Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-03-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 mars 1863 01 mars 1863
Description : 1863/03/01 (A8,N161). 1863/03/01 (A8,N161).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203240t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. - 77
» Un fait incontestable, c'est que la superficie de
l'Egypte, sur une étendue d'environ deux cent quatre-
vingts lieues, a été formée par les attérissemetns du
Nil. Elle présente uniformément dans son profil verti-
cal deux sortes de. terrains superposés l'un à l'autre :
au-dessous du lit du fleuve un dépôt de sables forte-
ment imprégnés de sel marin ; au-dessus, une couche
de terre végétale dont l'épaisseur augmente à mesure
qu'on remonte vers les cataractes, et sous laquelle la
plupart des monuments de la haute Egypte ont aujour-
d'hui à moitié disparu. Quel est le progrès des atté-
rissements du Nil sur les côtes de la Méditerranée? On
l'évalue à 4 mètres environ par année. Combien de
temps a-t-il fallu au fleuve pour former la basse Egy-
pte seulement ? Des milliers et des milliers de siècles.
» Hérodote, Manéthon et d'autres historiens assurent
que les traditions sacrées de l'Egypte en rapportaient
l'antiquité à des temps incalculables, qu'elles comp-
taient parmi les rois de ce pays des dieux, des demi-
dieux et des héros, puis trente et une dynastie de
simples mortels dont on avait conservé tous les noms.
» Quelques détails sur les débordements du Nil nous
semblent nécessaires pour que le lecteur conçoive bien la
nature des travaux exécutés par les Pharaons dans l'is-
thme de Suez. Soit à cause de la pression que le fleuve
exerce à certaines époques sur les terrains sous-jacents,
soit en vertu des lois seules de la capillarité, il est cer-
tain que les sables marins, sur lesquels tout le sol super-
ficiel de l'Egypte repose, produisent au travers de conti-
nuelles infiltrations et tendent, par conséquent, à en
couvrir la surface d'efflorescences salines, cause de mort
immédiate pour toute espèce de végétation. L'Egypte
ne serait donc qu'un vaste marais salant si le Nil ne
venait chaque année, non-seulement y déposer son li-
mon, mais encore en laver les terres, les débarrasser
de l'excédant de leurs sels et les rendre ainsi propres à
la culture. C'est le Nil qui a créé ce pays, et c'est lui qui
en nourrit les habitants.
» De là les immenses travaux exécutés sur ses bords
'depuis des temps dont l'antiquité paraît fabuleuse.
» Mais l'inondation du fleuve une fois terminée, on
jette la semei ce à la surface du limon qu'elle a laissé,
sans s'inquiéter même de la recouvrir. Les plus soi-
gneux se contentent de presser le grain sous une plan-
che. Trois mois après, la campagne a changé d'aspect :
de magnifiques récoltes la recouvrent de toutes parts ;
récoltes fameuses dès la plus haute antiquité. Rome
attendait avidement chaque année les blés d'Egypte et
ses lentilles ; les Juifs, devenus libres à force de mira-
cles, regrettaient ses succulents oignons.
» Des sept branches que formait autrefois le Nil en
pénétrant dans la basse Egypte, la plus orientale des-
cendait à Péluse. Sur le revers des collines qui la bor-
dent se creuse à l'est une seconde vallée, laquelle re-
monte ensuite vers les grands amas de sable du désert
iduméen. Cette vallée s'étend du golfe même de Pé-
luse, c'est-à-dire de la Méditerranée jusqu'à Suez et à la
mer Rouge, sur un espace d'environ vingt-neuf lieues.
Tel est l'obstacle qui ferme de ce côté aux navires de
l'Europe l'accès de la mer des Indes. Cet obstacle s'ap-
pelle l'isthme de Suez. Il offre, entre les collines qui le
séparent de la basse Egypte et les pentes opposées de
l'Asie, une sorte de dépression qui, vue à distance,
semble à peine dépasser de quelques mètres le ni-
veau moyen des deux mers. Là se trouve, pour ainsi
dire jalonnée depuis des siècles, la grande voie de na-
vigation maritime à ouvrir entre l'Orient et l'Occident.
» En allant de la Méditerranée à la mer Rouge, ce
thalweg naturel commence par le lac Menzaleh, bas-
fond d'une étendue considérable, que traversaient jadis
trois des sept branches du Nil. De larges attérissements
le séparent de la terre ferme. Le château de Tineh
marque vers l'orient les ruines de l'antique Péluse,
qui fut le grand port militaire des Ptolémées et la clef
de leur empire; Damiette est à l'occident; au nord, la
mer. La pêche du lac Menzaleh est, dit-on, miracu-
leuse ; elle nourrit une population de quinze mille serfs
qu'on prétend descendre des peuples pasteurs, lesquels
furent pendant cinq cents ans les maîtres de la con-
trée.
