Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-05-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 mai 1862 15 mai 1862
Description : 1862/05/15 (A7,N142). 1862/05/15 (A7,N142).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032966
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 163
d'Égypte : d'abord leur adresse, leur habileté à imiter
les produits et les ouvrages d'art; en second lieu, leur
intelligence, leur aptitude pour les sciences. On sait que
l'astronomie a fleuri au Caire sous les califes, comme
jadis à Alexandrie, au temps d'Eratosthène et de Ptolé-
mée, et comme chez les Arabes d'Espagne; il en est de
même des mathématiques et de la médecine ; il en
est de même encore des sciences historiques.
La France, en allant délivrer l'Égypte du joug des
Mamelouks, allait aussi la délivrer d'un autre fléau,
l'ignorance, lui reporter la lumière et la civilisation,
que l'Europe avait reçues jadis de l'Orient. Cette œuvre
avait fatalement été interrompue par les chances de la
guerre et de la politique ; ne pouvait-on pas la repren-
dre et la compléter ? Pourquoi ne pas profiter de l'expé-
rience acquise? pourquoi abandonner le principal but
d'une expédition qui avait coûté tant d'efforts et de sa-
crifices? D'ailleurs, des germes précieux avaient été dé-
posés sur les rives du Nil. Il ne s'agissait que de les
réveiller. L'Institut du Caire, l'armée et son illustre
chef y avaient laissé plus que des souvenirs.
Le représentant de la France, le chevalier Drovetti,
était disposé à agir dans ce fens ; il avait gagné la con-
fiance et l'amitié du prince qui gouvernait l'Égypte. Ce
prince était un homme intelligent, exempt des préjugés
vulgaires de l'islamisme, cherchant à profiter des exem-
ples de l'Europe ; accueillant tous les perfectionnements
pour les arts, l'agriculture, l'armée, la marine ; en un
mot, c'était un mahométan de génie. Le moment était
devenu favorable.
Malgré quelques oppositions, un membre de la Com-
mission des sciences et arts, qui correspondait depuis
longtemps avec le consul général de France, pour les
antiquités et les voyages de découvertes, lui proposa,
dès avant 1812, de soumettre à Mohammed-Aly un plan
pour la civilisation de l'Égypte par l'instruction, c'est-à-
dire en faisant élever en France un certain nombre de
jeunes Égyptiens dans les sciences théoriques et appli-
quées. Ce n'est que sept ans après que le prince envoya
à Paris Haggi Osman Effendi, à titre de premier essai.
Celui-ci, après avoir étudié le français, l'anglais, les
mathématiques, emporta une dernière copie du plan,
le remit au vice-roi, et le fit enfin agréer en principe ;
mais, d'abord, Osman fut mis à la tête d'une grande
école spéciale, principalement militaire. Enfin, en
1826, arrivèrent à Paris quarante-quatre jeunes gens
pour être élevés et instruits à l'européenne. Depuis,
jusqu'à ce jour, la Mission égyptienne a reçu près de deux
cents jeunes gens de toute condition, sans distinction
de naissance, plébéienne ou aristocratique, Égyptiens
ou Osmanlis, Grecs et Arméniens d'Egypte, fellahs ou
de classes supérieures. Ils ont d'abord été instruits
dans la langue française et les premiers éléments, puis
dans les connaissances spéciales aux professions qu'ils
devaient embrasser, la médecine, ou l'art militaire, ou
la marine et la navigation, ou l'administration et les
finances, les sciences mathématiques ou les travaux
publics, le génie et l'artillerie, enfin les arts chimiques
et l'exploitation des mines. En ce moment, Messieurs, j'ai
l'honneur de vous présenter un docteur médecin,
Hassan Hachem, un docteur chimiste, Abd-el-Aziz, et
un astronome admis à l'Observatoire impérial. Ils ont
obtenu, dans les écoles publiques où ils ont fait leurs
études, les plus honorables témoignages.-
Cette mission, vous le voyez, est le fruit d'une expé-
dition que l'étranger jaloux a taxée de folie, et qui sera
jugée autrement par la postérité, déjà arrivée pour elle
après soixante-quatre àns écoulés, c'est-à-dire à peu
près deux générations.
Les noms de Bonaparte et Kléber, de Desaix et Mon-
tebello, de Caffarelli et de Murât, du maréchal Bertrand,
de Dupetit-Thouars et bien d'autres, seront éternelle-
ment cités, associés à ceux de Monge et Berthollet, de
Fourier et Geoffroy Saint-Hilaire, de Larrey, Dolomieu -
et Desgenettes, de Chabrol et Denon, de l'Institut
d'Egypte, etc. Jamais leurs noms, pas plus que leurs
travaux et leurs services, ne seront oubliés; on n'ou-
bliera pas que vingt et un de ces derniers, de ces
argonautes de la science ont succombé pendant le
cours de l'expédition, victimes des combats, de la peste
ou de l'assassinat, sans parler des braves qui ont péri en
combattant pour l'honneur et la gloire de la patrie.
