Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-11-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 novembre 1863 15 novembre 1863
Description : 1863/11/15 (A8,N178). 1863/11/15 (A8,N178).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032573
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. ji3
« J'ai vu Aali et Fuad-Pacha ; je les ai trouvés dans
les mêmes dispositions, c'est-à-dire toujours favorables
au canal, et très-désirëux d'établir publiquement que LA
PORTE N'OPPOSE DE SON CHEF AUCUN OBSTACLE à la
réalisation de votre grande entreprise. »
» Le sultan Abdul-Medjid portait au projet une
vive sympathie. M. de Lesseps déclare en avoir reçu
l'assurance de sa. bouche. Mes renseignements me
mettent à même d'affirmer que les dispositions du
sultan Abdul-Aziz ne sont pas moins favorables.
L'esprit de ce prince est surtout pénétré de la force
que retirerait à la fois son pouvoir religieux et poli-
tique d'une voie d'introduction toujours facile et
toujours assurée à sa marine dans la mer Rouge.
1 » Malheureusement la Turquie est faible et ne
s'appartient pas. Destinée à l'affranchir, la guerre
de Crimée n'a pas atteint ce but; la Porte n'a fait
que changer de pression. Elle a tout simplement
passé du joug moscovite sous le joug britannique.
» C'est ainsi que, placée entre son intérêt et ses
craintes, entre l'intimidation qui l'obsède et le désir
de céder aux vœux de la civilisation qui l'invoque,
la Turquie hésite, recule, avance, se tait, parle, agit,
et tout en finissant par succomber sous les coërci..
tions de la diplomatie anglaise toujours altière et
menaçante à ses côtés, n'y cède qu'avec répu-
gnance.
» J'en donnerai un exemple. Il est célèbre.
» En 1860, les opérations du canal commencent à
se développer. Elles marchent, et la diplomatie an-
glaise s'inquiète. A force de manœuvres, elle arrache
au Divan une manifestation qu'elle croit décisive.
Mouktar-Bey part pour l'Egypte avec la fameuse
mission d'ordonner et d'effectuer la suspension des
travaux. Tout est en émoi à Alexandrie; les consuls
sont convoqués ; l'ordre fatal leur est officiellement
communiqué. Un télégramme du gouvernement
français survient qui s'oppose à cet acte de violence.
Tout est fini. Mouktar-Bey s'en retourne paisible-
ment à Constantinople, et la Porte, heureuse de pou-
voir échapper à la contrainte britannique, retire son
ordre et s'abstient.
» Après cet échec éclatant la diplomatie anglaise
se tint plus tranquille, c'est-à-dire que la Porte laissa
se continuer en toute paix les travaux de l'isthme
de Suez.
» Toutefois, en 1862, la situation se dessine. Le
seuil d'El-Guisr est percé ; les eaux de la Méditer-
ranée sont amenées au lac Timsah, au centre de
l'isthme. En fait, dès lors, le problème de l'impossi-
bilité prétendue du canal est résolu pratiquement,
car quatre fois le canal a été établi par les anciens
du lac Timsah à la mer Rouge. Cet événement ré-
jouit le monde. Il irrite la vieille Angleterre. En
même temps une mission importante était donnée
par S. A. Mohammed-Saïd à M. Hawkshaw, éminent
ingénieur de Londres. Celui ci se transporte sur le
terrain de l'isthme ; il y inspecte l'état des choses,
et l'on apprend que ses conclusions sont favorables à
l'exécution de l'œuvre. C'est en ce moment que sir
Henry Bulwer, ambassadeur anglais à Constantino-
ple, se rend en Egypte et va de sa personne vérifier
l'état des travaux. Il en revient frappé des résultats
obtenus. Il ne doute plus que l'œuvre ne s'achève.
Il communique ses impressions à son gouvernement,
et il sent que des mesures extrêmes et suprêmes sont
indispensables et urgentes, si l'on veut que le canal
ne s'exécute point.
