Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1861-07-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juillet 1861 15 juillet 1861
Description : 1861/07/15 (A6,N122). 1861/07/15 (A6,N122).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032751
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 231
drie, et communiquant avec cette ville par un petit
chemin de fer établi pour le service exclusif du vice-roi
et de sa maison. C'est là qu'on le prévint, par le télé-
graphe, de notre arrivée, et le jeudi 20, dans la matinée,
il fit savoir au général qu'il l'attendrait à Mariout à
quatre heures du soir ; un train spécial fut mis à notre
disposition à trois heures. Le consul général de
France, M. de Beauval, et Mottet-Bey nous accompa-
gnèrent.
D Mariout est un kiosque d'une modeste élégance au
milieu d'une plaine sans fin, et dont pas un arbre ne
coupe l'horizon. La pièce principale, dans laquelle eut
lieu notre présentation, est une rotonde à colonnes,
entourée de divans : le seul luxe qui nous frappa fut
celui des chibouks, dont les énormes bouts d'ambre,
garnis de pierres précieuses et de diamants, sont d'une
valeur énorme.
D Saïd-Pacha, le vice-roi actuel, est un homme d'une
trentaine d'années, de taille moyenne, très-fort déjà,
mais a la physionomie intelligente et bonne; il parle très-
correctement français, aime les Européens. Son armée
fait son orgueil et devait faire notre étonnement.
» Le général était prévenu que le vice-roi lui offrirait
de passer une revue de ses troupes, qui campent autour
de lui, avec tout leur matériel de guerre. A un s:gnal
donné, onze mille hommes d'infanterie, deux mille hom-
mes de cavalerie et vingt batteries d'artillerie sont sous
les armes, et rangés en colonnes comme pour un de
ces départs précipités dont ils ont l'habitude.
D Nous sortons avec le vice-roi de son habitation; on
nous amène des chevaux richement caparaçonnés, et
nous assistons aux manœuvres que commande lui-même
le général de Beaufort. Nous ne nous attendions certes
pas à rencontrer en Orient des troupes si aguerries et
si exercées; elles possèdent à merveille le maniement
des armes ; leur marche est agile, bien cadencée ;
donnez-leur un commandement européen, et en peu
d'années vous obtiendrez de très-beaux résultats. Toute
l'infanterie, soldats et officiers, est habillée de coutil
blanc avec boutons blancs. La cavalerie, dont les che-
vaux sont fort bien assortis, porte le casque de fer avec
pointe et la cotte de maille serrée autour de la taille par
le baudrier du sabre; ce sont les cuirassiers, l'effet en
est magnifique. D'autres escadrons, dits de chasseurs, ou
cavalerie légère, ont la grande lance des Abyssiniens ;
l'artillerie est complètement organisée à l'européenne
et traîne avec elle ses forges et ses fonderies.
» Aux compliments très-mérités que lui fit le général,
le vice-roi répondit en demandant ce que nous désirions
visiter de l'Egypte, mettant à nos ordres ses chemins
de fer et ses bateaux à vapeur ; c'était nous ouvrir le
chemin du Caire et des Pyramides, qui étaient le but
rêvé de notre excursion en Egypte, et le voyage fut
immédiatement décidé pour le lendemain. S. A. le vice-
roi voulut en faire tous les frais, en préparer le pro-
gramme, et nous n'eûmes qu'à nous laisser conduire.
» N'ayant ni le temps ni la volonté d'écrire un vo-
lume, je dois me borner à notre itinéraire.
» Le 21, à sept heures et demie du matin, les voitures
du vice roi venaient nous prendre à l'hôtel d'Europe
pour nous transporter au chemin de fer qui conduit au
Caire en six heures ordinairement; le train spécial qui
nous attendait fit le trajet en quatre heures. La station
de Kefer-Zayad, située à égale distance d'Alexandrie et
du Caire, a un buffet assez confortable : un magnifique
déjeuner y était préparé pour nous.
» Vers une heure de l'après-midi, nous arrivions au
Caire; des voitures avaient été commandées, et, sans y
penser, nous nous trouvâmes en quelques minutes sur
la place Esbekyeh, au milieu du quartier français, dans
l'hôtel le plus européen qu'on puisse désirer dans la
ville la plus orientale du monde.
» C'est du seuil de la mosquée de Méhémet-Ali, qui
domine la citadelle, qu'on peut vraiment juger et ap-
précier cette ville gigantesque du Caire, qui ne compte
pas moins de 400,000 âmes. Quand nous y mon-
tâmes, le soleil commençait à disparaître, et l'om-
bre rendait plus doux à contempler 1 immense horizon
qui se déroulait autour de nous. Rien ne peut dire l'as-
pect du Caire, rien ne peut lui servir de terme de com-
paraison : il faut le voir par soi-même, il faut voir de
ses yeux ces cinq ou six cents minarets d'où retentit à
certaines heures l'appel à la prière.
