Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 février 1864 15 février 1864
Description : 1864/02/15 (A9,N184). 1864/02/15 (A9,N184).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033153
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
122 L'ISTHME DE SUEZ,
un jeune ministre tel que Pitt qui ne reculerait pas de-
vant la guerre pour une idée.
D Mais tout en condamnant avec vigueur les dispo-
sitions pacifiques de l'Angleterre, le prince Napoléon
a longuement indiqué que la France devait profiter de
ces dispositions pour pousser ses intérêts et ses projets
avec peu d'égards relativement à leur justice, présu-
mant que si elle en grondait l'Angleterre ne ressenti-
rait pas sérieusement un tort envers elle. En fait le
prince a dit à M. de Lesseps : a Poursuivez l'exécution
de votre canal en dépit des Turcs et des Egyptiens.
La France vous soutiendra, et quant à l'Angleterre
» vous n'avez pas à la craindre. Les Anglais qui n'ont
» pas envoyé un régiment au secours du roi Christian
» ne déclareront certainement pas la guerre à propos
du canal. » »
» C'est là un avis très-mauvais et très-dangereux.
Car insister pour faire le canal, pour contraindre le
peuple du pays à y travailler et prendre possession
d'une région tout entière comme appartenant à la
Compagnie par le droit d'occupation et d'amélioration,
ce ne serait ni plus ni moins qu'effectuer la conquête
de l'Egypte. C'est là une entreprise essayée par le
premier Napoléon à la fleur de son âge et dans toute la
force de Bon génie, et non-seulement elle s'est terminée
en échec absolu, mais elle a été considérée par tous
les Français raisonnables comme un des exemples les
plus frappants de l'absurdité d'une politique purement
sentimentale en contradiction avec une politique pra-
tique.
» Nous sommes obligés de dire que Napoléon III ne
s'embarquera pas dans une pareille folie. Il n'a jamais
donné aucun encouragement direct à M. de Lesseps, et
par conséquent, quoique prêt à engager toute lutte
contre l'Angleterre avec des avantages égaux et supé-
rieurs, il n'a pas la folie de M. de Lesseps qui s'est
avisé par pur don-quichotisme de se jeter précisément
en travers d'une des grandes routes commerciales et
militaires de l'Angleterre, comme si son objet était
une rivalité politique et non un succès industriel. Il est
pour le moment impossible de dire quel sera le mode
de transit à travers l'isthme qui ne sépare que par un
étrit intervalle les mers d'Europe de celles d'Asie. La
possibilité de créer, de rendre navigables et de tenir
ouvertes des entrées pour un canal maritime sur l'une
et l'autre mer reste encore l'objet de grands doutes.
Mais qu'il doive s'effectuer là un grand passage et un
grand transit d'une ou d'autre espèce c'est une cer-
titude. Suez est un autre Sund et un autre Bosphore ;
mais il a une bien plus grande importance que ceux-
ci parce qu'il joint deux mondes et deux océans, au
lieu de conduire à des mers purement intérieures.
Supposer qu'un Français ou un homme de toute autre
partie de l'Europe fanatique des intérêts de son pays
puisse jamais réussir à garder une semblable position
serait aussi absurde que fut également insensée la
tentative des Français dans le dernier siècle pour s'em-
parer des deux grandes artères de l'Amérique, le Saint-
Laurent et le Mississipi. De tels projets, quelque pa-
triotiques et grandioses qu'ils soient dans leur concep-
4
tion, sont simplement impossibles, et avant de pouvoir
les accomplir il faudrait que la France tint dans ses
mains le trident de Neptune et la foudre de Jupiter.
