Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-06-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juin 1862 15 juin 1862
Description : 1862/06/15 (A7,N144). 1862/06/15 (A7,N144).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032981
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 197
leur dévouement,et dans. léury coù fiance.' La puissance
de l'opinion française ne nous: a'^as'tfâilli un seul jour;
elle n'a fait que grandir et ?se ^fortifier dans les tra-
verses, dans les obstacles* La presse a été au niveau de
l'opinion. Oui, nous sommes une" nation persévérante,
et l'achèvement du percement de l'isthme de Suez res-
tera dans l'histoire comme un des monuments de la per-
sévérance française. (Bravos prolongés.)
Au seuil d'El-Guisr, nous sommes sur le terrain
d'une seconde objection qui nous a été opposée. Après
les sables maritimes on a parlé des sables du dé-
sert. Ces derniers, a-t-on dit, doivent combler notre
canal. Les vents :de nord-ouest, prenant l'isthme en tra-
vers, agissent de deux façons sur ces sables. Ils les dé-
tachent en rasant le sol, les soulèvent à une hauteur
qui ne dépasse pas un mètre et les roulent devant eux
par parcelles. Lorsque ces vents acquièrent la force
de la tempête, ils s'emparent en bas des parties les plus
ténues et les plus légères de la masse soulevée, les
élèvent au haut des airs et les transportent impétueu-
sement vers l'est, à des distances considérables. C'est
ainsi que, loin dans le désert, vers la frontière d'Égypte
et de Syrie, j'ai franchi des élévations de 3 à 400 mètres
de sable, portés là par ces ouragans. Dans ces localités,
l'entretien d'un canal serait au moins fort difficile. C'est
une véritable mer de sable sur une étendue de 25 à
30 lieues. Mais en est-il de même dans l'isthme de
Suez? C'est aux faits constatés à répondre.
La ligne du canal placée à l'ouest du désert syrien
suit sans interruption le thalweg de vallée qui de Port-
Saïd à Suez sépare l'Afrique de l Asie. Sur le par-
cours de cette ligne, de l'une à l'autre mer, à une
distance peu considérable les unes des autres, se trou-
vent dévastes et profondes dépressions formant plus de
moitié de l'étendue de toute la ligne. Ces dépressions
sont, du nord au sud, le lac Menzaleh, le lac Ballah, le
lac Timsah, les lacs Amers. La circonférence du lac
M enzaleh est de 50 lieues; celle du lac Ballah, de 15 ou
20 lieues; celle du lac Timsah, d'un millier d'hectares;
celle des lacs Amers, de 2,"> lieues. Si les sables devaient
produire sur le canal l'effet qu'on nous annonce, ces
bassins qu'il traverse seraient incontestablement com-
blés depuis des siècles. Or on n'y trouve pas un grain
de sable. Il me semble qu'au point de vue général la
question est déjà résolue.
Cependant les 12 kilomètres de terrain, le long du
seuil d'El-Guisr, ne seraient pas exempts de tout in-
convénient de ce genre. Sous le souffle des vents, les
sables soulevés et roulés y donneraient des apports.
Mais le remède est facile et à côté du mal. On a ob-
servé que ces sables voyageurs s'arrêtaient autour de
tous les obstacles, par exemple autour des végé-
taux qu'ils rencontraient, qu'ils s'y accumulaient en
petits monticules qui finissaient par devenir des dunes
assez hautes pour intercepter sur leur passage tous les
effets de ce roulis. C'est ainsi qu'autour des nombreux
végétaux qui les bordent se sont formées les dunes qui
protègent les lacs. Nos ingénieurs, imitant le travail de
la nature, ont élevé dans le parcours du seuil une pa-
lissade formée de pieux dans les intervalles desquels
ils ont planté des tamaris coupés dans le désert. Ces
palissades ne coûtent pas cher, puisque pour 12 kilo-
mètres, nous n'avons pas dépensé plus de 30,000 francs.
Dès à présent les tranchées que nous faisons sont pro-
tégées, et à mesure que nous creuserons, les terres pro-
venant des déblais seront portées contre cette palis-
sade et elles deviendront des dunes artificielles qui
protégeront le creux de notre canal, de même que les
dunes naturelles protègent le creux des bassins. Si l'ob-
jection tirée de ce mouvement des sables pouvait avoir
quelque valeur, je pense l'avoir dissipée d'une manière
qui ne laisse plus de doute. (Oui, oui ! vif assentiment !)
Arrivés à Timsah, nous traversons ce bassin qui de-
viendra le port intérieur de l'isthme, et nous suivons le
tracé entre deux collines, dont l'une s'appelle Sheik-
Ennedec, et l'autre Gibel-Mariam. Encore ici nous re-
trouvons la tradition biblique. Les Arabes prétendent
que c'est sur cette montagne que Marie la Prophétesse,
sœur de Moïse, mécontente de son frère et de l'influence
qu'il laissait à ses femmes, venait implorer Dieu et lui
demander son assistance. C'est au pied de cette der-
nière colline que, dans le principe, nous avions nos
premiers pionniers français, si solides, si intelligents, qui
depuis sept ans ne nous ont pas manqué un seul jour.
