Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-03-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 mars 1862 15 mars 1862
Description : 1862/03/15 (A7,N138). 1862/03/15 (A7,N138).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203292j
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS.
95
c'est-à-dire de cette mortalité dont les victimes elles-
mêmes, par volonté, caprice ou inconduite, doivent être
réputées responsables ; enfin, c'est que les mortalités
quelconques survenues dans l'isthme, quelle que soit
leur cause, naturelle ou exceptionnelle, ne vont pas à
trente, et, je crois, pas à vingt-cinq, c'est-à-dire n'attei-
gnent pas le chiffre relatif et proportionnel d'une po-
pulation comparative. Que dire à cela ?
» Solution générale : pour juger sainement d'une
œuvre, d'une chose quelconque, il faut la regarder de
haut, c'est-à-dire dans son principe, dans son ensem-
ble, dans son but, et non pas dans un détail qui, con-
sidéré isolément, peut être défectueux.
» En toutes choses, il faut avoir un point de départ dont
on puisse convenu. un- point de vue net d'où l'on puisse
regarder dans un vrai jour. Quand Dieu eut créé le
monde, il le trouva un ouvrage parfait; et nous le trouve-
rons parfait nous aussi, si, comme lui, nous le regardons
dans son vaste ensemble d'éléments coordonnés et rat-
tachés les uns aux autres ; d'êtres animés le peuplant ;
de populations guidées, gouvernées et conduites par
des lois avec des administrations différentes s'échelon-
naLt les unes les autres; de prédestination modelée
dans son principe et dans sa fin, sur le type premier
de toute chose, qui est Jésus Christ, etc. Mais nous le
trouverons un ouvrage déplorable, si, nous rabaissant
au niveau des passions, nous le jugeons par les mi-
sères dont il abonde, par les souffrances qu'on y en-
dure, par les accidents déplorables qu'on y subit tous
les jours. De même, par comparaison proportionnelle
et permise, l'affaire de l'isthme de Suez, si nous la ju-
geons par son but, par le remuement qu'elle met dans
le monde, par l'entreprise si vastement échelonnée qui
la mène, par l'avenir qu'elle annonce, nous Pestime-
rons magnifique. Si, au contraire, nous la prenons dans
un détail de rien, où c'est un homme qui se plaint, où
c'est un accident de terrain qui ne semble pas se pré
ter au travail, où c'est une machine qui momentané-
ment ne fonctionne pas bien, où c'est une combinaison
qui ne tient pas ce qu'elle semblait promettre d'abord,
nous la jugerons moins bonne ou même mauvaise ; et
c'est mal, parce que nous ne partons pas d'un point de
vue vrai et net.
» Et tel est l'argument que, pour résumer toutes ses
impressions, le prêtre fit valoir à Port-Saïd, le diman-
che 5 janvier, où la messe, comme au Seuil précédem-
ment, était dite pour la première fois dans une église
tout récemment terminée. Car ce n'est point une di-
gression oiseuse que j'ai faite dans les pages précéden-
tes ; ce n'est pas une pièce justificative que j'ai voulu
rédiger en faveur de l'isthme : c'est l'œuvre tout en-
tière que j'ai analysée, c'est-à-dire prise à son point
de vue d'ensemble, étudiée dans ses propres éléments,
et telle que le prêtre la contemplait dans son parcours
pour s'en exprimer ensuite, par manière d'instruction
religieuse, au peuple qu'il venait servir de son minis-
tère. Du moins telle a été mon intention. Je n'en ai
pas eu d'autre. C'est d'une haute pensée que je me suis
inspiré dans ce petit travail, j'y parle favorablement
de l'œuvre, il est vrai; je la justifie et la venge, ce
semble, en supposant qu'elle en ait besoin ; mais c'est
parce que je la considère en chrétien et en prêtre,
c'est-à-dire dans les desseins et la volonté de Dieu, qui
a ses vues, qui ordonne et coordonne tout, qui choisit
les moments et les hommes, quand, même ceux-ci ne le
soupçonnent et ne s'en inquiètent guère ; ensuite,
parce que je la considère en homme, c'est-à-dire comme
devant être utile au monde ; et, enfin, parce que je la
considère en ma qualité de Français ; car j'ai à cœur
la gloire de ma patrie et celle de ses enfants, mes con-
citoyens. C'est une profession de foi que je fais là, mais
au moins je la fais en toute simplicité.