» Du lac Menzaleh, le tracé que nous suivons traverse
le bassin desséché d'un second lac, celui de Ballah,
puis les dunes de sables d'El-Ferdane, et atteint le
seuil d'El-Guisr, qui est le point culminant de son par-
cours.
» Sur une étendue de trois lieues environ, le seuil
d'El-Guisr ne s'élève pas en moyenne à plus de 10m,50
au-dessus du niveau de la mer. Comme perspective
dans le panorama de l'isthme, ce n'est rien, presque
rien; mais c'est énorme quand il s'agit d'y percer un
canal de 18 mètres de profondeur moyenne, avec 32
mètres de largeur au plafond et 56 à la ligne d'eau, ce
qui, vu l'inégalité du terrain, donne pour certains en-
droits jusqu'à 120 ou 130 mètres d'ouverture sur la crête
des talus. Mais ces problèmes, dont notre imagination
s'effraye, que sont-ils pour la science? Une simple ques-
tion de chiffres, un devis où l'on commence par poser
des règles de trois et où l'on finit par aligner des mil-
lions. Pourvu qu'ensuite on trouve les millions, tout
s'arrange.
» Des hauteurs d'El-Guisr on descend au lac Timsah,
point central de l'isthme, dont les berges couvertes de
tamariscs dessinent comme un îlot de verdure au mi-
lieu du désert. Partout, dans les environs, l'histoire, la
mythologie, la légende, ont laissé leurs empreintes. Les
débris qu'on aperçoit à l'extrémité sud-ouest du lac ap-
partiennent à l'ancienne ville juive de Toumbastum.
Viennent ensuite deux collines à peu près parallèles.
Celle de gauche est le tombeau du cheik Ennedek, san
ton vénéré. Maria, la prophétesse, sœur de Moïse, ve-
nait prier sur l'autre, selon les Arabes.
» On aborde ensuite le second seuil de l'isthme, ce-
lui du Sérapéum, auquel un vieux reste de construction
persépolitaine a donné son nom.
» Au-dessous se creuse la vaste dépression des lacs
Amers, formés de deux bassins contigus d'un diamètre
de dix lieues. L'âpre végétation du désert se montre un
instant au bord du premier, mais elle disparaît bientôt
et ne laisse plus apercevoir qu'une plaine légèrement
ondulée, où les coquillages et la chaux, mêlés au sel
» Un fait incontestable, c'est que la superficie de
l'Egypte, sur une étendue d'environ deux cent quatre-
vingts lieues, a été formée par les attérissemetns du
Nil. Elle présente uniformément dans son profil verti-
cal deux sortes de. terrains superposés l'un à l'autre :
au-dessous du lit du fleuve un dépôt de sables forte-
ment imprégnés de sel marin ; au-dessus, une couche
de terre végétale dont l'épaisseur augmente à mesure
qu'on remonte vers les cataractes, et sous laquelle la
plupart des monuments de la haute Egypte ont aujour-
d'hui à moitié disparu. Quel est le progrès des atté-
rissements du Nil sur les côtes de la Méditerranée? On
l'évalue à 4 mètres environ par année. Combien de
temps a-t-il fallu au fleuve pour former la basse Egy-
pte seulement ? Des milliers et des milliers de siècles.
» Hérodote, Manéthon et d'autres historiens assurent
que les traditions sacrées de l'Egypte en rapportaient
l'antiquité à des temps incalculables, qu'elles comp-
taient parmi les rois de ce pays des dieux, des demi-
dieux et des héros, puis trente et une dynastie de
simples mortels dont on avait conservé tous les noms.
» Quelques détails sur les débordements du Nil nous
semblent nécessaires pour que le lecteur conçoive bien la
nature des travaux exécutés par les Pharaons dans l'is-
thme de Suez. Soit à cause de la pression que le fleuve
exerce à certaines époques sur les terrains sous-jacents,
soit en vertu des lois seules de la capillarité, il est cer-
tain que les sables marins, sur lesquels tout le sol super-
ficiel de l'Egypte repose, produisent au travers de conti-
nuelles infiltrations et tendent, par conséquent, à en
couvrir la surface d'efflorescences salines, cause de mort
immédiate pour toute espèce de végétation. L'Egypte
ne serait donc qu'un vaste marais salant si le Nil ne
venait chaque année, non-seulement y déposer son li-
mon, mais encore en laver les terres, les débarrasser
de l'excédant de leurs sels et les rendre ainsi propres à
la culture. C'est le Nil qui a créé ce pays, et c'est lui qui
en nourrit les habitants.