Ces hommes, au moment où des émissaires venus on ne
sait d'où cherchaient à soulever les Arabes contre
nous, étaient obligés de ne jamais se séparer de leurs
fusils; ils s'étaient spontanément concentrés sur le point
culminant. Ici le canal traverse un seuil , le Sera-
peum, qui est loin d'exiger autant de travail que le
seuil d'El-Guisr. Il n'y a que 2 millions de mètres cu-
bes à enlever; ce sera l'affaire de deux ou trois mois.
Nous entrons ensuite dans le bassin des lacs Amers,
qui, en certains endroits, sur la ligne du canal, ont une
profondeur de 30 à 40 pieds au-dessous du niveau de
la mer. Comme le canal n'est creusé qu'à 8 mètres, il
n'y aura rien à faire sur ce point. Le bassin des lacs
Amers faisait autrefois partie de la mer Rouge. Les
Arabes racontent que les villes saintes s'étant révoltées,
le sultan, auquel elles obéissaient et qui régnait en
Egypte, ordonna de couper la communication entre ce
bassin et Suez, afin d'empêcher les vivres d'arriver à
la Mecque et à Médine. Cette tradition explique com-
ment le bassin des lacs Amers, qui formait la dernière
lagune de la mer Rouge, est aujourd'hui desséché; le
desséchement s'est opéré lentement. C'est entre les deux
extrémités du lac Timsah et des lacs Amers que Moïse
a dû passer la mer Rouge.
Après le Serapeum, nous n'avons plus qu'un seuil de
deux lieues et demie à trancher pour aboutir à Suez.
Le travail sera facile et simple de ce côté.
Il avait d'abord été question de construire des jetées
dans la rade de Suez. Un de nos ingénieurs, sorti de
l'École polytechnique, chargé des opérations hydrogra-
phiques, a étudié avec un grand soin cette rade de
Suez, et nous a indiqué un perfectionnement considé-
rable du projet primitif. Au lieu de jetées de 1,000 à
1,500 mètres, il nous a conseillé de profiter d'un chenal
naturel bordé par un banc de sable et se prolongeant de-
puis Suez jusqu'au mouillage des bâtiments à l'est de la
côté d'Arabie. Il ne s'agit que d'agrandir ce chenal, et
leur dévouement,et dans. léury coù fiance.' La puissance
de l'opinion française ne nous: a'^as'tfâilli un seul jour;
elle n'a fait que grandir et ?se ^fortifier dans les tra-
verses, dans les obstacles* La presse a été au niveau de
l'opinion. Oui, nous sommes une" nation persévérante,
et l'achèvement du percement de l'isthme de Suez res-
tera dans l'histoire comme un des monuments de la per-
sévérance française. (Bravos prolongés.)
Au seuil d'El-Guisr, nous sommes sur le terrain
d'une seconde objection qui nous a été opposée. Après
les sables maritimes on a parlé des sables du dé-
sert. Ces derniers, a-t-on dit, doivent combler notre
canal. Les vents :de nord-ouest, prenant l'isthme en tra-
vers, agissent de deux façons sur ces sables. Ils les dé-
tachent en rasant le sol, les soulèvent à une hauteur
qui ne dépasse pas un mètre et les roulent devant eux
par parcelles. Lorsque ces vents acquièrent la force
de la tempête, ils s'emparent en bas des parties les plus
ténues et les plus légères de la masse soulevée, les
élèvent au haut des airs et les transportent impétueu-
sement vers l'est, à des distances considérables. C'est
ainsi que, loin dans le désert, vers la frontière d'Égypte
et de Syrie, j'ai franchi des élévations de 3 à 400 mètres
de sable, portés là par ces ouragans. Dans ces localités,
l'entretien d'un canal serait au moins fort difficile. C'est
une véritable mer de sable sur une étendue de 25 à
30 lieues. Mais en est-il de même dans l'isthme de
Suez? C'est aux faits constatés à répondre.
La ligne du canal placée à l'ouest du désert syrien
suit sans interruption le thalweg de vallée qui de Port-
Saïd à Suez sépare l'Afrique de l Asie. Sur le par-
cours de cette ligne, de l'une à l'autre mer, à une
distance peu considérable les unes des autres, se trou-
vent dévastes et profondes dépressions formant plus de
moitié de l'étendue de toute la ligne. Ces dépressions
sont, du nord au sud, le lac Menzaleh, le lac Ballah, le
lac Timsah, les lacs Amers. La circonférence du lac
M enzaleh est de 50 lieues; celle du lac Ballah, de 15 ou
20 lieues; celle du lac Timsah, d'un millier d'hectares;
celle des lacs Amers, de 2,"> lieues. Si les sables devaient
produire sur le canal l'effet qu'on nous annonce, ces
bassins qu'il traverse seraient incontestablement com-
blés depuis des siècles. Or on n'y trouve pas un grain
de sable. Il me semble qu'au point de vue général la
question est déjà résolue.
