Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-07-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juillet 1862 15 juillet 1862
Description : 1862/07/15 (A7,N146). 1862/07/15 (A7,N146).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203300n
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
226 L'ISTHME DE SUEZ,
endroit, où un coup de vent se dirigeant vers la terre
pouvait nous faire périr.
Grâce à la vapeur et à l'hélice, on peut revenir
avec avantage et avec un système perfectionné, à
l'ancien mode d'un auxiliaire donné à la voile. Aussi,
ma conviction est-elle que dans peu de temps il y
aura bien peu de na\ires qui ne soient munis de cet
auxiliaire. Déjà la marine de guerre de tous les États
a donné l'exemple. — Et cet exemple commence à
être suivi par le commerce.
Le commerce anglais, américain et français, a
depuis quelque temps déjà pris l'initiative de ce
perfectionnement. On va chercher du coton en Amé-
rique et en Égypte avec des bâtiments à hélice. Nous
avons maintenant des bâtiments français à hélice
qui font le cabotage entre Marseille et les côtes de
Syrie et d'Egypte. Dans dix ans il n'y aura pas un
bâtiment qui ne soit mû exclusivement par la va-
peur, ou par la voile et la vapeur combinées. On
profitera du moteur mécanique quand l'action de
la voile sera paralysée. Ainsi tombent les objec-
tions qui portent sur les prétendues difficultés de la
navigation dans la mer Rouge. Cette mer est ma-
gnifique. On n'y éprouve pas de tempêtes et les
nuits y sont parfaitement claires. Cette mer a
500 lieues de long. Elle sera bientôt, comme dans
l'antiquité, sillonnée par les pavillons de toutes les
nations. L'importance de la navigation dans une
mer qui a un développement de côtes de 1,200
lieues, suffirait seule pour justifier le percement de
l'isthme de Suez. Mais que sera-ce lorsqu'elle servira
de trait d'union à un milliard d'hommes formant la
population de notre globe !
Les vents qui régnent sur la mer Rouge, près des
côtes, soufflent tantôt de l'ouest, tantôt de l'est, et
toute l'année on y ressent l'influence des brises du
matin et du soir. C'est justement cette variété des
vents et des courants qui, lorsqu'elle sera bien étu-
diée, bien connue, permettra de régler facilement la
navigation à l'exemple de ce qui se pratique déjà
dans l'Adriatique, où , pour monter et descendre,
on adopte tantôt un côté, tantôt l'autre.
La mer Rouge ne reçoit aucun affluent de riviè-
res. La mer des Indes y entre par le détroit de Bab-
el- Mandeb. Le courant y est continu, et, par compen-
sation , il s'y produit le même phénomène que
dans la Méditerranée au détroit de Gibraltar, où l'on
constate l'existence d'un mouvement sous-marin qui
ramène les eaux vers l'Océan. C'est ce qu'a découvert,
il y a peu d'années, le capitaine américain Maury,
qui a fait une étude spéciale des courants maritimes
et des vents. Il a calculé que la mer Rouge recevant
continuellement les apports de la mer des Indes, de-
vrait, sans l'existence des courants sous-marins, être
solidifiée en mille ans, placée comme elle l'est sous
les topiques et soumise, par conséquent, à une éva-
poration constante qui laisserait des dépôts de sel ;
mais la mer Rouge n'est pas plus salée que les au-
tres mers. Ceci m'amène à vous dire que la diffé-
rence de niveau entre la Méditerranée et l'Océan,
qu'on avait attribuée en partie à des courants qui
déterminaient à Suez une surélévation des eaux ,
n'existe pas. Cette erreur a été une des causes qui
ont empêché les anciens de songer à percer l'isthme
d'une mer à l'autre : ils craignaient l'inondation ce
la basse Egypte. Ils s'étaient donc bornés à établir
leur communication entre le Nil et la mer Rouge.
La même erreur existait pour l'isthme de Corin-
the. Et à ce sujet je vais vous lire un passage des
dialogues de Lucien , où cet auteur rend compte
des efforts de Néron pour percer l'isthme de Co-
rinthe.
