Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 février 1864 15 février 1864
Description : 1864/02/15 (A9,N184). 1864/02/15 (A9,N184).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033153
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
104 L'ISTHME DE SUEZ,
merveille que quand les faits sont accomplis, la Porte les ac-
cepte bien souvent, pour ile pas dire toujours, après les
avoir contestés.
A cet égard, permettez-moi une excursion sur la politi-
que de la Porte, puisque c'est le nœud de la situation,
puisque c'est derrière la Porte que l'on cherche à créer des
obstacles à l'achèvement du canal. Je ne voudrais rien dire
de trop méchant contre la Porte, quoiqu'on me reproche
quelquefois de parler trop légèrement des gouvernements
étrangers. (Rires.) J'ai un patriotisme très-chaud, qui ne
se laisse pas mesurer quand il s'agit de no're chère France,
et peut-être ai-je le tort de me laisser entraîner à dire la
vérité, quand je parle des gouvernements étrangers ; mais
il ne s'agit pas de la politique, ici, nous nous occupons pu-
rement d'affaires.
Je parlerai du gouvernement ottoman avec tous les égards
qui lui sont dus. Je ne peux, je ne veux pas oublier que
le sang généreux et pur des enfants de la France a coulé
pour la Turquie; mais elle ne devrait pas l'oublier non
plus (Très-bien! très-bien!) Eh bien! cette Turquie, qu'est-
elle? voyons. On vient nous parler du droit strict de la suze-
raineté de la Porte sur l'Egypte. Mais ce droit est-il appli-
cable ici? Messieurs, si vous aviez besoin d'un exemple,
je le prendrais ici même et je dirais : Si M. de Lesseps,
président de la Société du canal de Suez, n'avait pas, avec
sa connaissance approfondie des hommes et des choses de
l'Orient, agi comme il l'a fait, à l'heure qu'il est, au lieu
d'avoir le canal d'eau douce terminé, et le canal maritime
très-avancé, car il est vivement exécuté, vous auriez beau-
coup de notes diplomatiques, vous auriez des monceaux de
papiers (on rit); mais rien ne se serait fait. Eh bien, je le
répète, grâce à sa connaissance profonde des hommes et des
choses de l'Orient, M. de Lesseps s'est dit: Il faut agir avec
le droit, mais avec le droit oriental, qui n'est pas le droit
français. (Rires et applaudissements.)
En Orient, le fait domine le droit. Si je voulais cher-
cher une comparaison, elle s'offrirait tout naturellement à
mon esprit; je veux ménager toutes les opinions, toutes
les tendances; je vous dirai cependant que le sultan res-
semble à un autre souverain temporel et spirituel que je ne
veux pas nommer, pour qui la théorie est absolue, qui pro-
teste toujours, -qui ne veut jamais fléchir; mais enfin
cette politique orientale, il faut la prendre pour ce qu'elle
est et pour ce qu'elle vaut : le sultan est souverain ab-
solu; il est ou plutôt il se dit, souverain de droit à Tu-
nis, à Tripoli, en Egypte, en Arabie, que sais-je? Je ne
sais pas s'il n'a pas la prétention d'avoir encore un droit
quelconque sur l'Algérie (hilarité). Il est exactement comme
ces gens qui protestent toujours et se disent : On ne sait
pas ce qui peut arriver, nous aurons réponse à tous les ar-.
guments en réservant toujours un droit, que nous ne vou-
lons pas abandonner.
Maintenant, à côté du droit, il y a le fait. Je n'ai pas
besoin de parler de l'Algérie, ce que j'ai dit n'est qu'une
plaisanterie. En fait, le sultan est peu souverain à Tunis, il
l'est peu à Tripoli; en Egypte, il ne l'est pas du tout ; en
Arabie, si un soldat s'éloigne à deux cents pas, il reçoit
des coups de fusil. La souveraineté de la Porte n'est pas
trop solide chez elle-même.
Parlerai-je des traités de 1841, qui règlent les rapports
entre la Porte et l'Egypte? Je les avais lus, ces traités; je
les ai relus avant le banquet. Qu'est-ce qu'on y trouve? Un
état de choses qui n'est pas exécuté. Il y est dit, entre au-
tres choses, que le vice-roi d'Egypte n'a pas le droit d'in-
fliger la peine de mort; et on sait que, quand il veut se
débarrasser de quelque sujet plus ou moins désagréable,
on lui fait remonter le Nil dans une barque vers le Sou-
dan. Il tombe dans le fleuve et on dit qu'il s'est noyé. (On
rit.) Tout le monde est ainsi satisfait, les traités et le gou-
vernement égyptien.
