Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-05-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 mai 1864 15 mai 1864
Description : 1864/05/15 (A9,N190). 1864/05/15 (A9,N190).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203321t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 245
M. Rendel, le premier ingénieur anglais pour les tra-
vaux hydrauliques, et M. Harris, capitaine de la
Compagnie des Indes, qui avait fait cinquante-huit
voyages de Suez à Bombay, furent désignés pour
faire partie de la commission internationale. Cette
commission se réunit bientôt à Paris.
L'Espagne, l'Autriche, la Prusse, l'Italie, les Pays-
Bas avaient délégué leurs premiers ingénieurs qui,
avec ceux de la France et de l'Angleterre, jetèrent
les premières bases de leur projet.
Cette commission se rendit avec moi en Egypte,
où elle fut accueillie par le vice-roi avec une grande
distinction. Je dis un jour en leur présence à Son
Altesse : « Vous recevez ces messieurs comme des têtes
couronnées. » Le prince me répondit très-spirituelle-
ment : « Eh ! sans doute, ne sont-ce pas les têtes cou-
ronnées de la science?» (Applaudissements).
Les ingénieurs de la commission furent invités à
visiter et à étudier l'Egypte avant d'explorer
l'isthme. Le vice-roi mit à leur disposition les
bateaux à vapeur, les chemins de fer, les fit accom-
pagner partout par des serviteurs de sa maison.
Il est à ma connaissance que les dépenses faites
pour eux se sont élevées à environ 300,000 francs pris
sur sa cassette particulière, dont il ne s'est pas fait
rembourser lors de la constitution de la Compagnie.
La commission remonta le Nil jusqu'à la pre-
mière cataracte afin d'étudier le régime du fleuve.
A ce sujet, je vous dirai que c'est à tort que
beaucoup d'entre vous pensent que le Nil déborde. Le
Nil ne déborde pas. Il croît périodiquement, et s'il
débordait il causerait de grands désastres: il arrose
le pays par des moyens artificiels d'irrigation. Lors-
qu'au mois de juin, le Nil commence à monter (il
monte et descend aussi régulièrement que les as-
tres se lèvent et se couchent), les principaux ca-
naux reçoivent directement les eaux du fleuve, qui
se répandent dans des canaux plus petits et vont
porter la vie et la fécondité au loin. Il y a en Egypte
de vastes bassins situés au-dessous du niveau
des hautes eaux, l'eau y est introduite. Dans la
haute Egypte, par exemple, lorsqu'un bassin est
rempli, et que le Nil commence à descendre, on ferme
un barrage afin d'éviter que le bassin ne se vide
trop promptement. Le soleil fait évaporer l'eau, et il
reste une boue liquide. C'est dans cette boue qu'on
jette les semences des céréales qui forment une des
richesses de l'Egypte, et qui faisaient qu'autrefois
l'Égypte servait de grenier d'abondance à Rome.
Quant au coton, il se cultive d'une manière diffé-
rente. Les champs où se trouve le coton sont très-
régulièrement arrosés pendant deux, trois, quatre et
six heures, suivant l'état de maturité du coton. Dans
la basse Egypte, les terres à coton sont très-produc-
tives. Les familles des fellahs recueillent peu à peu
le produit de cette plante, au fur et à mesure que
les chaleurs l'ont amenée à maturité. Les flocons ne
sont pas mûrs tous ensemble, de sorte qu'il faut
qu'une famille vienne à plusieurs reprises en faire la
récolte. Si l'on avait des ouvriers européens pour
cultiver ces champs, la culture en serait très-coû-
teuse. Si les Européens voulaient cultiver en Egypte,
y
ils produiraient chèrement.
Je dis cela, j'insiste sur ce point, parce que plu-
sieurs personnes m'ont demandé s'il serait avanta-
geux de fonder des colonies d'Européens dans les
terres de la Compagnie pour aller y cultiver le coton.
C'est une culture qu'il faut laisser aux indigènes.
