Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-04-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 avril 1862 01 avril 1862
Description : 1862/04/01 (A7,N139). 1862/04/01 (A7,N139).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203293z
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 105
de M. Maigean, chef des expéditions. Elles étaient tout à
fait neuves, fabriquées à Port-Saïd par des charpentiers
du golfe de Venise. On nous a donné deux embarca-
tions parce que nous étions trois voyageurs, plus mon
domestique formant le quatrième. Elles devaient en
outre recevoir chacune deux Arabes pour les conduire
et charger une bonne quantité de bagages, car au dé -
sert il faut tout porter avec soi. Beaucoup de mes pré-
cautions sous ce rapport ont cependant été inutiles en
raison de l'hospitalité empressée qui m'a partout ac-
cueilli. J'entre dans tous ces détails pour enlever à la
malveillance le droit de prétendre que la rigole n'a pas
assez d'eau pour être utilisée.
» Je quittai donc Port-Saïd au lever du soleil par la
rigole (ou canal) qui communique avec la mer ; pour
moi, né dans les lagunes de Venise, le lac Menzaleh
n'est qu'une lagune. — Le canal est fait à présent en
petit, et il sera par la suite fait en grand par le travail
des dragues, précisément comme on à fait, dans nos
lagunes vénitiennes, les canaux qui conduisent à nos
grands ports de Malamoco et Chioggia, où des vais-
seaux construits dans le fameux arsenal de Venise
sortent et entrent sans difficultés ; celles que pré-
sentait le port de Malamoco n'existent plus, grâce à la
digue qu'on y. a achevée. D'après ces données et dans
mon opinion, la difficulté du percement consistait dans
la possibilité de l'approvisionnement, surtout en eau; puis
dans celle de réunir sur les lieux une quantité suffisante
d'ouvriers, avec les capitaux nécessités par la marche
non interrompue du travail. Aujourd'hui qu'aucun de
ces éléments ne manque, la question paraît résolue ;
vous verrez par la suite que, dans des conversations
que j'ai eues particulièrement avec l'ingénieur dirigeant
les travaux du seuil d'El-Guisr, M. E. Larousse, il est
parfaitement de mon avis.
» Revenons à mon voyage. A Il heures du matin
j'étais à Ras-El-Eish, campement situé dans une espèce
d'ile du lac Menzaleh. Ce campement est formé d'une
vingtaine de baraques ; une de ces baraques était oc-
cupée par un restaurateur qui nous a donné un excel-
lent déjeuner à la fourchette à 2 fr. 50 c. par tête y
compris le vin; dans tous les pays d'Europe on m'au-
rait fait payer le double. A Ras-El-Eisch, le véritable
lac est presque fini, et là commence la rigole creusée
par les dragues. En fonctionnant, les dragues rejettent
à droite et à gauche les terres enlevées au fond du lac,
et forment ainsi des berges solides, ces terres se solidi-
fiant très-bien sous l'influence du soleil ; je m'y suis
promené. A Ras-El-Eish, mes embarcations furent rem-
placées par d'autres plus petites, mais assez commodes
pour que nous pussions naviguer trois dans l'une avec
deux Arabes, et y dîner à notre aise, comme nous
l'avons fait. La rigole avait de 6 à 15 mètres de lar-
geur selon les endroits, et de 80 centimètres à lra,20 de
profondeur. A 11 heures du soir j'arrivai à Kantara, où
je passai la nuit.
» Le 28 février.- Kantara est une espèce de petite ville,
bâtie en grande partie en briques ; ces briques ont été
enlevées d'un ancien cimetière. J'ai assisté au travail,
et j'eus lieu de remarquer que les tombeaux étaient
garnis en stuc intérieurement, avec des peintures
comme on en trouve à Pompeïa ; à d'autres époques ce
cimetière a dû être fouillé et dévasté ; car tous les tom-
beaux se trouvent ouverts et vides. A 8 heures 3/4
je suis parti pour El-Ferdane par la rigole qui part de
Port-Saïd. Le jour de mon arrivée on avait donné l'eau
de la mer à 2 kilomètres de rigole achevés au-dessus
d'El-Ferdane. J'y trouvai des dromadaires pour aller au
seuil d'El-Guisr, où j'étais rendu à 3 heures. Je me suis
présenté à M. E. Larousse, ingénieur de division et di-
recteur au seuil d'El-Guisr, qui, avec une amabilité ex-
trême, me montra tous les établissements et tous les
travaux.
» Le jour précédent quatorze mille hommes étaient
partis, et je suis allé examiner ce qu'ils avaient fait.
