Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1861-07-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 juillet 1861 01 juillet 1861
Description : 1861/07/01 (A6,N121). 1861/07/01 (A6,N121).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203274m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 215
Plus distingués et les plus populaires de la Grande-
Bretagne, M. Dickens. Dans le recueil périodique qu'il
publie sous ce titre : Diclœn 's ail the year Round
(Ronde de toute l'année, par Dickens), M. Dickens
vient de nous tracer un tableau du sort des apprentis
dans l'industrie anglaise. Nous puisons cet extrait
dans le Manchester Guardian, qui, reconnaissant
sans doute son exactitude, l'a reproduit lui-même.
« A Wolverhampton, à Willenhall et autres localités
existe une coutume d'apprentissage très-triste dans son
opération : les enfants d'un âge tondre sont engagés
comme apprentis par leurs parents qui reçoivent le sa-
laire stipulé dans le contrat, et l'apprentissage, à quel-
que époque qu'il commence, dure jusqu'à vingt et un
ans. La magistrature oblige les enfants à observer l'en-
gagement par lequel ils sont liés toutes les fois qu'ils
y résistent, quoique leur consentement n'ait jamais été
demandé. L'apprenti fait partie de la propriété du maî-
tre tant qu'il est au-dessous de vingt et un ans ; les
héritiers du maître en héritent dans le cas de mort
de celui-ci. Tel de ces apprentis a été acheté par un
homme à un autre homme pour le prix de 10 shillings
(12 fr. 50) fl n'est pas rare qu'appartenant à un pro-
priétaire sans argent, celui-ci le loue et reçoive le prix
de son travail excédant le salaire qu'il doit aux pa-
rents. L'apprenti est puni par des coups et par la pri-
vation de nourriture. « Je réduirai vos boyaux à l'é-
D tat de cordes à violon ; » c'est là une des formes de
la menace du maître à l'apprenti. « Les parents, dit
» M. Horner, écrivant de Wolverhampton , reçoivent
» l'argent, le maître estime le travail et l'enfant doit
» le faire. H Serait-ce trop de demander qu'aucun enfant
ne puisse être mis en apprentissage avant d'avoir
accompli ses neuf années, ou qu'il ne puisse pas être
engagé pour plus de huit ans , et qu'il ne puisse pas
être lié par un contrat qui n'est pas fait à son profit ?
Serait-ce trop de demander qu'un père ne puisse pas
vendre ou mettre en gage le travail de son enfant pour
trouver les moyens d'acheter de quoi boire ? J)
Voici donc les principaux traits de ce tableau :
des enfants au-dessous de neuf ans vendus jus-
qu'à leur majorité par leur père, ceux-ci recevant
le fruit de leurs labeurs et l'employant à boire ; les
enfants épuisés par les coups et les mauvais traite-
ments. Ces esclaves, car c'est le nom que leur donne
avec raison le Manchester Guardiani en intitulant son
extrait Apprentice Slavery (esclavage des apprentis),
ne peuvent pas même regagner la liberté par la mort
de leur maître ; ils se transmettent comme un meu-
ble à ses héritiers; vendus par leurs parents, ils
peuvent être encore revendus par leurs propriétaires
actuels ; et ils ne sont pas cher, il n'est pas rare qu'on
les achète pour 10 shillings. Mais du moins le colon
a soin de ses nègres ; il les nourrit, il pourvoit à leurs
besoins, sinon comme hommes, au moins comme un
bétail de prix qu'il lui faut conserver. Il paraît qu'il
n'en est pas de même en Angleterre pour les appren-
tis : ou les forme et on les dompte par la faim ; et
quand ils veulent briser des engagements qu'ils n'ont
point contractés, dont ils n'ont que les douleurs sans
aucun bénéfice, ils y sont ramenés par la main sé-
vère de la justice. Voilà ce que l'Angleterre ne voit
pas ou tolère chez elle, tandis qu'elle va chercher au
loin des sujets pour sa sensibilité et sa philanthropie.
Et c'est sur son sol, sous la protection de ses magis-
trats que s'exerce sur ces enfants dès l'âge le plus
tendre cet incroyable trafic de chair humaine, cepen-
dant que ses orateurs viennent s'attendrir sur le sort
des fellahs d'Egypte, cent fois plus heureux et _plus
libres que ses propres apprentis ! -
Que dirait cependant l'Angleterre si l'Egypte, la
Turquie ou la France lui faisaient des représentations
et prétendaient intervenir contre ces vices de sa cons-
titution intérieure !