En général, l'Européen ne peut pas être cultivateur
sous le climat d'Egypte.
Mais revenons à la commission internationale.
Ces messieurs examinèrent le cours du Nil. Après
leurs études, ils furent amenés à penser qu'il ne
conviendrait pas de se servir de l'eau du Nil pour
alimenter le canal maritime. L'examen des lieux les
conduisit à penser, comme les auteurs de l'avant-
projet, qu'il n'y avait qu'une seule communication
possible pour la grande navigation, en creusant
simplement la terre d'une mer à l'autre, sans aucun
autre travail que celui de creuser.
Certainement, le plus petit chemin de fer de France
présente plus de difficultés d'art que le canal de Suez.
C'est une œuvre facile comme travail technique.
Maintenant, il y avait la difficulté de réunir un
grand nombre d'hommes dans le désert, de les nour-
rir et de les entretenir, et vous le comprendrez lors-
que je vous dirai que dans mon premier voyage
j'avais été obligé d'emmener pour quatre personnes
quarante chameaux, c'est-à-dire une caravane com-
plète, pour vivre seulement pendant un mois. La
grande difficulté était de faire vivre dans le désert
vingt-cinq à trente mille travailleurs. Maintenant que
ce problème est résolu, nous pouvons distribuer tout
notre travail par fractions à des entrepreneurs spé-
ciaux, qui viennent nous apporter le concours de leur
industrie, de leurs capitaux individuels et de leurs
efforts. C'est ainsi que, par les contrats qui s'exé-
cutent en ce moment, nous avons la confiance de
pouvoir ouvrir le canal des deux mers à la grande
navigation dans quatre ans.
La commission scientifique remit au vice-roi un
rapport favorable, le 1er janvier 1856. Elle affirmait
que l'entreprise était exécutable, et que la dépense
n'excéderait pas 200 millions.
Le vice-roi m'engagea à me rendre de nouveau en
Europe, et surtout à voir l'effet que produirait en
Angleterre le rapport dans lequel figuraient des in-
génieurs anglais. A Londres, l'effet fut assez grand
M. Rendel, le premier ingénieur anglais pour les tra-
vaux hydrauliques, et M. Harris, capitaine de la
Compagnie des Indes, qui avait fait cinquante-huit
voyages de Suez à Bombay, furent désignés pour
faire partie de la commission internationale. Cette
commission se réunit bientôt à Paris.
L'Espagne, l'Autriche, la Prusse, l'Italie, les Pays-
Bas avaient délégué leurs premiers ingénieurs qui,
avec ceux de la France et de l'Angleterre, jetèrent
les premières bases de leur projet.
Cette commission se rendit avec moi en Egypte,
où elle fut accueillie par le vice-roi avec une grande
distinction. Je dis un jour en leur présence à Son
Altesse : « Vous recevez ces messieurs comme des têtes
couronnées. » Le prince me répondit très-spirituelle-
ment : « Eh ! sans doute, ne sont-ce pas les têtes cou-
ronnées de la science?» (Applaudissements).
Les ingénieurs de la commission furent invités à
visiter et à étudier l'Egypte avant d'explorer
l'isthme. Le vice-roi mit à leur disposition les
bateaux à vapeur, les chemins de fer, les fit accom-
pagner partout par des serviteurs de sa maison.
Il est à ma connaissance que les dépenses faites
pour eux se sont élevées à environ 300,000 francs pris
sur sa cassette particulière, dont il ne s'est pas fait
rembourser lors de la constitution de la Compagnie.
La commission remonta le Nil jusqu'à la pre-
mière cataracte afin d'étudier le régime du fleuve.
