Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-12-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 décembre 1864 15 décembre 1864
Description : 1864/12/15 (A9,N204). 1864/12/15 (A9,N204).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203335v
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 19/11/2012
490 L'ISTHME DE SUEZ,
l'amiral gouverneur, est venue visiter la capitale de
notre colonie. Aux yeux des populations asiatiques, un
tel déplacement est une affaire de la dernière impor-
tance ; Norodon ne pouvait donner à la France une plus
grande marque d'attachement et de déférence, et sanc-
tionner avec plus de profit pour notre influence, le
protectorat qu'il nous a concédé sur ses Etats. Nous
avons dans le temps fourni à nos lecteurs des détails
sur la personne de ce souverain absolu et sur la race
à laquelle il appartient, race entièrement distincte des
Annamites et des Chinois, et supérieure sous le rap-
port de la constitution physique, mais beaucoup moins
avancée sous celui de la civilisation.
Le roi et son escorte sont descendus de Houdou,
capitale du Cambodge, par le grand fleuve et les ri-
vières qui forment l'itinéraire le plus court et le plus
commode jusqu'à Saigon. La rade entière avait été pa-
voisée ; la ville chinoise de Cho-Ien était revêtue de
drapeaux et guirlandes sur le parcours de l'escadrille.
L'amiral avait envoyé à la disposition de Norodon la
canonnière n° 32, somptueusement et confortablement
installée pour la personne royale, qui s'en est montrée
très-satisfaite et a largement usé, pendant ce voyage,
des commodités et des friandises misera sa discrétion.
La canonnière, qui avait le mérite extrême d'abréger
ce voyage, qui demande par les pirogues ramées six à
huit jours, avait après elle le yacht Gia-Dinh, portant
les femmes et l'escorte de Sa Majesté. Ces femmes
sont nombreuses, et chaque épouse en titre est pourvue
d'une suppléante chargée de veiller sur elle, et qui de-
vient un jour ou l'autre, pour peu qu'elle ait quel-
que beauté, femme légitime à son lour. Ces suppléan-
tes sont en même temps des baladines, destinées à
égayer le monarque. La compétition, dans le harem
cambodgien, pour obtenir d'être du voyage, a sans
doute été très-vive, car ce harem se compose d'une
quarantaine de sultanes en titre, et il n'en est pas venu à
beaucoup près un si grand nombre.
Le roi portait le costume militaire de fantaisie qui
lui a été offert à l'occasion de son couronnement, et
n'avait eu garde d'oublier la couronne d'or, à pointe
aiguë, que la France lui a également donnée. Il
avait avec lui plusieurs; de ses devins, sans lesquels il
n'entreprend rien d'important, et qui ont des formules
magiques pour toutes les circonstances. Leur chef est
un grand vieillard aux traits austères, impassibles, aux
cheveux longs, relevés en chignon derrière le crâne, et
qui, dans les occasions solennelles comme celle-ci,
porte des vêtements de soie et d'or.
Le cortège cambodgien se composait d'une centaine
de personnages, tous dignitaires et militaires attachés
à la cour d'Houdou. Le coup d'œil était aussi pitto-
resque qu'étrange, mais il faut renoncer à en donner
une description détaillée, tant ces ajustements ont peu
de rapport avec les nôtres et appartiennent à la fan-
taisie indienne. Ce qui frappait, cependant, c'est l'ha-
bileté avec laquelle sont confectionnés les tissus de
soie et sont assorties les nuances vives et les chamar-
rures qui les ornent. II y a là des dessins très-bizarres,
mais il y eb à ausM qui feraient la fortune de l'indus-
triel européen qui saurait se les approprier. Une partie
des dignitaires cambodgiens et desmusiciens de la cour
avaient le torse nu et les reins ceints de tonnelets écla-
tants. La musique se compose de gongs et cymbales
et de quelques instruments bizarres, parmi lesquels
les plus bruyants sont les plus prisés. Leurs sons éclatants
n'ont pas cessé sur le yacht pendant tout le trajet, afin
d'avertir les riverains de l'honneur que recevaient leurs
eaux, et ils ont redoublé à l'arrivée, afin de rivaliser
avec les décharges de l'artillerie.
