Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1861-06-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 juin 1861 01 juin 1861
Description : 1861/06/01 (A6,N119). 1861/06/01 (A6,N119).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203272s
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 14/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 187
L'ÉTAT DE LA QUESTION EN ANGLETERRE.
« Nous attendons le moment où l'on pourra navi-
» guer à travers cette langue de terre ; nous éprou-
» vons le besoin de passer l'isthme de Suez à la
» voile; nos ports sont remplis de bons et solides
» vaisseaux bien chargés, prêts à payer à la Com-
» pagnie toute redevance raisonnable pour effectuer
» leur passage. La Compagnie a contracté une dette
» envers le monde et envers l'Angleterre; nous re-
>; clamons l'accomplissement de ses magnifiques
» promesses. Oui, nous sommes prêts à acquitter vo-
» tre péage, nous ne demandons qu'à jouir des bé-
» néfices de votre succès. Après tout il nous faut
» notre canal, ou, si nous ne l'avons pas, il faut au
» moins qu'avec des raisons excellentes et irréfuta-
» bles on nous dise pourquoi. D
Ainsi parlait le Tim.es dans les derniers jours de
l'année dernière, et le 1er janvier nous enregistrions
avec joie, pour nos étrennes, ces brûlantes protesta-
tions. Notre confrère, en effet, avait reçu d'Alexan-
drie des nouvelles qui l'avaient désolé. On lui avait
fait croire que les travaux ne marchaient pas, que
tout était mort ou paralysé dans l'isthme, que la
Compagnie se croisait tranquillement les bras, et la
diplomatie anglaise agissait de son côté à Constan-
tinople pour les lui lier le plus étroitement possible.
Il s'émeut et se récrie, il réclame son canal : c'est le
vœu, c'est l'intérêt de l'Angleterre; il veut son ca-
nal, il lui faut son canal.
Après avoir entendu et recueilli ces vives signifi-
cations, nous attendions avec une confiance impa-
tiente les foudres que le Times ne pouvait point
manquer, selon nous, de faire éclater sur la tête des
orateurs ayant pris part, le 6 mai, aux débats de la
Chambre des lords.
Nous avons attendu longtemps, car il ne s'est dé-
cidé à parler de cette séance que le 25 mai. Mais
qu'on juge de notre stupéfaction à la lecture de son
article : le Times a perdu toute sa verve d'apostro-
phes : il exigeait le canal quand il pensait qu'il ne
marchait pas; il n'y voyait alors que des avantages
et des charmes, et maintenant qu'il avance, qu'il ne
peut plus se dissimuler qu'on y travaille avec éner-
gie, il y découvre une multitude de dangers et d'in-
convénients. Le canal cache un mystère, comme le
billet doux de la Dame blanche: le canal n'est pas si
commercial qu'on le croit et il est plus politique
qu'on ne le suppose ; le canal manque de l'autorisation
du sultan, et le Times ne peut pas le comprendre
sans cette autorisation ; la neutralité de l'Egypte est
une nécessité européenne, et cette neutralité est com„
promise par la cession non autorisée d'un district
considérable de l'Egypte à la France. L'isthme de
Suez est à l'océan Indien ce que le Bosphore est au
Pont-Euxin. Le canal de Péluse à Suez, coupant le
lac Menzaleh et le lac Timsah, va devenir une des
plus importantes lignes stratégiques du monde. Si
le canal a des bénéfices, ils entreront dans d'autres
bourses que dans celles des actionnaires ; s'il fait des
pertes, les infortunés actionnaires les supporteront
toutes. L'isthme de Suez est un. isthme formidable
où il n'est pas bon de s'aventurer, et s'ils n'y pren-
nent garde, les pionniers imprudents qui vont braver
les périls de l'entréprise seront abandonnés par Na-
poléon III sur cette terre dévorante, comme, dans
l'autre siècle, les aventuriers qui allèrent essayer de
percer l'isthme de Darien furent abandonnés par
Guillaume III à la mortalité du climat et au fer
des indigènes.
