Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-09-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 septembre 1863 15 septembre 1863
Description : 1863/09/15 (A8,N174). 1863/09/15 (A8,N174).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203253f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
382 L'ISTHME DE SUEZ,
core, le commerce et les manufactures étaient dans un
état florissant. Le défaut de confiance dans l'avenir
retire les capitaux de la circulation; l'industrie est
stagnante, et la moitié des métiers de tisserand précé-
demment employés est aujourd'hui abandonnée. Les
chrétiens sont dans un état de terreur abjecte. Ils
n'osent acquérir de propriétés territoriales de crainte
d'en être dépouillés. »
Le consul anglais de Monastir nous dépeint
comme suit l'état de l'Albanie.
D Les membres chrétiens des conseils locaux n'osent
différer d'opinion avec les membres musulmans. Un
membre chrétien du conseil de Monastir a été empoi-
sonné pour s'être opposé à ses collègues musulmans.
Les paysans sont réduits à la plus grande misère, ayant
à payer trois et quatre fois au fermier du revenu ce
qui lui est dû légalement. Un chrétien n'ose jamais se
présenter dans un procès pour témoigner en faveur de
ses coréligionnaires. C'est la coutume de plaideurs
sans foi de produire de faux témoins musulmans dont
le témoignage annule la validité d'un titre dressé par
un officier public. Ce mode illégal est souvent adopté
pour dépouiller un légitime propriétaire. Les Turcs
font volontiers des conversions soit par contrainte, soit
par intimidation. »
Le consul anglais de Salonique s'exprime en ces
termes sur la situation de la Roumélie :
« Il est malheureusement vrai que depuis plusieurs
siècles les chrétiens sont cruellement opprimés. Leur
dégradation morale après cette longue période d'oppres-
sion étant devenue héréditaire ils ne pourront être élevés
successivement à un plus haut degré de dignité po-
litique et sociale qu'après avoir été affranchis de cette
oppression. Toutes les ressources de l'Etat sont accu-
mulées dans la capitale et y sont follement dépensées.
La moitié des sommes que l'on a l'habitude de dissi-
per aurait suffi dans les vingt dernières années pour
faire de bonnes routes dans toutes les provinces. L'Etat
paraît ne point se soucier de la façon dont les revenus
sont perçus pourvu qu'il les reçoive.
» Par un récent décret la population chrétienne a été
appelée à fournir un état des contributions arbitraires
levées sur elle, dans l'objet ostensible de réparer cette
injustice. Lorsque ce document a été dans ses mains,
le gouvernement a établi l'impôt d'après le chiffre
entier de ces exactions, sur la présomption que la popu-
lation l'ayant payé une fois pouvait le payer toujours.
C'est ce qui s'exécute en ce moment. Plusieurs des fa-
milles chrétiennes ont été réduites à l'état de servage
par leurs maîtres musulmans. »
Sur la Bulgarie nous extrayons ces incroyables
détails des rapports du major Cox, consul à Bucba-
rest :
« Le témoignage du chrétien, même le plus riche et
le plus intelligent de la Bulgarie, est rejeté, tandis
qu'on prend celui d'une mendiante. Il n'est rien que la
police ne puisse faire avec impunité dans les villages.
Les femmes n'oseraient opposer de résistance à un ma-
hométan. Lorsqu'un musulman entre chez un paysan
bulgare celui-ci va coucher dans son étable et laisse son
hôte faire tout ce qu'il veut de sa femme et de sa fille.»
Citons enfin un dernier fait rapporté par M. Cob-
den dans cette discussion.
« Les chrétiens sont souvent tués par les voleurs
parce qu'ils n'osent porter des armes. L'un d'eux ayant
ainsi perdu plusieurs moutons finit par charger un
fusil et le garda avec lui. Bientôt les voleurs se pré-
sentèrent de nouveau. Il tira et en tua un. Ce chré-
tien fut publiquement exécuté pour avoir tiré sur un
musulman. »
Certes, parmi toutes ces malheureuses populations
dont la condition est ainsi dépeinte par les représen-
tants britanniques, il n'est pas un seul individu qui
ne regardât comme le suprême bonheur le sort de
la classe des travailleurs de l'Egypte. Il n'en est
certes pas un qui n'enviât le sort des ouvriers de
l'isthme, et pourtant c'est sur l'isthme que se fixent
toutes les préoccupations du ministère turc.