Cependant les 12 kilomètres de terrain, le long du
seuil d'El-Guisr, ne seraient pas exempts de tout in-
convénient de ce genre. Sous le souffle des vents, les
sables soulevés et roulés y donneraient des apports.
Mais le remède est facile et à côté du mal. On a ob-
servé que ces sables voyageurs s'arrêtaient autour de
tous les obstacles, par exemple autour des végé-
taux qu'ils rencontraient, qu'ils s'y accumulaient en
petits monticules qui finissaient par devenir des dunes
assez hautes pour intercepter sur leur passage tous les
effets de ce roulis. C'est ainsi qu'autour des nombreux
végétaux qui les bordent se sont formées les dunes qui
protègent les lacs. Nos ingénieurs, imitant le travail de
la nature, ont élevé dans le parcours du seuil une pa-
lissade formée de pieux dans les intervalles desquels
ils ont planté des tamaris coupés dans le désert. Ces
palissades ne coûtent pas cher, puisque pour 12 kilo-
mètres, nous n'avons pas dépensé plus de 30,000 francs.
Dès à présent les tranchées que nous faisons sont pro-
tégées, et à mesure que nous creuserons, les terres pro-
venant des déblais seront portées contre cette palis-
sade et elles deviendront des dunes artificielles qui
protégeront le creux de notre canal, de même que les
dunes naturelles protègent le creux des bassins. Si l'ob-
jection tirée de ce mouvement des sables pouvait avoir
quelque valeur, je pense l'avoir dissipée d'une manière
qui ne laisse plus de doute. (Oui, oui ! vif assentiment !)
Arrivés à Timsah, nous traversons ce bassin qui de-
viendra le port intérieur de l'isthme, et nous suivons le
tracé entre deux collines, dont l'une s'appelle Sheik-
Ennedec, et l'autre Gibel-Mariam. Encore ici nous re-
trouvons la tradition biblique. Les Arabes prétendent
que c'est sur cette montagne que Marie la Prophétesse,
sœur de Moïse, mécontente de son frère et de l'influence
qu'il laissait à ses femmes, venait implorer Dieu et lui
demander son assistance. C'est au pied de cette der-
nière colline que, dans le principe, nous avions nos
premiers pionniers français, si solides, si intelligents, qui
depuis sept ans ne nous ont pas manqué un seul jour.
Ces hommes, au moment où des émissaires venus on ne
sait d'où cherchaient à soulever les Arabes contre
nous, étaient obligés de ne jamais se séparer de leurs
fusils; ils s'étaient spontanément concentrés sur le point
culminant. Ici le canal traverse un seuil , le Sera-
peum, qui est loin d'exiger autant de travail que le
seuil d'El-Guisr. Il n'y a que 2 millions de mètres cu-
bes à enlever; ce sera l'affaire de deux ou trois mois.
Nous entrons ensuite dans le bassin des lacs Amers,
qui, en certains endroits, sur la ligne du canal, ont une
profondeur de 30 à 40 pieds au-dessous du niveau de
la mer. Comme le canal n'est creusé qu'à 8 mètres, il
n'y aura rien à faire sur ce point. Le bassin des lacs
Amers faisait autrefois partie de la mer Rouge. Les
Arabes racontent que les villes saintes s'étant révoltées,
le sultan, auquel elles obéissaient et qui régnait en
Egypte, ordonna de couper la communication entre ce
bassin et Suez, afin d'empêcher les vivres d'arriver à
la Mecque et à Médine. Cette tradition explique com-
ment le bassin des lacs Amers, qui formait la dernière
lagune de la mer Rouge, est aujourd'hui desséché; le
desséchement s'est opéré lentement. C'est entre les deux
extrémités du lac Timsah et des lacs Amers que Moïse
a dû passer la mer Rouge.
Après le Serapeum, nous n'avons plus qu'un seuil de
deux lieues et demie à trancher pour aboutir à Suez.
Le travail sera facile et simple de ce côté.
Il avait d'abord été question de construire des jetées
dans la rade de Suez. Un de nos ingénieurs, sorti de
l'École polytechnique, chargé des opérations hydrogra-
phiques, a étudié avec un grand soin cette rade de
Suez, et nous a indiqué un perfectionnement considé-
rable du projet primitif. Au lieu de jetées de 1,000 à
1,500 mètres, il nous a conseillé de profiter d'un chenal
naturel bordé par un banc de sable et se prolongeant de-
puis Suez jusqu'au mouillage des bâtiments à l'est de la
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