Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-05-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 mai 1864 15 mai 1864
Description : 1864/05/15 (A9,N190). 1864/05/15 (A9,N190).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203321t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 241
puisqu'en 1830 on n'en comptait qu'un seul dans la
flotte française de cinq cents navires envoyée devant
Alger.
Le Parlement fit consulter les hommes pratiques
et les hommes politiques; les amiraux et surtout les
politiques déclarèrent que les bâtiments à voiles pou-
vaient bien franchir dans les moussons le détroit de
Bab-el-Mandeb et naviguer facilement dans la mer
Rouge; mais que jamais un bateau à vapeur ne
pourrait le faire. (Rires.)
A trente ans de distance, l'argument est renversé,
et aujourd'hui, à l'occasion du canal de Suez, dans
ce même pays d'Angleterre, on dit que les bâti-
ments à voiles ne pourront pas naviguer dans la
mer Rouge.
Le lieutenant Wagorn avait cependant fondé la
navigation entre l'Angleterre etl es Indes en traver-
sant la route de terre ; c'est lui qui en a fait la dé-
monstration, et le courage que je lui ai vu déployer
me servant d'exemple, avait laissé dans mon esprit
une 'profonde impression. — Méhémet-Ali était alors
vice-roi d'Egypte. Il me traitait avec beaucoup de
bienveillance , parce qu'avant son élévation au
pouvoir, il avait été en relation avec mon père, le
premier agent français envoyé en Egypte après le
départ de notre armée, expressément chargé par le
premier consul Bonaparte et par M. de Talleyrand,
ministre des relations extérieures, de combattre
l'ancienne politique anglaise, qui consistait à favo-
riser en Égypte le gouvernement barbare des ma.
melucks. Mon père avait cherché à découvrir parmi
les milices turques un chef intelligent, influent qui
pût être désigné à la Porte comme capable de s'é-
lever au-dessus des siens, de réunir en ses mains
un pouvoir divisé et désorganisé, et de renverser
ces mêmes mamelucks contre lesquels la république
française avait été forcée d'agir plus encore pour
détruire un mauvais gouvernement nuisible aux in-
térêts commerciaux de l'Europe que pour s'emparer
de l'Égypte.
On sait comment Méhémet-Ali a fondé en Égypte
un pouvoir et une dynastie, et comment il a toujours
été aidé par l'appui de la France, en même temps
qu'il était entravé par l'hostilité ou la mauvaise vo-
lonté de l'Angleterre. Il racontait un jour, à l'époque
des victoires de Homs, Hama et de Koniah, devant
toute sa cour, que le père du jeune consul qui était là,
près de lui, l'avait invité à dîner, au Caire, à une épo-
que où il n'était que simple chef de mille hommes. Il
disait que le lendemain, ayant appris qu'un couvert
d'argent avait disparu, il craignait de retourner chez
l'agent français, parce qu'il lui semblait que par sa
position et par les habitudes du corps indiscipliné
auquel il appartenait, il était le seul convive qui
pût être soupçonné ; il ajoutait que son ami M. de
Lesseps fut obligé de l'envoyer chercher pour le faire
retourner chez lui. Il était beau d'entendre ce grand
prince arrivé au faîte de la puissance, raconter
naïvement une phase si singulière de. son existence.
Ces antécédents expliquent comment Méhémet-Ali
mit lui-même son jeune fils Saïd en rapport avec
moi, et comment, dès sa jeunesse, des relations d'a-
mitié s'établirent entre nous.
En 1847, son père était mort, et son neveu Abbas-
Pacha, qui régnait en Égypte, le persécutait. Il vint
à Paris, où j'eus le bonheur de le recevoir dans ma
famille ; nos liens devinrent plus étroits. Lorsqu'il
fut appelé au pouvoir, en 1854, il m'écrivit immé-
diatement de venir le trouver. Les événements poli-
tiques m'avaient fait des loisirs, je me rendis à
Alexandrie. J'avais préparé mon projet depuis long-
temps, mais comme je craignais de le voir échouer
dans une première conversation, j'apportai beaucoup
de soin et d'attention à aborder ce sujet.
Le vice-roi ayant examiné le projet, se décida à
l'exécuter. Nous nous rendîmes au Caire où il me
chargea de rédiger le premier firman de conces-
sion.
Le consul d'Angleterre lui soumit bien quelques ob-
jections, mais aussitôt le vice-roi ajouta que l'entre -
prise serait faite avec les capitaux européens, qu'il
n'y aurait de privilége pour aucune nation, et que
personne n'avait à s'en alarmer; que si quelques puis-
sances avaient des observations à faire, il serait
charmé de les connaître par l'intermédiaire de leurs
consuls.
A la suite de cette communication, il ne reçut que
des compliments des souverains de l'Europe, qui
lui envoyèrent les grand'croix de leurs ordres.
Une lettre que j'écrivis à M. Richard Cobden, en
Angleterre, et dont je vais donner lecture, montre
les principes et l'esprit de conciliation qui m'ani-
maient dès le début de l'entreprise et auxquels je suis
resté fidèle.
« A M. Cobden, membre du Parlement, à Londres.
» Caire, le 3 décembre 1854.
» Je viens, comme ami de la paix et de l'alliance
anglo-française, vous apporter une nouvelle qui con-
tribuera à réaliser cette parole : Aperire terram et
dare pacem gentibus.
» Venu récemment en Égypte pour répondre à une
invitation du vice-roi, avec lequel j'avais eu des re-
lations d'amitié depuis son enfance, j'ai eu l'occasion
d'appeler son attention sur les résultats qu'aurait,
pour le commerce du monde et pour la prospérité de -
l'Egypte, l'ouverture d'un canal maritime entre la
Méditerranée et la mer Rouge. Mohammed-Saïd a
puisqu'en 1830 on n'en comptait qu'un seul dans la
flotte française de cinq cents navires envoyée devant
Alger.