L'amiral la Grandière, entouré de son état-major
et des hommes de la garnison, est allé recevoir son vi-
siteur sur le quai, et après un compliment de bienve-
nue, auquel Norodon a répondu très-affectueusement,
on s'est rendu, au milieu d'une affluence énorme de
population, au palais du gouvernement, où le roi a
trouvé un appartement préparé, comme l'avait été le
bâtiment de transport, de manière à satisfaire à ses
usages. Des fêtes, des illuminations, un spectacle et de
la musique avaient été organisés et duraient encore au
moment où notre correspondant a dû fermer sa lettre
pour la remettre au paquebot. Norodon avait apporté
avec lui des présents remarquables, spécimens des pro-
duits et de l'industrie de son royaume, entre lesquels
l'ivoire et la soie jouent un grand rôle.
La pêche du Grand-Lac, qui est une des richesses
du roi, a été très-abondante cette année, ce qui lui a
permis de faire des largesses. Cette pêche est évaluée,
pour cette saison seule, de 120,000 à 150,000 piculs
(soit de 9,000 à 10,000 tonneaux), ce qui, au prix moyen
de 10 fr. le picul, constitue une importance de 12
à 1,500,000 francs; et cette récolte, qui ne demande que
la peine d'être ramassée, le poisson venant donner lui-
même dans les bourses, à l'entrée des moindres rigo-
les, cette récolte incomplète, à moitié sacrifiéé par l'in-
différence des indigènes, par l'insuffisance du sel et
des fumures, n'attend, pour les enrichir, que la pré-
sence et l'intelligence de quelques commerçants fran-
çais.
Le mois d'octobre a été assez tranquille, malgré
quelques velléités de piraterie, promptement réprimées,
sur des points écartés de nos postes, et malgré l'atta-
que d'une de nos positions des frontières, par un petit
mandarin, à qui, assure-t on, Tu-Duc avait promis au-
tant de terres qu'il en pourrait prendre aux Français.
On sait que ces mandarins, expulsés de notre territoire,
où ils exerçaient leur pouvoir et leurs exactions, détes-
tent notre drapeau, et que, retirés dans les provinces
voisines, ils sont les fauteurs de toutes ces tentatives
de rébellion, qui deviennent aujourd'hui très-rares, tes
populations préférant beaucoup notre administration
paternelle et féconde à leur despotisme. Le poste atta-
qué est celui de Long-Nhon, qui a tenu ferme contre
une nuée d'assaillants, et n'a eu qu'un homme tué et
deux blessés.
On prépare le prochain budget, qui parait devoir
réaliser les précédentes et favorables indications four-
nies par la Pairie. Le gouvernement de la colonie se
préoccupe de l'installation des bâtiments militaires, ca-
sernes et hôpitaux, car il faut toujours combattre l'in-
l'amiral gouverneur, est venue visiter la capitale de
notre colonie. Aux yeux des populations asiatiques, un
tel déplacement est une affaire de la dernière impor-
tance ; Norodon ne pouvait donner à la France une plus
grande marque d'attachement et de déférence, et sanc-
tionner avec plus de profit pour notre influence, le
protectorat qu'il nous a concédé sur ses Etats. Nous
avons dans le temps fourni à nos lecteurs des détails
sur la personne de ce souverain absolu et sur la race
à laquelle il appartient, race entièrement distincte des
Annamites et des Chinois, et supérieure sous le rap-
port de la constitution physique, mais beaucoup moins
avancée sous celui de la civilisation.
Le roi et son escorte sont descendus de Houdou,
capitale du Cambodge, par le grand fleuve et les ri-
vières qui forment l'itinéraire le plus court et le plus
commode jusqu'à Saigon. La rade entière avait été pa-
voisée ; la ville chinoise de Cho-Ien était revêtue de
drapeaux et guirlandes sur le parcours de l'escadrille.
L'amiral avait envoyé à la disposition de Norodon la
canonnière n° 32, somptueusement et confortablement
installée pour la personne royale, qui s'en est montrée
très-satisfaite et a largement usé, pendant ce voyage,
des commodités et des friandises misera sa discrétion.
La canonnière, qui avait le mérite extrême d'abréger
ce voyage, qui demande par les pirogues ramées six à
huit jours, avait après elle le yacht Gia-Dinh, portant
les femmes et l'escorte de Sa Majesté. Ces femmes
sont nombreuses, et chaque épouse en titre est pourvue
d'une suppléante chargée de veiller sur elle, et qui de-
vient un jour ou l'autre, pour peu qu'elle ait quel-
que beauté, femme légitime à son lour. Ces suppléan-
tes sont en même temps des baladines, destinées à
égayer le monarque. La compétition, dans le harem
cambodgien, pour obtenir d'être du voyage, a sans
doute été très-vive, car ce harem se compose d'une
quarantaine de sultanes en titre, et il n'en est pas venu à
beaucoup près un si grand nombre.
