Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-03-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 mars 1863 01 mars 1863
Description : 1863/03/01 (A8,N161). 1863/03/01 (A8,N161).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203240t
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 75
gération, sans doute, à voir dans le percement de l'is-
thme de Suez, l'entreprise la plus utile et la plus fé-
conde, comme la plus grandiose de notre époque.
» Le regard et les méditations de Leibnitz, s'étaient
aussi portés, on le sait, sur cette mystérieuse terre des
sphinx, où se sont rencontrées successivement, depuis
des siècles, les préoccupations des plus puissants gé-
nies ; dominé par le pressentiment des destinées hu-
manitaires attachées à ce point du globe, où trois
mondes semblaient conviés à se donner la main, le
souverain penseur descendit des hauteurs métaphysi-
ques aux régions de la politique positive, et, posant ce
qu'il aurait pu dès lors appeler la Question d'Orient, il en
fit le sujet d'un mémoire présenté à Louis XIV. Plus
héureux que le philosophe allemand, M. de Lesseps
s'est adressé à cette puissance qui n'est point en vain
nommée la reine du monde : l'opinion publique, ré-
pondant à son appel, accueillit de sa plus éclatante
faveur le projet dont il a eu la gloire d'être l'initia-
teur, et qu'il aura, nous l'espérons, la gloire bien plus
rare de conduire à bonne fin. Je ne rappellerai pas ici
comment ce projet devint celui du vice-roi d'Egypte,
par le patronage que lui accorda ce prince, noblement
jaloux, en cette circonstance, de donner aux gouver-
nements des grands Etats de l'Europe — selon les ex-
pressions d'un économiste célèbre — l'exemple le plus
éclatant des manifestations qu'aujourd'hui les hommes
attendent des pouvoirs de la terre.
» Une comfnission européenne fut nommée pour étu-
dier la question sur les lieux, et quand la science eut
marqué les difficultés à vaincre, les dispositions furent
prises pour en triompher, et les travaux commen-
cèrent aux applaudissements de l'Europe. »
Voici maintenant les détails que je reçois de Timsah :
« Timsah, 20 novembre 1862.
» Lorsque je rencontrai votre ami pour la pre-
mière fois, ce fut à l'Ouadée-Tomélât, cette vieille terre
de Gessen où Joseph vint d'Héliopolis à la rencontre de
son père Jacob, arrivé du pays de Chanaan : « Or Jacob,
» dit la Genèse, envoya en Egypte Juda devant lui vers .fo-
» seph, afin qu'il vint à sa rencontre en Gessen. — Lorsqu'il
» y fut arrivé, Joseph fit atteler son char et vint au même
» lieu à la rencontre de son père; et le voyant, il se jeta à
» son cou et pleura en l'embrassant. » — Vous comprenez
qu'ici je ne fais pas un pas sans ma Bible. — Les éru-
dits, dans des vues plus hostiles que favorables à la
véracité de la Genèse, ont longuement disserté sur
remplacement du pays de Gessen. La Ramessès de la
Bible que Joseph donna à son père et à ses frères,
ainsi que Pharaon l'avait ordonné, appartenait-elle à la
terre de Gessen? Si je m'en souviens bien, votre savant
compatriote, l'abbé Greppo, répond oui, — et le prouve
irréfutablement dans son précieux Essai sur le système
hiéroglyphique de Champollion le Jeune. Mais je n'ai pas son
livre et je ne saurais trop le regretter : il eût été une
lumière pour moi en beaucoup de choses. Je me rap-
pelle qu'il y exprime le vœu que des fouilles opérées
dans le village actuel de Ramsès éclaircissent un jour
la question, au double profit de la religion et de la
science. Ce vœu avait été déjà celui de Bossuet et de
Leibnitz, quoique non précisément au sujet de la même
difficulté. Ces grands esprits pressentaient les inappré-
ciables avantages que pourraient offrir les monuments
de l'Egypte pour la confirmation des faits de l'Ecriture,
s'ils étaient étudiés sur les lieux mêmes, par des hommes
compétents et en esprit de vérité. Je me suis fait à mon
tour l'humble écho de ce vœu auprès de M. Sala, si
capable, je dirai mieux, si digne de le comprendre, et
d'associer cette religieuse pensée à celle des gigantes-
ques travaux placés sous son intelligent contrôle. Ces
travaux, par l'échelle sur laquelle ils opèrent, doivent
nous donner une idée assez exacte de cette force orga-
nisée, 'qui peut seule nous expliquer les prodigieux mo-
numents de l'antiquité égyptienne, dans l'exécution
