Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-09-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 septembre 1862 15 septembre 1862
Description : 1862/09/15 (A7,N150). 1862/09/15 (A7,N150).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033049
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 285
la vie que leur a fait le canal d'eau douce, et culti-
vant avec fruit les quelques feddans de terre qu'ils
appellent leur propriété. De temps à autre, des ponts-
levis nécessités pour la communication d'une rive à
l'autre. Enfin, la belle et riche vallée de l'Ouady. Je
ne sais vraiment comment vous exprimer, Monsieur,
tout ce que j'ai ressenti à l'aspect de ces contrées
verdoyantes si riches en souvenirs historiques, et aux-
quelles il ne manquait, pour devenir encore plus fer-
tiles, qu'un peu d'eau douce. Dans cette partie, le
canal atteint jusqu'à une largeur de 25 mètres ; les
berges solides et bien faites éloignent toute espèce de
crainte; de chaque côté, des roseaux et des joncs,
comme sur nos fleuves et rivières de France. Bien
souvent je me suis demandé si réellement ce canal
avait été creusé par la main des hommes, et si je ne
naviguais pas plutôt sur une de ces rivières comme
nous en connaissons tous, et qui traversent nos su-
perbes et riches campagnes de la Touraine. Ajoutez
à cela la ligne télégraphique côtoyant le canal d'eau
douce dans une certaine étendue, et vous avouerez
qu'il y a de quoi être émerveillé ; l'illusion pour moi
était complète : ce canal, je dirai mieux, cette ri-
vière, ne me conduisait pas au centre d'un désert,
mais bien dans quelques riches campagnes qu'elle
arrosait en passant.
» Sur le parcours du canal, en arrivant à Timsah,
je vis environ quinze cents hommes occupés à re-
hausser les berges, car nous sommes en plein désert,
et dans ce moment, vu la crue du Nil, les eaux du
canal d'eau douce ont une profondeur de 2 à 201,20.
Dans certains endroits même, il a fallu faire des sai-
gnées et laisser écouler l'eau pour éviter les débor-
dements. A 3 heures, j'étais à Timsah, d'où je me
rendis au chalet que l'entreprise fait édifier pour le
vice-roi Mohammed-Saïd, notre coactionnaire, l'âme
du canal.
» J'ai vu, en passant, les bâtiments que l'on cons-
truit dans ce moment pour l'installation prochaine
des magasins et de l'administration actuellement à
Damiette, aujourd'hui trop éloignés du centre des
travaux. Conduit par l'agent de la Compagnie,
M. Audibert, que je ne saurais trop remercier pour
la bienveillance avec laquelle il m'a reçu, m'accom-
pagnant partout et me donnant tous les renseigne-
ments que je pouvais désirer, je fis une visite au
chalet dont j'ai parlé plus haut : c'est un joli pavil-
lon, moitié européen, moitié turc, et construit avec
un goût exquis. De la plate-forme où nous mon-
tâmes, on découvre un panorama ravissant : à droite,
le canal d'eau douce, sillonné par de nombreuses
barques, serpentant au milieu du désert et se perdant
à l'entrée des rives verdoyantes de la vallée de
l'Ouady ; en face, le lac Timsah, l'immense lac
Timsah, destiné à devenir le port intérieur de
l'isthme, ce qui, soit dit ici, ne nécessitera que fort
peu de travail, le niveau du lac étant au-dessous de
celui de la mer; plus loin, dans la même direction,
l'Attaka, près de Suez, se découpant par un soleil
couchant sur l'azur du ciel ; à gauche, les travaux
gigantesques du seuil d'El-Guisr; de chaque côté,
des caravanes de chameaux animant le paysage,
venant à Timsah chercher l'eau nécessaire à ces
hardis travailleurs, qui, je puis le dire, après notre
illustre président, sont les « pionniers de la civilisa-
tion. » Du chalet je me rendis directement sur les
travaux en remontant le canal maritime. En appro-
chant du chantier n° 6, le plus proche de Timsah,
j'entendais un bourdonnement qui augmentait à
mesure que nous avancions. Je pensais bien que ce
bruit était causé par les travailleurs, mais j'étais
loin de m'attendre au spectacle que j'allais découvrir.
