Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-12-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 01 décembre 1864 01 décembre 1864
Description : 1864/12/01 (A9,N203). 1864/12/01 (A9,N203).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203334f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
468 L'ISTHME DE SUEZ,
des fils devait être exclusivement consacré à l'usage de
l'Angleterre pour ses communications avec l'Inde.
» Il est remarquable que dès qu'il s'agit de servir les
intérêts anglais, la Porte, toujours si soupçonneuse et
si temporisatrice en présence des inspirations qui peu-
vent lui venir de l'Europe, ne montre plus qu'empres-
sement et bon vouloir. Sa façon de donner alors ajoute
encore à ce qu'elle donne. Elle n'a ni une objection ni
une difficulté. C'est ainsi qu'elle n'hésitait pas, en 1857,
à accorder aux exigences de lord Stratfford de Redcliffe
la ligne du golfe Persique à la Méditerranée au profit
d'une compagnie qui se vantait d'être anglaise et rien
qu'anglaise. A cette Compagnie elle accordait une
quantité indéfinie de terres sur chacun des côtés de la
ligne et sur une étendue de plusieurs centaines de
kilomètres. Elle ajoutait à toutes ces munificences,
malgré l'état obéré de son Trésor, une garantie de 6 0/0
en faveur des actionnaires, plus la construction à ses
frais d'un vaste port sur la côte de Syrie, dont les ingé
nieurs anglais devaient fournir les plans et diriger
l'exécution.
» C'est ainsi encore qu'elle octroie aux entreprises
britanniques, sur son territoire, tout ce qu'il plait a
l'Angleterre de demander, chemins de fer, canaux,
exploitation de mines, constitution de banque, etc.
Pour ne citer que quelques exemples, nous pouvons
nommer le canal de Kustendjé, le chemin d'Aïn-Aïdin,
d'autres encore dans l'Asie Mineure, des mines impor-
tantes dans l'Anatolie et la Syrie, la Banque ottomane
et le télégraphe du golfe Persique à Constantinople,
dont nous venons de parler, et qui, sans doute, est des-
tiné à dédommager l'Angleterre de l'échec qu'elle a
éprouvé dans la tentative avortée de l'établissement du
chemin de fer de l'Euphrate qui devait en quelque
sorte lui livrer cette immense vallée.
» Mais dès qu'il s'agit de la France, les sentiments
de la Turquie sont tout à fait différents. La Porte pa-
raît avoir tout à fait oublié qu'elle nous a dû, il y a
quelques années, son salut et son existence, et toutes
les fois qu'il s'agit de créer dans ses domaines une
entreprise quelconque pouvant favoriser un intérêt
français, c'est alors que se manifestent tous ses soup-
çons, toutes ses répugnances, tous ses préjugés contre
les œuvres de la civilisation. L'Angleterre pèse sur la
Turquie, l'opprime et la méprise. La Turquie est à ses
genoux, prête à obéir à ses moindres gestes, prompte
à se mettre au service de toutes ses jalousies. La
France, au contraire, est remplie d'égards et de réserve
envers la Porte, elle ménage sa faiblesse ; elle res-
pecte son indépendance et sa dignité, et la Turquie
semble s'appliquer à lui prouver que ces procédés lui
attirent peu son estime. L'Angleterre a pris Aden,
l'Angleterre a pris Périm. Les journaux de Londres
disent tout haut que la mer Rouge est et doit être une
mer anglaise. La Porte ne s'en montre que plus zélée
pour obéir aux ordres britanniques et que plus tiède et
plus malveillante pour les intérêts français.
- Certes a l'entreprise du canal de Suez avait été
faite par une compagnie anglaise, il y a longtemps que
la Porte, sur un froncement de sourcil de lord Stratfforrl
de Redcliffe ou sur un mot de sir Henry Bulwer, eùt
donné à cette œuvre une sanction aveugle et absolue
qu'elle n'aurait certes pas osé ni voulu marchander.
Mais le lendemain même de la guerre de Crimée, sous
le souvenir tout frais encore de nos services et de
notre dévouement, la Porte n'a pas hésité à concéder
purement et simplemeut, aux conditions que nous avons
dites, la chemin de fer de l'Euphrate à une Compagnie
anglaise et à refuser en même temps sa sanction à la
Compagnie du canal de Suez, formée en grande partie
par des capitaux français, conçue et dirigée par un
Français. Rien n'a été négligé pour que cette partialité
éclatât dans tout son jour.
h Les journaux anglais ne se gênaient pas pour dire
que ce chemin était pour l'Angleterre l'acquisition de
la plus belle position stratégique du monde, ce qui
n'était pas rassurant pour la Turquie. D'un autre côté,
la Turquie déclarait hautement à la fois l'utilité uni-
verselle du canal de Suez et les magnifiques résultats
qu'il promettait à ses sujets et à son empire. Cepen-
dant, c'était le chemin de fer de l'Euphrate que la
Turquie approuvait et décrétait, c'était le canal de
Suez qu'elle écartait par un ajournement.
