Parlement ont souvent si-
gnalé au public les abus et l'arbitraire du gouverne-
ment turc.
» La Porte a construit l'an dernier pour les besoins de
l'Angleterre une ligne télégraphique de Scutari à
Bagdad. La fourniture des poteaux, la main-d'œuvre
sont restées à la charge des populations placées sur le
parcours de cette immense ligne, qui n'oublieront ja-
mais ce qu'elle leur a coûté de journées de travail et
de peines.
« Nous n'en finirions plus si nous voulions raconter
toutes les exactions, toutes les charges que supportent
de la part des pachas les sujets du sultan dans ces
pays perdus. La Porte prétend, pour s'excuser, qu'à cetto
distance elle est dans l'impossibilité de porter remède
à des habitudes invétérées depuis des siècles. Elle re-
connaîtrait donc elle-même que le mal dont elle veut
délivrer, dit-elle, l'Egypte, subsiste dans des provinces
qui relèvent directement de son autorité. Constatons le
fait; il nous suffit.
» Dans la province de Brousse, on procède d'une
autre façon, il est vrai. Nous nous plaisons à le recon-
naître et à en faire honneur au commissaire extraordi-
naire que le sultan y a envoyé. Mais cette exception
confirme précisément la règle. Ahmed-Vefik-Efendi a
l'honnêteté de payer et de bien payer les gens qu'il
emploie aux travaux de restauration des monuments
de Brousse et à la reconstruction ou à l'achèvement
des routes de cette province. La chose, toute naturelle
qu'elle était en elle-même, parut cependant si extraor-
dinaire aux habitants qu'aucun d'eux ne voulut y croire
au commencement. A force de persévérance et d'énergie
le commissaire parvint à les convaincre, et à leur prou-
verque les hommes du parti dont il est le chef
avaient rompu avec les anciens errements et qu'ils
voulaient eu finir une fois pour toutes avec le ré-
gime de la force et de la violence qui prévalut mal-
heureusement encore dans les autres provinces de
l'empire, malgré les louables efforts que déployèrent
Méhémet-Kibrisli pacha, Zia bey, Soubih bey, dans
les missions d'inspection dont ils avaient été chargés
pour les faire cesser, efforts qui furent récompensés, on
s'en souvient, de la plus noire ingratitude de la part du
miuistère ottoman; les petits et les grands employés
du gouvernement pensent, toujours comme leurs
patrons de Constantinople, que le paysan est né
corvéable en Turquie, et ils maudissent Ahmed
Vefik-Efendi. Mais les populations de la campagne,
les artisans, le peuple, qui ne demandent pas mieux
que de travailler si on les paye, le bénissent et
s'empressent de se rendre à son appel partout où il y
a du travail, c'est à-dire de l'argent à gagner, puisqu'ils
savent que le commissaire veille en personne à ce que
leur salaire leur soit régulièrement et intégralement
remis.
» Ce n'est cependant qu'au moyen du travail obliga-
toire dont il ne se cache pas, qu'Ahmed- Vefik-Efend
obtient les immenses résultats et les améliorations
inappréciables que l'on constate dans la province qu'il
administre avec tant de soin, et qu'il régénère même
uvec les détestables éléments dont il dispose.
» A Constantinople, le gouvernement couvre, on le
conçoit, ses actes d'une apparence de bonne volonté. Là
ses agents procèdent, il est vrai, depuis quelque temps,
d'une autre façon que dans les villes et villages de l'inté-
rieur, ce qui ne les empêche pas pour cela de requérir
souvent les conducteurs de voitures, les passants, les
rayas nous voulons dire, et de les relâcher ensuite une
fois leur besogne achevée, heureux d'en être quittes
à si bon marché et de n'avoir point reçu les
coups de bâton dont on les gratifiait d'ordinaire.
Nous ne voulons point dire que ce mode de recruter les
gens de force dans la rue et sur les grandes routes
avoisinant la capitale soit passé en principe; maisf il
plus en Turquie, alors que nous avons tous les jours
sous les yeux la preuve du contraire. Ces abus ont été
de tout temps, et ils sont tellement enracinés dans les
habitudes que, quand bien même elle voudrait s'en
débarrasser, elle ne le pourrait véritablement pas.
» La vérité exige cependant que je reconnaisse
que chrétiens et musulmans des provinces, en général,
ont à souffrir à peu près des mêmes abus. Le régime
de la corvée est commun aux uns et aux autres Il y
a une telle communauté de douleurs entre musulmans
et chrétiens à cet égard, que dans les provinces
où ce système est en pleine vigueur, on voit le pay-
san turc donner la main au paysan chrétien et com-
battre à côté de celui-ci pour se soustraire à un état
de choses qui devient, chaque jour, de plus en plus in-
tolérable.
