Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1861-09-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 01 septembre 1861 01 septembre 1861
Description : 1861/09/01 (A6,N125). 1861/09/01 (A6,N125).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032788
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS: 285
saintes de la Mecque et de Médine et des populations
de l'Arabie.
Ce canal s'appelait alors le Canal du prince des fidè-
les.
Selon le géographe Alfergan, le fleuve Trajan,
qui passait à la Babylone d'Egypte , était le même
- qui fut appelé plus tard le Canal du prince des fidèles,
et qui coule le long de Fostat (vieux Caire) ; car
Omar, comme il est dit dans l'histoire de la guerre
d'Egypte, ordonna que ce canal fût rouvert, à l'effet
de faire transporter des vivres à Médine et à la
Mecque qui étaient désolées par la famine.
Le calife Omar-ben-el-Khaththab écrivait à Amrou-
ben-el-A'ss une lettre ainsi conçue :
» Au rebelle, fils du rebelle.
« Tandis que toi et tes compagnons vous vous
» engraissez, vous ne vous inquiétez pas si moi et
» les miens nous maigrissons. Donne-nous donc du
D secours.»
— « Je suis à toi, » — répondit Amrou, — « je
* t'envoie un convoi de bêtes de somme, dont la
D première sera chez toi quand la dernière ne
D sera pas encore partie : j'espère en outre trouver
» un autre moyen de transport par mer. »
Mais' Amrou ne tarda pas à se repentir d'avoir
donné cette dernière idée, parce qu'on lui fit observer
que., par* ce canal, il serait possible de dévaster
l'Egypte. Il écrivit donc qu'il avait réfléchi sur le
transport par mer, et qu'il y trouvait des difficultés
insurmontables.
Omar répondit :
« J'ai reçu la lettre par laquelle tu cherches à
» éluder l'exécution du projet conçu dans la précé-
» dente. J'en jure par le Tout-Puissant, tu l'exécu-
» teras, ou je te chasserai par les oreilles, et j'en
» enverrai un qui l'exécutera. — Envoie-moi des
» vêtements, des lentilles, des oignons et des bes-
» tiaux. »
On voit que, depuis cette époque, les correspon-
dances administratives ont perdu en concision ce
qu'elles gagnent en aménité.
Amrou avait la faiblesse de tenir à ses oreilles, il
s'occupa à l'instant même du canal.
Elkensi, dans son ouvrage Aldjend el Moghreby, dit
qu'il fut creusé en l'an 23 de l'hégire (643 de l'ère
chrétienne) et terminé en six mois, de façon à ce
que les vaisseaux y passèrent et purent se rendre
dans l'Hedjaz.
Le canal du prince des fidèles fut fermé cent cinquante
ans après, l'an 159 de l'hégire, sous le règne du
calife Abas Sidi-Abou-Djafar-el-Mansour.
Mon Dieu 1 que tous ces noms turcs et arabes sont
désagréables à prononcer 1 Il vaudrait mieux ne pas
se nommer du tout que de se nommer ainsi. C'est
sans doute ce qui explique pourquoi, en littérature,
les sujets turcs et arabes ne peuvent inspirer le moindre
intérêt.
A peine arrivé sur le sol qu'avaient foulé Sésostris,
Alexandre et César, le.général Bonaparte se hâta d'ac-
courir à Suez pour juger s'il pourrait recommencer
l'œuvre des Pharaons, des Grecs et des Romains.
Le 24 décembre n98, il partait du Caire, et, le 30, il
retrouvait, le premier parmi ses illustres compagnons,
Berthier, Caffarelli, Gantheaume, Monge , Berthollet,
Costaz, les vestiges deTançien canal; il les suivait pen-
dant cinq lieues; puis, après avoir visité les fontaines
de Moïse, il revenait au Caire par l'ouadé Toumilat (terre
de Gessen), et il voyait, le 3 janvier 1799, l'autre extré-
mité du canal des rharaons.
M. Lepère fut chargé de rédiger un mémoire" sur la.
communication de la Méditerranée et la mer Rouge.
Le canal que proposa M. Lepère n'était que l'ancien
canal. D'après ses calculs, ce travail ne devait coûter
que de 25 à 30 millions. La prise d'eau était à Bubaste,
sur le Nil, avec une dérivation sur le Caire, en amont.
Il se dirigeait vers le lac Timsah, et, tournant au sud,
il descendait vers Suez. C'était toujours la pensée d'un
canal destiné uniquement à relier le Nil à. la mer
Rouge.
