Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 février 1864 15 février 1864
Description : 1864/02/15 (A9,N184). 1864/02/15 (A9,N184).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033153
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
lp2 L'ISTHME DE SUEZ.
œuvres de l'humanité; ce canal qui réunira l'Occident à
l'Orient et rendra les peuples plus solidaires les uns des
autres. (Très-bien ! très-bien ! Applaudissements.)
Et, à cet égard, je me rappelais la prospérité de l'an-
cienne Egypte. On pourrait presque calculer cette prospé-
rité, selon le plus ou moins d'activité avec laquelle le cou-
rant du commerce européen, entre l'Occident et l'Orient,
emprunte la route de l'Egypte. Le Caire a été une grande
ville qui a tenté l'ambition des Arabes, il y a douze cents
ans, bien avant la découverte du cap de Bonne-Espérance,
et, depuis quatre cents ans, depuis la découverte de ce cap,
l'Egypte a baissé, parce que le commerce a pris le che-
min de ce grand détour que vous voulez lui épargner à
l'avenir. L'intérêt de l'Egypte, la prospérité du commerce
du monde consiste à reprendre la route de l'Egypte. Tant
qu'il y a passé, l'Egypte a été prospère; quand il s'en est
détourné, elle est tombée.
J'avais donc raison de dire que votre œuvre est non-seu-
lement une œuvre française, mais une œuvre humani-
taire accomplie par le génie français. (Applaudissements.)
C'est rester dans le vrai et ne rien exagérer.
A présent, messieurs, permettez-moi d'entrer dans l'his-
torique de votre affaire.
Vous avez passé des contrats avec Saïd-Pacha, prince spi-
rituel, un peu enthousiaste, très-irrésolu, sachant peu,
mais confiant et laissant faire quelquefois un homme qui
s'y entendait, mon ami M. de Lesseps. Saïd meurt ; Is-
maïl monte sur le trône. En général, les successeurs aiment
peu à faire ce que faisaient leurs prédécesseurs : c'est l'his-
toire du monde, ce n'est pas une critique contre lsmaïl-
Pacha.
Je me plais à le dire ici : S. A. Ismaïl-Pacha s'est très-
bien conduit. C'est un prince instruit, capable, ordonné,
plus régulier et plus sage que les Orientaux en général,
et qui a été élevé à Paris. Il a commencé par régler ses
dettes avec la Compagnie. Cela est quelque chose, car il de-
vait de 78 à 80 millions. Ses dettes réglées, il a regardé
les travaux du canal, il les a encouragés, développés.
Pourquoi faut-il qu'à côté de ces éloges que je me plais
à lui donner, tout d'un coup sa conduite ait changé?
Pourquoi? Je vais le dire; j'entrerai dans tous les détails,
et je prononcerai les noms propres quand ce sera néces-
saire, parce que je n'ai rien à cacher. (Mouvements de cu-
riosité.)
Un de ses secrétaires, un homme capable, je mets un
certain amour-propre à dire qu'il est capable, car nous
avons été élevés ensemble pendant deux années ; j'ai été
très-étonné de retrouver sur les bords du Nil un de mes
condisciples avec lequel j'avais travaillé et joué quand
j'étais en exil en Suisse : il s'agit de Nubar-Pacha.
Nubar et moi, nous avons été élevés dans la même pen-
sion près de Genève. Il est devenu pacha, l'ami du vice-
roi, et moi, je suis devenu autre chose que vous savez
(Sourires), et nous nous sommes retrouvés, fort étonnés l'un
et l'autre de nous rencontrer sur les bords du Nil.
Le vice-roi, changeant de conduite, envoie Nubar à Cons-
tantinople. Je crois que je pourrais vous éclairer sur sa
mission à Constantinople; je crois même que je pourrais
vous donner beaucoup de détails. Mais je me suis imposé le
devoir de ne parler que des affaires de l'isthme, des af-
faires qui peuvent vous intéresser directement.
Le vice-roi a eu une idée que je ne vous dirai pas, idée
louable et fort honorable que je ne blâme pas et qu'il a
voulu faire triompher à Constantinople. Il a trouvé un
homme intelligént pour exposer ses idées, et il l'a envoyé
à Constantinople.
Une fois là, Nubar a vu que pour obtenir quelque chose
des Turcs, c'était difficile toujours, mais qu'il fallait avant
tout beaucoup promettre, quelquefois donner, surtout pro-
mettre. Il n'avait pas grand'chose à donner; il pouvait
beaucoup promettre; il avait l'isthme de Suez dans son
sac ; il promit l'isthme de Suez. (Rires et applaudisse-
ments.)