A ce sujet, je vous dirai que c'est à tort que
beaucoup d'entre vous pensent que le Nil déborde. Le
Nil ne déborde pas. Il croît périodiquement, et s'il
débordait il causerait de grands désastres: il arrose
le pays par des moyens artificiels d'irrigation. Lors-
qu'au mois de juin, le Nil commence à monter (il
monte et descend aussi régulièrement que les as-
tres se lèvent et se couchent), les principaux ca-
naux reçoivent directement les eaux du fleuve, qui
se répandent dans des canaux plus petits et vont
porter la vie et la fécondité au loin. Il y a en Egypte
de vastes bassins situés au-dessous du niveau
des hautes eaux, l'eau y est introduite. Dans la
haute Egypte, par exemple, lorsqu'un bassin est
rempli, et que le Nil commence à descendre, on ferme
un barrage afin d'éviter que le bassin ne se vide
trop promptement. Le soleil fait évaporer l'eau, et il
reste une boue liquide. C'est dans cette boue qu'on
jette les semences des céréales qui forment une des
richesses de l'Egypte, et qui faisaient qu'autrefois
l'Égypte servait de grenier d'abondance à Rome.
Quant au coton, il se cultive d'une manière diffé-
rente. Les champs où se trouve le coton sont très-
régulièrement arrosés pendant deux, trois, quatre et
six heures, suivant l'état de maturité du coton. Dans
la basse Egypte, les terres à coton sont très-produc-
tives. Les familles des fellahs recueillent peu à peu
le produit de cette plante, au fur et à mesure que
les chaleurs l'ont amenée à maturité. Les flocons ne
sont pas mûrs tous ensemble, de sorte qu'il faut
qu'une famille vienne à plusieurs reprises en faire la
récolte. Si l'on avait des ouvriers européens pour
cultiver ces champs, la culture en serait très-coû-
teuse. Si les Européens voulaient cultiver en Egypte,
y
ils produiraient chèrement.
Je dis cela, j'insiste sur ce point, parce que plu-
sieurs personnes m'ont demandé s'il serait avanta-
geux de fonder des colonies d'Européens dans les
terres de la Compagnie pour aller y cultiver le coton.
C'est une culture qu'il faut laisser aux indigènes.
En général, l'Européen ne peut pas être cultivateur
sous le climat d'Egypte.
Mais revenons à la commission internationale.
Ces messieurs examinèrent le cours du Nil. Après
leurs études, ils furent amenés à penser qu'il ne
conviendrait pas de se servir de l'eau du Nil pour
alimenter le canal maritime. L'examen des lieux les
conduisit à penser, comme les auteurs de l'avant-
projet, qu'il n'y avait qu'une seule communication
possible pour la grande navigation, en creusant
simplement la terre d'une mer à l'autre, sans aucun
autre travail que celui de creuser.
Certainement, le plus petit chemin de fer de France
présente plus de difficultés d'art que le canal de Suez.
C'est une œuvre facile comme travail technique.
Maintenant, il y avait la difficulté de réunir un
grand nombre d'hommes dans le désert, de les nour-
rir et de les entretenir, et vous le comprendrez lors-
que je vous dirai que dans mon premier voyage
j'avais été obligé d'emmener pour quatre personnes
quarante chameaux, c'est-à-dire une caravane com-
plète, pour vivre seulement pendant un mois. La
grande difficulté était de faire vivre dans le désert
vingt-cinq à trente mille travailleurs. Maintenant que
ce problème est résolu, nous pouvons distribuer tout
notre travail par fractions à des entrepreneurs spé-
ciaux, qui viennent nous apporter le concours de leur
industrie, de leurs capitaux individuels et de leurs
efforts. C'est ainsi que, par les contrats qui s'exé-
cutent en ce moment, nous avons la confiance de
pouvoir ouvrir le canal des deux mers à la grande
navigation dans quatre ans.
La commission scientifique remit au vice-roi un
rapport favorable, le 1er janvier 1856. Elle affirmait
que l'entreprise était exécutable, et que la dépense
n'excéderait pas 200 millions.
Le vice-roi m'engagea à me rendre de nouveau en
Europe, et surtout à voir l'effet que produirait en
Angleterre le rapport dans lequel figuraient des in-
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