Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-12-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 décembre 1864 15 décembre 1864
Description : 1864/12/15 (A9,N204). 1864/12/15 (A9,N204).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203335v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/11/2012
486 L'ISTHME DE SUEZ.
LES SOURCES DU NIL.
Le monde entier a reienti de la découverte des
sources du Nil par le capitaine Speke, et de la triste
catastrophe qui a mis un terme à la vie de l'intré-
pide explorateur. La relation de ce voyage d'explo-
ration a été publiée en Angleterre par M. Speke lui-
même ; elle a -été traduite par M. E. D. Forgues avec
autorisation de l'auteur, et cette traduction vient
d'être éditée par la célèbre maison Hachette et O.
Nous aurons occasion de revenir sur ce récit plein
d'intérêt. Nos lecteurs nous sauront gré de leur en
offrir aujourd'hui un extrait décrivant ces sources du
grand fleuve et les contrées qui les environnent.
J. MONGIN.
21 juillet 1862, - Enfin, enfin, je me trouvais sur les
bords du Nil. Rien de plus beau que le spectacle alors
offert à nos yeux. J'y voyais réunis par la nature tous
les effets de perspective auxquels vise le propriétaire
du parc le mieux tenu : un courant magnifique de
6 à 700 mètres de large, tigré çà et là de récifs et
d'îlots, ceux-ci occupés par des huttes de pêcheurs,
ceux-là par des hirondelles de mer et des crocodiles se
chauffant au soleil ; il glisse entre de hautes berges
recouvertes d'un épais gazon, et derrière lesquelles,
parmi de beaux arbres, nous pouvions voir errer de
nombreux troupeaux d'antilopes, tandis que les hippo-
potames renâclaient dans l'eau, et que sous nos pieds,
à chaque instant, floricans et pintades prenaient leur
vol. Melondo, le commandant du district, était, par
malheur, absent de chez lui ; mais nous prîmes
possession de ses huttes, fort vastes et fort bien en-
tretenues, et une fois installés en face du fleuve, il
nous sembla qu'un séjour de quelque durée n'y se-
rait vraiment pas désagréable.
Bientôt cependant des subterfuges, des retards de
toute espèce vinrent un peu refroidir nos dispositions
enthousiastes. Le chef de la station, que nous avions
mandé, nous dit que toutes les barques étaient dis-
persées et ne sauraient être réunies avant un ou
deux jours. « D'ailleurs et quand bien même nous
les aurions sous la main elles ne s'aventureraient
jamais à descendre ou à remonter le fleuve. Il fallait
de plus faire venir le chef du district ; car le roi
changeait souvent les ordres donnés, et il n'était pas
certain, après tout, que nous eussions bien inter-
prété ses promesses. Le district appartenait au saki-
bobo, et nous n'amenions avec nous aucun de ses
délégués. » Nous ne voulûmes pas naturellement
nous payer de pareilles excuses. — « Les barques
doivent être réunies, disions-nous, en tel nombre
qu'elles se pourront trouver, car il faut d'abord véri-
fier leur conditionlPuis s'entendre sur l'emploi qu'on
en peut faire, avant que nous nous décidions à re-
monter le fleuve. Pour peu que le commandant de
la station tienne à conserver sa tête, il fera droit à
nos demandes et reconnaîtra Kasoro comme le repré-
sentant de Sa Majesté. Sans cela, nous ferons porter
nos plaintes au palais, n'étant guère disposés à souf-
frir qu'on se moque de nous. »
Nous avions alors en face de nous un pays qui,
sous le rapport de la richesse et de la beauté, forme
le contraste le plus complet avec l'Ouganda. C'est
l'Ousoga, dont les habitants sont armés de javelines
courtes à larges pointes de fer, « mieux faites, di-
saient mes gens, pour déterrer des pommes de terre
que pour guerroyer Contre des hommes. » Ainsi que
que nous avions pu en juger par la dévastation des
campagnes que nous traversions depuis deux jours,
les éléphants doivent abonder dans les environs ;
mais tout récemment il est venu de l'Ouneyro une
expédition de chasse qui les a renvoyés plus loin.