Et puisque le mot un peu ambitieux d'argonautes a
été prononcé, l'on ne dira pas que ceux-ci allaient,
comme les premiers, à la conquête d'une toison d'or ;
bien au contraire, au lieu d'aller à la recherche de l'or,
ils allaient porter à une nation épuisée par l'oppression,
le fanatisme et l'ignorance, le trésor de la civilisation !
J'ai prononcé tout à l'heure un beau nom qui n'avait
pas encore été représenté à cette réunion, celui de Des-
genettes, et cela faute d'un fils ou d'un neveu présent
à Paris, Desgenettes, le médecin en chef de l'armée
d'Orient, celui qui rédigea, pendant tout le cours de
l'expédition, le Courrier d'Egypte, rare et précieuse col-
lection. Aujourd'hui nous avons l'avantage de posséder
à cette table son neveu, M. Dufriche-Desgenettes, ré-
cemment arrivé de Malaisie, d'où il rapporte de pré-
cieuses notions de linguistique et d'ethnographie.
Nous devrions compter aussi un représentant de
l'illustre peintre Gérard, son neveu, le fils d'un des na-
turalistes de l'expédition ; mais il est absent.
Comment oublierais-je, dans cette énumération, une
école célèbre dont Monge, le grand géomètre, fut le
principal fondateur, en même temps qu'il fut le créa-
teur de la géométrie descriptive, science qu'on dirait
inventée pour la grande École (1), si l'École elle-même,
pour ainsi dire, n'avait pas été créée pour l'application
et la mise en œuvre de la science nouvelle.
C'est encore Monge qui conseilla au gouvernement
français de choisir une quarantaine d'élèves et ingé-
nieurs de l'École, pour en faire des membres actifs de
l'expédition. On lira bientôt un opuscule sous ce titre :
L'École polytechnique fonctionnant pour la première fois,
en 1798.
Il n'y avait pas moins de cinq professeurs de l'École
(dont Berthollet, l'un des principaux créateurs de la
chimie pneumatique), et de quarante-quatre ingénieurs
et élèves sortis de l'École, sans compter sept anciens in-
(1) Le fait est que l'École centrale des travaux publics et la géo-
métrie descriptive sont presque de la même date, comme émanées
de la même initiative.
d'Égypte : d'abord leur adresse, leur habileté à imiter
les produits et les ouvrages d'art; en second lieu, leur
intelligence, leur aptitude pour les sciences. On sait que
l'astronomie a fleuri au Caire sous les califes, comme
jadis à Alexandrie, au temps d'Eratosthène et de Ptolé-
mée, et comme chez les Arabes d'Espagne; il en est de
même des mathématiques et de la médecine ; il en
est de même encore des sciences historiques.
La France, en allant délivrer l'Égypte du joug des
Mamelouks, allait aussi la délivrer d'un autre fléau,
l'ignorance, lui reporter la lumière et la civilisation,
que l'Europe avait reçues jadis de l'Orient. Cette œuvre
avait fatalement été interrompue par les chances de la
guerre et de la politique ; ne pouvait-on pas la repren-
dre et la compléter ? Pourquoi ne pas profiter de l'expé-
rience acquise? pourquoi abandonner le principal but
d'une expédition qui avait coûté tant d'efforts et de sa-
crifices? D'ailleurs, des germes précieux avaient été dé-
posés sur les rives du Nil. Il ne s'agissait que de les
réveiller. L'Institut du Caire, l'armée et son illustre
chef y avaient laissé plus que des souvenirs.
Le représentant de la France, le chevalier Drovetti,
était disposé à agir dans ce fens ; il avait gagné la con-
fiance et l'amitié du prince qui gouvernait l'Égypte. Ce
prince était un homme intelligent, exempt des préjugés
vulgaires de l'islamisme, cherchant à profiter des exem-
ples de l'Europe ; accueillant tous les perfectionnements
pour les arts, l'agriculture, l'armée, la marine ; en un
mot, c'était un mahométan de génie. Le moment était
devenu favorable.
Malgré quelques oppositions, un membre de la Com-
mission des sciences et arts, qui correspondait depuis
longtemps avec le consul général de France, pour les
antiquités et les voyages de découvertes, lui proposa,
dès avant 1812, de soumettre à Mohammed-Aly un plan
pour la civilisation de l'Égypte par l'instruction, c'est-à-
dire en faisant élever en France un certain nombre de
jeunes Égyptiens dans les sciences théoriques et appli-
quées. Ce n'est que sept ans après que le prince envoya
à Paris Haggi Osman Effendi, à titre de premier essai.