Il a dit aux Turcs : Il y a quelque chose que je désire
beaucoup. On lui a répondu , Il y a quelque chose que
nous désirons beaucoup aussi, c'est l'isthme de Suez. Ce
diable d'isthme nous embarrasse tous; donnez-nous-le, et
nous vous donnerons ce que vous désirez. Mais il faut se
montrer méchant pour l'isthme, et on s'est entendu pour
agir contie votre Compagnie et contre les intérêts français.
Alors, avec cette finesse que je reconnais chez les Orient
taux, ils ont bien vite apprécié la situation, et ils se sont
dit : Non, la Porte n'est pas assez forte pour vaincre l'is-
thme; l'Angleterre n'est pas assez forte pour vaincre
l'isthme. (Non! non! — Bravos prolongés.)
Que faut-il faire? Ah! ils se souviennent alors de ce vieil
adage, qu'ils ont trouvé dans la politique africaine, dans
les antécédents du grand homme de l'Afrique : On ne
peut vaincre Rome que dans Borne. Ils se sont dit : On ne
peut vaincre la France qu'en France, allons à Paris. (Ap-
plaudissements.)
C'est un hommage que Nubar a rendu à la puissance
de notre pays, à l'opinion publique française. Il a com-
pris que ce n'était pas de Constantinople, que ce n'était
pas d'autre part que l'on pouvait avoir de l'influence sur
l'opinion publique française. Il est venu ici, que faire?
Essayer de mettre le désordre parmi nous, et c'est ici que
nous le combattons. (Très-bien ! très-bien!)
Quelles ont été, messieurs, ses lettres de recommanda-
tion ?
Ai-jè besoin de le dire? Ses lettres de recommandation
ont été des lettres de crédit sur des banquiers anglais.
(Bravo! bravo!) Son argent de poche, de quoi se composait-
il? De livres sterling et non de napoléons d'or. (Rires et
applaudissements. )
Il arrive ici, et mettant en œuvre cette politique orientale
souvent employée, et malheureusement trop souvent habi-
tuée à réussir, il cherche, il sonde, il espère triompher par
des moyens que je ne qualifie pas. Je ne soulève pas cer-
œuvres de l'humanité; ce canal qui réunira l'Occident à
l'Orient et rendra les peuples plus solidaires les uns des
autres. (Très-bien ! très-bien ! Applaudissements.)
Et, à cet égard, je me rappelais la prospérité de l'an-
cienne Egypte. On pourrait presque calculer cette prospé-
rité, selon le plus ou moins d'activité avec laquelle le cou-
rant du commerce européen, entre l'Occident et l'Orient,
emprunte la route de l'Egypte. Le Caire a été une grande
ville qui a tenté l'ambition des Arabes, il y a douze cents
ans, bien avant la découverte du cap de Bonne-Espérance,
et, depuis quatre cents ans, depuis la découverte de ce cap,
l'Egypte a baissé, parce que le commerce a pris le che-
min de ce grand détour que vous voulez lui épargner à
l'avenir. L'intérêt de l'Egypte, la prospérité du commerce
du monde consiste à reprendre la route de l'Egypte. Tant
qu'il y a passé, l'Egypte a été prospère; quand il s'en est
détourné, elle est tombée.
J'avais donc raison de dire que votre œuvre est non-seu-
lement une œuvre française, mais une œuvre humani-
taire accomplie par le génie français. (Applaudissements.)
C'est rester dans le vrai et ne rien exagérer.
A présent, messieurs, permettez-moi d'entrer dans l'his-
torique de votre affaire.
Vous avez passé des contrats avec Saïd-Pacha, prince spi-
rituel, un peu enthousiaste, très-irrésolu, sachant peu,
mais confiant et laissant faire quelquefois un homme qui
s'y entendait, mon ami M. de Lesseps. Saïd meurt ; Is-
maïl monte sur le trône. En général, les successeurs aiment
peu à faire ce que faisaient leurs prédécesseurs : c'est l'his-
toire du monde, ce n'est pas une critique contre lsmaïl-
Pacha.