» Indépendamment du trident et du tonnerre, le tra-
vail et le capital, les hommes et l'argent sont des né-
cessités préliminaires à l'ouverture du canal, et M. de
Lesseps paraît n'avoir pas assez ni de l'un ni de l'au-
tre. La totalité de ses actions n'a pas été souscrite par
le public; une grande part en est due par le pacha
d'Egypte; pour le manque de travailleurs, M. de Les-
seps y a suppléé par l'autorité et par la contrainte,
mais l'Egypte a fait l'expérience de ce genre de tra-
vail depuis les pyramides dans les temps anciens, jus-
qu'au barrage du Nil à notre époque. Sans doute le
travail forcé y a fait des merveilles, mais non sans une
immense consommation de la vie humaine. M. de Les-
seps soutient eucore que l'Egypte doit lui fournir des
travailleurs en telle quantité et à tel prix qu'il lui
plaira. A cela, Ismaïl, le pacha d'Egypte, fait des dif-
ficultés. De plus, additionnellement au canal, M. de
Lesseps a pris possession de la région qui l'environne,
et il espère y attirer des capitaux français et des co-
lons français. C'est en partie un projet d'émigration
greffé sur un autre projet de canalisation. Le prince
Napoléon, en patron généreux, soutient M. de Lesseps
dans l'exécution de ces idées, et insiste sur ces pri-
vilèges.
» Un singulier exemple des progrès du siècle, c'est
le procédé par lequel le gouvernement égyptien a su
parer et mettre en déroute cette attaque. Au lieu de la
vieille guerre diplomatique, ce gouvernement s'est
adressé aux plus éminents jurisconsultes français, leur
a soumis son affaire, et obtenu d'eux des opinions ad-
verses aux demandes de M. de Lesseps. Par ce moyen,
lorsque ce dernier a voulu lancer les foudres de la
presse contre ceux qu'il accusait de contrecarrer une
grande entreprise française, les agents égyptiens se
sont abrités derrière l'opinion positive et écrite d'hom-
mes tels qu'Odilon Barrot et Jules Favre. Le terrain
était ainsi miné sous les pas de M. de Lesseps. Il ne peut
plus se servir de son fantôme patriotique. Le duc de
Morny, autorisé par l'Empereur à examiner la question,
n'admet pas, à ce qu'il paraît, la justice des exigences
de M. de Lesseps. Le dénoûment, nous le supposons,
sera l'abandon de la direction de l'entreprise par cet
énergique individu, et sa transmission entre les mains
d'un directeur ou d'une compagnie plus conciliants et
plus cosmopolites. »
MOTION À LA CHAMBRE DES COMMUNES
Relative au canal de Suez.
Séance du 23 février.
On lit dans le Moniteur du 25 de ce mois :
« M. ROEBUCH annonce que jeudi prochain 25, il
demandera au gouvernement de produire la corres-
pondance avec sir Henry Bulwer, relative au canal
un jeune ministre tel que Pitt qui ne reculerait pas de-
vant la guerre pour une idée.
D Mais tout en condamnant avec vigueur les dispo-
sitions pacifiques de l'Angleterre, le prince Napoléon
a longuement indiqué que la France devait profiter de
ces dispositions pour pousser ses intérêts et ses projets
avec peu d'égards relativement à leur justice, présu-
mant que si elle en grondait l'Angleterre ne ressenti-
rait pas sérieusement un tort envers elle. En fait le
prince a dit à M. de Lesseps : a Poursuivez l'exécution
de votre canal en dépit des Turcs et des Egyptiens.
La France vous soutiendra, et quant à l'Angleterre
» vous n'avez pas à la craindre. Les Anglais qui n'ont
» pas envoyé un régiment au secours du roi Christian
» ne déclareront certainement pas la guerre à propos
du canal. » »
» C'est là un avis très-mauvais et très-dangereux.
Car insister pour faire le canal, pour contraindre le
peuple du pays à y travailler et prendre possession
d'une région tout entière comme appartenant à la
Compagnie par le droit d'occupation et d'amélioration,
ce ne serait ni plus ni moins qu'effectuer la conquête
de l'Egypte. C'est là une entreprise essayée par le
premier Napoléon à la fleur de son âge et dans toute la
force de Bon génie, et non-seulement elle s'est terminée
en échec absolu, mais elle a été considérée par tous
les Français raisonnables comme un des exemples les
plus frappants de l'absurdité d'une politique purement
sentimentale en contradiction avec une politique pra-
tique.
