Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-08-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 août 1862 01 août 1862
Description : 1862/08/01 (A7,N147). 1862/08/01 (A7,N147).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033012
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
944 L'ISTHME DE SUEZ,
ment au bout de vingt ou trente jours, tandis que
jusqu'ici on avait agi d'une façon bien plus. turque,
et c'est précisément ce qui avait fait naître chez les
fellahs la répulsion la plus vive pour tout grand tra-
vail d'utilité publique quel qu'il fût.
» Mais de ce que l'Arabe n'est pas disposé à travail-
ler volontairement parce que cela n'est pas dans sa
manière de voir, où parce qu'il se souvient des bruta-
lités du passé, l'Egypte devra-t-elle renoncer aux
grands travaux de tous genres qui sont devenus au-
jourd'hui indispensables?
» Devrait-elle ne plus creuser de canaux ; ne point
faire de chemins de fer, et par l'absence des voies de
communication laisser se prolonger encore la mort
morale de ses populations ? Et à qui donc ces amélio-
rations profitent-elles davantage actuellement, à qui
profiteront-elles dans l'avenir? N'est-ce point au pays
même? Si donc il n'est pas possible, vu le caractère
apathique des Arabes, de les voir accourir spontané-
ment en foule au travail, n'est-ce pas leur rendre ser-
vice que de les y contraindre? Un enfant a-t-il jamais,
de son plein gré, avalé une médecine ?
» Nous nous croyons aussi humanitaires que pas un,
nous qui habitons l'Egypte, et si nous disons franche-
ment qu'il y a quelque chose de ridicule à parler du
travail forcé des fellahs égyptiens, c'est que nous
l'avons vu ce travail, c'est que nous les connaissons,
ces fellahs, et que vraiment l'envie vous prend d'é-
clater de rire en pensant que les honorables de la
Chambre des communes se sont sérieusement entre-
tenus de ces choses au lendemain d'une civilisation
portée en Chine à grands coups de canon, et avec pil-
lage consenti par un noble Anglais, d'un des plus
beaux palais du monde.
» Au reste, il est une chose que l'on peut certifier,
c'est que de tous les travaux qui sont en cours d'exé-
cution en Egypte, il n'en est pas un auquel l'Arabe ne
préfère celui de l'isthme de Suez. Ceci prouve deux
choses très-importantes: d'abord cela prouve que la
Compagnie a le plus grand soin des travailleurs ; en
second lieu cela prouve que les fellahs travaillent au
percement de l'isthme de Suez selon le même système
que l'on a toujours suivi et que l'on suit encore en
Egypte, et nul n'a le droit de s'immiscer dans une af-
faire de gouvernement intérieur ; ceci a été bien claire-
ment dit à la tribune anglaise.
» Il est bon d'en prendre note I
» Il avait été certifié, on ne sait sur quelle base, que
les ouvriers n'étaient pas payés ou du moins qu'ils n'é-
taient pas payés en argent; M. de Lesseps a répondu
par un démenti formel, et il n'y aurait point à revenir
sur ce fait; mais je me trouve en mesure d'ajouter
quelques éclaircissements qui pourront faire compren-
dre en quoi et comment la religion de l'honorable
lord H. Scott a pu être surprise à ce sujet; je crois
utile de ne point les négliger.
» Les fellahs, aussitôt leur tâche accomplie, sont payés
généralement en livres sterling; mais il arrive sou-
vent (et c'est fort naturel) que la somme qui leur est
due ne peut se solder que par un reste de petite mon-
naie qu'on ne peut leur donner parce que la petite
monnaie est fort rare en Egypte. Pour remédier à cet
inconvénient, on leur donne des petits billets de 10 ou
de 20 paras (1) que tous les bureaux de la Compagnie leur
reprennent contre l'équivalent en argent; ces bureaux
sont si nombreux sur le parcours de l'isthme que l'on
doit considérer comme une grosse erreur ou une
énorme hyperbole les 150 milles de chemin dont il a
été question au parlement anglais.
» Après cette explication si simple et si naturelle,
que reste-t-il de toutes les graves accusations qui ont
été formulées, et qui impliquaient le gouvernement et
la Compagnie dans un complot contre les malheureux
fellahs? Il n'en reste rien, comme il n'est jamais rien
resté non plus de toutes les accusations qu'on a lan-
cées contre cette entreprise, toutes les fois que les ac-
cusateurs ont bien voulu examiner d'eux-mêmes, en se
rendant sur les lieux, ce qu'ils avaient voulu juger de
trop loin; et, disons-le, ils satisfaisaient ainsi et en
même temps au plus ardent désir des hommes qui di-
rigent ce grand travail.
