Presse et revues
16 pages
Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 février 1863 15 février 1863
Description : 1863/02/15 (A8,N160). 1863/02/15 (A8,N160).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62032395
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 55
Quelques détails nouveaux, que nous a transmis
le dernier courrier, nous permettent de compléter la
relation que nous avons déjà donnée de l'excursion
de l'illustre voyageur aux travaux du désert.
A son départ d'Alexandrie, l'émir avait trouvé,
réunis à la gare du chemin de fer, une nombreuse
députation de sœurs de charité, ainsi que les pères
lazaristes, qui attendaient son arrivée pour lui offrir
leurs remercîments pour ce qu'il avait fait à Damas
en faveur des chrétiens, et lui présenter l'expression
de leur hommage.
Abd-el-Kader, réellement ému, leur a répondu en
ces termes :
« Je vous remercie de votre sympathie. J'ai été
malheureusement prévenu trop tard à Damas, car
j'aurais pu maîtriser le carnage. Je demande à Dieu
de vous protéger. Continuez à marcher dans la voie
de la vertu. Retournez à Damas, je vous promets de
ne jamais vous perdre de vue. »
A Tantah, les cheiks de la religion de Mahomet,
ayant à leur tête le cheik Islam, réunis dans la grande
mosquée à l'occasion de la fête du 10 Reggeb, dé-
cernèrent à l'émir une ovation non moins flatteuse.
A Damiette, Abd-el-Kader, après avoir parcouru
les divers établissements et chantiers, s'étant arrêté
devant un groupe de Français attachés à la Compa-
gnie, qui s'étaient réunis pour le complimenter, leur
a adressé les paroles suivantes :
« En vous saluant, Messieurs, je salue l'homme
inspiré de Dieu.
» En travaillant avec le noble M. de Lesseps,
vous acquerrez des droits à la reconnaissance du
monde entier.
» Je suis très-sensible à l'affectueuse réception que
vous me faites, croyez-le bien, car j'aime beaucoup
la généreuse nation à laquelle vous appartenez. »
Après avoir visité, avec le plus vif intérêt, tous
les chantiers de Port-Saïd, s'informant des plus pe-
tits détails, se faisant rendre compte par l'ingénieur
chef de division de la marche des travaux achevés
et des travaux à exécuter encore pour arriver à
l'accomplissement de l'œuvre, l'émir, devinant les
destinées futures de Port-Saïd, comprenant les dé-
veloppements que la ville nouvelle est appelée à pren-
dre, et l'importance qui lui est réservée, a voulu faire
connaître ses impressions.
« Vous êtes, a-t-il dit aux employés de la Compa-
gnie, les fondateurs d'une cité naissante. Adoptez
de larges proportions pour son agrandissement, car
cette ville est destinée à recevoir les enfants de Dieu
arrivant de toutes les parties du monde. Les musul-
mans, mes frères, la traverseront en grand nombre,
et, en passant, ils n'oublieront jamais de prier Dieu
pour la conservation du grand homme qui a su, mal
gré tant d'obstacles, arriver à l'accomplissement
d'un si grand travail humanitaire et civilisateur.
» Que Dieu le bénisse. »
Les travaux exécutés de Port-Saïd à Timsah de-
vaient, plus encore que ceux qu'il venait de voir, at-
tirer l'attention d'Abd-el-Kader. Après avoir suivi la
rigole maritime de Port-Saïd à Ferdane, traversé la
tranchée du seuil d'EI-Guisr, examiné les berges, il
a laissé sa pensée se dévoiler tout entière en adres-
sant à M. Vernoni, interprète de la Compagnie, dé-
légué par M. Ferdinand de Lesseps pour l'accompa-
gner dans son excursion, ces belles et nobles pa-
roles :
« C'est ici que s'accomplit la résurrection de cette
Egypte si renommée dans les temps antiques, de
cette noble terre si riche en grands monuments.
» Jusqu'à ce moment, j'avais regardé les hommes
de notre époque comme trop faibles pour faire autre
chose que de l'imitation; mais, aujourd'hui, je re-
connais qu'ils surpassent en mérite les hommes des
temps anciens.
» Honneur donc à M. de Lesseps, et que Dieu lui
permette d'accomplir l'œuvre gigantesque qu'il a si
bien entreprise. »
Enfin, à Timsah, l'émir s'est exprimé ainsi :
« C'est ici, autour de ce magnifique bassin et dans
les eaux vivifiantes du Nil béni, que de toutes les
parties du monde rendront les serviteurs de Dieu,
créateur de toute chose, se reposer des fatigues de
leur longue traversée. »
Nous ne rappellerons pas la réception presque
triomphale faite à Abd-el-Kader au château de Tell-
el-Kebir. Nous ne pourrions que répéter les détails
que contient notre dernier numéro; nous avons pu-
blié un résumé très-exact des paroles qu'il a pronon-
cées avant de quitter cette dernière station des éta-
blissements de la Compagnie.
Nous aimons Abd-el-Kader; nous" admirons son
caractère; nous apprécions les services qu'il a
rendus à Damas à la cause de la civilisation; nous
reconnaissons toute la portée de sa grande intelli-
gence. Les employés de la Compagnie, qui se dé-
vouent à l'œuvre loin de leurs parents, de leurs amis,
de leur patrie, garderont, nous n'en doutons pas, un
doux souvenir de son court passage au milieu d'eux,
et ils n'oublieront point les encouragements que leur
a donnés l'un des hommes les plus éminents certai-
nement de la grande famille arabe.