Seulement, dès lors, l'habile ingénieur avait reconnu
que le vrai, le seul canal à creuser un jour, celui qui
ouvrirait la grande voie maritime réclamée par le com-
merce et la civilisation universelle, serait la coupure
directe de l'isthme, à partir de Suez jusqu'à Péluse.
M. Lepère terminait ainsi son rapport :
a Nous pensons qu'un canal ouvert dans cette direc-
» tion (de Suez à Péluse) présenterait un avantage que
» n'aurait pas le canal intérieur. En effet, la navigation,
1; qui pourrait y être constante, ne serait pas assujettie
> aux alternatives des crues et des décroissements du
» Nil. Il serait facile d'y entretenir une profondeur plus
» considérable. J'ajouterai que si je ne voyais quel-
» ques difficultés à creuser et à entretenir à la profon-
D deur convenable le chemin entre Suez et la rade
» (la force des dragues à vapeur n'était pas encore con-
» nue), je proposerais d'établir, à l'usage des grands
D navires, la communication directe des deux mers par -
» l'isthme, ce qui deviendrait le complément de cette
» grande et importante opération. »
Eh bien ! ce que M. Lepère rêvait il y a soixante ans,
M. Ferdinand de Lesseps l'exécute aujourd'hui.
Nous ne pouvons résister à la tentation d'extraire
quelques vers d'un poëme de M. Charles Valois sur le
sujet qui nous occupe. Les vers, bien frappés, disent
mieux que la prose et s'incrustent plus avant dans la
pensée. On accueillera d'autant mieux ceux-ci que l'Aca-
démie elle-même a proposé, le canal de Suez comme
sujet du concours de poésie de cette année.
Il y a quelques mois à peine c'était le désert :
Au fond du lac français, une langue de terre,
Dont le sauvage aspect s'étend jusques au Caire,
Voit mourir à ses pieds les flots tumultueux
Dont elle arrête enfin le cours impétueux.
C'est le désert!. un mot splendide en poésie,
Un mystère profond, dont notre âme saisie
S'épouvante et s'enivre à la fois. Le désert !.
L'immensité 1 le vide 1 un infini concert
De sons harmonieux, d'harmonieux silence!.
Ah ! la fièvre me prend malgré moi, quand j'y pense !
Je vois encor, je vois les lointains horizons
Chaudement éclairés par les ardents rayons
saintes de la Mecque et de Médine et des populations
de l'Arabie.
Ce canal s'appelait alors le Canal du prince des fidè-
les.
Selon le géographe Alfergan, le fleuve Trajan,
qui passait à la Babylone d'Egypte , était le même
- qui fut appelé plus tard le Canal du prince des fidèles,
et qui coule le long de Fostat (vieux Caire) ; car
Omar, comme il est dit dans l'histoire de la guerre
d'Egypte, ordonna que ce canal fût rouvert, à l'effet
de faire transporter des vivres à Médine et à la
Mecque qui étaient désolées par la famine.
Le calife Omar-ben-el-Khaththab écrivait à Amrou-
ben-el-A'ss une lettre ainsi conçue :
» Au rebelle, fils du rebelle.
« Tandis que toi et tes compagnons vous vous
» engraissez, vous ne vous inquiétez pas si moi et
» les miens nous maigrissons. Donne-nous donc du
D secours.»
— « Je suis à toi, » — répondit Amrou, — « je
* t'envoie un convoi de bêtes de somme, dont la
D première sera chez toi quand la dernière ne
D sera pas encore partie : j'espère en outre trouver
» un autre moyen de transport par mer. »
Mais' Amrou ne tarda pas à se repentir d'avoir
donné cette dernière idée, parce qu'on lui fit observer
que., par* ce canal, il serait possible de dévaster
l'Egypte. Il écrivit donc qu'il avait réfléchi sur le
transport par mer, et qu'il y trouvait des difficultés
insurmontables.
Omar répondit :
« J'ai reçu la lettre par laquelle tu cherches à
» éluder l'exécution du projet conçu dans la précé-
» dente. J'en jure par le Tout-Puissant, tu l'exécu-
» teras, ou je te chasserai par les oreilles, et j'en
» enverrai un qui l'exécutera. — Envoie-moi des
» vêtements, des lentilles, des oignons et des bes-
» tiaux. »
On voit que, depuis cette époque, les correspon-
dances administratives ont perdu en concision ce
qu'elles gagnent en aménité.