» Entendons - nous, cependant ; il ne faudrait point
croire que tout ait parfaitement marché dès le commen-
cement ; il serait absurde de soutenir une semblable
thèse; il n'est point de grande entreprise sans de
grandes difficultés , et lorsque surtout elle doit s'exé-
cuter dans un pays comme celui-ci. Certes on n'a pas
le droit de s'étonner que, dès le début, on n'ait point
réussi partout ; qu'on ait dû défaire, refaire, changer
modifier, épurer bien des choses. Mais il est un fait
sur lequel il n'y a aucun doute à élever, c'est qu'on
a tout fait pour réparer les erreurs, les vices dès qu'on
les a connus, et aujourd'hui encore les améliorations
dans le système se poursuivent chaque jour dès que
la nécessité s'en fait sentir.
» Il ne faut point l'oublier; la Compagnie a eu long-
temps à lutter contre des difficultés morales d'une
grande importance ; la politique s'est jetée pendant
plusieurs années au travers de ses travaux, et ce n'est
vraiment que depuis quelques mois que le travail
s'exécute franchement. On peut, on doit admirer les
résultats déjà obtenus ! Quatorze à dix-huit mille ou-
vriers (et non pas quarante-six mille., hélasl.) tra-
vaillent au seuil ; ils enlèvent 500,000 mètres cubes par
mois, d'où il résulte que dans quatre mois environ la
mer Méditerranée ira remplir le lac Timsah, et la ri-
gole sera en état d'effectuer le transport du combusti-
ble jusque-là. Dans six mois on a raison de croire
que le canal d'eau douce arrivera à Suez.
» L'importance des travaux accomplis est immense,
et il serait puéril de le nier ; toutefois il ne faudrait pas
croire que ce qui reste à faire ne soit point énorme
aussi; seulement, les hommes qui ont su pousser, à
force d'activité et d'énergie, et malgré mille obstacles,
ce travail au point où il se trouve aujourd'hui, doivent
évidemment renfermer en eux-mêmes une profonde con-
viction de réussir, puisqu'ils n'ont point eu un instant
de doute pendant la lutte et malgré la lutte.
» Cette lettre est déjà bien longue, Monsieur, et je
- (1) 40 paras représentent environ 25 centimes de notre monnaie.
(Note du rédacteur).
ment au bout de vingt ou trente jours, tandis que
jusqu'ici on avait agi d'une façon bien plus. turque,
et c'est précisément ce qui avait fait naître chez les
fellahs la répulsion la plus vive pour tout grand tra-
vail d'utilité publique quel qu'il fût.
» Mais de ce que l'Arabe n'est pas disposé à travail-
ler volontairement parce que cela n'est pas dans sa
manière de voir, où parce qu'il se souvient des bruta-
lités du passé, l'Egypte devra-t-elle renoncer aux
grands travaux de tous genres qui sont devenus au-
jourd'hui indispensables?
» Devrait-elle ne plus creuser de canaux ; ne point
faire de chemins de fer, et par l'absence des voies de
communication laisser se prolonger encore la mort
morale de ses populations ? Et à qui donc ces amélio-
rations profitent-elles davantage actuellement, à qui
profiteront-elles dans l'avenir? N'est-ce point au pays
même? Si donc il n'est pas possible, vu le caractère
apathique des Arabes, de les voir accourir spontané-
ment en foule au travail, n'est-ce pas leur rendre ser-
vice que de les y contraindre? Un enfant a-t-il jamais,
de son plein gré, avalé une médecine ?
» Nous nous croyons aussi humanitaires que pas un,
nous qui habitons l'Egypte, et si nous disons franche-
ment qu'il y a quelque chose de ridicule à parler du
travail forcé des fellahs égyptiens, c'est que nous
l'avons vu ce travail, c'est que nous les connaissons,
ces fellahs, et que vraiment l'envie vous prend d'é-
clater de rire en pensant que les honorables de la
Chambre des communes se sont sérieusement entre-
tenus de ces choses au lendemain d'une civilisation
portée en Chine à grands coups de canon, et avec pil-
lage consenti par un noble Anglais, d'un des plus
beaux palais du monde.
» Au reste, il est une chose que l'on peut certifier,
c'est que de tous les travaux qui sont en cours d'exé-
cution en Egypte, il n'en est pas un auquel l'Arabe ne
préfère celui de l'isthme de Suez. Ceci prouve deux
choses très-importantes: d'abord cela prouve que la
Compagnie a le plus grand soin des travailleurs ; en
second lieu cela prouve que les fellahs travaillent au
percement de l'isthme de Suez selon le même système
que l'on a toujours suivi et que l'on suit encore en
Egypte, et nul n'a le droit de s'immiscer dans une af-
faire de gouvernement intérieur ; ceci a été bien claire-
ment dit à la tribune anglaise.