Celui-ci, après avoir étudié le français, l'anglais, les
mathématiques, emporta une dernière copie du plan,
le remit au vice-roi, et le fit enfin agréer en principe ;
mais, d'abord, Osman fut mis à la tête d'une grande
école spéciale, principalement militaire. Enfin, en
1826, arrivèrent à Paris quarante-quatre jeunes gens
pour être élevés et instruits à l'européenne. Depuis,
jusqu'à ce jour, la Mission égyptienne a reçu près de deux
cents jeunes gens de toute condition, sans distinction
de naissance, plébéienne ou aristocratique, Égyptiens
ou Osmanlis, Grecs et Arméniens d'Egypte, fellahs ou
de classes supérieures. Ils ont d'abord été instruits
dans la langue française et les premiers éléments, puis
dans les connaissances spéciales aux professions qu'ils
devaient embrasser, la médecine, ou l'art militaire, ou
la marine et la navigation, ou l'administration et les
finances, les sciences mathématiques ou les travaux
publics, le génie et l'artillerie, enfin les arts chimiques
et l'exploitation des mines. En ce moment, Messieurs, j'ai
l'honneur de vous présenter un docteur médecin,
Hassan Hachem, un docteur chimiste, Abd-el-Aziz, et
un astronome admis à l'Observatoire impérial. Ils ont
obtenu, dans les écoles publiques où ils ont fait leurs
études, les plus honorables témoignages.-
Cette mission, vous le voyez, est le fruit d'une expé-
dition que l'étranger jaloux a taxée de folie, et qui sera
jugée autrement par la postérité, déjà arrivée pour elle
après soixante-quatre àns écoulés, c'est-à-dire à peu
près deux générations.
Les noms de Bonaparte et Kléber, de Desaix et Mon-
tebello, de Caffarelli et de Murât, du maréchal Bertrand,
de Dupetit-Thouars et bien d'autres, seront éternelle-
ment cités, associés à ceux de Monge et Berthollet, de
Fourier et Geoffroy Saint-Hilaire, de Larrey, Dolomieu -
et Desgenettes, de Chabrol et Denon, de l'Institut
d'Egypte, etc. Jamais leurs noms, pas plus que leurs
travaux et leurs services, ne seront oubliés; on n'ou-
bliera pas que vingt et un de ces derniers, de ces
argonautes de la science ont succombé pendant le
cours de l'expédition, victimes des combats, de la peste
ou de l'assassinat, sans parler des braves qui ont péri en
combattant pour l'honneur et la gloire de la patrie.
Et puisque le mot un peu ambitieux d'argonautes a
été prononcé, l'on ne dira pas que ceux-ci allaient,
comme les premiers, à la conquête d'une toison d'or ;
bien au contraire, au lieu d'aller à la recherche de l'or,
ils allaient porter à une nation épuisée par l'oppression,
le fanatisme et l'ignorance, le trésor de la civilisation !
J'ai prononcé tout à l'heure un beau nom qui n'avait
pas encore été représenté à cette réunion, celui de Des-
genettes, et cela faute d'un fils ou d'un neveu présent
à Paris, Desgenettes, le médecin en chef de l'armée
d'Orient, celui qui rédigea, pendant tout le cours de
l'expédition, le Courrier d'Egypte, rare et précieuse col-
lection. Aujourd'hui nous avons l'avantage de posséder
à cette table son neveu, M. Dufriche-Desgenettes, ré-
cemment arrivé de Malaisie, d'où il rapporte de pré-
cieuses notions de linguistique et d'ethnographie.
Nous devrions compter aussi un représentant de
l'illustre peintre Gérard, son neveu, le fils d'un des na-
turalistes de l'expédition ; mais il est absent.
Comment oublierais-je, dans cette énumération, une
école célèbre dont Monge, le grand géomètre, fut le
principal fondateur, en même temps qu'il fut le créa-
teur de la géométrie descriptive, science qu'on dirait
inventée pour la grande École (1), si l'École elle-même,
pour ainsi dire, n'avait pas été créée pour l'application
et la mise en œuvre de la science nouvelle.
C'est encore Monge qui conseilla au gouvernement
français de choisir une quarantaine d'élèves et ingé-
nieurs de l'École, pour en faire des membres actifs de
l'expédition. On lira bientôt un opuscule sous ce titre :
L'École polytechnique fonctionnant pour la première fois,
en 1798.
Il n'y avait pas moins de cinq professeurs de l'École
(dont Berthollet, l'un des principaux créateurs de la
chimie pneumatique), et de quarante-quatre ingénieurs
et élèves sortis de l'École, sans compter sept anciens in-
(1) Le fait est que l'École centrale des travaux publics et la géo-
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