» Cet ajournement, indéfini depuis sept ans dure
encore; il dure encore malgré les nombreuses repré-
sentations du gouvernement français, en présence de
la décision arbitrale de l'Empereur, et, à voir la len-
teur de la Porte à donner enfin une sanction qu'elle ne
peut plus refuser, nous ne serions pas étonnés qu'elle
ne se rendit de nouveau l'instrument de quelque in-
trigue de la diplomatie anglaise, infatigable à Cons-
tantinople dans son action souterraine contre le canal.
Voilà comment la France est récompensée du sang
et des trésors qu'elle a répandus en Crimée pour
la défense de la Turquie, et pourtant celle-ci ne devrait
pas oublier que c'est la France qui l'a sauvée bien plus
que l'Angleterre.
» La Turquie, nous regrettons de le dire, ne néglige
rien pour se dépopulariser en France, et malgré tous
les moyens qu'elle emploie et que nous connaissons
pour obtenir quelques éloges d'une certaine partie de
la presse, elle réussit parfaitement dans ce but si cher
à l'Angleterre. La Turquie aurait-elle le sentiment de
cette situation? Comprendrait-elle qu'il est des patiences
et des longanimités qu'elle pourrait,bien avoir lassées?
Cette politique si étrange et si peu intelligente com-
mencerait-elle à lui inspirer sinon quelques remords
au moins quelque inquiétude. Nous ne savons, mais
voici ce que nous lisons dans une correspondance du
Nouvelliste de Marseille, datée de Constantinople le
9 novembre :
« Notre ambassadeur, M. le marquis de Moustier, est
p arrivé la semaine dernière par la voie de Kostendjé.
» On le dit porteur de nouvelles instructions ayant
» pour objet de donner à notre politique à Constauti-
* nople un caractère mieux dessiné. C'est du moins ce
» que la Porte croit savoir par ses informations parti-
i culières, et elle se préoccupe vivement de la nature
» des communications que peut avoir à lui faire le
des fils devait être exclusivement consacré à l'usage de
l'Angleterre pour ses communications avec l'Inde.
» Il est remarquable que dès qu'il s'agit de servir les
intérêts anglais, la Porte, toujours si soupçonneuse et
si temporisatrice en présence des inspirations qui peu-
vent lui venir de l'Europe, ne montre plus qu'empres-
sement et bon vouloir. Sa façon de donner alors ajoute
encore à ce qu'elle donne. Elle n'a ni une objection ni
une difficulté. C'est ainsi qu'elle n'hésitait pas, en 1857,
à accorder aux exigences de lord Stratfford de Redcliffe
la ligne du golfe Persique à la Méditerranée au profit
d'une compagnie qui se vantait d'être anglaise et rien
qu'anglaise. A cette Compagnie elle accordait une
quantité indéfinie de terres sur chacun des côtés de la
ligne et sur une étendue de plusieurs centaines de
kilomètres. Elle ajoutait à toutes ces munificences,
malgré l'état obéré de son Trésor, une garantie de 6 0/0
en faveur des actionnaires, plus la construction à ses
frais d'un vaste port sur la côte de Syrie, dont les ingé
nieurs anglais devaient fournir les plans et diriger
l'exécution.
» C'est ainsi encore qu'elle octroie aux entreprises
britanniques, sur son territoire, tout ce qu'il plait a
l'Angleterre de demander, chemins de fer, canaux,
exploitation de mines, constitution de banque, etc.
Pour ne citer que quelques exemples, nous pouvons
nommer le canal de Kustendjé, le chemin d'Aïn-Aïdin,
d'autres encore dans l'Asie Mineure, des mines impor-
tantes dans l'Anatolie et la Syrie, la Banque ottomane
et le télégraphe du golfe Persique à Constantinople,
dont nous venons de parler, et qui, sans doute, est des-
tiné à dédommager l'Angleterre de l'échec qu'elle a
éprouvé dans la tentative avortée de l'établissement du
chemin de fer de l'Euphrate qui devait en quelque
sorte lui livrer cette immense vallée.