Le Parlement fit consulter les hommes pratiques
et les hommes politiques; les amiraux et surtout les
politiques déclarèrent que les bâtiments à voiles pou-
vaient bien franchir dans les moussons le détroit de
Bab-el-Mandeb et naviguer facilement dans la mer
Rouge; mais que jamais un bateau à vapeur ne
pourrait le faire. (Rires.)
A trente ans de distance, l'argument est renversé,
et aujourd'hui, à l'occasion du canal de Suez, dans
ce même pays d'Angleterre, on dit que les bâti-
ments à voiles ne pourront pas naviguer dans la
mer Rouge.
Le lieutenant Wagorn avait cependant fondé la
navigation entre l'Angleterre etl es Indes en traver-
sant la route de terre ; c'est lui qui en a fait la dé-
monstration, et le courage que je lui ai vu déployer
me servant d'exemple, avait laissé dans mon esprit
une 'profonde impression. — Méhémet-Ali était alors
vice-roi d'Egypte. Il me traitait avec beaucoup de
bienveillance , parce qu'avant son élévation au
pouvoir, il avait été en relation avec mon père, le
premier agent français envoyé en Egypte après le
départ de notre armée, expressément chargé par le
premier consul Bonaparte et par M. de Talleyrand,
ministre des relations extérieures, de combattre
l'ancienne politique anglaise, qui consistait à favo-
riser en Égypte le gouvernement barbare des ma.
melucks. Mon père avait cherché à découvrir parmi
les milices turques un chef intelligent, influent qui
pût être désigné à la Porte comme capable de s'é-
lever au-dessus des siens, de réunir en ses mains
un pouvoir divisé et désorganisé, et de renverser
ces mêmes mamelucks contre lesquels la république
française avait été forcée d'agir plus encore pour
détruire un mauvais gouvernement nuisible aux in-
térêts commerciaux de l'Europe que pour s'emparer
de l'Égypte.
On sait comment Méhémet-Ali a fondé en Égypte
un pouvoir et une dynastie, et comment il a toujours
été aidé par l'appui de la France, en même temps
qu'il était entravé par l'hostilité ou la mauvaise vo-
lonté de l'Angleterre. Il racontait un jour, à l'époque
des victoires de Homs, Hama et de Koniah, devant
toute sa cour, que le père du jeune consul qui était là,
près de lui, l'avait invité à dîner, au Caire, à une épo-
que où il n'était que simple chef de mille hommes. Il
disait que le lendemain, ayant appris qu'un couvert
d'argent avait disparu, il craignait de retourner chez
l'agent français, parce qu'il lui semblait que par sa
position et par les habitudes du corps indiscipliné
auquel il appartenait, il était le seul convive qui
pût être soupçonné ; il ajoutait que son ami M. de
Lesseps fut obligé de l'envoyer chercher pour le faire
retourner chez lui. Il était beau d'entendre ce grand
prince arrivé au faîte de la puissance, raconter
naïvement une phase si singulière de. son existence.
Ces antécédents expliquent comment Méhémet-Ali
mit lui-même son jeune fils Saïd en rapport avec
moi, et comment, dès sa jeunesse, des relations d'a-
mitié s'établirent entre nous.
En 1847, son père était mort, et son neveu Abbas-
Pacha, qui régnait en Égypte, le persécutait. Il vint
à Paris, où j'eus le bonheur de le recevoir dans ma
famille ; nos liens devinrent plus étroits. Lorsqu'il
fut appelé au pouvoir, en 1854, il m'écrivit immé-
diatement de venir le trouver. Les événements poli-
tiques m'avaient fait des loisirs, je me rendis à
Alexandrie. J'avais préparé mon projet depuis long-
temps, mais comme je craignais de le voir échouer
dans une première conversation, j'apportai beaucoup
de soin et d'attention à aborder ce sujet.
Le vice-roi ayant examiné le projet, se décida à
l'exécuter. Nous nous rendîmes au Caire où il me
chargea de rédiger le premier firman de conces-
sion.
Le consul d'Angleterre lui soumit bien quelques ob-
jections, mais aussitôt le vice-roi ajouta que l'entre -
prise serait faite avec les capitaux européens, qu'il
n'y aurait de privilége pour aucune nation, et que
personne n'avait à s'en alarmer; que si quelques puis-
sances avaient des observations à faire, il serait
charmé de les connaître par l'intermédiaire de leurs
consuls.
A la suite de cette communication, il ne reçut que
des compliments des souverains de l'Europe, qui
lui envoyèrent les grand'croix de leurs ordres.
Une lettre que j'écrivis à M. Richard Cobden, en
Angleterre, et dont je vais donner lecture, montre
les principes et l'esprit de conciliation qui m'ani-
maient dès le début de l'entreprise et auxquels je suis
resté fidèle.
« A M. Cobden, membre du Parlement, à Londres.
» Caire, le 3 décembre 1854.
» Je viens, comme ami de la paix et de l'alliance
anglo-française, vous apporter une nouvelle qui con-
tribuera à réaliser cette parole : Aperire terram et
dare pacem gentibus.
» Venu récemment en Égypte pour répondre à une
invitation du vice-roi, avec lequel j'avais eu des re-
lations d'amitié depuis son enfance, j'ai eu l'occasion
d'appeler son attention sur les résultats qu'aurait,
pour le commerce du monde et pour la prospérité de -
l'Egypte, l'ouverture d'un canal maritime entre la
Méditerranée et la mer Rouge. Mohammed-Saïd a
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