Or il nous semble que si ce tableau si varié et si
chargé est vrai, il l'était dans les derniers jours de
décembre tout aussi bien que dans les derniers jours
de mai. Pourquoi donc en décembre ces excitations
et cet enthousiasme, et pourquoi en mai ces décou-
ragements et ces désenchantements ?
Nous ne consentons point à supposer qu'en décem-
bre, le Times voulait absolument le canal parce qu'il
avait ses raisons pour le croire menacé, et qu'en
mai il s'y intéresse beaucoup moins parce que l'œuvre
est dans de très-bonnes conditions de présent et d'a-
venir.
Nous ne serions point juste d'ailleurs en admettant
cette hypothèse peu charitable; car, au fond, malgré
ses réserves et ses tergiversations, le nouvel article dp.
Times nous paraît de nature à faire avancer et
aboutir la question.
Il nous démontre d'abord que nous ne nous étions
pas trompé dans notre appréciation du débat de la
chambre haute et des commentaires qu'y avait at-
tachés le Morning-Post, organe plus intime de lord
Palmerston. Nous observons d'abord une modifica-
tion très-notable dans le sentiment des orateurs et
des journalistes anglais sur la possibilité si contestée
du canal. Jusqu'ici l'opinion de M. Stephenson sem-
blait faire article de foi en Angleterre, et les défen-
seurs eux-mêmes du percement de l'isthme n'osaient
en parler qu'avec une sorte de superstitieuse timidité.
Lord Carnarvon à la Chambre des lords a été le pre-
mier à déclarer qu'il n'exprimait qu'avec défiance
son incrédulité sur la possibilité du projet. Le Times
va plus loin ; il reconnaît que l'habileté de nos
ingénieurs et les progrès de la science, qui dans
notre siècle a opéré tant de miracles, pourraient
bien surmonter les obstacles devant lesquelles on au-
rait succombé au temps du pharaon Nécos. Le Mor-
ning-Post enchérit encore sur ces deux concessions;
il ne recule point enfin devant l'aveu qu'une commis-
sion composée d'hommes éminents parmi les ingénienrs
et marins de l'Europe, a scientifiquement prononcé la
solution possible et même facile du problème, et que
L'ÉTAT DE LA QUESTION EN ANGLETERRE.
« Nous attendons le moment où l'on pourra navi-
» guer à travers cette langue de terre ; nous éprou-
» vons le besoin de passer l'isthme de Suez à la
» voile; nos ports sont remplis de bons et solides
» vaisseaux bien chargés, prêts à payer à la Com-
» pagnie toute redevance raisonnable pour effectuer
» leur passage. La Compagnie a contracté une dette
» envers le monde et envers l'Angleterre; nous re-
>; clamons l'accomplissement de ses magnifiques
» promesses. Oui, nous sommes prêts à acquitter vo-
» tre péage, nous ne demandons qu'à jouir des bé-
» néfices de votre succès. Après tout il nous faut
» notre canal, ou, si nous ne l'avons pas, il faut au
» moins qu'avec des raisons excellentes et irréfuta-
» bles on nous dise pourquoi. D
Ainsi parlait le Tim.es dans les derniers jours de
l'année dernière, et le 1er janvier nous enregistrions
avec joie, pour nos étrennes, ces brûlantes protesta-
tions. Notre confrère, en effet, avait reçu d'Alexan-
drie des nouvelles qui l'avaient désolé. On lui avait
fait croire que les travaux ne marchaient pas, que
tout était mort ou paralysé dans l'isthme, que la
Compagnie se croisait tranquillement les bras, et la
diplomatie anglaise agissait de son côté à Constan-
tinople pour les lui lier le plus étroitement possible.
Il s'émeut et se récrie, il réclame son canal : c'est le
vœu, c'est l'intérêt de l'Angleterre; il veut son ca-
nal, il lui faut son canal.
Après avoir entendu et recueilli ces vives signifi-
cations, nous attendions avec une confiance impa-
tiente les foudres que le Times ne pouvait point
manquer, selon nous, de faire éclater sur la tête des
orateurs ayant pris part, le 6 mai, aux débats de la
Chambre des lords.
