Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-11-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 novembre 1863 15 novembre 1863
Description : 1863/11/15 (A8,N178). 1863/11/15 (A8,N178).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032573
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
444 L'ISTHME DE SUEZ,
et n'engageait point le gouvernement égyptien. Is-
maïl-Pacha n'a pas songé un seul instant à invoquer
cette distinction. En acceptant la solidarité des obliga-
tions de son prédécesseur, il eût pu au moins s'en te-
nir aux conditions de libération que la Compagnie avait
été forcée d'accepter. Certes, M. de Lesseps et le con-
seil de la Compagnie n'avaient pas le droit de s'atten-
dre à être mieux traités par lui que par Saïd.
» Cependant, au moment même où la Porte se prépa-
rait à revendiquer les droits qui lui ont été réservés
quant à la sanction de l'entreprise du percement de
l'isthme, le vice-roi d'Egypte, spontanément, a voulu
mettre la constitution financière de la Compagnie à
l'abri de toute contestation; il n'a pas voulu profiter
des termes de paiement que M. de Lesseps avait été
forcé d'accorder à Saïd-Pacba, et s'est mis au niveau
des autres actionnaires, en effectuant à l'avance des
paiements que Saïd ne devait, commencer qu'en 186*7,
pour les achever en 1814!
» Le premier acte d'Ismaïl-Pacha a doiic été de ré-
gulariser la situation financière de la Compagnie, en
faisant des avances et des sacrifices auxquels il n'était
pas tenu, en déchargeant M. de Lesseps et le conseil
de soucis et de responsabilités considérables. Il est au-
jourd'hui, au même titre onéreux que les autres sous-
cripteurs, actionnaire de la Compagnie pour un nombre
d'actions qui représentent 86 millions ! Et c'est le prince
qui a rendu spontanément un tel service à la Compa-
gnie qui voit aujourd'hui ses ouvertures pour la régu-
larisation sociale de la Compagnie si brusquement et
si bruyamment repoussées.
» Nous disons la régularisation légale de la Compa-
gnie. La condition suprême de l'existence de la Com-
pagnie et du percement de l'isthme est, en effet, la
sanction du gouvernement suzerain de la Porte. L'acte
de concession du canal impose sérieusement cette con-
dition à la Compagnie. M. de Lesseps, dans une décla-
ration remise par lui à Said-Pacha, a reconnu cette
obligation dans les termes les plus formels : « Je sous-
» signé,. au moment de me rendre en Europe pour
» préparer les moyens de formation de la Compagnie
» universelle du canal de Suez, dont l'organisation et
• la direction me sont exclusivement confiées, recon-
» nais avoir accepté et avoir reçu les pouvoirs de S.
» A. Mohammed-Saïd-Pacha, sans qu'elle ait à encou-
» rir aucune espèce de responsabilité, soit à mon
» égard, soit envers les personnes qui s'intéressent dans
» ladite Compagnie, laquelle ne pourra fonctionner
» qu'après la ratification de S. M. I. le sultan. »
» Cette ratification, on le sait, n'a jamais eu lieu;
Said-Pacha n'a cessé d'en maintenir la nécessité, par
des protestations et des réserves suivant les circons-
tances. Mais il serait oiseux de parler du passé. Le
changement de règne en Egypte devait donner une
opportunité toute nouvelle à cette question de ratifi-
cation. Il était naturel que la Porte en rappelât l'obli-
gation à un nouveau vice-roi ; il était naturel qu'un
nouveau vice-roi, pour s'affranchir des difficultés ex-
térieures et intérieures que pouvait lui susciter la si-
tuation incertaine, au point de vue de la légalité poli,
tique, de l'entreprise du canal, eût à cœur de se met-
tre en règle vis-à-vis de la puissance suzeraine, vis-à-
vis de la Porte.
» Enfin, le3 actionnaires de la Compagnie ont eux-
mêmes le plus puissant et le plus grand intérêt à fixer
leur situation à cet égard. Est-il prudent à eux d'a-
venturer leurs capitaux aux hasards d'une position
politique irrégulière ; de demeurer à la merci de tous
les accidents qui peuvent survenir dans la question
d'Orient, des caprices d'un prince égyptien ou d'un
ministre ottoman; de n'avoir enfin entre les mains
pour titre qu'un contrat soumis à une clause condi-
tionnelle qu'ils n'auraient jamais remplie? Il n'est vrai-
ment pas permis d'abandonner par négligence, par
mauvais vouloir, par obstination vaine, une grande
affaire à des chances si aléatoires.