» Nous sommes obligés de dire que Napoléon III ne
s'embarquera pas dans une pareille folie. Il n'a jamais
donné aucun encouragement direct à M. de Lesseps, et
par conséquent, quoique prêt à engager toute lutte
contre l'Angleterre avec des avantages égaux et supé-
rieurs, il n'a pas la folie de M. de Lesseps qui s'est
avisé par pur don-quichotisme de se jeter précisément
en travers d'une des grandes routes commerciales et
militaires de l'Angleterre, comme si son objet était
une rivalité politique et non un succès industriel. Il est
pour le moment impossible de dire quel sera le mode
de transit à travers l'isthme qui ne sépare que par un
étrit intervalle les mers d'Europe de celles d'Asie. La
possibilité de créer, de rendre navigables et de tenir
ouvertes des entrées pour un canal maritime sur l'une
et l'autre mer reste encore l'objet de grands doutes.
Mais qu'il doive s'effectuer là un grand passage et un
grand transit d'une ou d'autre espèce c'est une cer-
titude. Suez est un autre Sund et un autre Bosphore ;
mais il a une bien plus grande importance que ceux-
ci parce qu'il joint deux mondes et deux océans, au
lieu de conduire à des mers purement intérieures.
Supposer qu'un Français ou un homme de toute autre
partie de l'Europe fanatique des intérêts de son pays
puisse jamais réussir à garder une semblable position
serait aussi absurde que fut également insensée la
tentative des Français dans le dernier siècle pour s'em-
parer des deux grandes artères de l'Amérique, le Saint-
Laurent et le Mississipi. De tels projets, quelque pa-
triotiques et grandioses qu'ils soient dans leur concep-
4
tion, sont simplement impossibles, et avant de pouvoir
les accomplir il faudrait que la France tint dans ses
mains le trident de Neptune et la foudre de Jupiter.
» Indépendamment du trident et du tonnerre, le tra-
vail et le capital, les hommes et l'argent sont des né-
cessités préliminaires à l'ouverture du canal, et M. de
Lesseps paraît n'avoir pas assez ni de l'un ni de l'au-
tre. La totalité de ses actions n'a pas été souscrite par
le public; une grande part en est due par le pacha
d'Egypte; pour le manque de travailleurs, M. de Les-
seps y a suppléé par l'autorité et par la contrainte,
mais l'Egypte a fait l'expérience de ce genre de tra-
vail depuis les pyramides dans les temps anciens, jus-
qu'au barrage du Nil à notre époque. Sans doute le
travail forcé y a fait des merveilles, mais non sans une
immense consommation de la vie humaine. M. de Les-
seps soutient eucore que l'Egypte doit lui fournir des
travailleurs en telle quantité et à tel prix qu'il lui
plaira. A cela, Ismaïl, le pacha d'Egypte, fait des dif-
ficultés. De plus, additionnellement au canal, M. de
Lesseps a pris possession de la région qui l'environne,
et il espère y attirer des capitaux français et des co-
lons français. C'est en partie un projet d'émigration
greffé sur un autre projet de canalisation. Le prince
Napoléon, en patron généreux, soutient M. de Lesseps
dans l'exécution de ces idées, et insiste sur ces pri-
vilèges.
» Un singulier exemple des progrès du siècle, c'est
le procédé par lequel le gouvernement égyptien a su
parer et mettre en déroute cette attaque. Au lieu de la
vieille guerre diplomatique, ce gouvernement s'est
adressé aux plus éminents jurisconsultes français, leur
a soumis son affaire, et obtenu d'eux des opinions ad-
verses aux demandes de M. de Lesseps. Par ce moyen,
lorsque ce dernier a voulu lancer les foudres de la
presse contre ceux qu'il accusait de contrecarrer une
grande entreprise française, les agents égyptiens se
sont abrités derrière l'opinion positive et écrite d'hom-
mes tels qu'Odilon Barrot et Jules Favre. Le terrain
était ainsi miné sous les pas de M. de Lesseps. Il ne peut
plus se servir de son fantôme patriotique. Le duc de
Morny, autorisé par l'Empereur à examiner la question,
n'admet pas, à ce qu'il paraît, la justice des exigences
de M. de Lesseps. Le dénoûment, nous le supposons,
sera l'abandon de la direction de l'entreprise par cet
énergique individu, et sa transmission entre les mains
d'un directeur ou d'une compagnie plus conciliants et
plus cosmopolites. »
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Relative au canal de Suez.
Séance du 23 février.
On lit dans le Moniteur du 25 de ce mois :
« M. ROEBUCH annonce que jeudi prochain 25, il
demandera au gouvernement de produire la corres-
pondance avec sir Henry Bulwer, relative au canal
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