Nous avons attendu longtemps, car il ne s'est dé-
cidé à parler de cette séance que le 25 mai. Mais
qu'on juge de notre stupéfaction à la lecture de son
article : le Times a perdu toute sa verve d'apostro-
phes : il exigeait le canal quand il pensait qu'il ne
marchait pas; il n'y voyait alors que des avantages
et des charmes, et maintenant qu'il avance, qu'il ne
peut plus se dissimuler qu'on y travaille avec éner-
gie, il y découvre une multitude de dangers et d'in-
convénients. Le canal cache un mystère, comme le
billet doux de la Dame blanche: le canal n'est pas si
commercial qu'on le croit et il est plus politique
qu'on ne le suppose ; le canal manque de l'autorisation
du sultan, et le Times ne peut pas le comprendre
sans cette autorisation ; la neutralité de l'Egypte est
une nécessité européenne, et cette neutralité est com„
promise par la cession non autorisée d'un district
considérable de l'Egypte à la France. L'isthme de
Suez est à l'océan Indien ce que le Bosphore est au
Pont-Euxin. Le canal de Péluse à Suez, coupant le
lac Menzaleh et le lac Timsah, va devenir une des
plus importantes lignes stratégiques du monde. Si
le canal a des bénéfices, ils entreront dans d'autres
bourses que dans celles des actionnaires ; s'il fait des
pertes, les infortunés actionnaires les supporteront
toutes. L'isthme de Suez est un. isthme formidable
où il n'est pas bon de s'aventurer, et s'ils n'y pren-
nent garde, les pionniers imprudents qui vont braver
les périls de l'entréprise seront abandonnés par Na-
poléon III sur cette terre dévorante, comme, dans
l'autre siècle, les aventuriers qui allèrent essayer de
percer l'isthme de Darien furent abandonnés par
Guillaume III à la mortalité du climat et au fer
des indigènes.
Or il nous semble que si ce tableau si varié et si
chargé est vrai, il l'était dans les derniers jours de
décembre tout aussi bien que dans les derniers jours
de mai. Pourquoi donc en décembre ces excitations
et cet enthousiasme, et pourquoi en mai ces décou-
ragements et ces désenchantements ?
Nous ne consentons point à supposer qu'en décem-
bre, le Times voulait absolument le canal parce qu'il
avait ses raisons pour le croire menacé, et qu'en
mai il s'y intéresse beaucoup moins parce que l'œuvre
est dans de très-bonnes conditions de présent et d'a-
venir.
Nous ne serions point juste d'ailleurs en admettant
cette hypothèse peu charitable; car, au fond, malgré
ses réserves et ses tergiversations, le nouvel article dp.
Times nous paraît de nature à faire avancer et
aboutir la question.
Il nous démontre d'abord que nous ne nous étions
pas trompé dans notre appréciation du débat de la
chambre haute et des commentaires qu'y avait at-
tachés le Morning-Post, organe plus intime de lord
Palmerston. Nous observons d'abord une modifica-
tion très-notable dans le sentiment des orateurs et
des journalistes anglais sur la possibilité si contestée
du canal. Jusqu'ici l'opinion de M. Stephenson sem-
blait faire article de foi en Angleterre, et les défen-
seurs eux-mêmes du percement de l'isthme n'osaient
en parler qu'avec une sorte de superstitieuse timidité.
Lord Carnarvon à la Chambre des lords a été le pre-
mier à déclarer qu'il n'exprimait qu'avec défiance
son incrédulité sur la possibilité du projet. Le Times
va plus loin ; il reconnaît que l'habileté de nos
ingénieurs et les progrès de la science, qui dans
notre siècle a opéré tant de miracles, pourraient
bien surmonter les obstacles devant lesquelles on au-
rait succombé au temps du pharaon Nécos. Le Mor-
ning-Post enchérit encore sur ces deux concessions;
il ne recule point enfin devant l'aveu qu'une commis-
sion composée d'hommes éminents parmi les ingénienrs
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