Le vice-roi n'a pas le droit de nommer un pacha :
qu'est-ce qu'il fait? Il nomme un bey; un bey est une
sorte de colonel, seulement il lui donne le rang et les
droits de pacha, ce qui équivaut à un général, et le droit
se trouve d'accord avec le fait. (Nouveaux rires.) Je de-
mande que pour le canal ce soit la même chose. (Très-
bien, très-bien !)
Que la Porte proteste si cela fait du bien à sa situation
politique, mais que cela ne vous empêche pas de faire le
canal. Persévérez, vous avez le droit pour vous. Vous avez
des traités avec le vice-roi ; on a beau vouloir les briser,
la rupture d'un contrat ne dépend pas de l'une des parties
seule. Exigez-en l'application, il n'y a pas de danger.
On s'appuie sur l'Angleterre. Eh bien, parlons de l'An-
gleterre, quoique ce soit une question délicate et la plus dé-
sagréable à traiter, j'en conviens; mais, cependant, en y
mettant beaucoup de mesure et de franchise, je finirai par
dire ce que je pense.
D'abord, quand bien même ma franchise devrait dé-
plaire à quelques uns d'entre vous, je n'entends absolu-
ment rien dire contre la nation anglaise, et je fais toujours
une grande différence entre cette puissante nation qui
m'attire. Oui! que voulez-vous! il y a un mirage qui me
plaît beaucoup de l'autre côté du canal, c'est le mirage de
la liberté que j'aime tant, et qui m'attire!.
De toutes parts: Le mirage de la liberté! (Applaudisse-
ments redoublés.)
s. A. I. LE PRINCE NAPOLÉON. — Oui, c'est le mirage de
la liberté ! (Nouveaux applaudissements.) Je l'aime, cette
liberté, je l'aime chez tous ceux qui la pratiquent.
Mais, à côté de la nation anglaise et de l'opinion an-
glaise, il y a le gouvernement anglais. (Ah! ah! écoutons,
écoutons !)
Ne soyons pas trop sévères, même pour le gouvernement
anglais. Il est défavorable à votre entreprise. Je ne dirai
pas que c'est tout simple, je le désapprouve, mais je le
comprends. Il ne vous attaque pas ouvertement; il aime,
dans ce cas, à se servir de moyens plus ou moins dé-
tournés. Une opposition ouverte, ne la craignez pas de lui ;
merveille que quand les faits sont accomplis, la Porte les ac-
cepte bien souvent, pour ile pas dire toujours, après les
avoir contestés.
A cet égard, permettez-moi une excursion sur la politi-
que de la Porte, puisque c'est le nœud de la situation,
puisque c'est derrière la Porte que l'on cherche à créer des
obstacles à l'achèvement du canal. Je ne voudrais rien dire
de trop méchant contre la Porte, quoiqu'on me reproche
quelquefois de parler trop légèrement des gouvernements
étrangers. (Rires.) J'ai un patriotisme très-chaud, qui ne
se laisse pas mesurer quand il s'agit de no're chère France,
et peut-être ai-je le tort de me laisser entraîner à dire la
vérité, quand je parle des gouvernements étrangers ; mais
il ne s'agit pas de la politique, ici, nous nous occupons pu-
rement d'affaires.
Je parlerai du gouvernement ottoman avec tous les égards
qui lui sont dus. Je ne peux, je ne veux pas oublier que
le sang généreux et pur des enfants de la France a coulé
pour la Turquie; mais elle ne devrait pas l'oublier non
plus (Très-bien! très-bien!) Eh bien! cette Turquie, qu'est-
elle? voyons. On vient nous parler du droit strict de la suze-
raineté de la Porte sur l'Egypte. Mais ce droit est-il appli-
cable ici? Messieurs, si vous aviez besoin d'un exemple,
je le prendrais ici même et je dirais : Si M. de Lesseps,
président de la Société du canal de Suez, n'avait pas, avec
sa connaissance approfondie des hommes et des choses de
l'Orient, agi comme il l'a fait, à l'heure qu'il est, au lieu
d'avoir le canal d'eau douce terminé, et le canal maritime
très-avancé, car il est vivement exécuté, vous auriez beau-
coup de notes diplomatiques, vous auriez des monceaux de
papiers (on rit); mais rien ne se serait fait. Eh bien, je le
répète, grâce à sa connaissance profonde des hommes et des
choses de l'Orient, M. de Lesseps s'est dit: Il faut agir avec
le droit, mais avec le droit oriental, qui n'est pas le droit
français. (Rires et applaudissements.)