Amrou avait la faiblesse de tenir à ses oreilles, il
s'occupa à l'instant même du canal.
Elkensi, dans son ouvrage Aldjend el Moghreby, dit
qu'il fut creusé en l'an 23 de l'hégire (643 de l'ère
chrétienne) et terminé en six mois, de façon à ce
que les vaisseaux y passèrent et purent se rendre
dans l'Hedjaz.
Le canal du prince des fidèles fut fermé cent cinquante
ans après, l'an 159 de l'hégire, sous le règne du
calife Abas Sidi-Abou-Djafar-el-Mansour.
Mon Dieu 1 que tous ces noms turcs et arabes sont
désagréables à prononcer 1 Il vaudrait mieux ne pas
se nommer du tout que de se nommer ainsi. C'est
sans doute ce qui explique pourquoi, en littérature,
les sujets turcs et arabes ne peuvent inspirer le moindre
intérêt.
A peine arrivé sur le sol qu'avaient foulé Sésostris,
Alexandre et César, le.général Bonaparte se hâta d'ac-
courir à Suez pour juger s'il pourrait recommencer
l'œuvre des Pharaons, des Grecs et des Romains.
Le 24 décembre n98, il partait du Caire, et, le 30, il
retrouvait, le premier parmi ses illustres compagnons,
Berthier, Caffarelli, Gantheaume, Monge , Berthollet,
Costaz, les vestiges deTançien canal; il les suivait pen-
dant cinq lieues; puis, après avoir visité les fontaines
de Moïse, il revenait au Caire par l'ouadé Toumilat (terre
de Gessen), et il voyait, le 3 janvier 1799, l'autre extré-
mité du canal des rharaons.
M. Lepère fut chargé de rédiger un mémoire" sur la.
communication de la Méditerranée et la mer Rouge.
Le canal que proposa M. Lepère n'était que l'ancien
canal. D'après ses calculs, ce travail ne devait coûter
que de 25 à 30 millions. La prise d'eau était à Bubaste,
sur le Nil, avec une dérivation sur le Caire, en amont.
Il se dirigeait vers le lac Timsah, et, tournant au sud,
il descendait vers Suez. C'était toujours la pensée d'un
canal destiné uniquement à relier le Nil à. la mer
Rouge.
Seulement, dès lors, l'habile ingénieur avait reconnu
que le vrai, le seul canal à creuser un jour, celui qui
ouvrirait la grande voie maritime réclamée par le com-
merce et la civilisation universelle, serait la coupure
directe de l'isthme, à partir de Suez jusqu'à Péluse.
M. Lepère terminait ainsi son rapport :
a Nous pensons qu'un canal ouvert dans cette direc-
» tion (de Suez à Péluse) présenterait un avantage que
» n'aurait pas le canal intérieur. En effet, la navigation,
1; qui pourrait y être constante, ne serait pas assujettie
> aux alternatives des crues et des décroissements du
» Nil. Il serait facile d'y entretenir une profondeur plus
» considérable. J'ajouterai que si je ne voyais quel-
» ques difficultés à creuser et à entretenir à la profon-
D deur convenable le chemin entre Suez et la rade
» (la force des dragues à vapeur n'était pas encore con-
» nue), je proposerais d'établir, à l'usage des grands
D navires, la communication directe des deux mers par -
» l'isthme, ce qui deviendrait le complément de cette
» grande et importante opération. »
Eh bien ! ce que M. Lepère rêvait il y a soixante ans,
M. Ferdinand de Lesseps l'exécute aujourd'hui.
Nous ne pouvons résister à la tentation d'extraire
quelques vers d'un poëme de M. Charles Valois sur le
sujet qui nous occupe. Les vers, bien frappés, disent
mieux que la prose et s'incrustent plus avant dans la
pensée. On accueillera d'autant mieux ceux-ci que l'Aca-
démie elle-même a proposé, le canal de Suez comme
sujet du concours de poésie de cette année.
Il y a quelques mois à peine c'était le désert :
Au fond du lac français, une langue de terre,
Dont le sauvage aspect s'étend jusques au Caire,
Voit mourir à ses pieds les flots tumultueux
Dont elle arrête enfin le cours impétueux.
C'est le désert!. un mot splendide en poésie,
Un mystère profond, dont notre âme saisie
S'épouvante et s'enivre à la fois. Le désert !.
L'immensité 1 le vide 1 un infini concert
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