» Aussitôt et sans perdre un jour, un complot est
ourdi par ce diplomate à Constantinople. Les dates
ici sont expressives. Sir Henry était encore dans
l'isthme à la fin de décembre dernier, et le complot
était organisé, prêt à agir dès le mois de mars sui-
vant. L'occasion semblait belle. Mohammed-Saïd,
que l'on n'avait pu dompter, venait de mourir. Un
changement de règne pouvait être une opportunité
heureuse. La visite du sultan au nouveau vice-roi
fournissait l'occasion de faire éclater la machine.
L'ambassadeur anglais se multipliait auprès des mi-
nistres ottomans, obsédait le sultan de ses demandes
d'audience ; sa ferveur était telle, que dédaignant
toutes les lois des convenances et les règles de l'éti-
quette, il allait poursuivre le sultan, pour qu'il eût
son dernier mot, jusqu'à bord du vaisseau qui le
portait vers Alexandrie.
» Il faisait plus. Il poursuivait en Egypte le sultan
de sa surveillance ; ses télégrammes, ses courriers,
ses envoyés, jusqu'à ses secrétaires personnels se
succédaient sans relâche sur le théâtre de la conspi-
ration dont il avait dicté lui-même le programme
daus une note devenue célèbre sous le nom de note
du 6 avril. Heureusement la fermeté de M. Tastu,
notre consul général en Egypte, muni des instruc-
tions de son gouvernement, étouffa le complot dans
son germe, et une seconde fois la Porte montra le
dégoût avec lequel elle subissait le rôle qui lui était
imposé par la facilité qu'elle mit à céder aux repré-
sentations qui lui furent faites.
» Ce nouvel échec, cette fois, ne devait pas arrê-
ter l'Angleterre. L'ajournement, c'était la défaite
définitive. On attendit à Constantinople le retour du
sultan. On rallia les débris épars du complot et on
ouvrit une nouvelle campagne, cette fois moins té-
nébreuse et plus hardie, sur les bases de la note du
6 avril.
s Un mot cependant sur cette note. J'ai dit qu'elle
avait été dictée. par sir Henry Bulwer ; j'ajoute
qu'elle contient des passages entiers d'une note
adressée sur le même sujet au gouvernement fran-
« J'ai vu Aali et Fuad-Pacha ; je les ai trouvés dans
les mêmes dispositions, c'est-à-dire toujours favorables
au canal, et très-désirëux d'établir publiquement que LA
PORTE N'OPPOSE DE SON CHEF AUCUN OBSTACLE à la
réalisation de votre grande entreprise. »
» Le sultan Abdul-Medjid portait au projet une
vive sympathie. M. de Lesseps déclare en avoir reçu
l'assurance de sa. bouche. Mes renseignements me
mettent à même d'affirmer que les dispositions du
sultan Abdul-Aziz ne sont pas moins favorables.
L'esprit de ce prince est surtout pénétré de la force
que retirerait à la fois son pouvoir religieux et poli-
tique d'une voie d'introduction toujours facile et
toujours assurée à sa marine dans la mer Rouge.
1 » Malheureusement la Turquie est faible et ne
s'appartient pas. Destinée à l'affranchir, la guerre
de Crimée n'a pas atteint ce but; la Porte n'a fait
que changer de pression. Elle a tout simplement
passé du joug moscovite sous le joug britannique.
» C'est ainsi que, placée entre son intérêt et ses
craintes, entre l'intimidation qui l'obsède et le désir
de céder aux vœux de la civilisation qui l'invoque,
la Turquie hésite, recule, avance, se tait, parle, agit,
et tout en finissant par succomber sous les coërci..
tions de la diplomatie anglaise toujours altière et
menaçante à ses côtés, n'y cède qu'avec répu-
gnance.
» J'en donnerai un exemple. Il est célèbre.
» En 1860, les opérations du canal commencent à
se développer. Elles marchent, et la diplomatie an-
glaise s'inquiète. A force de manœuvres, elle arrache
au Divan une manifestation qu'elle croit décisive.
