Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-06-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 juin 1863 01 juin 1863
Description : 1863/06/01 (A8,N167). 1863/06/01 (A8,N167).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032469
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
190 L'ISTHME DE SUEZ,
sur une étendue de 1,600 kilomètres, en un mot, non
pour la Compagnie universelle du canal de Suez,
mais pour la Compagnie exclusivement anglaise du
chemin de fer de la vallée de l'Euphrate? Voici, en
effet, les termes de cette concession, tels que les a
publiés le président de la Compagnie anglaise,
M. Andrews.
« Le gouvernement ottoman garantit la Compa-
gnie contre toute concurrence d'ouvrages d'un carac-
tère semblable. — Il lui accorde, en outre, droit
sur les terres, les bois, les forêts et les carrières,
propriétés de l'Etat, à une certaine distance de chaque
côté de la ligne. »
D'où il faut conclure que l'Aali-Pacha de 1863
met en état d'accusation l'Aali-Pacha de 1856, ou
qu'il regarde comme criminel à l'égard de la France
ce qu'il juge parfaitement innocent à l'égard de
l'Angleterre.
Encore une fois où est l'équité? où est la bienveil-
lance? où est l'impartialité? où est le respect des
bonnes relations et de tant de services rendus ?
Ce n'est pas tout. Le grand vizir de 1856, si avare
pour la France qui n'attendait de lui qu'un simple
mot, était inépuisable de prodigalités envers l'Angle-
terre. L'entreprise était si hasardeuse que la Com-
pagnie patronnée par lord Palmerston, lord Clarendon
et lordStratford de Redcliffe, risquait fort de ne point
trouver son capital. Pour lui faciliter cette opération
qui devait donner à l'Angleterre « le premier point
stratégique du monde », lui fournir une base contre la
Russie et la Perse, et lui procurer la possession d'une
zone de terrain d'une largeur non définie et d'une
longueur de 1,600 kilomètres de chaque côté de la
ligne du railway, Aali-Pacha consentit à garantir,
sur les finances ruinées de la Turquie, un intérêt
minimum de 6 0/0 par an sur le capital engagé et
dont toutefois le chiffre fut soumis à une limitation.
Les Anglais pourtant ne furent pas satisfaits, et
Aali-Pacha s'obligea encore à creuser et construire,
aux frais de la Turquie, sur les plans et sous la di-
rection des ingénieurs anglais, un port à Séleucie
destiné à servir au railway de tête et de débouché sur
la Méditerranée.
Et il faut l'avouer, le ministre turc prenait tous
ces édifiants arrangements avec la discrétion la plus
touchante. Il craignait pour eux la publicité plus que
pour sa note du 6 avril. Il faisait tout pour l'éviter et
pour conduire les choses sous le voile du mystère, s'il
faut en croire ces lignes des instructions de M. An-
drews, données au major général Chesney, sous la
date du 28 août 1856, pour diriger sa conduite à
Constantinople :
« L'administration de la Compagnie désire que
vous teniez le vicomte Stratford de Redcliffe, ambas-
sadeur de Sa Majesté près la Sublime Porte, au
courant par des communications semi-ofiicielles, de
tout ce qui surviendrait d'important relativement à
votre mission à Constantinoplee t pendant votre levée
des plans en Syrie.
» Mais comme S. A. Aali-Pacha, alors qu'il était
dans ce pays, exprimait son vœu très-net soit au
président de la Compagnie, soit à l'ambassadeur de
Turquie à Londres,que les négociations fussent suivies
simplement entre la Compagnie et lui, grand vizir,
comme ayant rapport à des affaires d'un caractère
public et non politique, les directeurs pensent qu'il
convient d'avoir égard à ces désirs exprimés en tant
qu'il ne sera pas besoin de l'intervention de l'ambas-
sadeur britannique, et sauf le cas de difficultés s'éle-
vant contre l'issue de la négociation proposée. »
On voit que le zèle d'Aali-Pacha pour l'Angleterre
et le railway de l'Euphrate égalait sa tiédeur pour
la France et le canal de Suez.