» Mais dès qu'il s'agit de la France, les sentiments
de la Turquie sont tout à fait différents. La Porte pa-
raît avoir tout à fait oublié qu'elle nous a dû, il y a
quelques années, son salut et son existence, et toutes
les fois qu'il s'agit de créer dans ses domaines une
entreprise quelconque pouvant favoriser un intérêt
français, c'est alors que se manifestent tous ses soup-
çons, toutes ses répugnances, tous ses préjugés contre
les œuvres de la civilisation. L'Angleterre pèse sur la
Turquie, l'opprime et la méprise. La Turquie est à ses
genoux, prête à obéir à ses moindres gestes, prompte
à se mettre au service de toutes ses jalousies. La
France, au contraire, est remplie d'égards et de réserve
envers la Porte, elle ménage sa faiblesse ; elle res-
pecte son indépendance et sa dignité, et la Turquie
semble s'appliquer à lui prouver que ces procédés lui
attirent peu son estime. L'Angleterre a pris Aden,
l'Angleterre a pris Périm. Les journaux de Londres
disent tout haut que la mer Rouge est et doit être une
mer anglaise. La Porte ne s'en montre que plus zélée
pour obéir aux ordres britanniques et que plus tiède et
plus malveillante pour les intérêts français.
- Certes a l'entreprise du canal de Suez avait été
faite par une compagnie anglaise, il y a longtemps que
la Porte, sur un froncement de sourcil de lord Stratfforrl
de Redcliffe ou sur un mot de sir Henry Bulwer, eùt
donné à cette œuvre une sanction aveugle et absolue
qu'elle n'aurait certes pas osé ni voulu marchander.
Mais le lendemain même de la guerre de Crimée, sous
le souvenir tout frais encore de nos services et de
notre dévouement, la Porte n'a pas hésité à concéder
purement et simplemeut, aux conditions que nous avons
dites, la chemin de fer de l'Euphrate à une Compagnie
anglaise et à refuser en même temps sa sanction à la
Compagnie du canal de Suez, formée en grande partie
par des capitaux français, conçue et dirigée par un
Français. Rien n'a été négligé pour que cette partialité
éclatât dans tout son jour.
h Les journaux anglais ne se gênaient pas pour dire
que ce chemin était pour l'Angleterre l'acquisition de
la plus belle position stratégique du monde, ce qui
n'était pas rassurant pour la Turquie. D'un autre côté,
la Turquie déclarait hautement à la fois l'utilité uni-
verselle du canal de Suez et les magnifiques résultats
qu'il promettait à ses sujets et à son empire. Cepen-
dant, c'était le chemin de fer de l'Euphrate que la
Turquie approuvait et décrétait, c'était le canal de
Suez qu'elle écartait par un ajournement.
» Cet ajournement, indéfini depuis sept ans dure
encore; il dure encore malgré les nombreuses repré-
sentations du gouvernement français, en présence de
la décision arbitrale de l'Empereur, et, à voir la len-
teur de la Porte à donner enfin une sanction qu'elle ne
peut plus refuser, nous ne serions pas étonnés qu'elle
ne se rendit de nouveau l'instrument de quelque in-
trigue de la diplomatie anglaise, infatigable à Cons-
tantinople dans son action souterraine contre le canal.
Voilà comment la France est récompensée du sang
et des trésors qu'elle a répandus en Crimée pour
la défense de la Turquie, et pourtant celle-ci ne devrait
pas oublier que c'est la France qui l'a sauvée bien plus
que l'Angleterre.
» La Turquie, nous regrettons de le dire, ne néglige
rien pour se dépopulariser en France, et malgré tous
les moyens qu'elle emploie et que nous connaissons
pour obtenir quelques éloges d'une certaine partie de
la presse, elle réussit parfaitement dans ce but si cher
à l'Angleterre. La Turquie aurait-elle le sentiment de
cette situation? Comprendrait-elle qu'il est des patiences
et des longanimités qu'elle pourrait,bien avoir lassées?
Cette politique si étrange et si peu intelligente com-
mencerait-elle à lui inspirer sinon quelques remords
au moins quelque inquiétude. Nous ne savons, mais
voici ce que nous lisons dans une correspondance du
Nouvelliste de Marseille, datée de Constantinople le
9 novembre :
« Notre ambassadeur, M. le marquis de Moustier, est
p arrivé la semaine dernière par la voie de Kostendjé.
» On le dit porteur de nouvelles instructions ayant
» pour objet de donner à notre politique à Constauti-
* nople un caractère mieux dessiné. C'est du moins ce
» que la Porte croit savoir par ses informations parti-
i culières, et elle se préoccupe vivement de la nature
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