» La tranchée nous était cachée par une dune qui,
une fois franchie, nous laissa découvrir les travaux
à. perte de vue : de chaque côté du canal, des milliers
d'hommes travaillant en chantant, montant gaiement
peu ortant leurs couffins pleins de terre, descendant
la berge un peu rapide, puisque l'eau, je l'ai dit,
coule dans cette partie du chantier no 6, et que le
seuil est élevé de 19 mètres au-dessus du niveau de la
mer, descendant, dis-je, avec une rapidité un peu
forcée. Souvent l'un d'eux perd pied, roule dans la
tranchée, mais pas bien loin, car le flot qui monte
est là pour le retenir ; puis, de rire et de recom-
mencer à descendre pour remonter encore. Il y avait
quinze mille hommes environ sur ce chantier ; on
aurait dit à distance autant de fourmis entrant dans
leur trou, et en sortant aussitôt. Les fellahs qui sont
au fond de la tranchée creusent et remplissent 1er.
couffins que d'autres viennent prendre et portent sur
la berge. Les cheiks de chaque village sont là sur-
veillant leurs travailleurs et travaillant même avec
eux. J'étais étonné de la facilité avec laquelle les
Arabes se servent de la pioche française; on dirait
qu'ils y sont habitués depuis longtemps. La berge
du côté de l'Asie est terminée et ne devra plus être
touchée : aussi maintenant la partie des déblais qui
doit former la berge du côté de l'Afrique est-elle
portée à l'extrémité de la ligne du canal de ce côté,
de manière que les terres ne soient pas remuées
deux fois. J'ai visité en détail cette berge, terminée
ou à peu près ; j'ai examiné attentivement la partie
déjà baignée par l'eau, et j'ai la conviction, si j'osais
je dirais la certitude, que non-seulement les berges
n'auront rien à craindre du contact des eaux, mais
qu'au contraire elles seront fortifiées par ce mémo
contact.
» Je me dirigeai vers El-Guisr en suivant la
tranchée. Les Arabes avaient terminé leur journée.
et se rendaient de leur côté, soit au village arabe
la vie que leur a fait le canal d'eau douce, et culti-
vant avec fruit les quelques feddans de terre qu'ils
appellent leur propriété. De temps à autre, des ponts-
levis nécessités pour la communication d'une rive à
l'autre. Enfin, la belle et riche vallée de l'Ouady. Je
ne sais vraiment comment vous exprimer, Monsieur,
tout ce que j'ai ressenti à l'aspect de ces contrées
verdoyantes si riches en souvenirs historiques, et aux-
quelles il ne manquait, pour devenir encore plus fer-
tiles, qu'un peu d'eau douce. Dans cette partie, le
canal atteint jusqu'à une largeur de 25 mètres ; les
berges solides et bien faites éloignent toute espèce de
crainte; de chaque côté, des roseaux et des joncs,
comme sur nos fleuves et rivières de France. Bien
souvent je me suis demandé si réellement ce canal
avait été creusé par la main des hommes, et si je ne
naviguais pas plutôt sur une de ces rivières comme
nous en connaissons tous, et qui traversent nos su-
perbes et riches campagnes de la Touraine. Ajoutez
à cela la ligne télégraphique côtoyant le canal d'eau
douce dans une certaine étendue, et vous avouerez
qu'il y a de quoi être émerveillé ; l'illusion pour moi
était complète : ce canal, je dirai mieux, cette ri-
vière, ne me conduisait pas au centre d'un désert,
mais bien dans quelques riches campagnes qu'elle
arrosait en passant.
» Sur le parcours du canal, en arrivant à Timsah,
je vis environ quinze cents hommes occupés à re-
hausser les berges, car nous sommes en plein désert,
et dans ce moment, vu la crue du Nil, les eaux du
canal d'eau douce ont une profondeur de 2 à 201,20.
Dans certains endroits même, il a fallu faire des sai-
gnées et laisser écouler l'eau pour éviter les débor-
dements. A 3 heures, j'étais à Timsah, d'où je me
rendis au chalet que l'entreprise fait édifier pour le
vice-roi Mohammed-Saïd, notre coactionnaire, l'âme
du canal.