Au total, il n'est pas une des conditions que la
Turquie veut imposer aujourd'hui à la Compagnie
universelle, pas une de ses appréhensions , pas une
de ses défiances par-dessus lesquelles elle n'ait passé
à pieds joints à propos du chemin de l'Euphrate. Com-
ment donc aujourd'hui peut-elle avoir le courage de
refuser aux uns ce qu'elle a si libéralement accordé
aux autres. Pourquoi cette différence entre les deux
projets ? Pourquoi cette largeur de concessions pour
l'un ? Pourquoi ce redoublement soudain et étudié de
difficultés pour l'autre ? Pourquoi tant de faveurs à
l'Angleterre? Pourquoi tant de rigueurs à la France?
Pourquoi tant de déférence pour le gouvernement de
lord Palmerston ? Pourquoi tant de hauteur insul-
tante pour le gouvernement de l'empereur des
Français ? Pourquoi tant d'efforts et de sacrifices pour
faire naître et vivre une Compagnie anglaise, con-
damnée à mourir ? Pourquoi tant de mauvaise volon-
té, de combinaisons hostiles et spoliatrices pour faire
mourir une Compagnie pleine de vie et d'avenir, mais
coupable de servir un intérêt français, en même temps
qu'un intérêt turc et un intérêt général ? Sont-ce là
des gages d'alliance, et la Turquie n'a-t-elle donc
rien à perdre à désintéresser la France du maintien
de son empire en se montrant à tout propos l'alliée
servile des passions ou des jalousies de lord Pal-
merston contre la France?
Nous venons de le démontrer par des faits authen-
tiques : tous ces périls qu'elle a mis cinq ans à dé-
couvrir dans l'entreprise du canal de Suez, elle n'a
pas voulu les voir dans le projet anglais de l'Euphrate,
quoiqu'ils y fussent au contraire très-visibles et très-
matériels, et même très-avoués par ses auteurs eux-
mêmes.
Dans le projet anglais elle semble n'avoir aperçu
qu'une chose : plaire à l'Angleterre et lui obéir. Pour
sur une étendue de 1,600 kilomètres, en un mot, non
pour la Compagnie universelle du canal de Suez,
mais pour la Compagnie exclusivement anglaise du
chemin de fer de la vallée de l'Euphrate? Voici, en
effet, les termes de cette concession, tels que les a
publiés le président de la Compagnie anglaise,
M. Andrews.
« Le gouvernement ottoman garantit la Compa-
gnie contre toute concurrence d'ouvrages d'un carac-
tère semblable. — Il lui accorde, en outre, droit
sur les terres, les bois, les forêts et les carrières,
propriétés de l'Etat, à une certaine distance de chaque
côté de la ligne. »
D'où il faut conclure que l'Aali-Pacha de 1863
met en état d'accusation l'Aali-Pacha de 1856, ou
qu'il regarde comme criminel à l'égard de la France
ce qu'il juge parfaitement innocent à l'égard de
l'Angleterre.
Encore une fois où est l'équité? où est la bienveil-
lance? où est l'impartialité? où est le respect des
bonnes relations et de tant de services rendus ?
Ce n'est pas tout. Le grand vizir de 1856, si avare
pour la France qui n'attendait de lui qu'un simple
mot, était inépuisable de prodigalités envers l'Angle-
terre. L'entreprise était si hasardeuse que la Com-
pagnie patronnée par lord Palmerston, lord Clarendon
et lordStratford de Redcliffe, risquait fort de ne point
trouver son capital. Pour lui faciliter cette opération
qui devait donner à l'Angleterre « le premier point
stratégique du monde », lui fournir une base contre la
Russie et la Perse, et lui procurer la possession d'une
zone de terrain d'une largeur non définie et d'une
longueur de 1,600 kilomètres de chaque côté de la
ligne du railway, Aali-Pacha consentit à garantir,
sur les finances ruinées de la Turquie, un intérêt
minimum de 6 0/0 par an sur le capital engagé et
dont toutefois le chiffre fut soumis à une limitation.