ERNEST DESPLACE.
LE TRAVAIL INDIGÈNE AU CANAL DE SUEZ.
Nous venons de montrer par des autorités anglai-
ses quel était le sort de la plus intéressante et la
plus faible partie des ouvriers anglais. Voyons main-
tenant quel est le sort des travailleurs indigènes en-
gagés dans les opérations de la Compagnie univer-
selle de Suez.
M. Griffith, nous aimons à lui rendre cet hom-
mage, est un esprit sincère et honnête ; il a toujours
combattu l'intervention impolitique et tracassière de
lord Palmerston dans l'exécution du percement de
l'isthme, et il vient de la blâmer encore Mais M. Grif-
fith, persuadé probablement que les fellahs ne peu-
vent travailler que sous l'influence de la terreur et
de la contrainte, lisant dans le Times que les agri-
culteurs égyptiens étaient enlevés violemment à leurs
moissons pour être transportés dans un désert aride où
ils étaient exposés à mourir de soif et de faim, s'est
cru dans l'obligation d'invoquer les lois de l'huma-
nité, et d'appeler même sur les actes intérieurs
d'un gouvernement étranger l'action de son propre
gouvernement.
Nous n'examinerons pas jusqu'à quel point l'hono-
rable orateur est fidèle, en cette circonstance, au prin-
cipe de non-intervention qu'il a commencé par poser;
nous n'examinerons point quel droit a l'Angleterre à
faire ainsi la police des Etats étrangers ; nous n'exa-
minerons point si elle reconnaîtrait à autrui ce droit
qu'elle s'arroge si souvent ù elle-même. Nous ne sa-
chons point que ses représentants se soient jamais
avisés de demander à leur gouvernement d'agir sur
la Russie pour y imposer l'abrogation du servage,
c'est-à-dire du travail forcé dans tout ce vaste empire.
C'est pourtant la même question. Est-ce à dire que
l'Angleterre ne prétend pas intervenir en Russie
parce que la Russie est forte, et croit pouvoir inter-
Plus distingués et les plus populaires de la Grande-
Bretagne, M. Dickens. Dans le recueil périodique qu'il
publie sous ce titre : Diclœn 's ail the year Round
(Ronde de toute l'année, par Dickens), M. Dickens
vient de nous tracer un tableau du sort des apprentis
dans l'industrie anglaise. Nous puisons cet extrait
dans le Manchester Guardian, qui, reconnaissant
sans doute son exactitude, l'a reproduit lui-même.
« A Wolverhampton, à Willenhall et autres localités
existe une coutume d'apprentissage très-triste dans son
opération : les enfants d'un âge tondre sont engagés
comme apprentis par leurs parents qui reçoivent le sa-
laire stipulé dans le contrat, et l'apprentissage, à quel-
que époque qu'il commence, dure jusqu'à vingt et un
ans. La magistrature oblige les enfants à observer l'en-
gagement par lequel ils sont liés toutes les fois qu'ils
y résistent, quoique leur consentement n'ait jamais été
demandé. L'apprenti fait partie de la propriété du maî-
tre tant qu'il est au-dessous de vingt et un ans ; les
héritiers du maître en héritent dans le cas de mort
de celui-ci. Tel de ces apprentis a été acheté par un
homme à un autre homme pour le prix de 10 shillings
(12 fr. 50) fl n'est pas rare qu'appartenant à un pro-
priétaire sans argent, celui-ci le loue et reçoive le prix
de son travail excédant le salaire qu'il doit aux pa-
rents. L'apprenti est puni par des coups et par la pri-
vation de nourriture. « Je réduirai vos boyaux à l'é-
D tat de cordes à violon ; » c'est là une des formes de
la menace du maître à l'apprenti. « Les parents, dit
» M. Horner, écrivant de Wolverhampton , reçoivent
» l'argent, le maître estime le travail et l'enfant doit
» le faire. H Serait-ce trop de demander qu'aucun enfant
ne puisse être mis en apprentissage avant d'avoir
accompli ses neuf années, ou qu'il ne puisse pas être
engagé pour plus de huit ans , et qu'il ne puisse pas
être lié par un contrat qui n'est pas fait à son profit ?