» Près la mosquée de Méhémet-Ali, et dans la cita-
delle même, se trouve le palais-caserne que le vice-rci
actuel a fait bâtir, construction immense où il pourra
passer l'hiver au milieu de toutes ses troupes aussi bien
que dans son chalet oriental de Mariout. Je note en pas-
sant, comme souvenir historique, la sortie de la citadelle
où Méhémet-Ali fit massacrer les mamelucks en 1811.
Le théâtre de cette affreuse boucherie est encore au-
jourd'hui tel qu'alors, de même que le jardin où fut as-
sassiné Kléber. au pied d'un arbre qu'on nous a montré,
mais qu'aucune inscription ne désigne au passant.
» Le 22 juin, dès le matin, nous traversions le vieux
Caire, qui longe le Nil, pour aller nous embarquer sur
un des bateaux à vapeur du vice-roi, sur lequel nous
redescendîmes le fleuve jusqu'au barrage et aux ou-
vrages de fortifications qui ont été construits dans ces
dernières années sous la direction de Mottet-Bey, of-
ficier supérieur du génie dans l'armée française.
A l'endroit où le Nil se bifurque pour descendre
à Damiette d'un côté, à Rosette do l'autre, s'élève un
grand fort, communiquant avec le continent par des
ponts sous lesquels doivent se mouvoir vingt-quatre
portes en tôle, qu'on place en ce moment, et maintien-
dront dans le Nil le niveau d'eau nécessaire à la fécon-
dité et à l'irrigation du sol. Deux autres petits forts,
placés de chaque côté du Nil, forment tête de pont et
protègent le Delta contre toute invasion. L'aspectde l'en-
semble est imposant comme le fleuve dont il doit ar-
rêter les flots. C'est un beau monument même dans ce
pays des plus gigantesques constructions que l'esprit
de l'homme puisse imaginer.
» Du barrage, le bateau à vapeur remontant le fleuve,
vient nous déposer sur la rive gauche, au village de
Gyzch, petite bourgade qui semble n'être qu'un repaire
pour les âniers et les ânes sur lesquels les voyageurs
doivent faire l'excursion aux grandes pyramides situées
à 8 kilomètres de là.
» Grâce au galop infernal de ces petits ânes, aussi
drie, et communiquant avec cette ville par un petit
chemin de fer établi pour le service exclusif du vice-roi
et de sa maison. C'est là qu'on le prévint, par le télé-
graphe, de notre arrivée, et le jeudi 20, dans la matinée,
il fit savoir au général qu'il l'attendrait à Mariout à
quatre heures du soir ; un train spécial fut mis à notre
disposition à trois heures. Le consul général de
France, M. de Beauval, et Mottet-Bey nous accompa-
gnèrent.
D Mariout est un kiosque d'une modeste élégance au
milieu d'une plaine sans fin, et dont pas un arbre ne
coupe l'horizon. La pièce principale, dans laquelle eut
lieu notre présentation, est une rotonde à colonnes,
entourée de divans : le seul luxe qui nous frappa fut
celui des chibouks, dont les énormes bouts d'ambre,
garnis de pierres précieuses et de diamants, sont d'une
valeur énorme.
D Saïd-Pacha, le vice-roi actuel, est un homme d'une
trentaine d'années, de taille moyenne, très-fort déjà,
mais a la physionomie intelligente et bonne; il parle très-
correctement français, aime les Européens. Son armée
fait son orgueil et devait faire notre étonnement.
» Le général était prévenu que le vice-roi lui offrirait
de passer une revue de ses troupes, qui campent autour
de lui, avec tout leur matériel de guerre. A un s:gnal
donné, onze mille hommes d'infanterie, deux mille hom-
mes de cavalerie et vingt batteries d'artillerie sont sous
les armes, et rangés en colonnes comme pour un de
ces départs précipités dont ils ont l'habitude.
D Nous sortons avec le vice-roi de son habitation; on
nous amène des chevaux richement caparaçonnés, et
nous assistons aux manœuvres que commande lui-même
le général de Beaufort. Nous ne nous attendions certes
pas à rencontrer en Orient des troupes si aguerries et
si exercées; elles possèdent à merveille le maniement
des armes ; leur marche est agile, bien cadencée ;
donnez-leur un commandement européen, et en peu
d'années vous obtiendrez de très-beaux résultats. Toute
l'infanterie, soldats et officiers, est habillée de coutil
blanc avec boutons blancs. La cavalerie, dont les che-
vaux sont fort bien assortis, porte le casque de fer avec
pointe et la cotte de maille serrée autour de la taille par
le baudrier du sabre; ce sont les cuirassiers, l'effet en
est magnifique. D'autres escadrons, dits de chasseurs, ou
cavalerie légère, ont la grande lance des Abyssiniens ;
l'artillerie est complètement organisée à l'européenne
et traîne avec elle ses forges et ses fonderies.