» Donc, le dimanche 5 janvier, une messe était so-
lennellement célébrée à Port-Saïd. Le bâtiment de l'é-
glise était tout neuf. Il avait été terminé précisément
la veille. C'était la veille aussi que l'autel avait été
improvisé. Mais l'ouvrage se fait si vite dans les chan-
tiers de l'isthme ! C'est un enchantement. L'état-major
de la Compagnie et de l'entreprise était là, M. de Les-
seps et M. Hardon en tête. La population affluait, heu-
reuse de ce beau jour; car on a beau être philosophe,
loin de son pays, on languit toujours d'une longue
suite de dimanches privés d'offices. Comme au Seuil,
les dames s'étaient empressées de parer l'autel et la
chapelle ; enfin, tout était beau, digne et gracieux. Le
prêtre était heureux d'être la cause, par son ministère,
d'une solennité semblable. Il en éprouvait toutes les
impressions. Terminant là son parcours , et s'étant
rendu compte de tout, il avait nécessairement à s'en
exprimer. Ministre de Jésus-Christ et de l'Eglise, il
devait, sans contredit, une instruction à ce peuple. Il
la lui fit donc et il la fit simple, cordiale, pathétique,
mais toute morale, et en même temps toute prise dans
le sujet que ce peuple fournissait lui-même par sa
présence dans l'isthme et par le travail qu'il y fait.
Dans cette instruction, il lui mettait sous les yeux la
grandeur du but auquel il concourt ; il lui recomman-
dait la patience, l'esprit de foi et de soumission chré-
tienne; enfin, il le précautionnait contre les dangers
du désert qui porte au murmure, témoin le peuple
d'Israël. Cette instruction fut courte, mais goûtée et
bien accueillie ; j'en citerai ici le début, et ce sera assez
pour en faire apprécier l'ensemble. »
Ici l'écrivain cite le texte de son discours, que
nous avons déjà publié dans notre numéro du 1er fé-
vrier. Il reprend ensuite en ces termes :
« Le saint sacrifice de la messe, célébré à Port-Saïd,
offrait à qui aurait pu le contempler de loin, de la mer
par exemple, un spectacle magnifique. L'enceinte de
l'église était trop étroite ce jour-là pour le nombre des
fidèles, et il y en avait autant dehors que dedans. A la
messe, dans notre culte catholique, il y a, on le sait, ce
moment spécial où tout le monde, sans exception, s'age-
nouille et courbe la tête. Vint donc ce moment, et un
des assistants les plus notables qui, n'ayant pu entrer, se
tenait religieusement dehors, voulut s'en donner le spec-
tacle, et il contempla. Le spectacle, c'était le prêtre
d'abord, dominant l'assemblée à raison de l'autel, et éle-
vant la sainte hostie; ensuite c'était la foule intérieure
dominant aussi, par sa position locale, la foule extérieure,
et se laissant voir agenouillée par la porte et les fené-
95
c'est-à-dire de cette mortalité dont les victimes elles-
mêmes, par volonté, caprice ou inconduite, doivent être
réputées responsables ; enfin, c'est que les mortalités
quelconques survenues dans l'isthme, quelle que soit
leur cause, naturelle ou exceptionnelle, ne vont pas à
trente, et, je crois, pas à vingt-cinq, c'est-à-dire n'attei-
gnent pas le chiffre relatif et proportionnel d'une po-
pulation comparative. Que dire à cela ?
» Solution générale : pour juger sainement d'une
œuvre, d'une chose quelconque, il faut la regarder de
haut, c'est-à-dire dans son principe, dans son ensem-
ble, dans son but, et non pas dans un détail qui, con-
sidéré isolément, peut être défectueux.
» En toutes choses, il faut avoir un point de départ dont
on puisse convenu. un- point de vue net d'où l'on puisse
regarder dans un vrai jour. Quand Dieu eut créé le
monde, il le trouva un ouvrage parfait; et nous le trouve-
rons parfait nous aussi, si, comme lui, nous le regardons
dans son vaste ensemble d'éléments coordonnés et rat-
tachés les uns aux autres ; d'êtres animés le peuplant ;
de populations guidées, gouvernées et conduites par
des lois avec des administrations différentes s'échelon-
naLt les unes les autres; de prédestination modelée
dans son principe et dans sa fin, sur le type premier
de toute chose, qui est Jésus Christ, etc. Mais nous le
trouverons un ouvrage déplorable, si, nous rabaissant
au niveau des passions, nous le jugeons par les mi-
sères dont il abonde, par les souffrances qu'on y en-
dure, par les accidents déplorables qu'on y subit tous
les jours. De même, par comparaison proportionnelle
et permise, l'affaire de l'isthme de Suez, si nous la ju-
geons par son but, par le remuement qu'elle met dans
le monde, par l'entreprise si vastement échelonnée qui
la mène, par l'avenir qu'elle annonce, nous Pestime-
rons magnifique. Si, au contraire, nous la prenons dans
un détail de rien, où c'est un homme qui se plaint, où
c'est un accident de terrain qui ne semble pas se pré
ter au travail, où c'est une machine qui momentané-
ment ne fonctionne pas bien, où c'est une combinaison
qui ne tient pas ce qu'elle semblait promettre d'abord,
nous la jugerons moins bonne ou même mauvaise ; et
c'est mal, parce que nous ne partons pas d'un point de
vue vrai et net.