Serait-ce trop de demander qu'un père ne puisse pas
vendre ou mettre en gage le travail de son enfant pour
trouver les moyens d'acheter de quoi boire ? J)
Voici donc les principaux traits de ce tableau :
des enfants au-dessous de neuf ans vendus jus-
qu'à leur majorité par leur père, ceux-ci recevant
le fruit de leurs labeurs et l'employant à boire ; les
enfants épuisés par les coups et les mauvais traite-
ments. Ces esclaves, car c'est le nom que leur donne
avec raison le Manchester Guardiani en intitulant son
extrait Apprentice Slavery (esclavage des apprentis),
ne peuvent pas même regagner la liberté par la mort
de leur maître ; ils se transmettent comme un meu-
ble à ses héritiers; vendus par leurs parents, ils
peuvent être encore revendus par leurs propriétaires
actuels ; et ils ne sont pas cher, il n'est pas rare qu'on
les achète pour 10 shillings. Mais du moins le colon
a soin de ses nègres ; il les nourrit, il pourvoit à leurs
besoins, sinon comme hommes, au moins comme un
bétail de prix qu'il lui faut conserver. Il paraît qu'il
n'en est pas de même en Angleterre pour les appren-
tis : ou les forme et on les dompte par la faim ; et
quand ils veulent briser des engagements qu'ils n'ont
point contractés, dont ils n'ont que les douleurs sans
aucun bénéfice, ils y sont ramenés par la main sé-
vère de la justice. Voilà ce que l'Angleterre ne voit
pas ou tolère chez elle, tandis qu'elle va chercher au
loin des sujets pour sa sensibilité et sa philanthropie.
Et c'est sur son sol, sous la protection de ses magis-
trats que s'exerce sur ces enfants dès l'âge le plus
tendre cet incroyable trafic de chair humaine, cepen-
dant que ses orateurs viennent s'attendrir sur le sort
des fellahs d'Egypte, cent fois plus heureux et _plus
libres que ses propres apprentis ! -
Que dirait cependant l'Angleterre si l'Egypte, la
Turquie ou la France lui faisaient des représentations
et prétendaient intervenir contre ces vices de sa cons-
titution intérieure !
ERNEST DESPLACE.
LE TRAVAIL INDIGÈNE AU CANAL DE SUEZ.
Nous venons de montrer par des autorités anglai-
ses quel était le sort de la plus intéressante et la
plus faible partie des ouvriers anglais. Voyons main-
tenant quel est le sort des travailleurs indigènes en-
gagés dans les opérations de la Compagnie univer-
selle de Suez.
M. Griffith, nous aimons à lui rendre cet hom-
mage, est un esprit sincère et honnête ; il a toujours
combattu l'intervention impolitique et tracassière de
lord Palmerston dans l'exécution du percement de
l'isthme, et il vient de la blâmer encore Mais M. Grif-
fith, persuadé probablement que les fellahs ne peu-
vent travailler que sous l'influence de la terreur et
de la contrainte, lisant dans le Times que les agri-
culteurs égyptiens étaient enlevés violemment à leurs
moissons pour être transportés dans un désert aride où
ils étaient exposés à mourir de soif et de faim, s'est
cru dans l'obligation d'invoquer les lois de l'huma-
nité, et d'appeler même sur les actes intérieurs
d'un gouvernement étranger l'action de son propre
gouvernement.
Nous n'examinerons pas jusqu'à quel point l'hono-
rable orateur est fidèle, en cette circonstance, au prin-
cipe de non-intervention qu'il a commencé par poser;
nous n'examinerons point quel droit a l'Angleterre à
faire ainsi la police des Etats étrangers ; nous n'exa-
minerons point si elle reconnaîtrait à autrui ce droit
qu'elle s'arroge si souvent ù elle-même. Nous ne sa-
chons point que ses représentants se soient jamais
avisés de demander à leur gouvernement d'agir sur
la Russie pour y imposer l'abrogation du servage,
c'est-à-dire du travail forcé dans tout ce vaste empire.
C'est pourtant la même question. Est-ce à dire que
l'Angleterre ne prétend pas intervenir en Russie
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