Le roi portait le costume militaire de fantaisie qui
lui a été offert à l'occasion de son couronnement, et
n'avait eu garde d'oublier la couronne d'or, à pointe
aiguë, que la France lui a également donnée. Il
avait avec lui plusieurs; de ses devins, sans lesquels il
n'entreprend rien d'important, et qui ont des formules
magiques pour toutes les circonstances. Leur chef est
un grand vieillard aux traits austères, impassibles, aux
cheveux longs, relevés en chignon derrière le crâne, et
qui, dans les occasions solennelles comme celle-ci,
porte des vêtements de soie et d'or.
Le cortège cambodgien se composait d'une centaine
de personnages, tous dignitaires et militaires attachés
à la cour d'Houdou. Le coup d'œil était aussi pitto-
resque qu'étrange, mais il faut renoncer à en donner
une description détaillée, tant ces ajustements ont peu
de rapport avec les nôtres et appartiennent à la fan-
taisie indienne. Ce qui frappait, cependant, c'est l'ha-
bileté avec laquelle sont confectionnés les tissus de
soie et sont assorties les nuances vives et les chamar-
rures qui les ornent. II y a là des dessins très-bizarres,
mais il y eb à ausM qui feraient la fortune de l'indus-
triel européen qui saurait se les approprier. Une partie
des dignitaires cambodgiens et desmusiciens de la cour
avaient le torse nu et les reins ceints de tonnelets écla-
tants. La musique se compose de gongs et cymbales
et de quelques instruments bizarres, parmi lesquels
les plus bruyants sont les plus prisés. Leurs sons éclatants
n'ont pas cessé sur le yacht pendant tout le trajet, afin
d'avertir les riverains de l'honneur que recevaient leurs
eaux, et ils ont redoublé à l'arrivée, afin de rivaliser
avec les décharges de l'artillerie.
L'amiral la Grandière, entouré de son état-major
et des hommes de la garnison, est allé recevoir son vi-
siteur sur le quai, et après un compliment de bienve-
nue, auquel Norodon a répondu très-affectueusement,
on s'est rendu, au milieu d'une affluence énorme de
population, au palais du gouvernement, où le roi a
trouvé un appartement préparé, comme l'avait été le
bâtiment de transport, de manière à satisfaire à ses
usages. Des fêtes, des illuminations, un spectacle et de
la musique avaient été organisés et duraient encore au
moment où notre correspondant a dû fermer sa lettre
pour la remettre au paquebot. Norodon avait apporté
avec lui des présents remarquables, spécimens des pro-
duits et de l'industrie de son royaume, entre lesquels
l'ivoire et la soie jouent un grand rôle.
La pêche du Grand-Lac, qui est une des richesses
du roi, a été très-abondante cette année, ce qui lui a
permis de faire des largesses. Cette pêche est évaluée,
pour cette saison seule, de 120,000 à 150,000 piculs
(soit de 9,000 à 10,000 tonneaux), ce qui, au prix moyen
de 10 fr. le picul, constitue une importance de 12
à 1,500,000 francs; et cette récolte, qui ne demande que
la peine d'être ramassée, le poisson venant donner lui-
même dans les bourses, à l'entrée des moindres rigo-
les, cette récolte incomplète, à moitié sacrifiéé par l'in-
différence des indigènes, par l'insuffisance du sel et
des fumures, n'attend, pour les enrichir, que la pré-
sence et l'intelligence de quelques commerçants fran-
çais.
Le mois d'octobre a été assez tranquille, malgré
quelques velléités de piraterie, promptement réprimées,
sur des points écartés de nos postes, et malgré l'atta-
que d'une de nos positions des frontières, par un petit
mandarin, à qui, assure-t on, Tu-Duc avait promis au-
tant de terres qu'il en pourrait prendre aux Français.
On sait que ces mandarins, expulsés de notre territoire,
où ils exerçaient leur pouvoir et leurs exactions, détes-
tent notre drapeau, et que, retirés dans les provinces
voisines, ils sont les fauteurs de toutes ces tentatives
de rébellion, qui deviennent aujourd'hui très-rares, tes
populations préférant beaucoup notre administration
paternelle et féconde à leur despotisme. Le poste atta-
qué est celui de Long-Nhon, qui a tenu ferme contre
une nuée d'assaillants, et n'a eu qu'un homme tué et
deux blessés.
On prépare le prochain budget, qui parait devoir
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