Les lions sont aussi représentés comme très-nom-
breux et très-hostiles à l'homme. Les antilopes
abondent dans les jungles, et les hippopotames qui
hantent volontiers les jardins plantés de bananes, se
laissent rarement apercevoir à terre, bien qu'on les
entende à chaque instant, ce qui tient, sans doute,
à leurs habitudes vagabondes.
25 juillet. — Chute d'Isamba.
J'ai remonté la rive gauche du Nil, à une distance
considérable de l'eau, jusqu'aux chutes d'Isamba,
tout au travers des jungles luxuriantes et de jar-
dins bananiers. Nango, que je connais de vieille
date, et qui commande ce district, nous a régalés de
bananes en compotes et de poisson sec, le tout
arrosé de pombé. Les éléphants le menacent souvent
de leur visite, à ce qu'il nous dit, « mais il prend
soin de les écarter au moyen de talismans, car s'ils
venaient à goûter une seule banane, ils ne quitte-
raient le jardin qu'après l'avoir complètement ra-
vagé. » Il nous a conduits ensuite aux chutes les
plus voisines; elles sont très-belles mais très-
resserrées. L'eau du Nil court profonde entre ses
rives couvertes d'épais gazons, d'acacias aux con-
tours nuageux et de convolvuli qui envoient de toutes
parts leurs guirlandes nuancées de lilas. Partout où
le sol s'est afftiissé sous l'action des eaux, on entre-
voit un terreau rouge qui rappelle celui du Devons-
hire; le courant, arrêté par une digue naturelle,
forme une espèce d'étang sombre et sinistre où deux
crocodiles, tout en se baignant, guettaient leur
proie. L'ensemble du tableau était plus féerique,
plus sauvage, plus saisissant, — je hasarde cette
comparaison, parce qu'elle me vint alors à l'esprit,
— que rien de ce que j'ai pu voir, à l'exception des
décors du théâtre. En jetant un pont d'une rive à
l'autre, et par un beau clair de lune, c'était bien là
LES SOURCES DU NIL.
Le monde entier a reienti de la découverte des
sources du Nil par le capitaine Speke, et de la triste
catastrophe qui a mis un terme à la vie de l'intré-
pide explorateur. La relation de ce voyage d'explo-
ration a été publiée en Angleterre par M. Speke lui-
même ; elle a -été traduite par M. E. D. Forgues avec
autorisation de l'auteur, et cette traduction vient
d'être éditée par la célèbre maison Hachette et O.
Nous aurons occasion de revenir sur ce récit plein
d'intérêt. Nos lecteurs nous sauront gré de leur en
offrir aujourd'hui un extrait décrivant ces sources du
grand fleuve et les contrées qui les environnent.
J. MONGIN.
21 juillet 1862, - Enfin, enfin, je me trouvais sur les
bords du Nil. Rien de plus beau que le spectacle alors
offert à nos yeux. J'y voyais réunis par la nature tous
les effets de perspective auxquels vise le propriétaire
du parc le mieux tenu : un courant magnifique de
6 à 700 mètres de large, tigré çà et là de récifs et
d'îlots, ceux-ci occupés par des huttes de pêcheurs,
ceux-là par des hirondelles de mer et des crocodiles se
chauffant au soleil ; il glisse entre de hautes berges
recouvertes d'un épais gazon, et derrière lesquelles,
parmi de beaux arbres, nous pouvions voir errer de
nombreux troupeaux d'antilopes, tandis que les hippo-
potames renâclaient dans l'eau, et que sous nos pieds,
à chaque instant, floricans et pintades prenaient leur
vol. Melondo, le commandant du district, était, par
malheur, absent de chez lui ; mais nous prîmes
possession de ses huttes, fort vastes et fort bien en-
tretenues, et une fois installés en face du fleuve, il
nous sembla qu'un séjour de quelque durée n'y se-
rait vraiment pas désagréable.