ERNEST DESPLACES.
Quelques détails nouveaux, que nous a transmis
le dernier courrier, nous permettent de compléter la
relation que nous avons déjà donnée de l'excursion
de l'illustre voyageur aux travaux du désert.
A son départ d'Alexandrie, l'émir avait trouvé,
réunis à la gare du chemin de fer, une nombreuse
députation de sœurs de charité, ainsi que les pères
lazaristes, qui attendaient son arrivée pour lui offrir
leurs remercîments pour ce qu'il avait fait à Damas
en faveur des chrétiens, et lui présenter l'expression
de leur hommage.
Abd-el-Kader, réellement ému, leur a répondu en
ces termes :
« Je vous remercie de votre sympathie. J'ai été
malheureusement prévenu trop tard à Damas, car
j'aurais pu maîtriser le carnage. Je demande à Dieu
de vous protéger. Continuez à marcher dans la voie
de la vertu. Retournez à Damas, je vous promets de
ne jamais vous perdre de vue. »
A Tantah, les cheiks de la religion de Mahomet,
ayant à leur tête le cheik Islam, réunis dans la grande
mosquée à l'occasion de la fête du 10 Reggeb, dé-
cernèrent à l'émir une ovation non moins flatteuse.
A Damiette, Abd-el-Kader, après avoir parcouru
les divers établissements et chantiers, s'étant arrêté
devant un groupe de Français attachés à la Compa-
gnie, qui s'étaient réunis pour le complimenter, leur
a adressé les paroles suivantes :
« En vous saluant, Messieurs, je salue l'homme
inspiré de Dieu.
» En travaillant avec le noble M. de Lesseps,
vous acquerrez des droits à la reconnaissance du
monde entier.
» Je suis très-sensible à l'affectueuse réception que
vous me faites, croyez-le bien, car j'aime beaucoup
la généreuse nation à laquelle vous appartenez. »
Après avoir visité, avec le plus vif intérêt, tous
les chantiers de Port-Saïd, s'informant des plus pe-
tits détails, se faisant rendre compte par l'ingénieur
chef de division de la marche des travaux achevés
et des travaux à exécuter encore pour arriver à
l'accomplissement de l'œuvre, l'émir, devinant les
destinées futures de Port-Saïd, comprenant les dé-
veloppements que la ville nouvelle est appelée à pren-
dre, et l'importance qui lui est réservée, a voulu faire
connaître ses impressions.
« Vous êtes, a-t-il dit aux employés de la Compa-
gnie, les fondateurs d'une cité naissante. Adoptez
de larges proportions pour son agrandissement, car
cette ville est destinée à recevoir les enfants de Dieu
arrivant de toutes les parties du monde. Les musul-
mans, mes frères, la traverseront en grand nombre,
et, en passant, ils n'oublieront jamais de prier Dieu
pour la conservation du grand homme qui a su, mal
gré tant d'obstacles, arriver à l'accomplissement
d'un si grand travail humanitaire et civilisateur.
» Que Dieu le bénisse. »
Les travaux exécutés de Port-Saïd à Timsah de-
vaient, plus encore que ceux qu'il venait de voir, at-
tirer l'attention d'Abd-el-Kader. Après avoir suivi la
rigole maritime de Port-Saïd à Ferdane, traversé la
tranchée du seuil d'EI-Guisr, examiné les berges, il
a laissé sa pensée se dévoiler tout entière en adres-
sant à M. Vernoni, interprète de la Compagnie, dé-
légué par M. Ferdinand de Lesseps pour l'accompa-
gner dans son excursion, ces belles et nobles pa-
roles :
« C'est ici que s'accomplit la résurrection de cette
Egypte si renommée dans les temps antiques, de
cette noble terre si riche en grands monuments.
» Jusqu'à ce moment, j'avais regardé les hommes
de notre époque comme trop faibles pour faire autre
chose que de l'imitation; mais, aujourd'hui, je re-
connais qu'ils surpassent en mérite les hommes des
temps anciens.
» Honneur donc à M. de Lesseps, et que Dieu lui
permette d'accomplir l'œuvre gigantesque qu'il a si
bien entreprise. »
Enfin, à Timsah, l'émir s'est exprimé ainsi :
« C'est ici, autour de ce magnifique bassin et dans
les eaux vivifiantes du Nil béni, que de toutes les
parties du monde rendront les serviteurs de Dieu,
créateur de toute chose, se reposer des fatigues de
leur longue traversée. »
Nous ne rappellerons pas la réception presque
triomphale faite à Abd-el-Kader au château de Tell-
el-Kebir. Nous ne pourrions que répéter les détails
que contient notre dernier numéro; nous avons pu-
blié un résumé très-exact des paroles qu'il a pronon-
cées avant de quitter cette dernière station des éta-
blissements de la Compagnie.
Nous aimons Abd-el-Kader; nous" admirons son
caractère; nous apprécions les services qu'il a
rendus à Damas à la cause de la civilisation; nous
reconnaissons toute la portée de sa grande intelli-
gence. Les employés de la Compagnie, qui se dé-
vouent à l'œuvre loin de leurs parents, de leurs amis,
de leur patrie, garderont, nous n'en doutons pas, un
doux souvenir de son court passage au milieu d'eux,
et ils n'oublieront point les encouragements que leur
a donnés l'un des hommes les plus éminents certai-
nement de la grande famille arabe.
ERNEST DESPLACES.
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