» Les populations murmureraient beaucoup moins
pourtant, si le gouvernement employait le régime de la
corvée exclusivement aux travaux publics. Mais ce dont
elles se plaignent, qu'on le remarque, c'est qu'on ne
l'applique qu'aux travaux militaires, ou aux entreprises
d'utilité privée, tels que la construction des forteresses
ou l'exploitation des fermes du sultan et de celles de
ses ministres, comme nous le prouverons si l'on vient
à nous y inviter, ne demandant pas mieux, du reste,
que d'appeler le débat soulevé par la philanthropie de
la Porte sur ce terrain, et d'engager une polémique à
ce sujet avec les défenseurs à la solde du gouverne-
ment turc. Il ne peut que profiter aux populations chré-
tiennes et musulmanes elles-mêmes entre lesquelles,
s'il n'y a pas égalité de situation politique, il y a du
moins similitude de douleurs, comme nous venons de
le dire.
» D'ailleurs n'allons pas si loin, et voyons ce qui se
passe tout près de Constantinople et dans la capitale
même des sultans.
» On comprend, d'après le système en usage dans la
Bulgarie, en Herzegovine et dans toute la Turquie
d'Europe, ce qui doit se pratiquer dans les provinces
de la Turquie d'Asie. Les pachas de ces contrées éloi-
gnées vivent à peu près indépendants et gouvernent
en maîtres absolus. Leur bon plaisir fait loi, et les ha-
bitants sont soumis à toutes sortes de lourdes et oné-
reuses obligations. On ne l'ignore point en Angle-
terre, où les blue-books, du Parlement ont souvent si-
gnalé au public les abus et l'arbitraire du gouverne-
ment turc.
» La Porte a construit l'an dernier pour les besoins de
l'Angleterre une ligne télégraphique de Scutari à
Bagdad. La fourniture des poteaux, la main-d'œuvre
sont restées à la charge des populations placées sur le
parcours de cette immense ligne, qui n'oublieront ja-
mais ce qu'elle leur a coûté de journées de travail et
de peines.
« Nous n'en finirions plus si nous voulions raconter
toutes les exactions, toutes les charges que supportent
de la part des pachas les sujets du sultan dans ces
pays perdus. La Porte prétend, pour s'excuser, qu'à cetto
distance elle est dans l'impossibilité de porter remède
à des habitudes invétérées depuis des siècles. Elle re-
connaîtrait donc elle-même que le mal dont elle veut
délivrer, dit-elle, l'Egypte, subsiste dans des provinces
qui relèvent directement de son autorité. Constatons le
fait; il nous suffit.
» Dans la province de Brousse, on procède d'une
autre façon, il est vrai. Nous nous plaisons à le recon-
naître et à en faire honneur au commissaire extraordi-
naire que le sultan y a envoyé. Mais cette exception
confirme précisément la règle. Ahmed-Vefik-Efendi a
l'honnêteté de payer et de bien payer les gens qu'il
emploie aux travaux de restauration des monuments
de Brousse et à la reconstruction ou à l'achèvement
des routes de cette province. La chose, toute naturelle
qu'elle était en elle-même, parut cependant si extraor-
dinaire aux habitants qu'aucun d'eux ne voulut y croire
au commencement. A force de persévérance et d'énergie
le commissaire parvint à les convaincre, et à leur prou-
verque les hommes du parti dont il est le chef
avaient rompu avec les anciens errements et qu'ils
voulaient eu finir une fois pour toutes avec le ré-
gime de la force et de la violence qui prévalut mal-
heureusement encore dans les autres provinces de
l'empire, malgré les louables efforts que déployèrent
Méhémet-Kibrisli pacha, Zia bey, Soubih bey, dans
les missions d'inspection dont ils avaient été chargés
pour les faire cesser, efforts qui furent récompensés, on
s'en souvient, de la plus noire ingratitude de la part du
miuistère ottoman; les petits et les grands employés
du gouvernement pensent, toujours comme leurs
patrons de Constantinople, que le paysan est né
corvéable en Turquie, et ils maudissent Ahmed
Vefik-Efendi. Mais les populations de la campagne,
les artisans, le peuple, qui ne demandent pas mieux
que de travailler si on les paye, le bénissent et
s'empressent de se rendre à son appel partout où il y
a du travail, c'est à-dire de l'argent à gagner, puisqu'ils
savent que le commissaire veille en personne à ce que
leur salaire leur soit régulièrement et intégralement
remis.
» Ce n'est cependant qu'au moyen du travail obliga-
toire dont il ne se cache pas, qu'Ahmed- Vefik-Efend
obtient les immenses résultats et les améliorations
inappréciables que l'on constate dans la province qu'il
administre avec tant de soin, et qu'il régénère même
uvec les détestables éléments dont il dispose.
» A Constantinople, le gouvernement couvre, on le
conçoit, ses actes d'une apparence de bonne volonté. Là
ses agents procèdent, il est vrai, depuis quelque temps,
d'une autre façon que dans les villes et villages de l'inté-
rieur, ce qui ne les empêche pas pour cela de requérir
souvent les conducteurs de voitures, les passants, les
rayas nous voulons dire, et de les relâcher ensuite une
fois leur besogne achevée, heureux d'en être quittes
à si bon marché et de n'avoir point reçu les
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