Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-01-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 janvier 1864 15 janvier 1864
Description : 1864/01/15 (A9,N182). 1864/01/15 (A9,N182).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033138
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 5?
nitaire de l'ouverture du canal interocéanique plutôt -
que de souscrire au travail obligatoire de la corvée?
Mais ce scrupule exagéré, les Anglais ne l'ont pas eu
pour une entreprise infiniment moins utile, et toutes
les puissances européennes ont montré encore plus de
tolérance lorsqu'elles ont garanti l'indépendance et
l'intégralité de l'empire ottoman, malgré le vice social
monstrueux de la polygamie.
» Dans la position que lui fait son traité de conces-
sion, la Compagnie du canal de Suez n'a non plus au-
cun intérêt à faire exécuter ses travaux par des ouvriers
de corvée ou même à rabaisser leurs salaires. Comme
elle opère pour le compte du gouvernement égyptien
qui s'est engagé à lui fournir la main-d'œuvre né-
cessaire à un prix fixé par lui-même, et comme la ré-
munération de l'entreprise a été calculée d'après la
valeur des salaires, il est évidemment de toute justice
que le gouvernement égyptien supporte seul les con-
séquences d'un changement quelconque apporté par lui,
pour une raison ou pour l'autre, dans le prix convenu
de la main-d'œuvre.
» Le vice-roi n'a qu'un mot à dire, et M. de Lesseps
s'empressera de renoncer aux corvées, et de payer à
ses ouvriers parfaitement libres, 2 ou 3 , ou même
5 francs par jour, si cela peut faire le bonheur du pa-
ternel sultan et du philanthrope Ismaïl-Pacha. Il ne
demande qu'une chose bien simple et bien équitable,
c'est que le gouvernement égyptien, respectant ses en-
gagements aussi bien que les principes de l'humanité,
lui rembourse le supplément de solde au-dessous du ta-
rif stipulé dans le traité, ou augmente, en proportion
de ce surcroît de frais, la rémunération due aux en-
trepreneurs, soit par une subvention pécuniaire, soit
par toute autre concession de nouveaux avantages.
Autrement, il serait trop commode pour les princes
musulmans de faire de la générosité aux dépens des
infidèles, et d'arracher le pain de la bouche des action-
naires du canal de Suez pour donner des ortolans aux
fellahs.
» Les avocats parisiens de Nubar-Pacha applaudissent
sans réserve à ce système de philanthropie économique ;
mais nous sommes intimement convaincus qu'ils chan-
geraient bien vite d'opinion si on leur en faisait à eux-
mêmes l'application; si, par exemple, Nubar-Pacha,
après leur avoir promis de magnifiques honoraires pour
leur consultation, consacrait cette somme, sans les con-
sulter, au soulagement des malheureux Bédouins.
» Dans un dernier article, nous examinerons si la
corvée, telle qu'elle est pratiquée sur les chantiers du
èanal, est :aussi contraire qu'on le dit aux lois, aux
Usages de l'empire ottoman, et aux principes de la
civilisation. »
9 janvier.
» Nous croyons avoir démontré que la Compagnie de
M. de Lesseps n'est nullement responsable du système
du travail forcé adopté par le gouvernement égyptien,
et que, si ce régime est illégal ou injuste, la philan-
thropie, dont les Turcs font ici un si plaisant étalage,
ne leur commande pas de corriger une erreur par une
faute encore plus grave, surtout lorsque le vrai cou-
pable peut, avec un peu de loyauté, réparer ses torts
très-facilement, sans violer de nouveau les lois de l'é-
quité. Mais, nous allons plus loin : nous prétendons que
la corvée égyptienne, telle qu'elle existe et a toujours
existé, n'est pas une contravention aux lois et aux
usages ottomans, ainsi que Nubar-Pacha l'a fait accroire
à ses avocats parisiens. Mieux encore, nous nous per-
mettons de penser, contrairement à l'opinion des trois
légistes libéraux de la consultation, que le travail obli-
gatoire appliqué à des entreprises d'utilité publique
telles que le canal de Suez, loin d'être un abus du passé,
un instrument de servitude barbare, est une institution
éminemment progressive, libérale et civilisatrice, pré-
férable sous tous les rapports à la stérile servitude mili-
taire, dont nul ne conteste le droit et la nécessité.