desquels le nombre des bras résolvait des problèmes
dynamiques on ne peut plus humiliants pour la science
de notre siècle de progrès. Je vis là, occupés à creuser
le canal d'eau douce dérivé du Nil, des chantiers de
plus de vingt mille manœuvres, travaillant à la manière
dont travaillaient leurs pères sous les Pharaons. La po-
lice, établie par Joseph en Egypte, y subsistait du
temps de Moïse; elle y subsista longtemps depuis,
comme nous l'apprennent tous les historiens; elle y
subsiste encore ; les fellahs ou paysans égyptiens tra-
vaillent pour le pacha qui leur laisse une portion pour
ensemencer et se nourrir. Ainsi, nous apprend la Bible,
en avait ordonné Joseph en rendant aux Egyptiens
leurs bestiaux et leurs terres qu'ils avaient été obligés
d'engager pendant la famine. « Lorsque vous ferez la
» moisson, leur dit-il, vous en donnerez la cinquième partie
f au roi, et vous garderez les quatre autres pour ensemencer
» vos champs et nourrir vos familles et vos enfants. » Les
Egyptiens souscrivirent volontiers à cette condition, et
leurs fils la remplissent encore aujourd'hui. N'allez pas
confondre toutefois le fellah et l'Arabe ; le fellah, fils
de ces Egyptiens, qui détestaient tous les pasteurs de brebis,
ainsi que Joseph lui-même en prévenait ses frères, et
l'Arabe, encore aujourd'hui dans sa vie, dans ses
mœurs, dans son costume, tradition vivante des temps
patriarcaux. « Que faites - vous ? » dit Pharaon aux
frères de Joseph. — Et ils répondent: « Vos serviteurs
D sont pasteurs de brebis comme l'ont été nos pères. » Appro-
chez-vous de cet Arabe et, comme Pharaon, dites-lui :
« Que faites-vous? » Il vous répondra:. « Je suis pas-
» teur de brebis comme l'ont été mes pères. »
» Voici maintenant où en est l'opération. Dans
quelques jours, l'eau de la Méditerranée entrera dans
le lac Timsah. Quatre millions deux cent mille mètres
cubes de terre ont été enlevés et portés sur berge en
sept mois et demi. Sésostris, en son temps, n'eût guère
fait plus. A l'extrémité de cette rigole, tout à fait digne
du pays des pyramides, et qui est quelquefois à 19
mètres en contre-bas du sol du désert, s'élève comme
par enchantement, au point où elle débouche dans le
lac Timsah et en face de ce futur et vaste port inté-
rieur, le palais du pacha en forme de chalet. Près de
ce chalet pousse et se développe la ville de Timsah.
D'intelligentes plantations s'y opèrent et réussissent,
grâce au canal d'eau douce qui permet d'arroser chaque
arbre. Au moment où je vous écris, le président fou-
gération, sans doute, à voir dans le percement de l'is-
thme de Suez, l'entreprise la plus utile et la plus fé-
conde, comme la plus grandiose de notre époque.
» Le regard et les méditations de Leibnitz, s'étaient
aussi portés, on le sait, sur cette mystérieuse terre des
sphinx, où se sont rencontrées successivement, depuis
des siècles, les préoccupations des plus puissants gé-
nies ; dominé par le pressentiment des destinées hu-
manitaires attachées à ce point du globe, où trois
mondes semblaient conviés à se donner la main, le
souverain penseur descendit des hauteurs métaphysi-
ques aux régions de la politique positive, et, posant ce
qu'il aurait pu dès lors appeler la Question d'Orient, il en
fit le sujet d'un mémoire présenté à Louis XIV. Plus
héureux que le philosophe allemand, M. de Lesseps
s'est adressé à cette puissance qui n'est point en vain
nommée la reine du monde : l'opinion publique, ré-
pondant à son appel, accueillit de sa plus éclatante
faveur le projet dont il a eu la gloire d'être l'initia-
teur, et qu'il aura, nous l'espérons, la gloire bien plus
rare de conduire à bonne fin. Je ne rappellerai pas ici
comment ce projet devint celui du vice-roi d'Egypte,
par le patronage que lui accorda ce prince, noblement
jaloux, en cette circonstance, de donner aux gouver-
nements des grands Etats de l'Europe — selon les ex-
pressions d'un économiste célèbre — l'exemple le plus
éclatant des manifestations qu'aujourd'hui les hommes
attendent des pouvoirs de la terre.
» Une comfnission européenne fut nommée pour étu-
dier la question sur les lieux, et quand la science eut
marqué les difficultés à vaincre, les dispositions furent
prises pour en triompher, et les travaux commen-
cèrent aux applaudissements de l'Europe. »
Voici maintenant les détails que je reçois de Timsah :
« Timsah, 20 novembre 1862.
