Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-06-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 juin 1863 01 juin 1863
Description : 1863/06/01 (A8,N167). 1863/06/01 (A8,N167).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032469
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 199
diterranée et le golfe de Suez a été placé en grande
proéminence dans ces derniers mois. Tous les efforts
que pouvait inspirer l'expérience de l'agiotage secondé
par la finesse diplomatique, ont été mis en œuvre pour
neutraliser l'effet des arguments par lesquels a été dé-
montrée la déraison de l'entreprise trompeuse qui porte
le nom de M. de Lesseps. C'est en vain qu'il semble
avoir été prouvé dans la Chambre des communes et
dans la presse anglaise, que le projet était combattu par
des difficultés naturelles presque insurmontables ; qu'il
ne serait pas rémunérateur, s'il était exécuté, et que
dans les procédés employés pour le prémouvoir, les
droits politiques et constitutionnels avaient été entiè-
rement dédaignés. Sur l'état de confiance déraisonna-
ble engendré dans un certain degré par les artifices
dont nous venons de parler, la mesure résolue et expli-
cite que vient de prendre le gouvernement turc descen-
dra avec l'effet le plus salutaire. La possibilité scienti-
fique du projet et ses chances de donner un dividende,
sont des objets sur lesquels l'opinion peut continuer à
être longtemps divisée; mais la manière contraire aux
formes et injustifiable avec laquelle il a été commencé,
est portée devant le tribunal de l'Europe pour une
décision prompte et concluante, par la dépêche d'Aali-
Pacha aux gouvernements d'Angleterre et de France.
» Le droit de la Porte à être entendue sur cette partie
de la question n'a pas besoin de défense ni d'explica-
tion. Toute personne bien informée sait, et la visite du
sultan en Egypte en a ravivé la mémoire, que la souve-
veraineté exercée par la Turquie sur sa quasi-dépen-
dance est un pouvoir substantiel. La circonstance que
la vice-royauté d'Egypte est héréditaire dans la famille
de Mohammed-Ali n'établit pas de différence fondamen-
tale entre les relations existant pour ce territoire à l'é-
gard du souverain commun et celle des autres pacha-
licks de l'empire ottoman. C'est la faute de la compa-
gnie d'actionnaires qui a entrepris de fonder un canal
navigable à travers l'isthme de Suez, si elle a traité
trop légèrement cette responsabilité, et si elle s'est
contentée de la sanction et de l'encouragement qui lui
ont été donnés par le défunt vice-roi Saïd-Pacha, en ou-
bli de la nécessité d'en référer au pouvoir plus grand
qui était derrière lui. Le gouvernement turc, de son
côté, a rempli son devoir en indiquant de temps en
temps que les grands travaux qui s'exécutaient avaient
l'apparence de tendre à des résultats qui ne pouvaient
être légalement parfaits sans sa sanction, et que l'on ne
pouvait pas argumenter de son consentement tacite.
Poussés par une préoccupation politique, les capitalis-
tes français s'étant aventurés à négliger cet avertisse-
ment, le ministre ottoman des affaires étrangères dé-
clare maintenant qu'il y a trois motifs distincts pour
refuser décidément la sanction du sultan à cet ouvrage,
sur ses bases actuelles.
» Le premier point considéré est un point que la Tur-
quie ne pourrait négliger sans dédain manifeste des in-
térêts de ses plus indispensables alliés* aussi bien que de
ses propres intérêts. La neutralitédu canal doit être garan-
tie par des stipulations internationales semblables à celles
qui existent par rapport au Bosphore et aux Dardan-
nelles. La valeur de cette condition pour la Grande-
Bretagne, qui, comme propriétaire de l'Inde, est princi-
palement intéressée au maintien d'une route libre vers
l'Orient, est trop manifeste pour qu'il soit besoin d'y
insister. Nous ne manquerons peut-être pas grandement
aux règles de la charité, en exprimant la prévision
que l'ardeur avec laquelle un parti en France soutient
l'entreprise, sera proportionnellement diminuée si l'en-
treprise est poursuivie dans cette limite, à moins
qu'elle ne soit abandonnée.