« 2. Quant au percement de l'isthme, il n'y avait
pas songé de longue main ; mais la vue du lieu et
de sa position lui inspira l'idée d'une gigantesque
entreprise ; il voulut imiter ce roi qui, pour conduire
les Grecs devant Troie, sépara l'Eubée de la Béotie
par le canal de l'Euripe, qui passe près de Chalcis;
Darius, qui jeta un pont sur le Bosphore, afin de
descendre chez les Scythes; Xerxès, enfin, qui sur-
passa tous les ouvrages précédents par la grandeur
de son œuvre. Il croyait, en outre que cette facilité
nouvelle de communication ferait de la Grèce une
sorte de rendez-vous brillant et de banquet de tous
les autres peuples : car les tyrans, malgré l'ivresse
de leur esprit, aiment cependant à s'entendre cé-
lébrer.
» 3. Néron sortit donc de sa tente, chantant
l'hymne d'Amphitrite et de Neptune, et quelques
couplets en l'honneur de Mélicerte et de Leucothoé.
Le gouverneur de la Grèce lui présenta un hoyau
d'or, et l'empereur se mit en devoir de commencer
la fouille, au milieu des applaudissements et des
chants. Par trois fois il frappa la terre, et recom-
mandant ensuite aux ouvriers la prompte exécution
de l'ouvrage, il rentra dans Corinthe, se persuadant
qu'il avait dépassé tous les travaux d'Hercule. Les
prisonniers furent employés aux travaux pénibles
des parties rocheuses; l'armée, à ceux des terrains
unis et légers.
» 4. Il y avait cinq ou six jours que nous étions,
pour ainsi dire, enchaînés sur l'isthme, lorsqu'un
bruit vague se répandit de Corinthe que Néron avait
changé d'avis. On disait que des géomètres égyp-
tiens, ayant mesuré la hauteur des deux mers, ne
les avaient point trouvées de niveau; ils croyaient
que celle du golfe des Lechéens était plus élevée, et
qu'il y avait à craindre qu'Égine ne fût submergée,
si une mer aussi considérable venait tout à coup s'y
répandre. Ce n'était point assez pour arrêter Néron :
Thalès lui-même, ce philosophe si sage, si versé
endroit, où un coup de vent se dirigeant vers la terre
pouvait nous faire périr.
Grâce à la vapeur et à l'hélice, on peut revenir
avec avantage et avec un système perfectionné, à
l'ancien mode d'un auxiliaire donné à la voile. Aussi,
ma conviction est-elle que dans peu de temps il y
aura bien peu de na\ires qui ne soient munis de cet
auxiliaire. Déjà la marine de guerre de tous les États
a donné l'exemple. — Et cet exemple commence à
être suivi par le commerce.
Le commerce anglais, américain et français, a
depuis quelque temps déjà pris l'initiative de ce
perfectionnement. On va chercher du coton en Amé-
rique et en Égypte avec des bâtiments à hélice. Nous
avons maintenant des bâtiments français à hélice
qui font le cabotage entre Marseille et les côtes de
Syrie et d'Egypte. Dans dix ans il n'y aura pas un
bâtiment qui ne soit mû exclusivement par la va-
peur, ou par la voile et la vapeur combinées. On
profitera du moteur mécanique quand l'action de
la voile sera paralysée. Ainsi tombent les objec-
tions qui portent sur les prétendues difficultés de la
navigation dans la mer Rouge. Cette mer est ma-
gnifique. On n'y éprouve pas de tempêtes et les
nuits y sont parfaitement claires. Cette mer a
500 lieues de long. Elle sera bientôt, comme dans
l'antiquité, sillonnée par les pavillons de toutes les
nations. L'importance de la navigation dans une
mer qui a un développement de côtes de 1,200
lieues, suffirait seule pour justifier le percement de
l'isthme de Suez. Mais que sera-ce lorsqu'elle servira
de trait d'union à un milliard d'hommes formant la
population de notre globe !