En Orient, le fait domine le droit. Si je voulais cher-
cher une comparaison, elle s'offrirait tout naturellement à
mon esprit; je veux ménager toutes les opinions, toutes
les tendances; je vous dirai cependant que le sultan res-
semble à un autre souverain temporel et spirituel que je ne
veux pas nommer, pour qui la théorie est absolue, qui pro-
teste toujours, -qui ne veut jamais fléchir; mais enfin
cette politique orientale, il faut la prendre pour ce qu'elle
est et pour ce qu'elle vaut : le sultan est souverain ab-
solu; il est ou plutôt il se dit, souverain de droit à Tu-
nis, à Tripoli, en Egypte, en Arabie, que sais-je? Je ne
sais pas s'il n'a pas la prétention d'avoir encore un droit
quelconque sur l'Algérie (hilarité). Il est exactement comme
ces gens qui protestent toujours et se disent : On ne sait
pas ce qui peut arriver, nous aurons réponse à tous les ar-.
guments en réservant toujours un droit, que nous ne vou-
lons pas abandonner.
Maintenant, à côté du droit, il y a le fait. Je n'ai pas
besoin de parler de l'Algérie, ce que j'ai dit n'est qu'une
plaisanterie. En fait, le sultan est peu souverain à Tunis, il
l'est peu à Tripoli; en Egypte, il ne l'est pas du tout ; en
Arabie, si un soldat s'éloigne à deux cents pas, il reçoit
des coups de fusil. La souveraineté de la Porte n'est pas
trop solide chez elle-même.
Parlerai-je des traités de 1841, qui règlent les rapports
entre la Porte et l'Egypte? Je les avais lus, ces traités; je
les ai relus avant le banquet. Qu'est-ce qu'on y trouve? Un
état de choses qui n'est pas exécuté. Il y est dit, entre au-
tres choses, que le vice-roi d'Egypte n'a pas le droit d'in-
fliger la peine de mort; et on sait que, quand il veut se
débarrasser de quelque sujet plus ou moins désagréable,
on lui fait remonter le Nil dans une barque vers le Sou-
dan. Il tombe dans le fleuve et on dit qu'il s'est noyé. (On
rit.) Tout le monde est ainsi satisfait, les traités et le gou-
vernement égyptien.
Le vice-roi n'a pas le droit de nommer un pacha :
qu'est-ce qu'il fait? Il nomme un bey; un bey est une
sorte de colonel, seulement il lui donne le rang et les
droits de pacha, ce qui équivaut à un général, et le droit
se trouve d'accord avec le fait. (Nouveaux rires.) Je de-
mande que pour le canal ce soit la même chose. (Très-
bien, très-bien !)
Que la Porte proteste si cela fait du bien à sa situation
politique, mais que cela ne vous empêche pas de faire le
canal. Persévérez, vous avez le droit pour vous. Vous avez
des traités avec le vice-roi ; on a beau vouloir les briser,
la rupture d'un contrat ne dépend pas de l'une des parties
seule. Exigez-en l'application, il n'y a pas de danger.
On s'appuie sur l'Angleterre. Eh bien, parlons de l'An-
gleterre, quoique ce soit une question délicate et la plus dé-
sagréable à traiter, j'en conviens; mais, cependant, en y
mettant beaucoup de mesure et de franchise, je finirai par
dire ce que je pense.
D'abord, quand bien même ma franchise devrait dé-
plaire à quelques uns d'entre vous, je n'entends absolu-
ment rien dire contre la nation anglaise, et je fais toujours
une grande différence entre cette puissante nation qui
m'attire. Oui! que voulez-vous! il y a un mirage qui me
plaît beaucoup de l'autre côté du canal, c'est le mirage de
la liberté que j'aime tant, et qui m'attire!.
De toutes parts: Le mirage de la liberté! (Applaudisse-
ments redoublés.)
s. A. I. LE PRINCE NAPOLÉON. — Oui, c'est le mirage de
la liberté ! (Nouveaux applaudissements.) Je l'aime, cette
liberté, je l'aime chez tous ceux qui la pratiquent.
Mais, à côté de la nation anglaise et de l'opinion an-
glaise, il y a le gouvernement anglais. (Ah! ah! écoutons,
écoutons !)
Ne soyons pas trop sévères, même pour le gouvernement
anglais. Il est défavorable à votre entreprise. Je ne dirai
pas que c'est tout simple, je le désapprouve, mais je le
comprends. Il ne vous attaque pas ouvertement; il aime,
dans ce cas, à se servir de moyens plus ou moins dé-
tournés. Une opposition ouverte, ne la craignez pas de lui ;
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