» Le point suivant sur lequel le gouvernement turc
appelle l'attention, est l'emploi du travail forcé dans la
construction du canal. On a plusieurs fois nié que
le système par lequel les travaux sont alimentés soit
réellement, comme il parait l'être, une violation fla-
grante des lois modernes contre le travail forcé dans
l'empire et des déclarations de concours promis à cette
réforme par les vice-rois égyptiens. Le ministre des
affaires étrangères à Constantinople nous apprend main-
tenant que le travail employé est entièrement obliga-
toire, et que, afin de maintenir un chiffre permanent
de 20,000 hommes sur les travaux, il faut en enlever
de leurs maisons et des occupations de leur choix , non
moins de 60,000. Cette pratique, par conséquent, opposée
à la lettre et à l'esprit des lois respectées dans les au-
tres parties de l'empire, ne sera plus sanctionnée, et le
canal doit, ou louer les travailleurs dont il a besoin,
sur un marché libre, ou être abandonné.
- D Le dernier point sur lequel la dépêche déclare les
procédés de M. de Lesseps inadmissibles, affecte la
souveraineté du sultan non moins gravement que ceux
déjà mentionnés. Il porte sur la prétention de l'admi-
nistration égyptienne à céder à une compagnie d'ac-
tionnaires le territoire attenant au canal, créant par là,
comme Aali-Pacha le fait justement observer, sur des
points importants de la domination ottomane des colo-
nies presque indépendantes de l'empire. 11 est très-vrai
qu'il n'y a pas de gouvernement dans le monde, pos-
sédant le moindre sentiment de son indépendance ou
de ses devoirs, qui voulût se soumettre à une usurpa-
tion de cette nature; et quand même le respect de sa
propre dignité ne l'en empêcherait pas, il en trouverait
encore une cause suffisante dans la certitude que cette
soumission l'entraînerait à des conflits perpétuels. Nous
allons plus loin, et nous disons qu'une semblable ten-
tative n'aurait jamais été faite si l'abaissement du pou-
voir du sultan, par l'influence étrangère, agissant dans
un but politique, n'avait pas été un des objets recher-
chés par les défenseurs de l'entreprise.
» Nous n'avons vu encore qu'un essai de mitiger l'a-
larme que la fière conduite du sultan a dû créer parmi
les actionnaires politiques de la Compagnie de M. de
Lesseps. Cette explication se borne à prétendre que la
dépêche du ministre étranger n'était qu'une commu-
nication confidentielle aux cabinets anglais et français,
et que sa publication est une indiscrétion coupable. La
vérité de cette assertion importe peu. Si l'on prétend
en faire conclure que l'attitude de la Porte pourrait
bien être changée par les représentations énergiques
que la France voudra faire indubitablement, nous n'a-
diterranée et le golfe de Suez a été placé en grande
proéminence dans ces derniers mois. Tous les efforts
que pouvait inspirer l'expérience de l'agiotage secondé
par la finesse diplomatique, ont été mis en œuvre pour
neutraliser l'effet des arguments par lesquels a été dé-
montrée la déraison de l'entreprise trompeuse qui porte
le nom de M. de Lesseps. C'est en vain qu'il semble
avoir été prouvé dans la Chambre des communes et
dans la presse anglaise, que le projet était combattu par
des difficultés naturelles presque insurmontables ; qu'il
ne serait pas rémunérateur, s'il était exécuté, et que
dans les procédés employés pour le prémouvoir, les
droits politiques et constitutionnels avaient été entiè-
rement dédaignés. Sur l'état de confiance déraisonna-
ble engendré dans un certain degré par les artifices
dont nous venons de parler, la mesure résolue et expli-
cite que vient de prendre le gouvernement turc descen-
dra avec l'effet le plus salutaire. La possibilité scienti-
fique du projet et ses chances de donner un dividende,
sont des objets sur lesquels l'opinion peut continuer à
être longtemps divisée; mais la manière contraire aux
formes et injustifiable avec laquelle il a été commencé,
est portée devant le tribunal de l'Europe pour une
décision prompte et concluante, par la dépêche d'Aali-
Pacha aux gouvernements d'Angleterre et de France.
» Le droit de la Porte à être entendue sur cette partie
de la question n'a pas besoin de défense ni d'explica-
tion. Toute personne bien informée sait, et la visite du
sultan en Egypte en a ravivé la mémoire, que la souve-
veraineté exercée par la Turquie sur sa quasi-dépen-
dance est un pouvoir substantiel. La circonstance que
la vice-royauté d'Egypte est héréditaire dans la famille
de Mohammed-Ali n'établit pas de différence fondamen-
tale entre les relations existant pour ce territoire à l'é-
gard du souverain commun et celle des autres pacha-
licks de l'empire ottoman. C'est la faute de la compa-
gnie d'actionnaires qui a entrepris de fonder un canal
navigable à travers l'isthme de Suez, si elle a traité
trop légèrement cette responsabilité, et si elle s'est
contentée de la sanction et de l'encouragement qui lui
ont été donnés par le défunt vice-roi Saïd-Pacha, en ou-
bli de la nécessité d'en référer au pouvoir plus grand
qui était derrière lui. Le gouvernement turc, de son
côté, a rempli son devoir en indiquant de temps en
temps que les grands travaux qui s'exécutaient avaient
l'apparence de tendre à des résultats qui ne pouvaient
être légalement parfaits sans sa sanction, et que l'on ne
pouvait pas argumenter de son consentement tacite.