» Lorsque je rencontrai votre ami pour la pre-
mière fois, ce fut à l'Ouadée-Tomélât, cette vieille terre
de Gessen où Joseph vint d'Héliopolis à la rencontre de
son père Jacob, arrivé du pays de Chanaan : « Or Jacob,
» dit la Genèse, envoya en Egypte Juda devant lui vers .fo-
» seph, afin qu'il vint à sa rencontre en Gessen. — Lorsqu'il
» y fut arrivé, Joseph fit atteler son char et vint au même
» lieu à la rencontre de son père; et le voyant, il se jeta à
» son cou et pleura en l'embrassant. » — Vous comprenez
qu'ici je ne fais pas un pas sans ma Bible. — Les éru-
dits, dans des vues plus hostiles que favorables à la
véracité de la Genèse, ont longuement disserté sur
remplacement du pays de Gessen. La Ramessès de la
Bible que Joseph donna à son père et à ses frères,
ainsi que Pharaon l'avait ordonné, appartenait-elle à la
terre de Gessen? Si je m'en souviens bien, votre savant
compatriote, l'abbé Greppo, répond oui, — et le prouve
irréfutablement dans son précieux Essai sur le système
hiéroglyphique de Champollion le Jeune. Mais je n'ai pas son
livre et je ne saurais trop le regretter : il eût été une
lumière pour moi en beaucoup de choses. Je me rap-
pelle qu'il y exprime le vœu que des fouilles opérées
dans le village actuel de Ramsès éclaircissent un jour
la question, au double profit de la religion et de la
science. Ce vœu avait été déjà celui de Bossuet et de
Leibnitz, quoique non précisément au sujet de la même
difficulté. Ces grands esprits pressentaient les inappré-
ciables avantages que pourraient offrir les monuments
de l'Egypte pour la confirmation des faits de l'Ecriture,
s'ils étaient étudiés sur les lieux mêmes, par des hommes
compétents et en esprit de vérité. Je me suis fait à mon
tour l'humble écho de ce vœu auprès de M. Sala, si
capable, je dirai mieux, si digne de le comprendre, et
d'associer cette religieuse pensée à celle des gigantes-
ques travaux placés sous son intelligent contrôle. Ces
travaux, par l'échelle sur laquelle ils opèrent, doivent
nous donner une idée assez exacte de cette force orga-
nisée, 'qui peut seule nous expliquer les prodigieux mo-
numents de l'antiquité égyptienne, dans l'exécution
desquels le nombre des bras résolvait des problèmes
dynamiques on ne peut plus humiliants pour la science
de notre siècle de progrès. Je vis là, occupés à creuser
le canal d'eau douce dérivé du Nil, des chantiers de
plus de vingt mille manœuvres, travaillant à la manière
dont travaillaient leurs pères sous les Pharaons. La po-
lice, établie par Joseph en Egypte, y subsistait du
temps de Moïse; elle y subsista longtemps depuis,
comme nous l'apprennent tous les historiens; elle y
subsiste encore ; les fellahs ou paysans égyptiens tra-
vaillent pour le pacha qui leur laisse une portion pour
ensemencer et se nourrir. Ainsi, nous apprend la Bible,
en avait ordonné Joseph en rendant aux Egyptiens
leurs bestiaux et leurs terres qu'ils avaient été obligés
d'engager pendant la famine. « Lorsque vous ferez la
» moisson, leur dit-il, vous en donnerez la cinquième partie
f au roi, et vous garderez les quatre autres pour ensemencer
» vos champs et nourrir vos familles et vos enfants. » Les
Egyptiens souscrivirent volontiers à cette condition, et
leurs fils la remplissent encore aujourd'hui. N'allez pas
confondre toutefois le fellah et l'Arabe ; le fellah, fils
de ces Egyptiens, qui détestaient tous les pasteurs de brebis,
ainsi que Joseph lui-même en prévenait ses frères, et
l'Arabe, encore aujourd'hui dans sa vie, dans ses
mœurs, dans son costume, tradition vivante des temps
patriarcaux. « Que faites - vous ? » dit Pharaon aux
frères de Joseph. — Et ils répondent: « Vos serviteurs
D sont pasteurs de brebis comme l'ont été nos pères. » Appro-
chez-vous de cet Arabe et, comme Pharaon, dites-lui :
« Que faites-vous? » Il vous répondra:. « Je suis pas-
» teur de brebis comme l'ont été mes pères. »
» Voici maintenant où en est l'opération. Dans
quelques jours, l'eau de la Méditerranée entrera dans
le lac Timsah. Quatre millions deux cent mille mètres
cubes de terre ont été enlevés et portés sur berge en
sept mois et demi. Sésostris, en son temps, n'eût guère
fait plus. A l'extrémité de cette rigole, tout à fait digne
du pays des pyramides, et qui est quelquefois à 19
mètres en contre-bas du sol du désert, s'élève comme
par enchantement, au point où elle débouche dans le
lac Timsah et en face de ce futur et vaste port inté-
rieur, le palais du pacha en forme de chalet. Près de
ce chalet pousse et se développe la ville de Timsah.
D'intelligentes plantations s'y opèrent et réussissent,
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