» Aux compliments très-mérités que lui fit le général,
le vice-roi répondit en demandant ce que nous désirions
visiter de l'Egypte, mettant à nos ordres ses chemins
de fer et ses bateaux à vapeur ; c'était nous ouvrir le
chemin du Caire et des Pyramides, qui étaient le but
rêvé de notre excursion en Egypte, et le voyage fut
immédiatement décidé pour le lendemain. S. A. le vice-
roi voulut en faire tous les frais, en préparer le pro-
gramme, et nous n'eûmes qu'à nous laisser conduire.
» N'ayant ni le temps ni la volonté d'écrire un vo-
lume, je dois me borner à notre itinéraire.
» Le 21, à sept heures et demie du matin, les voitures
du vice roi venaient nous prendre à l'hôtel d'Europe
pour nous transporter au chemin de fer qui conduit au
Caire en six heures ordinairement; le train spécial qui
nous attendait fit le trajet en quatre heures. La station
de Kefer-Zayad, située à égale distance d'Alexandrie et
du Caire, a un buffet assez confortable : un magnifique
déjeuner y était préparé pour nous.
» Vers une heure de l'après-midi, nous arrivions au
Caire; des voitures avaient été commandées, et, sans y
penser, nous nous trouvâmes en quelques minutes sur
la place Esbekyeh, au milieu du quartier français, dans
l'hôtel le plus européen qu'on puisse désirer dans la
ville la plus orientale du monde.
» C'est du seuil de la mosquée de Méhémet-Ali, qui
domine la citadelle, qu'on peut vraiment juger et ap-
précier cette ville gigantesque du Caire, qui ne compte
pas moins de 400,000 âmes. Quand nous y mon-
tâmes, le soleil commençait à disparaître, et l'om-
bre rendait plus doux à contempler 1 immense horizon
qui se déroulait autour de nous. Rien ne peut dire l'as-
pect du Caire, rien ne peut lui servir de terme de com-
paraison : il faut le voir par soi-même, il faut voir de
ses yeux ces cinq ou six cents minarets d'où retentit à
certaines heures l'appel à la prière.
» Près la mosquée de Méhémet-Ali, et dans la cita-
delle même, se trouve le palais-caserne que le vice-rci
actuel a fait bâtir, construction immense où il pourra
passer l'hiver au milieu de toutes ses troupes aussi bien
que dans son chalet oriental de Mariout. Je note en pas-
sant, comme souvenir historique, la sortie de la citadelle
où Méhémet-Ali fit massacrer les mamelucks en 1811.
Le théâtre de cette affreuse boucherie est encore au-
jourd'hui tel qu'alors, de même que le jardin où fut as-
sassiné Kléber. au pied d'un arbre qu'on nous a montré,
mais qu'aucune inscription ne désigne au passant.
» Le 22 juin, dès le matin, nous traversions le vieux
Caire, qui longe le Nil, pour aller nous embarquer sur
un des bateaux à vapeur du vice-roi, sur lequel nous
redescendîmes le fleuve jusqu'au barrage et aux ou-
vrages de fortifications qui ont été construits dans ces
dernières années sous la direction de Mottet-Bey, of-
ficier supérieur du génie dans l'armée française.
A l'endroit où le Nil se bifurque pour descendre
à Damiette d'un côté, à Rosette do l'autre, s'élève un
grand fort, communiquant avec le continent par des
ponts sous lesquels doivent se mouvoir vingt-quatre
portes en tôle, qu'on place en ce moment, et maintien-
dront dans le Nil le niveau d'eau nécessaire à la fécon-
dité et à l'irrigation du sol. Deux autres petits forts,
placés de chaque côté du Nil, forment tête de pont et
protègent le Delta contre toute invasion. L'aspectde l'en-
semble est imposant comme le fleuve dont il doit ar-
rêter les flots. C'est un beau monument même dans ce
pays des plus gigantesques constructions que l'esprit
de l'homme puisse imaginer.
» Du barrage, le bateau à vapeur remontant le fleuve,
vient nous déposer sur la rive gauche, au village de
Gyzch, petite bourgade qui semble n'être qu'un repaire
pour les âniers et les ânes sur lesquels les voyageurs
doivent faire l'excursion aux grandes pyramides situées
à 8 kilomètres de là.
» Grâce au galop infernal de ces petits ânes, aussi
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