» J'ai vu, en passant, les bâtiments que l'on cons-
truit dans ce moment pour l'installation prochaine
des magasins et de l'administration actuellement à
Damiette, aujourd'hui trop éloignés du centre des
travaux. Conduit par l'agent de la Compagnie,
M. Audibert, que je ne saurais trop remercier pour
la bienveillance avec laquelle il m'a reçu, m'accom-
pagnant partout et me donnant tous les renseigne-
ments que je pouvais désirer, je fis une visite au
chalet dont j'ai parlé plus haut : c'est un joli pavil-
lon, moitié européen, moitié turc, et construit avec
un goût exquis. De la plate-forme où nous mon-
tâmes, on découvre un panorama ravissant : à droite,
le canal d'eau douce, sillonné par de nombreuses
barques, serpentant au milieu du désert et se perdant
à l'entrée des rives verdoyantes de la vallée de
l'Ouady ; en face, le lac Timsah, l'immense lac
Timsah, destiné à devenir le port intérieur de
l'isthme, ce qui, soit dit ici, ne nécessitera que fort
peu de travail, le niveau du lac étant au-dessous de
celui de la mer; plus loin, dans la même direction,
l'Attaka, près de Suez, se découpant par un soleil
couchant sur l'azur du ciel ; à gauche, les travaux
gigantesques du seuil d'El-Guisr; de chaque côté,
des caravanes de chameaux animant le paysage,
venant à Timsah chercher l'eau nécessaire à ces
hardis travailleurs, qui, je puis le dire, après notre
illustre président, sont les « pionniers de la civilisa-
tion. » Du chalet je me rendis directement sur les
travaux en remontant le canal maritime. En appro-
chant du chantier n° 6, le plus proche de Timsah,
j'entendais un bourdonnement qui augmentait à
mesure que nous avancions. Je pensais bien que ce
bruit était causé par les travailleurs, mais j'étais
loin de m'attendre au spectacle que j'allais découvrir.
» La tranchée nous était cachée par une dune qui,
une fois franchie, nous laissa découvrir les travaux
à. perte de vue : de chaque côté du canal, des milliers
d'hommes travaillant en chantant, montant gaiement
peu ortant leurs couffins pleins de terre, descendant
la berge un peu rapide, puisque l'eau, je l'ai dit,
coule dans cette partie du chantier no 6, et que le
seuil est élevé de 19 mètres au-dessus du niveau de la
mer, descendant, dis-je, avec une rapidité un peu
forcée. Souvent l'un d'eux perd pied, roule dans la
tranchée, mais pas bien loin, car le flot qui monte
est là pour le retenir ; puis, de rire et de recom-
mencer à descendre pour remonter encore. Il y avait
quinze mille hommes environ sur ce chantier ; on
aurait dit à distance autant de fourmis entrant dans
leur trou, et en sortant aussitôt. Les fellahs qui sont
au fond de la tranchée creusent et remplissent 1er.
couffins que d'autres viennent prendre et portent sur
la berge. Les cheiks de chaque village sont là sur-
veillant leurs travailleurs et travaillant même avec
eux. J'étais étonné de la facilité avec laquelle les
Arabes se servent de la pioche française; on dirait
qu'ils y sont habitués depuis longtemps. La berge
du côté de l'Asie est terminée et ne devra plus être
touchée : aussi maintenant la partie des déblais qui
doit former la berge du côté de l'Afrique est-elle
portée à l'extrémité de la ligne du canal de ce côté,
de manière que les terres ne soient pas remuées
deux fois. J'ai visité en détail cette berge, terminée
ou à peu près ; j'ai examiné attentivement la partie
déjà baignée par l'eau, et j'ai la conviction, si j'osais
je dirais la certitude, que non-seulement les berges
n'auront rien à craindre du contact des eaux, mais
qu'au contraire elles seront fortifiées par ce mémo
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» Je me dirigeai vers El-Guisr en suivant la
tranchée. Les Arabes avaient terminé leur journée.
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