» De là les immenses travaux exécutés sur ses bords
'depuis des temps dont l'antiquité paraît fabuleuse.
» Mais l'inondation du fleuve une fois terminée, on
jette la semei ce à la surface du limon qu'elle a laissé,
sans s'inquiéter même de la recouvrir. Les plus soi-
gneux se contentent de presser le grain sous une plan-
che. Trois mois après, la campagne a changé d'aspect :
de magnifiques récoltes la recouvrent de toutes parts ;
récoltes fameuses dès la plus haute antiquité. Rome
attendait avidement chaque année les blés d'Egypte et
ses lentilles ; les Juifs, devenus libres à force de mira-
cles, regrettaient ses succulents oignons.
» Des sept branches que formait autrefois le Nil en
pénétrant dans la basse Egypte, la plus orientale des-
cendait à Péluse. Sur le revers des collines qui la bor-
dent se creuse à l'est une seconde vallée, laquelle re-
monte ensuite vers les grands amas de sable du désert
iduméen. Cette vallée s'étend du golfe même de Pé-
luse, c'est-à-dire de la Méditerranée jusqu'à Suez et à la
mer Rouge, sur un espace d'environ vingt-neuf lieues.
Tel est l'obstacle qui ferme de ce côté aux navires de
l'Europe l'accès de la mer des Indes. Cet obstacle s'ap-
pelle l'isthme de Suez. Il offre, entre les collines qui le
séparent de la basse Egypte et les pentes opposées de
l'Asie, une sorte de dépression qui, vue à distance,
semble à peine dépasser de quelques mètres le ni-
veau moyen des deux mers. Là se trouve, pour ainsi
dire jalonnée depuis des siècles, la grande voie de na-
vigation maritime à ouvrir entre l'Orient et l'Occident.
» En allant de la Méditerranée à la mer Rouge, ce
thalweg naturel commence par le lac Menzaleh, bas-
fond d'une étendue considérable, que traversaient jadis
trois des sept branches du Nil. De larges attérissements
le séparent de la terre ferme. Le château de Tineh
marque vers l'orient les ruines de l'antique Péluse,
qui fut le grand port militaire des Ptolémées et la clef
de leur empire; Damiette est à l'occident; au nord, la
mer. La pêche du lac Menzaleh est, dit-on, miracu-
leuse ; elle nourrit une population de quinze mille serfs
qu'on prétend descendre des peuples pasteurs, lesquels
furent pendant cinq cents ans les maîtres de la con-
trée.
» Du lac Menzaleh, le tracé que nous suivons traverse
le bassin desséché d'un second lac, celui de Ballah,
puis les dunes de sables d'El-Ferdane, et atteint le
seuil d'El-Guisr, qui est le point culminant de son par-
cours.
» Sur une étendue de trois lieues environ, le seuil
d'El-Guisr ne s'élève pas en moyenne à plus de 10m,50
au-dessus du niveau de la mer. Comme perspective
dans le panorama de l'isthme, ce n'est rien, presque
rien; mais c'est énorme quand il s'agit d'y percer un
canal de 18 mètres de profondeur moyenne, avec 32
mètres de largeur au plafond et 56 à la ligne d'eau, ce
qui, vu l'inégalité du terrain, donne pour certains en-
droits jusqu'à 120 ou 130 mètres d'ouverture sur la crête
des talus. Mais ces problèmes, dont notre imagination
s'effraye, que sont-ils pour la science? Une simple ques-
tion de chiffres, un devis où l'on commence par poser
des règles de trois et où l'on finit par aligner des mil-
lions. Pourvu qu'ensuite on trouve les millions, tout
s'arrange.
» Des hauteurs d'El-Guisr on descend au lac Timsah,
point central de l'isthme, dont les berges couvertes de
tamariscs dessinent comme un îlot de verdure au mi-
lieu du désert. Partout, dans les environs, l'histoire, la
mythologie, la légende, ont laissé leurs empreintes. Les
débris qu'on aperçoit à l'extrémité sud-ouest du lac ap-
partiennent à l'ancienne ville juive de Toumbastum.
Viennent ensuite deux collines à peu près parallèles.
Celle de gauche est le tombeau du cheik Ennedek, san
ton vénéré. Maria, la prophétesse, sœur de Moïse, ve-
nait prier sur l'autre, selon les Arabes.
» On aborde ensuite le second seuil de l'isthme, ce-
lui du Sérapéum, auquel un vieux reste de construction
persépolitaine a donné son nom.
» Au-dessous se creuse la vaste dépression des lacs
Amers, formés de deux bassins contigus d'un diamètre
de dix lieues. L'âpre végétation du désert se montre un
instant au bord du premier, mais elle disparaît bientôt
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