Je me plais à le dire ici : S. A. Ismaïl-Pacha s'est très-
bien conduit. C'est un prince instruit, capable, ordonné,
plus régulier et plus sage que les Orientaux en général,
et qui a été élevé à Paris. Il a commencé par régler ses
dettes avec la Compagnie. Cela est quelque chose, car il de-
vait de 78 à 80 millions. Ses dettes réglées, il a regardé
les travaux du canal, il les a encouragés, développés.
Pourquoi faut-il qu'à côté de ces éloges que je me plais
à lui donner, tout d'un coup sa conduite ait changé?
Pourquoi? Je vais le dire; j'entrerai dans tous les détails,
et je prononcerai les noms propres quand ce sera néces-
saire, parce que je n'ai rien à cacher. (Mouvements de cu-
riosité.)
Un de ses secrétaires, un homme capable, je mets un
certain amour-propre à dire qu'il est capable, car nous
avons été élevés ensemble pendant deux années ; j'ai été
très-étonné de retrouver sur les bords du Nil un de mes
condisciples avec lequel j'avais travaillé et joué quand
j'étais en exil en Suisse : il s'agit de Nubar-Pacha.
Nubar et moi, nous avons été élevés dans la même pen-
sion près de Genève. Il est devenu pacha, l'ami du vice-
roi, et moi, je suis devenu autre chose que vous savez
(Sourires), et nous nous sommes retrouvés, fort étonnés l'un
et l'autre de nous rencontrer sur les bords du Nil.
Le vice-roi, changeant de conduite, envoie Nubar à Cons-
tantinople. Je crois que je pourrais vous éclairer sur sa
mission à Constantinople; je crois même que je pourrais
vous donner beaucoup de détails. Mais je me suis imposé le
devoir de ne parler que des affaires de l'isthme, des af-
faires qui peuvent vous intéresser directement.
Le vice-roi a eu une idée que je ne vous dirai pas, idée
louable et fort honorable que je ne blâme pas et qu'il a
voulu faire triompher à Constantinople. Il a trouvé un
homme intelligént pour exposer ses idées, et il l'a envoyé
à Constantinople.
Une fois là, Nubar a vu que pour obtenir quelque chose
des Turcs, c'était difficile toujours, mais qu'il fallait avant
tout beaucoup promettre, quelquefois donner, surtout pro-
mettre. Il n'avait pas grand'chose à donner; il pouvait
beaucoup promettre; il avait l'isthme de Suez dans son
sac ; il promit l'isthme de Suez. (Rires et applaudisse-
ments.)
Il a dit aux Turcs : Il y a quelque chose que je désire
beaucoup. On lui a répondu , Il y a quelque chose que
nous désirons beaucoup aussi, c'est l'isthme de Suez. Ce
diable d'isthme nous embarrasse tous; donnez-nous-le, et
nous vous donnerons ce que vous désirez. Mais il faut se
montrer méchant pour l'isthme, et on s'est entendu pour
agir contie votre Compagnie et contre les intérêts français.
Alors, avec cette finesse que je reconnais chez les Orient
taux, ils ont bien vite apprécié la situation, et ils se sont
dit : Non, la Porte n'est pas assez forte pour vaincre l'is-
thme; l'Angleterre n'est pas assez forte pour vaincre
l'isthme. (Non! non! — Bravos prolongés.)
Que faut-il faire? Ah! ils se souviennent alors de ce vieil
adage, qu'ils ont trouvé dans la politique africaine, dans
les antécédents du grand homme de l'Afrique : On ne
peut vaincre Rome que dans Borne. Ils se sont dit : On ne
peut vaincre la France qu'en France, allons à Paris. (Ap-
plaudissements.)
C'est un hommage que Nubar a rendu à la puissance
de notre pays, à l'opinion publique française. Il a com-
pris que ce n'était pas de Constantinople, que ce n'était
pas d'autre part que l'on pouvait avoir de l'influence sur
l'opinion publique française. Il est venu ici, que faire?
Essayer de mettre le désordre parmi nous, et c'est ici que
nous le combattons. (Très-bien ! très-bien!)
Quelles ont été, messieurs, ses lettres de recommanda-
tion ?
Ai-jè besoin de le dire? Ses lettres de recommandation
ont été des lettres de crédit sur des banquiers anglais.
(Bravo! bravo!) Son argent de poche, de quoi se composait-
il? De livres sterling et non de napoléons d'or. (Rires et
applaudissements. )
Il arrive ici, et mettant en œuvre cette politique orientale
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tuée à réussir, il cherche, il sonde, il espère triompher par
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