» Pour ce qui concerne la légalité, nous croyons que
les avocats parisiens seraient bien embarrassés de mon-
trer la prétendue loi ottomane qui, suivant eux, aurait
« aboli l'esclavage et la corvée dans toute l'étendue de
l'empire turc. » Les seuls actes constitutionnels d'où
l'on pourrait tirer à la rigueur des conclusions favora-
bles à ce rêve d'affranchissement, sont les hatti-shérifs
de Gulhané et deux ou trois autres édits impériaux
aussitôt oubliés que promulgués, dont la lettre équi-
voque n'a jamais été mise en pratique. On ferait aussi
bien d'invoquer en France l'autorité des lois du roi
Dagobert que celle de ces constitutions ottomanes
mortes en naissant.
» Nous ne voudrions pour preuve de la manière dont
ces libertés illusoires sont respectées, que le témoi-
gnage de tous les voyageurs qui ont parcouru les pro-
vinces de la Turquie, des légations européennes qui y
résident, et des armées alliées qui ont traversé cet em-
pire pour le défendre contre la Russie. Tous ont pu
voir, comme nous-mêmes avons de nos yeux vu, au
moment même où nos soldats campaient aux portes de
Constantinople, des centaines de malheureuses femmes
esclaves vendues au marché de la Soleymanié, où elles
étaient enfermées dans des cages de bois, comme des
poules ou des tigresses.
» Tous ont pu entendre comme nous, en Bulgarie et
ailleurs, les plaintes amères des pauvres rayas chrétiens
accablés de toutes espèces de corvées au service de l'État
et des seigneurs musulmans, obligés d'abandonner leurs
récoltes qui périssaient sur pied faute de moissonneurs,
pour faire les transports du gouvernement, travailler
chez les pachas ou réparer les routes, sans avoir à es-
pérer le moindre dédommagement de leurs pertes ou
de leurs peines.
» Encore aujourd'hui, les choses ne se passent pas
autrement dans la réalité de l'administration turque,
et notamment en Égypte. C'est ainsi que le vice-roi
fait entretenir gratis les routes, les canaux et les di-
gues de son royaume. Les agents prennent hommes
et choses et ne paient rien. C'est comme cela que les
ravages des dernières inondations du Nilont été
réparés. Nubar-Pacha a essayé de. le nier ; mais son
nitaire de l'ouverture du canal interocéanique plutôt -
que de souscrire au travail obligatoire de la corvée?
Mais ce scrupule exagéré, les Anglais ne l'ont pas eu
pour une entreprise infiniment moins utile, et toutes
les puissances européennes ont montré encore plus de
tolérance lorsqu'elles ont garanti l'indépendance et
l'intégralité de l'empire ottoman, malgré le vice social
monstrueux de la polygamie.
» Dans la position que lui fait son traité de conces-
sion, la Compagnie du canal de Suez n'a non plus au-
cun intérêt à faire exécuter ses travaux par des ouvriers
de corvée ou même à rabaisser leurs salaires. Comme
elle opère pour le compte du gouvernement égyptien
qui s'est engagé à lui fournir la main-d'œuvre né-
cessaire à un prix fixé par lui-même, et comme la ré-
munération de l'entreprise a été calculée d'après la
valeur des salaires, il est évidemment de toute justice
que le gouvernement égyptien supporte seul les con-
séquences d'un changement quelconque apporté par lui,
pour une raison ou pour l'autre, dans le prix convenu
de la main-d'œuvre.
» Le vice-roi n'a qu'un mot à dire, et M. de Lesseps
s'empressera de renoncer aux corvées, et de payer à
ses ouvriers parfaitement libres, 2 ou 3 , ou même
5 francs par jour, si cela peut faire le bonheur du pa-
ternel sultan et du philanthrope Ismaïl-Pacha. Il ne
demande qu'une chose bien simple et bien équitable,
c'est que le gouvernement égyptien, respectant ses en-
gagements aussi bien que les principes de l'humanité,
lui rembourse le supplément de solde au-dessous du ta-
rif stipulé dans le traité, ou augmente, en proportion
de ce surcroît de frais, la rémunération due aux en-
trepreneurs, soit par une subvention pécuniaire, soit
par toute autre concession de nouveaux avantages.