» La présence d'un nouveau prince à la tête du gou-
vernement égyptien était une occasion naturelle de
concilier ces divers et importants intérêts. Le nouveau
vice-roi était le médiateur désigné entre la Porte, ac-
cusée de malveillance contre le canal, et la Compa-
gnie. Il semble, d'après les publications actuelles de
M. de Lesseps, que le gouvernement égyptien se croie
sûr d'obtenir la sanction de la Porte à deux conditions:
suppression des concessions de terre arrosées par le
canal, abolition du système des corvées et organisa-
tion nouvelle de la main-d'œuvre employée au perce-
ment de l'isthme. C'est sur ces deux questions que
doit porter évidemment le débat soulevé par les publi-
cations du conseil de la Compagnie. Ce débat nous pa-
rait destiné à se prolonger, et nous en parcourrons les
divers points. Pour aujourd'hui, nous ne dirons qu'un
mot de la question des corvées.
» Il suffit de se rendre compte de l'organisation du
système des corvées pour comprendre les graves in-
convénients que ce système présente au point de vue
de la population et du gouvernement égyptien. La
Compagnie emploie jusqu'à vingt mille travailleurs
qui se relaient de mois en mois. Ces travailleurs,
recrutés de tous les points de l'Egypte, mettent en
moyenne quinze jours pour arriver aux chantiers et
quinze jours pour s'en retourner. On peut donc calcu-
ler, en comptant l'aller, le séjour et le retour, que cette
organisation donne lieu à un mouvement de soixante
mille hommes par mois. En multipliant ce chiffre par
douze, on voit que c'est un mouvement de sept cent
vingt mille hommes par année. Ce chiffre paraîtra plus
énorme si l'on prend garde qu'il ressort sur une po-
pulation de quatre millions d'âmes.
» Nous ne parlons pas de la question d'humanité, du
sort de ces malheureux fellahs obligés ainsi d'aller
travailler au désert, condamnés à de longs et pénibles
voyages ; mais il saute aux yeux qu'au point de vue
économique, ce système est détestable et jette une vé-
ritable perturbation dans les conditions de la main-
d'œuvre en Egypte. Une Compagnie qui a la prétention
d'importer en Orient la civilisation française, devrait
avoir hâte de renoncer à une combinaison si vicieuse.
Le système proposé par le vice-roi paraît à la fois plus
rationnel, plus humain, plus conforme à la bonne éco-
nomie du travail.
et n'engageait point le gouvernement égyptien. Is-
maïl-Pacha n'a pas songé un seul instant à invoquer
cette distinction. En acceptant la solidarité des obliga-
tions de son prédécesseur, il eût pu au moins s'en te-
nir aux conditions de libération que la Compagnie avait
été forcée d'accepter. Certes, M. de Lesseps et le con-
seil de la Compagnie n'avaient pas le droit de s'atten-
dre à être mieux traités par lui que par Saïd.
» Cependant, au moment même où la Porte se prépa-
rait à revendiquer les droits qui lui ont été réservés
quant à la sanction de l'entreprise du percement de
l'isthme, le vice-roi d'Egypte, spontanément, a voulu
mettre la constitution financière de la Compagnie à
l'abri de toute contestation; il n'a pas voulu profiter
des termes de paiement que M. de Lesseps avait été
forcé d'accorder à Saïd-Pacba, et s'est mis au niveau
des autres actionnaires, en effectuant à l'avance des
paiements que Saïd ne devait, commencer qu'en 186*7,
pour les achever en 1814!
» Le premier acte d'Ismaïl-Pacha a doiic été de ré-
gulariser la situation financière de la Compagnie, en
faisant des avances et des sacrifices auxquels il n'était
pas tenu, en déchargeant M. de Lesseps et le conseil
de soucis et de responsabilités considérables. Il est au-
jourd'hui, au même titre onéreux que les autres sous-
cripteurs, actionnaire de la Compagnie pour un nombre
d'actions qui représentent 86 millions ! Et c'est le prince
qui a rendu spontanément un tel service à la Compa-
gnie qui voit aujourd'hui ses ouvertures pour la régu-
larisation sociale de la Compagnie si brusquement et
si bruyamment repoussées.