Bientôt cependant des subterfuges, des retards de
toute espèce vinrent un peu refroidir nos dispositions
enthousiastes. Le chef de la station, que nous avions
mandé, nous dit que toutes les barques étaient dis-
persées et ne sauraient être réunies avant un ou
deux jours. « D'ailleurs et quand bien même nous
les aurions sous la main elles ne s'aventureraient
jamais à descendre ou à remonter le fleuve. Il fallait
de plus faire venir le chef du district ; car le roi
changeait souvent les ordres donnés, et il n'était pas
certain, après tout, que nous eussions bien inter-
prété ses promesses. Le district appartenait au saki-
bobo, et nous n'amenions avec nous aucun de ses
délégués. » Nous ne voulûmes pas naturellement
nous payer de pareilles excuses. — « Les barques
doivent être réunies, disions-nous, en tel nombre
qu'elles se pourront trouver, car il faut d'abord véri-
fier leur conditionlPuis s'entendre sur l'emploi qu'on
en peut faire, avant que nous nous décidions à re-
monter le fleuve. Pour peu que le commandant de
la station tienne à conserver sa tête, il fera droit à
nos demandes et reconnaîtra Kasoro comme le repré-
sentant de Sa Majesté. Sans cela, nous ferons porter
nos plaintes au palais, n'étant guère disposés à souf-
frir qu'on se moque de nous. »
Nous avions alors en face de nous un pays qui,
sous le rapport de la richesse et de la beauté, forme
le contraste le plus complet avec l'Ouganda. C'est
l'Ousoga, dont les habitants sont armés de javelines
courtes à larges pointes de fer, « mieux faites, di-
saient mes gens, pour déterrer des pommes de terre
que pour guerroyer Contre des hommes. » Ainsi que
que nous avions pu en juger par la dévastation des
campagnes que nous traversions depuis deux jours,
les éléphants doivent abonder dans les environs ;
mais tout récemment il est venu de l'Ouneyro une
expédition de chasse qui les a renvoyés plus loin.
Les lions sont aussi représentés comme très-nom-
breux et très-hostiles à l'homme. Les antilopes
abondent dans les jungles, et les hippopotames qui
hantent volontiers les jardins plantés de bananes, se
laissent rarement apercevoir à terre, bien qu'on les
entende à chaque instant, ce qui tient, sans doute,
à leurs habitudes vagabondes.
25 juillet. — Chute d'Isamba.
J'ai remonté la rive gauche du Nil, à une distance
considérable de l'eau, jusqu'aux chutes d'Isamba,
tout au travers des jungles luxuriantes et de jar-
dins bananiers. Nango, que je connais de vieille
date, et qui commande ce district, nous a régalés de
bananes en compotes et de poisson sec, le tout
arrosé de pombé. Les éléphants le menacent souvent
de leur visite, à ce qu'il nous dit, « mais il prend
soin de les écarter au moyen de talismans, car s'ils
venaient à goûter une seule banane, ils ne quitte-
raient le jardin qu'après l'avoir complètement ra-
vagé. » Il nous a conduits ensuite aux chutes les
plus voisines; elles sont très-belles mais très-
resserrées. L'eau du Nil court profonde entre ses
rives couvertes d'épais gazons, d'acacias aux con-
tours nuageux et de convolvuli qui envoient de toutes
parts leurs guirlandes nuancées de lilas. Partout où
le sol s'est afftiissé sous l'action des eaux, on entre-
voit un terreau rouge qui rappelle celui du Devons-
hire; le courant, arrêté par une digue naturelle,
forme une espèce d'étang sombre et sinistre où deux
crocodiles, tout en se baignant, guettaient leur
proie. L'ensemble du tableau était plus féerique,
plus sauvage, plus saisissant, — je hasarde cette
comparaison, parce qu'elle me vint alors à l'esprit,
— que rien de ce que j'ai pu voir, à l'exception des
décors du théâtre. En jetant un pont d'une rive à
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