Presse et revues
32 pages
Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 février 1864 01 février 1864
Description : 1864/02/01 (A9,N183). 1864/02/01 (A9,N183).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203314p
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MEHS. 87
La réunion était nombreuse et brillante. Elle em-
pruntait un intérêt particulier à des circonstances
récentes auxquelles était due la présence en France
de Ferdinand de Lesseps, que nous avions mise à
profit en invitant notre camarade à présider le ban-
quet annuel.
Le jour même où nous nous adressions à lui, Fer.
dinand de Lesseps, le hardi pionnier de la civilisa-
tion française, se voyait en butte à d'odieuses atta-
ques dans son propre pays, alors qu'à huit cents
lieues delà, le musulman de Suez, en buvant l'eau
du Nil que le génie persévérant de ce Franc d'Oc-
cident avait portée jusqu'à lui, le recommandait dans
ses prières à toutes les grâces du prophète.
C'est avec une attention sympathique, accrue encore
par les préoccupations du moment, que Ferdinand
de Lesseps a été écouté, lorsqu'au dessert il a pro-
noncé l'allocution que nous reproduisons :
« Mes chers camarades,
» Je succède dans la présidence de ce banquet à
l'un de nos écrivains les plus élégants et les plus
distingués. Dire son nom, c'est rappeler surtout des
succès mérités et obtenus sur notre première scène,
où M. Léon Laya exprime avec tant de bonheur des
sentiments nobles et élevés dont on est d'autant plus
touché qu'ils viennent naturellement de son cœur
autant que de son esprit.
» Je n'ai point de pareils titres à vos préférences,
et si je cherche à m'expliquer l'honneur que vous
m'avez fait, je dois y voir surtout un nouveau té-
moignage de la fraternité qui nous urit dans les
diverses conditions de la vie où le sort nous a placés.
» Cet honneur, je le dois, j'en suis convaincu,
principalement à mes efforts pour contribuer à la
fusion, heureusement accomplie, entre les anciens
et les nouveaux élèves du lycée Napoléon et du col-
lége Henri IV.
» Me sera-t-il permis de croire, en outre, que le
canal de Suez n'est pas étranger à votre choix :
n'avez-vous pas voulu donner une marque de vos
sympathies pour cette œuvre de civilisation et de
progrès qui rentre si naturellement dans la mission
providentielle de la France?
» Je ne me ferai donc peut-être pas illusion en es.
pérant vous intéresser par l'exposé très-rapide et très-
court des résultats que nous avons obtenus.
» Il y a quatre ans, nous avons pris possession
dans l'isthme des terres que nous a concédées le pré-
cédent vice-roi d'Egypte pour la construction d'un
canal allant de la Méditerranée à la mer Rouge.
» Le but de cette entreprise est d'abréger de trois
mille lieues la route des navires entre l'Europe e
les mers de l'Inde, d'ouvrir des mers lointaines aux
pavillons de toutes les marines commerciales, et de
répandre sur l'Europe entière le bénéfice des échan-
ges avec l'Asie et l'Afrique orientale, aujourd'hui
difficilement accessibles aux petits armements.
» Nos premiers soins ont été consacrés presque ex-
clusivement à préparer pour la population d'ingé-.
nieurs, d'employés, d'ouvriers, des abris et des
moyens de subsistance. Ce n'était pas chose aisée.
Devant nous, autour de nous, il n'y avait ni routes,
ni eau, ni population : rien que le sable du désert.
» L'épreuve a été rude. Le courage de nos agents,
de nos ouvriers et de leurs chefs, a été plus grand
encore.
» C'est avec un véritable orgueil que je signale
ici le dévouement et l'énergie de tous ceux de mes
collaborateurs que j'ai placés dans l'isthme, à l'ori-
gine, pour dompter le désert : ils ont supporté les
privations, la solitude et tous les inconvénients at-
tachés à leur position, avec cet entrain, cette gaieté
d'esprit et cette chaleur de cœur qui distinguent no-
tre nation entre toutes.
» Est-ce par un naturel retour des choses d'ici-bas
qu'ils ont été depuis lors l'objet de beaucoup d'atta-
ques? Je ne puis dire qu'une chose, c'est que de tels
hommes doivent exciter naturellement la jalousie de
ceux qui sont jaloux. Leur œuvre est au-dessus des
efforts désespérés qu'on a pu faire pour l'entraver.
Ces attaques ne sont qu'une ombre au tableau.
» En effet, je suis heureux de vous annoncer que
la communication entre les deux mers est dès ce
moment établie : le canal maritime est ouvert, à
partir de la Méditerranée, sur une étendue de 75 ki-
lomètres. Vers le milieu de l'isthme, notre canal
d'eau douce, dérivé du Nil, s'embranche sur le canal
maritime et aboutit à Suez, formant ainsi une ligne
de navigation continue entre les mers d'Europe et
les mers d'Asie.
» Ce canal d'eau douce est à lui seul un immense
bienfait pour l'Egypte. La ville de Suez prend cha-
que jour une plus grande importance. Suez, qui est
le point de départ et d'arrivée des paquebots fran-
çais et anglais de l'Indo-Chine, est restée jusqu'à ce
jour entièrement privée d'eau et de verdure, dépen-
dant pour l'alimentation de ses habitants des arri-
vages de l'eau du Nil apportée par le chemin de
fer.
1) Nous lui donnons gratuitement un fleuve. Aussi
ne doit-on pas s'étonner 'que la population euro-
péenne ou indigène ait envoyé en France les rerner-
ciments et les félicitations attestés par le Moniteur.