Ces quatorze mille hommes étaient engagés pour un
mois ? mais, avec le temps perdu pour se rendre à leur
poste, ils n'ont travaillé réellement que vingt-quatre
jours, et unis à six mille hommes que je devais voir
travailler le lendemain, ensemble vingt mille hommes
environ, ils avaient creusé pendant ces vingt-quatre jours
400,000 mètres cubes de terrain. Je suis allé sur le théâ-
tre des travaux que ces hommes venaient de quitter ;
j'ai visité la rigole à sec sur ce point considéré comme
étant le plus difficile du percement. J'ai vu aussi, sur
une longueur d'une centaine de mètres, un spécimen de
ce que sera le canal quand il sera navigable pour les
grands navires. Il doit avoir 60 mètres de largeur de
berge à berge, il aura de 55 à 56 mètres au niveau d'eau.
Le susdit ingénieur a répondu à toutes mes questions,
soit sur les berges, soit sur l'effet qu'exercera sur elles
le passage des navires, soit sur les éboulementsà crain-
dre. En ce qui concerne les éboulements, on a été assez
heureux pour trouver, au lieu de sable, une espèce de
craie durcie, une sorte de pierre écartant toute appré-
hension à cet égard. J'ai vu à diverses places se tenir
parfaitement ce terrain, qu'on avait exprès taillé verti-
calement, et il s'agit d'une hauteur de 10 à 15 mètres.
» Le seuil est, comme je l'ai dit, la position qu'on
croyait critique pour le canal, parce qu'il y a à creuser
14 à 15 mètres pour arriver au niveau de l'eau. Je de-
mandai le prix de revient pour savoir si le devis dressé
pour le creusement se rapproche de la vérité ; on a cal-
culé le prix dans le devis à 50 centimes le mètre cube,
et le creusement des 400,000 mètres cubes ne revient
qu'à 40 centimes (et celui des dragues à 45 centimes) (1).
Ne croyez pas que les Arabes ne soient pas payés; ils
sont payés, et même aussitôt qu'ils ont fini leur be-
sogne. Pour leur faciliter le travail, le terrain a été
divisé en tâches par compagnies de cent hommes, et ils
reçoivent leur salaire dès que la tâche est terminée.
Il en résulte qu'ils se surveillent réciproquement, vu
que plutôt une tâche a fini plutôt ils touchent leur ar-
gent, et voilà la cause de cette ardeur des fellahs
signalée par plusieurs visiteurs des travaux. Les paie-
ments leur sont faits après déduction de la valeur des
aliments qui leur ont été fournis par la Compagnie,
comme biscuits, etc., etc., aux prix les plus modérés.
(1) L'estimation des devis de la commission internationale est de
67 centimes pour les déblais à sec, et de 1 franc pour les déblais
sous l'eau.
(Note du rédacteur.)
de M. Maigean, chef des expéditions. Elles étaient tout à
fait neuves, fabriquées à Port-Saïd par des charpentiers
du golfe de Venise. On nous a donné deux embarca-
tions parce que nous étions trois voyageurs, plus mon
domestique formant le quatrième. Elles devaient en
outre recevoir chacune deux Arabes pour les conduire
et charger une bonne quantité de bagages, car au dé -
sert il faut tout porter avec soi. Beaucoup de mes pré-
cautions sous ce rapport ont cependant été inutiles en
raison de l'hospitalité empressée qui m'a partout ac-
cueilli. J'entre dans tous ces détails pour enlever à la
malveillance le droit de prétendre que la rigole n'a pas
assez d'eau pour être utilisée.
» Je quittai donc Port-Saïd au lever du soleil par la
rigole (ou canal) qui communique avec la mer ; pour
moi, né dans les lagunes de Venise, le lac Menzaleh
n'est qu'une lagune. — Le canal est fait à présent en
petit, et il sera par la suite fait en grand par le travail
des dragues, précisément comme on à fait, dans nos
lagunes vénitiennes, les canaux qui conduisent à nos
grands ports de Malamoco et Chioggia, où des vais-
seaux construits dans le fameux arsenal de Venise
sortent et entrent sans difficultés ; celles que pré-
sentait le port de Malamoco n'existent plus, grâce à la
digue qu'on y. a achevée. D'après ces données et dans
mon opinion, la difficulté du percement consistait dans
la possibilité de l'approvisionnement, surtout en eau; puis
dans celle de réunir sur les lieux une quantité suffisante
d'ouvriers, avec les capitaux nécessités par la marche
non interrompue du travail. Aujourd'hui qu'aucun de
ces éléments ne manque, la question paraît résolue ;
vous verrez par la suite que, dans des conversations
que j'ai eues particulièrement avec l'ingénieur dirigeant
les travaux du seuil d'El-Guisr, M. E. Larousse, il est
parfaitement de mon avis.