Poussés par une préoccupation politique, les capitalis-
tes français s'étant aventurés à négliger cet avertisse-
ment, le ministre ottoman des affaires étrangères dé-
clare maintenant qu'il y a trois motifs distincts pour
refuser décidément la sanction du sultan à cet ouvrage,
sur ses bases actuelles.
» Le premier point considéré est un point que la Tur-
quie ne pourrait négliger sans dédain manifeste des in-
térêts de ses plus indispensables alliés* aussi bien que de
ses propres intérêts. La neutralitédu canal doit être garan-
tie par des stipulations internationales semblables à celles
qui existent par rapport au Bosphore et aux Dardan-
nelles. La valeur de cette condition pour la Grande-
Bretagne, qui, comme propriétaire de l'Inde, est princi-
palement intéressée au maintien d'une route libre vers
l'Orient, est trop manifeste pour qu'il soit besoin d'y
insister. Nous ne manquerons peut-être pas grandement
aux règles de la charité, en exprimant la prévision
que l'ardeur avec laquelle un parti en France soutient
l'entreprise, sera proportionnellement diminuée si l'en-
treprise est poursuivie dans cette limite, à moins
qu'elle ne soit abandonnée.
» Le point suivant sur lequel le gouvernement turc
appelle l'attention, est l'emploi du travail forcé dans la
construction du canal. On a plusieurs fois nié que
le système par lequel les travaux sont alimentés soit
réellement, comme il parait l'être, une violation fla-
grante des lois modernes contre le travail forcé dans
l'empire et des déclarations de concours promis à cette
réforme par les vice-rois égyptiens. Le ministre des
affaires étrangères à Constantinople nous apprend main-
tenant que le travail employé est entièrement obliga-
toire, et que, afin de maintenir un chiffre permanent
de 20,000 hommes sur les travaux, il faut en enlever
de leurs maisons et des occupations de leur choix , non
moins de 60,000. Cette pratique, par conséquent, opposée
à la lettre et à l'esprit des lois respectées dans les au-
tres parties de l'empire, ne sera plus sanctionnée, et le
canal doit, ou louer les travailleurs dont il a besoin,
sur un marché libre, ou être abandonné.
- D Le dernier point sur lequel la dépêche déclare les
procédés de M. de Lesseps inadmissibles, affecte la
souveraineté du sultan non moins gravement que ceux
déjà mentionnés. Il porte sur la prétention de l'admi-
nistration égyptienne à céder à une compagnie d'ac-
tionnaires le territoire attenant au canal, créant par là,
comme Aali-Pacha le fait justement observer, sur des
points importants de la domination ottomane des colo-
nies presque indépendantes de l'empire. 11 est très-vrai
qu'il n'y a pas de gouvernement dans le monde, pos-
sédant le moindre sentiment de son indépendance ou
de ses devoirs, qui voulût se soumettre à une usurpa-
tion de cette nature; et quand même le respect de sa
propre dignité ne l'en empêcherait pas, il en trouverait
encore une cause suffisante dans la certitude que cette
soumission l'entraînerait à des conflits perpétuels. Nous
allons plus loin, et nous disons qu'une semblable ten-
tative n'aurait jamais été faite si l'abaissement du pou-
voir du sultan, par l'influence étrangère, agissant dans
un but politique, n'avait pas été un des objets recher-
chés par les défenseurs de l'entreprise.
» Nous n'avons vu encore qu'un essai de mitiger l'a-
larme que la fière conduite du sultan a dû créer parmi
les actionnaires politiques de la Compagnie de M. de
Lesseps. Cette explication se borne à prétendre que la
dépêche du ministre étranger n'était qu'une commu-
nication confidentielle aux cabinets anglais et français,
et que sa publication est une indiscrétion coupable. La
vérité de cette assertion importe peu. Si l'on prétend
en faire conclure que l'attitude de la Porte pourrait
bien être changée par les représentations énergiques
que la France voudra faire indubitablement, nous n'a-
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