» Le problème est donc résolu. Les deux mers
sont réunies. Une voie navigable, qu'on avait trai-
tée de pure chimère dans le parlement voisin, est
ouverte à travers l'isthme de Suez. Il ne nous reste
La réunion était nombreuse et brillante. Elle em-
pruntait un intérêt particulier à des circonstances
récentes auxquelles était due la présence en France
de Ferdinand de Lesseps, que nous avions mise à
profit en invitant notre camarade à présider le ban-
quet annuel.
Le jour même où nous nous adressions à lui, Fer.
dinand de Lesseps, le hardi pionnier de la civilisa-
tion française, se voyait en butte à d'odieuses atta-
ques dans son propre pays, alors qu'à huit cents
lieues delà, le musulman de Suez, en buvant l'eau
du Nil que le génie persévérant de ce Franc d'Oc-
cident avait portée jusqu'à lui, le recommandait dans
ses prières à toutes les grâces du prophète.
C'est avec une attention sympathique, accrue encore
par les préoccupations du moment, que Ferdinand
de Lesseps a été écouté, lorsqu'au dessert il a pro-
noncé l'allocution que nous reproduisons :
« Mes chers camarades,
» Je succède dans la présidence de ce banquet à
l'un de nos écrivains les plus élégants et les plus
distingués. Dire son nom, c'est rappeler surtout des
succès mérités et obtenus sur notre première scène,
où M. Léon Laya exprime avec tant de bonheur des
sentiments nobles et élevés dont on est d'autant plus
touché qu'ils viennent naturellement de son cœur
autant que de son esprit.
» Je n'ai point de pareils titres à vos préférences,
et si je cherche à m'expliquer l'honneur que vous
m'avez fait, je dois y voir surtout un nouveau té-
moignage de la fraternité qui nous urit dans les
diverses conditions de la vie où le sort nous a placés.
» Cet honneur, je le dois, j'en suis convaincu,
principalement à mes efforts pour contribuer à la
fusion, heureusement accomplie, entre les anciens
et les nouveaux élèves du lycée Napoléon et du col-
lége Henri IV.
» Me sera-t-il permis de croire, en outre, que le
canal de Suez n'est pas étranger à votre choix :
n'avez-vous pas voulu donner une marque de vos
sympathies pour cette œuvre de civilisation et de
progrès qui rentre si naturellement dans la mission
providentielle de la France?
» Je ne me ferai donc peut-être pas illusion en es.
pérant vous intéresser par l'exposé très-rapide et très-
court des résultats que nous avons obtenus.
» Il y a quatre ans, nous avons pris possession
dans l'isthme des terres que nous a concédées le pré-
cédent vice-roi d'Egypte pour la construction d'un
canal allant de la Méditerranée à la mer Rouge.
» Le but de cette entreprise est d'abréger de trois
mille lieues la route des navires entre l'Europe e
les mers de l'Inde, d'ouvrir des mers lointaines aux
pavillons de toutes les marines commerciales, et de
répandre sur l'Europe entière le bénéfice des échan-
ges avec l'Asie et l'Afrique orientale, aujourd'hui
difficilement accessibles aux petits armements.
» Nos premiers soins ont été consacrés presque ex-
clusivement à préparer pour la population d'ingé-.
nieurs, d'employés, d'ouvriers, des abris et des
moyens de subsistance. Ce n'était pas chose aisée.
Devant nous, autour de nous, il n'y avait ni routes,
ni eau, ni population : rien que le sable du désert.
» L'épreuve a été rude. Le courage de nos agents,
de nos ouvriers et de leurs chefs, a été plus grand
encore.
» C'est avec un véritable orgueil que je signale
ici le dévouement et l'énergie de tous ceux de mes
collaborateurs que j'ai placés dans l'isthme, à l'ori-
gine, pour dompter le désert : ils ont supporté les
privations, la solitude et tous les inconvénients at-
tachés à leur position, avec cet entrain, cette gaieté
d'esprit et cette chaleur de cœur qui distinguent no-
tre nation entre toutes.
» Est-ce par un naturel retour des choses d'ici-bas
qu'ils ont été depuis lors l'objet de beaucoup d'atta-
ques? Je ne puis dire qu'une chose, c'est que de tels
hommes doivent exciter naturellement la jalousie de
ceux qui sont jaloux. Leur œuvre est au-dessus des
efforts désespérés qu'on a pu faire pour l'entraver.
Ces attaques ne sont qu'une ombre au tableau.
» En effet, je suis heureux de vous annoncer que
la communication entre les deux mers est dès ce
moment établie : le canal maritime est ouvert, à
partir de la Méditerranée, sur une étendue de 75 ki-
lomètres. Vers le milieu de l'isthme, notre canal
d'eau douce, dérivé du Nil, s'embranche sur le canal
maritime et aboutit à Suez, formant ainsi une ligne
de navigation continue entre les mers d'Europe et
les mers d'Asie.
» Ce canal d'eau douce est à lui seul un immense
bienfait pour l'Egypte. La ville de Suez prend cha-
que jour une plus grande importance. Suez, qui est
le point de départ et d'arrivée des paquebots fran-
çais et anglais de l'Indo-Chine, est restée jusqu'à ce
jour entièrement privée d'eau et de verdure, dépen-
dant pour l'alimentation de ses habitants des arri-
vages de l'eau du Nil apportée par le chemin de
fer.
1) Nous lui donnons gratuitement un fleuve. Aussi
ne doit-on pas s'étonner 'que la population euro-
péenne ou indigène ait envoyé en France les rerner-
ciments et les félicitations attestés par le Moniteur.
» Le problème est donc résolu. Les deux mers
sont réunies. Une voie navigable, qu'on avait trai-
tée de pure chimère dans le parlement voisin, est
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