» Nous disons la régularisation légale de la Compa-
gnie. La condition suprême de l'existence de la Com-
pagnie et du percement de l'isthme est, en effet, la
sanction du gouvernement suzerain de la Porte. L'acte
de concession du canal impose sérieusement cette con-
dition à la Compagnie. M. de Lesseps, dans une décla-
ration remise par lui à Said-Pacha, a reconnu cette
obligation dans les termes les plus formels : « Je sous-
» signé,. au moment de me rendre en Europe pour
» préparer les moyens de formation de la Compagnie
» universelle du canal de Suez, dont l'organisation et
• la direction me sont exclusivement confiées, recon-
» nais avoir accepté et avoir reçu les pouvoirs de S.
» A. Mohammed-Saïd-Pacha, sans qu'elle ait à encou-
» rir aucune espèce de responsabilité, soit à mon
» égard, soit envers les personnes qui s'intéressent dans
» ladite Compagnie, laquelle ne pourra fonctionner
» qu'après la ratification de S. M. I. le sultan. »
» Cette ratification, on le sait, n'a jamais eu lieu;
Said-Pacha n'a cessé d'en maintenir la nécessité, par
des protestations et des réserves suivant les circons-
tances. Mais il serait oiseux de parler du passé. Le
changement de règne en Egypte devait donner une
opportunité toute nouvelle à cette question de ratifi-
cation. Il était naturel que la Porte en rappelât l'obli-
gation à un nouveau vice-roi ; il était naturel qu'un
nouveau vice-roi, pour s'affranchir des difficultés ex-
térieures et intérieures que pouvait lui susciter la si-
tuation incertaine, au point de vue de la légalité poli,
tique, de l'entreprise du canal, eût à cœur de se met-
tre en règle vis-à-vis de la puissance suzeraine, vis-à-
vis de la Porte.
» Enfin, le3 actionnaires de la Compagnie ont eux-
mêmes le plus puissant et le plus grand intérêt à fixer
leur situation à cet égard. Est-il prudent à eux d'a-
venturer leurs capitaux aux hasards d'une position
politique irrégulière ; de demeurer à la merci de tous
les accidents qui peuvent survenir dans la question
d'Orient, des caprices d'un prince égyptien ou d'un
ministre ottoman; de n'avoir enfin entre les mains
pour titre qu'un contrat soumis à une clause condi-
tionnelle qu'ils n'auraient jamais remplie? Il n'est vrai-
ment pas permis d'abandonner par négligence, par
mauvais vouloir, par obstination vaine, une grande
affaire à des chances si aléatoires.
» La présence d'un nouveau prince à la tête du gou-
vernement égyptien était une occasion naturelle de
concilier ces divers et importants intérêts. Le nouveau
vice-roi était le médiateur désigné entre la Porte, ac-
cusée de malveillance contre le canal, et la Compa-
gnie. Il semble, d'après les publications actuelles de
M. de Lesseps, que le gouvernement égyptien se croie
sûr d'obtenir la sanction de la Porte à deux conditions:
suppression des concessions de terre arrosées par le
canal, abolition du système des corvées et organisa-
tion nouvelle de la main-d'œuvre employée au perce-
ment de l'isthme. C'est sur ces deux questions que
doit porter évidemment le débat soulevé par les publi-
cations du conseil de la Compagnie. Ce débat nous pa-
rait destiné à se prolonger, et nous en parcourrons les
divers points. Pour aujourd'hui, nous ne dirons qu'un
mot de la question des corvées.
» Il suffit de se rendre compte de l'organisation du
système des corvées pour comprendre les graves in-
convénients que ce système présente au point de vue
de la population et du gouvernement égyptien. La
Compagnie emploie jusqu'à vingt mille travailleurs
qui se relaient de mois en mois. Ces travailleurs,
recrutés de tous les points de l'Egypte, mettent en
moyenne quinze jours pour arriver aux chantiers et
quinze jours pour s'en retourner. On peut donc calcu-
ler, en comptant l'aller, le séjour et le retour, que cette
organisation donne lieu à un mouvement de soixante
mille hommes par mois. En multipliant ce chiffre par
douze, on voit que c'est un mouvement de sept cent
vingt mille hommes par année. Ce chiffre paraîtra plus
énorme si l'on prend garde qu'il ressort sur une po-
pulation de quatre millions d'âmes.
» Nous ne parlons pas de la question d'humanité, du
sort de ces malheureux fellahs obligés ainsi d'aller
travailler au désert, condamnés à de longs et pénibles
voyages ; mais il saute aux yeux qu'au point de vue
économique, ce système est détestable et jette une vé-
ritable perturbation dans les conditions de la main-
d'œuvre en Egypte. Une Compagnie qui a la prétention
d'importer en Orient la civilisation française, devrait
avoir hâte de renoncer à une combinaison si vicieuse.
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