Autrement, il serait trop commode pour les princes
musulmans de faire de la générosité aux dépens des
infidèles, et d'arracher le pain de la bouche des action-
naires du canal de Suez pour donner des ortolans aux
fellahs.
» Les avocats parisiens de Nubar-Pacha applaudissent
sans réserve à ce système de philanthropie économique ;
mais nous sommes intimement convaincus qu'ils chan-
geraient bien vite d'opinion si on leur en faisait à eux-
mêmes l'application; si, par exemple, Nubar-Pacha,
après leur avoir promis de magnifiques honoraires pour
leur consultation, consacrait cette somme, sans les con-
sulter, au soulagement des malheureux Bédouins.
» Dans un dernier article, nous examinerons si la
corvée, telle qu'elle est pratiquée sur les chantiers du
èanal, est :aussi contraire qu'on le dit aux lois, aux
Usages de l'empire ottoman, et aux principes de la
civilisation. »
9 janvier.
» Nous croyons avoir démontré que la Compagnie de
M. de Lesseps n'est nullement responsable du système
du travail forcé adopté par le gouvernement égyptien,
et que, si ce régime est illégal ou injuste, la philan-
thropie, dont les Turcs font ici un si plaisant étalage,
ne leur commande pas de corriger une erreur par une
faute encore plus grave, surtout lorsque le vrai cou-
pable peut, avec un peu de loyauté, réparer ses torts
très-facilement, sans violer de nouveau les lois de l'é-
quité. Mais, nous allons plus loin : nous prétendons que
la corvée égyptienne, telle qu'elle existe et a toujours
existé, n'est pas une contravention aux lois et aux
usages ottomans, ainsi que Nubar-Pacha l'a fait accroire
à ses avocats parisiens. Mieux encore, nous nous per-
mettons de penser, contrairement à l'opinion des trois
légistes libéraux de la consultation, que le travail obli-
gatoire appliqué à des entreprises d'utilité publique
telles que le canal de Suez, loin d'être un abus du passé,
un instrument de servitude barbare, est une institution
éminemment progressive, libérale et civilisatrice, pré-
férable sous tous les rapports à la stérile servitude mili-
taire, dont nul ne conteste le droit et la nécessité.
» Pour ce qui concerne la légalité, nous croyons que
les avocats parisiens seraient bien embarrassés de mon-
trer la prétendue loi ottomane qui, suivant eux, aurait
« aboli l'esclavage et la corvée dans toute l'étendue de
l'empire turc. » Les seuls actes constitutionnels d'où
l'on pourrait tirer à la rigueur des conclusions favora-
bles à ce rêve d'affranchissement, sont les hatti-shérifs
de Gulhané et deux ou trois autres édits impériaux
aussitôt oubliés que promulgués, dont la lettre équi-
voque n'a jamais été mise en pratique. On ferait aussi
bien d'invoquer en France l'autorité des lois du roi
Dagobert que celle de ces constitutions ottomanes
mortes en naissant.
» Nous ne voudrions pour preuve de la manière dont
ces libertés illusoires sont respectées, que le témoi-
gnage de tous les voyageurs qui ont parcouru les pro-
vinces de la Turquie, des légations européennes qui y
résident, et des armées alliées qui ont traversé cet em-
pire pour le défendre contre la Russie. Tous ont pu
voir, comme nous-mêmes avons de nos yeux vu, au
moment même où nos soldats campaient aux portes de
Constantinople, des centaines de malheureuses femmes
esclaves vendues au marché de la Soleymanié, où elles
étaient enfermées dans des cages de bois, comme des
poules ou des tigresses.
» Tous ont pu entendre comme nous, en Bulgarie et
ailleurs, les plaintes amères des pauvres rayas chrétiens
accablés de toutes espèces de corvées au service de l'État
et des seigneurs musulmans, obligés d'abandonner leurs
récoltes qui périssaient sur pied faute de moissonneurs,
pour faire les transports du gouvernement, travailler
chez les pachas ou réparer les routes, sans avoir à es-
pérer le moindre dédommagement de leurs pertes ou
de leurs peines.
» Encore aujourd'hui, les choses ne se passent pas
autrement dans la réalité de l'administration turque,
et notamment en Égypte. C'est ainsi que le vice-roi
fait entretenir gratis les routes, les canaux et les di-
gues de son royaume. Les agents prennent hommes
et choses et ne paient rien. C'est comme cela que les
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