Les vents qui régnent sur la mer Rouge, près des
côtes, soufflent tantôt de l'ouest, tantôt de l'est, et
toute l'année on y ressent l'influence des brises du
matin et du soir. C'est justement cette variété des
vents et des courants qui, lorsqu'elle sera bien étu-
diée, bien connue, permettra de régler facilement la
navigation à l'exemple de ce qui se pratique déjà
dans l'Adriatique, où , pour monter et descendre,
on adopte tantôt un côté, tantôt l'autre.
La mer Rouge ne reçoit aucun affluent de riviè-
res. La mer des Indes y entre par le détroit de Bab-
el- Mandeb. Le courant y est continu, et, par compen-
sation , il s'y produit le même phénomène que
dans la Méditerranée au détroit de Gibraltar, où l'on
constate l'existence d'un mouvement sous-marin qui
ramène les eaux vers l'Océan. C'est ce qu'a découvert,
il y a peu d'années, le capitaine américain Maury,
qui a fait une étude spéciale des courants maritimes
et des vents. Il a calculé que la mer Rouge recevant
continuellement les apports de la mer des Indes, de-
vrait, sans l'existence des courants sous-marins, être
solidifiée en mille ans, placée comme elle l'est sous
les topiques et soumise, par conséquent, à une éva-
poration constante qui laisserait des dépôts de sel ;
mais la mer Rouge n'est pas plus salée que les au-
tres mers. Ceci m'amène à vous dire que la diffé-
rence de niveau entre la Méditerranée et l'Océan,
qu'on avait attribuée en partie à des courants qui
déterminaient à Suez une surélévation des eaux ,
n'existe pas. Cette erreur a été une des causes qui
ont empêché les anciens de songer à percer l'isthme
d'une mer à l'autre : ils craignaient l'inondation ce
la basse Egypte. Ils s'étaient donc bornés à établir
leur communication entre le Nil et la mer Rouge.
La même erreur existait pour l'isthme de Corin-
the. Et à ce sujet je vais vous lire un passage des
dialogues de Lucien , où cet auteur rend compte
des efforts de Néron pour percer l'isthme de Co-
rinthe.
« 2. Quant au percement de l'isthme, il n'y avait
pas songé de longue main ; mais la vue du lieu et
de sa position lui inspira l'idée d'une gigantesque
entreprise ; il voulut imiter ce roi qui, pour conduire
les Grecs devant Troie, sépara l'Eubée de la Béotie
par le canal de l'Euripe, qui passe près de Chalcis;
Darius, qui jeta un pont sur le Bosphore, afin de
descendre chez les Scythes; Xerxès, enfin, qui sur-
passa tous les ouvrages précédents par la grandeur
de son œuvre. Il croyait, en outre que cette facilité
nouvelle de communication ferait de la Grèce une
sorte de rendez-vous brillant et de banquet de tous
les autres peuples : car les tyrans, malgré l'ivresse
de leur esprit, aiment cependant à s'entendre cé-
lébrer.
» 3. Néron sortit donc de sa tente, chantant
l'hymne d'Amphitrite et de Neptune, et quelques
couplets en l'honneur de Mélicerte et de Leucothoé.
Le gouverneur de la Grèce lui présenta un hoyau
d'or, et l'empereur se mit en devoir de commencer
la fouille, au milieu des applaudissements et des
chants. Par trois fois il frappa la terre, et recom-
mandant ensuite aux ouvriers la prompte exécution
de l'ouvrage, il rentra dans Corinthe, se persuadant
qu'il avait dépassé tous les travaux d'Hercule. Les
prisonniers furent employés aux travaux pénibles
des parties rocheuses; l'armée, à ceux des terrains
unis et légers.
» 4. Il y avait cinq ou six jours que nous étions,
pour ainsi dire, enchaînés sur l'isthme, lorsqu'un
bruit vague se répandit de Corinthe que Néron avait
changé d'avis. On disait que des géomètres égyp-
tiens, ayant mesuré la hauteur des deux mers, ne
les avaient point trouvées de niveau; ils croyaient
que celle du golfe des Lechéens était plus élevée, et
qu'il y avait à craindre qu'Égine ne fût submergée,
si une mer aussi considérable venait tout à coup s'y
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