» Et tel est l'argument que, pour résumer toutes ses
impressions, le prêtre fit valoir à Port-Saïd, le diman-
che 5 janvier, où la messe, comme au Seuil précédem-
ment, était dite pour la première fois dans une église
tout récemment terminée. Car ce n'est point une di-
gression oiseuse que j'ai faite dans les pages précéden-
tes ; ce n'est pas une pièce justificative que j'ai voulu
rédiger en faveur de l'isthme : c'est l'œuvre tout en-
tière que j'ai analysée, c'est-à-dire prise à son point
de vue d'ensemble, étudiée dans ses propres éléments,
et telle que le prêtre la contemplait dans son parcours
pour s'en exprimer ensuite, par manière d'instruction
religieuse, au peuple qu'il venait servir de son minis-
tère. Du moins telle a été mon intention. Je n'en ai
pas eu d'autre. C'est d'une haute pensée que je me suis
inspiré dans ce petit travail, j'y parle favorablement
de l'œuvre, il est vrai; je la justifie et la venge, ce
semble, en supposant qu'elle en ait besoin ; mais c'est
parce que je la considère en chrétien et en prêtre,
c'est-à-dire dans les desseins et la volonté de Dieu, qui
a ses vues, qui ordonne et coordonne tout, qui choisit
les moments et les hommes, quand, même ceux-ci ne le
soupçonnent et ne s'en inquiètent guère ; ensuite,
parce que je la considère en homme, c'est-à-dire comme
devant être utile au monde ; et, enfin, parce que je la
considère en ma qualité de Français ; car j'ai à cœur
la gloire de ma patrie et celle de ses enfants, mes con-
citoyens. C'est une profession de foi que je fais là, mais
au moins je la fais en toute simplicité.
» Donc, le dimanche 5 janvier, une messe était so-
lennellement célébrée à Port-Saïd. Le bâtiment de l'é-
glise était tout neuf. Il avait été terminé précisément
la veille. C'était la veille aussi que l'autel avait été
improvisé. Mais l'ouvrage se fait si vite dans les chan-
tiers de l'isthme ! C'est un enchantement. L'état-major
de la Compagnie et de l'entreprise était là, M. de Les-
seps et M. Hardon en tête. La population affluait, heu-
reuse de ce beau jour; car on a beau être philosophe,
loin de son pays, on languit toujours d'une longue
suite de dimanches privés d'offices. Comme au Seuil,
les dames s'étaient empressées de parer l'autel et la
chapelle ; enfin, tout était beau, digne et gracieux. Le
prêtre était heureux d'être la cause, par son ministère,
d'une solennité semblable. Il en éprouvait toutes les
impressions. Terminant là son parcours , et s'étant
rendu compte de tout, il avait nécessairement à s'en
exprimer. Ministre de Jésus-Christ et de l'Eglise, il
devait, sans contredit, une instruction à ce peuple. Il
la lui fit donc et il la fit simple, cordiale, pathétique,
mais toute morale, et en même temps toute prise dans
le sujet que ce peuple fournissait lui-même par sa
présence dans l'isthme et par le travail qu'il y fait.
Dans cette instruction, il lui mettait sous les yeux la
grandeur du but auquel il concourt ; il lui recomman-
dait la patience, l'esprit de foi et de soumission chré-
tienne; enfin, il le précautionnait contre les dangers
du désert qui porte au murmure, témoin le peuple
d'Israël. Cette instruction fut courte, mais goûtée et
bien accueillie ; j'en citerai ici le début, et ce sera assez
pour en faire apprécier l'ensemble. »
Ici l'écrivain cite le texte de son discours, que
nous avons déjà publié dans notre numéro du 1er fé-
vrier. Il reprend ensuite en ces termes :
« Le saint sacrifice de la messe, célébré à Port-Saïd,
offrait à qui aurait pu le contempler de loin, de la mer
par exemple, un spectacle magnifique. L'enceinte de
l'église était trop étroite ce jour-là pour le nombre des
fidèles, et il y en avait autant dehors que dedans. A la
messe, dans notre culte catholique, il y a, on le sait, ce
moment spécial où tout le monde, sans exception, s'age-
nouille et courbe la tête. Vint donc ce moment, et un
des assistants les plus notables qui, n'ayant pu entrer, se
tenait religieusement dehors, voulut s'en donner le spec-
tacle, et il contempla. Le spectacle, c'était le prêtre
d'abord, dominant l'assemblée à raison de l'autel, et éle-
vant la sainte hostie; ensuite c'était la foule intérieure
dominant aussi, par sa position locale, la foule extérieure,
et se laissant voir agenouillée par la porte et les fené-
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.96%.
- Collections numériques similaires Thématique : ingénierie, génie civil Thématique : ingénierie, génie civil /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCthèm02"Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp11" Corpus : ports et travaux maritimes Corpus : ports et travaux maritimes /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp16"
- Auteurs similaires Desplaces Ernest Desplaces Ernest /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Desplaces Ernest" or dc.contributor adj "Desplaces Ernest")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 15/16
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k6203292j/f15.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k6203292j/f15.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k6203292j/f15.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k6203292j
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k6203292j
Facebook
Twitter