Un autre document publié tout récemment par le
Temps pourra encore ajouter un trait à ce tableau.
C'est une plainte touchante adressée au gouverne-
ment ottoman par les Noghaïs, tribu musulmane du
Caucase, plainte que les journaux de Constantinople
n'ont pas osé reproduire, et que nous allons essayer
d'analyser brièvement.
Cette tribu habitait la Circassie. Sur la déclaration
du gouverneur du Caucase que tout musulman était
libre de se rendre à la Mecque, elle prit ses passeports
pour entreprendre le saint pèlerinage. A Constanti-
nople on leur aurait tenu ce langage : « Soyez les
bienvenus, ne rentrez plus dans votre patrie. Nous
vous donnerons de bonnes maisons, de la terre et de
l'eau. » Ils crurent à ces promesses. Ils livrèrent
leurs passeports. On les transporta en Anatolie où,
abandonnés, ils dépensèrent leur argent. Ils en-
voyèrent une députation à Constantinople pour obte-
nir la réalisation des promesses faites ou leur rapa-
triement en Russie. On les retint en les berçant de
nouvelles espérances. Ici laissons-les parler eux-
mêmes :
« Ajoutant foi à ces paroles, nous demeurions et
nous attendions. Mais tout ce temps ils n'ont fait que
renouveler leurs promesses. Cela a duré trois ans.
Pendant ce temps, à cause du mauvais climat, de
la mauvaise eau et de la misère, beaucoup de nous
ont péri. Nous sommes sortis de Russie au nombre
de mille cinq cents familles et nous ne sommes plus
que six cents. Nous nous trouvons campés mainte-
nant près de Samsoun, sans maisons, sans abri. Notre
lit, c'est la terre, notre toit, c'est le ciel. En Russie
nous étions de riches agriculteurs et pasteurs. Ici
nous sommes devenus de malheureux mendiants.
Les Turcs ne font rien pour nous. Ils nous laissent
core, le commerce et les manufactures étaient dans un
état florissant. Le défaut de confiance dans l'avenir
retire les capitaux de la circulation; l'industrie est
stagnante, et la moitié des métiers de tisserand précé-
demment employés est aujourd'hui abandonnée. Les
chrétiens sont dans un état de terreur abjecte. Ils
n'osent acquérir de propriétés territoriales de crainte
d'en être dépouillés. »
Le consul anglais de Monastir nous dépeint
comme suit l'état de l'Albanie.
D Les membres chrétiens des conseils locaux n'osent
différer d'opinion avec les membres musulmans. Un
membre chrétien du conseil de Monastir a été empoi-
sonné pour s'être opposé à ses collègues musulmans.
Les paysans sont réduits à la plus grande misère, ayant
à payer trois et quatre fois au fermier du revenu ce
qui lui est dû légalement. Un chrétien n'ose jamais se
présenter dans un procès pour témoigner en faveur de
ses coréligionnaires. C'est la coutume de plaideurs
sans foi de produire de faux témoins musulmans dont
le témoignage annule la validité d'un titre dressé par
un officier public. Ce mode illégal est souvent adopté
pour dépouiller un légitime propriétaire. Les Turcs
font volontiers des conversions soit par contrainte, soit
par intimidation. »
Le consul anglais de Salonique s'exprime en ces
termes sur la situation de la Roumélie :
« Il est malheureusement vrai que depuis plusieurs
siècles les chrétiens sont cruellement opprimés. Leur
dégradation morale après cette longue période d'oppres-
sion étant devenue héréditaire ils ne pourront être élevés
successivement à un plus haut degré de dignité po-
litique et sociale qu'après avoir été affranchis de cette
oppression. Toutes les ressources de l'Etat sont accu-
mulées dans la capitale et y sont follement dépensées.
La moitié des sommes que l'on a l'habitude de dissi-
per aurait suffi dans les vingt dernières années pour
faire de bonnes routes dans toutes les provinces. L'Etat
paraît ne point se soucier de la façon dont les revenus
sont perçus pourvu qu'il les reçoive.