» Il est bon d'en prendre note I
» Il avait été certifié, on ne sait sur quelle base, que
les ouvriers n'étaient pas payés ou du moins qu'ils n'é-
taient pas payés en argent; M. de Lesseps a répondu
par un démenti formel, et il n'y aurait point à revenir
sur ce fait; mais je me trouve en mesure d'ajouter
quelques éclaircissements qui pourront faire compren-
dre en quoi et comment la religion de l'honorable
lord H. Scott a pu être surprise à ce sujet; je crois
utile de ne point les négliger.
» Les fellahs, aussitôt leur tâche accomplie, sont payés
généralement en livres sterling; mais il arrive sou-
vent (et c'est fort naturel) que la somme qui leur est
due ne peut se solder que par un reste de petite mon-
naie qu'on ne peut leur donner parce que la petite
monnaie est fort rare en Egypte. Pour remédier à cet
inconvénient, on leur donne des petits billets de 10 ou
de 20 paras (1) que tous les bureaux de la Compagnie leur
reprennent contre l'équivalent en argent; ces bureaux
sont si nombreux sur le parcours de l'isthme que l'on
doit considérer comme une grosse erreur ou une
énorme hyperbole les 150 milles de chemin dont il a
été question au parlement anglais.
» Après cette explication si simple et si naturelle,
que reste-t-il de toutes les graves accusations qui ont
été formulées, et qui impliquaient le gouvernement et
la Compagnie dans un complot contre les malheureux
fellahs? Il n'en reste rien, comme il n'est jamais rien
resté non plus de toutes les accusations qu'on a lan-
cées contre cette entreprise, toutes les fois que les ac-
cusateurs ont bien voulu examiner d'eux-mêmes, en se
rendant sur les lieux, ce qu'ils avaient voulu juger de
trop loin; et, disons-le, ils satisfaisaient ainsi et en
même temps au plus ardent désir des hommes qui di-
rigent ce grand travail.
» Entendons - nous, cependant ; il ne faudrait point
croire que tout ait parfaitement marché dès le commen-
cement ; il serait absurde de soutenir une semblable
thèse; il n'est point de grande entreprise sans de
grandes difficultés , et lorsque surtout elle doit s'exé-
cuter dans un pays comme celui-ci. Certes on n'a pas
le droit de s'étonner que, dès le début, on n'ait point
réussi partout ; qu'on ait dû défaire, refaire, changer
modifier, épurer bien des choses. Mais il est un fait
sur lequel il n'y a aucun doute à élever, c'est qu'on
a tout fait pour réparer les erreurs, les vices dès qu'on
les a connus, et aujourd'hui encore les améliorations
dans le système se poursuivent chaque jour dès que
la nécessité s'en fait sentir.
» Il ne faut point l'oublier; la Compagnie a eu long-
temps à lutter contre des difficultés morales d'une
grande importance ; la politique s'est jetée pendant
plusieurs années au travers de ses travaux, et ce n'est
vraiment que depuis quelques mois que le travail
s'exécute franchement. On peut, on doit admirer les
résultats déjà obtenus ! Quatorze à dix-huit mille ou-
vriers (et non pas quarante-six mille., hélasl.) tra-
vaillent au seuil ; ils enlèvent 500,000 mètres cubes par
mois, d'où il résulte que dans quatre mois environ la
mer Méditerranée ira remplir le lac Timsah, et la ri-
gole sera en état d'effectuer le transport du combusti-
ble jusque-là. Dans six mois on a raison de croire
que le canal d'eau douce arrivera à Suez.
» L'importance des travaux accomplis est immense,
et il serait puéril de le nier ; toutefois il ne faudrait pas
croire que ce qui reste à faire ne soit point énorme
aussi; seulement, les hommes qui ont su pousser, à
force d'activité et d'énergie, et malgré mille obstacles,
ce travail au point où il se trouve aujourd'hui, doivent
évidemment renfermer en eux-mêmes une profonde con-
viction de réussir, puisqu'ils n'ont point eu un instant
de doute pendant la lutte et malgré la lutte.
» Cette lettre est déjà bien longue, Monsieur, et je
- (1) 40 paras représentent environ 25 centimes de notre monnaie.
(Note du rédacteur).
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
- Collections numériques similaires Thématique : ingénierie, génie civil Thématique : ingénierie, génie civil /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCthèm02"Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp11" Corpus : ports et travaux maritimes Corpus : ports et travaux maritimes /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp16"
- Auteurs similaires Desplaces Ernest Desplaces Ernest /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Desplaces Ernest" or dc.contributor adj "Desplaces Ernest")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 12/16
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k62033012/f12.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k62033012/f12.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k62033012/f12.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k62033012
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k62033012
Facebook
Twitter