Mouktar-Bey part pour l'Egypte avec la fameuse
mission d'ordonner et d'effectuer la suspension des
travaux. Tout est en émoi à Alexandrie; les consuls
sont convoqués ; l'ordre fatal leur est officiellement
communiqué. Un télégramme du gouvernement
français survient qui s'oppose à cet acte de violence.
Tout est fini. Mouktar-Bey s'en retourne paisible-
ment à Constantinople, et la Porte, heureuse de pou-
voir échapper à la contrainte britannique, retire son
ordre et s'abstient.
» Après cet échec éclatant la diplomatie anglaise
se tint plus tranquille, c'est-à-dire que la Porte laissa
se continuer en toute paix les travaux de l'isthme
de Suez.
» Toutefois, en 1862, la situation se dessine. Le
seuil d'El-Guisr est percé ; les eaux de la Méditer-
ranée sont amenées au lac Timsah, au centre de
l'isthme. En fait, dès lors, le problème de l'impossi-
bilité prétendue du canal est résolu pratiquement,
car quatre fois le canal a été établi par les anciens
du lac Timsah à la mer Rouge. Cet événement ré-
jouit le monde. Il irrite la vieille Angleterre. En
même temps une mission importante était donnée
par S. A. Mohammed-Saïd à M. Hawkshaw, éminent
ingénieur de Londres. Celui ci se transporte sur le
terrain de l'isthme ; il y inspecte l'état des choses,
et l'on apprend que ses conclusions sont favorables à
l'exécution de l'œuvre. C'est en ce moment que sir
Henry Bulwer, ambassadeur anglais à Constantino-
ple, se rend en Egypte et va de sa personne vérifier
l'état des travaux. Il en revient frappé des résultats
obtenus. Il ne doute plus que l'œuvre ne s'achève.
Il communique ses impressions à son gouvernement,
et il sent que des mesures extrêmes et suprêmes sont
indispensables et urgentes, si l'on veut que le canal
ne s'exécute point.
» Aussitôt et sans perdre un jour, un complot est
ourdi par ce diplomate à Constantinople. Les dates
ici sont expressives. Sir Henry était encore dans
l'isthme à la fin de décembre dernier, et le complot
était organisé, prêt à agir dès le mois de mars sui-
vant. L'occasion semblait belle. Mohammed-Saïd,
que l'on n'avait pu dompter, venait de mourir. Un
changement de règne pouvait être une opportunité
heureuse. La visite du sultan au nouveau vice-roi
fournissait l'occasion de faire éclater la machine.
L'ambassadeur anglais se multipliait auprès des mi-
nistres ottomans, obsédait le sultan de ses demandes
d'audience ; sa ferveur était telle, que dédaignant
toutes les lois des convenances et les règles de l'éti-
quette, il allait poursuivre le sultan, pour qu'il eût
son dernier mot, jusqu'à bord du vaisseau qui le
portait vers Alexandrie.
» Il faisait plus. Il poursuivait en Egypte le sultan
de sa surveillance ; ses télégrammes, ses courriers,
ses envoyés, jusqu'à ses secrétaires personnels se
succédaient sans relâche sur le théâtre de la conspi-
ration dont il avait dicté lui-même le programme
daus une note devenue célèbre sous le nom de note
du 6 avril. Heureusement la fermeté de M. Tastu,
notre consul général en Egypte, muni des instruc-
tions de son gouvernement, étouffa le complot dans
son germe, et une seconde fois la Porte montra le
dégoût avec lequel elle subissait le rôle qui lui était
imposé par la facilité qu'elle mit à céder aux repré-
sentations qui lui furent faites.
» Ce nouvel échec, cette fois, ne devait pas arrê-
ter l'Angleterre. L'ajournement, c'était la défaite
définitive. On attendit à Constantinople le retour du
sultan. On rallia les débris épars du complot et on
ouvrit une nouvelle campagne, cette fois moins té-
nébreuse et plus hardie, sur les bases de la note du
6 avril.
s Un mot cependant sur cette note. J'ai dit qu'elle
avait été dictée. par sir Henry Bulwer ; j'ajoute
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adressée sur le même sujet au gouvernement fran-
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