» Par un récent décret la population chrétienne a été
appelée à fournir un état des contributions arbitraires
levées sur elle, dans l'objet ostensible de réparer cette
injustice. Lorsque ce document a été dans ses mains,
le gouvernement a établi l'impôt d'après le chiffre
entier de ces exactions, sur la présomption que la popu-
lation l'ayant payé une fois pouvait le payer toujours.
C'est ce qui s'exécute en ce moment. Plusieurs des fa-
milles chrétiennes ont été réduites à l'état de servage
par leurs maîtres musulmans. »
Sur la Bulgarie nous extrayons ces incroyables
détails des rapports du major Cox, consul à Bucba-
rest :
« Le témoignage du chrétien, même le plus riche et
le plus intelligent de la Bulgarie, est rejeté, tandis
qu'on prend celui d'une mendiante. Il n'est rien que la
police ne puisse faire avec impunité dans les villages.
Les femmes n'oseraient opposer de résistance à un ma-
hométan. Lorsqu'un musulman entre chez un paysan
bulgare celui-ci va coucher dans son étable et laisse son
hôte faire tout ce qu'il veut de sa femme et de sa fille.»
Citons enfin un dernier fait rapporté par M. Cob-
den dans cette discussion.
« Les chrétiens sont souvent tués par les voleurs
parce qu'ils n'osent porter des armes. L'un d'eux ayant
ainsi perdu plusieurs moutons finit par charger un
fusil et le garda avec lui. Bientôt les voleurs se pré-
sentèrent de nouveau. Il tira et en tua un. Ce chré-
tien fut publiquement exécuté pour avoir tiré sur un
musulman. »
Certes, parmi toutes ces malheureuses populations
dont la condition est ainsi dépeinte par les représen-
tants britanniques, il n'est pas un seul individu qui
ne regardât comme le suprême bonheur le sort de
la classe des travailleurs de l'Egypte. Il n'en est
certes pas un qui n'enviât le sort des ouvriers de
l'isthme, et pourtant c'est sur l'isthme que se fixent
toutes les préoccupations du ministère turc.
Un autre document publié tout récemment par le
Temps pourra encore ajouter un trait à ce tableau.
C'est une plainte touchante adressée au gouverne-
ment ottoman par les Noghaïs, tribu musulmane du
Caucase, plainte que les journaux de Constantinople
n'ont pas osé reproduire, et que nous allons essayer
d'analyser brièvement.
Cette tribu habitait la Circassie. Sur la déclaration
du gouverneur du Caucase que tout musulman était
libre de se rendre à la Mecque, elle prit ses passeports
pour entreprendre le saint pèlerinage. A Constanti-
nople on leur aurait tenu ce langage : « Soyez les
bienvenus, ne rentrez plus dans votre patrie. Nous
vous donnerons de bonnes maisons, de la terre et de
l'eau. » Ils crurent à ces promesses. Ils livrèrent
leurs passeports. On les transporta en Anatolie où,
abandonnés, ils dépensèrent leur argent. Ils en-
voyèrent une députation à Constantinople pour obte-
nir la réalisation des promesses faites ou leur rapa-
triement en Russie. On les retint en les berçant de
nouvelles espérances. Ici laissons-les parler eux-
mêmes :
« Ajoutant foi à ces paroles, nous demeurions et
nous attendions. Mais tout ce temps ils n'ont fait que
renouveler leurs promesses. Cela a duré trois ans.
Pendant ce temps, à cause du mauvais climat, de
la mauvaise eau et de la misère, beaucoup de nous
ont péri. Nous sommes sortis de Russie au nombre
de mille cinq cents familles et nous ne sommes plus
que six cents. Nous nous trouvons campés mainte-
nant près de Samsoun, sans maisons, sans abri. Notre
lit, c'est la terre, notre toit, c'est le ciel. En Russie
nous étions de riches agriculteurs et pasteurs. Ici
nous sommes devenus de malheureux mendiants.
Les Turcs ne font rien pour nous. Ils nous laissent
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