» Revenons à mon voyage. A Il heures du matin
j'étais à Ras-El-Eish, campement situé dans une espèce
d'ile du lac Menzaleh. Ce campement est formé d'une
vingtaine de baraques ; une de ces baraques était oc-
cupée par un restaurateur qui nous a donné un excel-
lent déjeuner à la fourchette à 2 fr. 50 c. par tête y
compris le vin; dans tous les pays d'Europe on m'au-
rait fait payer le double. A Ras-El-Eisch, le véritable
lac est presque fini, et là commence la rigole creusée
par les dragues. En fonctionnant, les dragues rejettent
à droite et à gauche les terres enlevées au fond du lac,
et forment ainsi des berges solides, ces terres se solidi-
fiant très-bien sous l'influence du soleil ; je m'y suis
promené. A Ras-El-Eish, mes embarcations furent rem-
placées par d'autres plus petites, mais assez commodes
pour que nous pussions naviguer trois dans l'une avec
deux Arabes, et y dîner à notre aise, comme nous
l'avons fait. La rigole avait de 6 à 15 mètres de lar-
geur selon les endroits, et de 80 centimètres à lra,20 de
profondeur. A 11 heures du soir j'arrivai à Kantara, où
je passai la nuit.
» Le 28 février.- Kantara est une espèce de petite ville,
bâtie en grande partie en briques ; ces briques ont été
enlevées d'un ancien cimetière. J'ai assisté au travail,
et j'eus lieu de remarquer que les tombeaux étaient
garnis en stuc intérieurement, avec des peintures
comme on en trouve à Pompeïa ; à d'autres époques ce
cimetière a dû être fouillé et dévasté ; car tous les tom-
beaux se trouvent ouverts et vides. A 8 heures 3/4
je suis parti pour El-Ferdane par la rigole qui part de
Port-Saïd. Le jour de mon arrivée on avait donné l'eau
de la mer à 2 kilomètres de rigole achevés au-dessus
d'El-Ferdane. J'y trouvai des dromadaires pour aller au
seuil d'El-Guisr, où j'étais rendu à 3 heures. Je me suis
présenté à M. E. Larousse, ingénieur de division et di-
recteur au seuil d'El-Guisr, qui, avec une amabilité ex-
trême, me montra tous les établissements et tous les
travaux.
» Le jour précédent quatorze mille hommes étaient
partis, et je suis allé examiner ce qu'ils avaient fait.
Ces quatorze mille hommes étaient engagés pour un
mois ? mais, avec le temps perdu pour se rendre à leur
poste, ils n'ont travaillé réellement que vingt-quatre
jours, et unis à six mille hommes que je devais voir
travailler le lendemain, ensemble vingt mille hommes
environ, ils avaient creusé pendant ces vingt-quatre jours
400,000 mètres cubes de terrain. Je suis allé sur le théâ-
tre des travaux que ces hommes venaient de quitter ;
j'ai visité la rigole à sec sur ce point considéré comme
étant le plus difficile du percement. J'ai vu aussi, sur
une longueur d'une centaine de mètres, un spécimen de
ce que sera le canal quand il sera navigable pour les
grands navires. Il doit avoir 60 mètres de largeur de
berge à berge, il aura de 55 à 56 mètres au niveau d'eau.
Le susdit ingénieur a répondu à toutes mes questions,
soit sur les berges, soit sur l'effet qu'exercera sur elles
le passage des navires, soit sur les éboulementsà crain-
dre. En ce qui concerne les éboulements, on a été assez
heureux pour trouver, au lieu de sable, une espèce de
craie durcie, une sorte de pierre écartant toute appré-
hension à cet égard. J'ai vu à diverses places se tenir
parfaitement ce terrain, qu'on avait exprès taillé verti-
calement, et il s'agit d'une hauteur de 10 à 15 mètres.
» Le seuil est, comme je l'ai dit, la position qu'on
croyait critique pour le canal, parce qu'il y a à creuser
14 à 15 mètres pour arriver au niveau de l'eau. Je de-
mandai le prix de revient pour savoir si le devis dressé
pour le creusement se rapproche de la vérité ; on a cal-
culé le prix dans le devis à 50 centimes le mètre cube,
et le creusement des 400,000 mètres cubes ne revient
qu'à 40 centimes (et celui des dragues à 45 centimes) (1).
Ne croyez pas que les Arabes ne soient pas payés; ils
sont payés, et même aussitôt qu'ils ont fini leur be-
sogne. Pour leur faciliter le travail, le terrain a été
divisé en tâches par compagnies de cent hommes, et ils
reçoivent leur salaire dès que la tâche est terminée.
Il en résulte qu'ils se surveillent réciproquement, vu
que plutôt une tâche a fini plutôt ils touchent leur ar-
gent, et voilà la cause de cette ardeur des fellahs
signalée par plusieurs visiteurs des travaux. Les paie-
ments leur sont faits après déduction de la valeur des
aliments qui leur ont été fournis par la Compagnie,
comme biscuits, etc., etc., aux prix les plus modérés.
(1) L'estimation des devis de la commission internationale est de
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