Les Anglais pourtant ne furent pas satisfaits, et
Aali-Pacha s'obligea encore à creuser et construire,
aux frais de la Turquie, sur les plans et sous la di-
rection des ingénieurs anglais, un port à Séleucie
destiné à servir au railway de tête et de débouché sur
la Méditerranée.
Et il faut l'avouer, le ministre turc prenait tous
ces édifiants arrangements avec la discrétion la plus
touchante. Il craignait pour eux la publicité plus que
pour sa note du 6 avril. Il faisait tout pour l'éviter et
pour conduire les choses sous le voile du mystère, s'il
faut en croire ces lignes des instructions de M. An-
drews, données au major général Chesney, sous la
date du 28 août 1856, pour diriger sa conduite à
Constantinople :
« L'administration de la Compagnie désire que
vous teniez le vicomte Stratford de Redcliffe, ambas-
sadeur de Sa Majesté près la Sublime Porte, au
courant par des communications semi-ofiicielles, de
tout ce qui surviendrait d'important relativement à
votre mission à Constantinoplee t pendant votre levée
des plans en Syrie.
» Mais comme S. A. Aali-Pacha, alors qu'il était
dans ce pays, exprimait son vœu très-net soit au
président de la Compagnie, soit à l'ambassadeur de
Turquie à Londres,que les négociations fussent suivies
simplement entre la Compagnie et lui, grand vizir,
comme ayant rapport à des affaires d'un caractère
public et non politique, les directeurs pensent qu'il
convient d'avoir égard à ces désirs exprimés en tant
qu'il ne sera pas besoin de l'intervention de l'ambas-
sadeur britannique, et sauf le cas de difficultés s'éle-
vant contre l'issue de la négociation proposée. »
On voit que le zèle d'Aali-Pacha pour l'Angleterre
et le railway de l'Euphrate égalait sa tiédeur pour
la France et le canal de Suez.
Au total, il n'est pas une des conditions que la
Turquie veut imposer aujourd'hui à la Compagnie
universelle, pas une de ses appréhensions , pas une
de ses défiances par-dessus lesquelles elle n'ait passé
à pieds joints à propos du chemin de l'Euphrate. Com-
ment donc aujourd'hui peut-elle avoir le courage de
refuser aux uns ce qu'elle a si libéralement accordé
aux autres. Pourquoi cette différence entre les deux
projets ? Pourquoi cette largeur de concessions pour
l'un ? Pourquoi ce redoublement soudain et étudié de
difficultés pour l'autre ? Pourquoi tant de faveurs à
l'Angleterre? Pourquoi tant de rigueurs à la France?
Pourquoi tant de déférence pour le gouvernement de
lord Palmerston ? Pourquoi tant de hauteur insul-
tante pour le gouvernement de l'empereur des
Français ? Pourquoi tant d'efforts et de sacrifices pour
faire naître et vivre une Compagnie anglaise, con-
damnée à mourir ? Pourquoi tant de mauvaise volon-
té, de combinaisons hostiles et spoliatrices pour faire
mourir une Compagnie pleine de vie et d'avenir, mais
coupable de servir un intérêt français, en même temps
qu'un intérêt turc et un intérêt général ? Sont-ce là
des gages d'alliance, et la Turquie n'a-t-elle donc
rien à perdre à désintéresser la France du maintien
de son empire en se montrant à tout propos l'alliée
servile des passions ou des jalousies de lord Pal-
merston contre la France?
Nous venons de le démontrer par des faits authen-
tiques : tous ces périls qu'elle a mis cinq ans à dé-
couvrir dans l'entreprise du canal de Suez, elle n'a
pas voulu les voir dans le projet anglais de l'Euphrate,
quoiqu'ils y fussent au contraire très-visibles et très-
matériels, et même très-avoués par ses auteurs eux-
mêmes.
Dans le projet anglais elle semble n'avoir aperçu
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