Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-12-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 décembre 1862 15 décembre 1862
Description : 1862/12/15 (A7,N156). 1862/12/15 (A7,N156).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033101
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 10/07/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 379
Il Au nom de Son Altesse-Mohammed-Saïd, dit-il
» avec dignité, je commande que les eaux de la Médi-
» terranée soient introduites dans le lac Timsah , par
» la grâce de Dieu. »
Il y eut un moment de silence solennel; chacun
avait le regard fixé sur la digue. Mais au moment
où l'on vit l'eau s'élan cer par la coupure, grondant
et entraînant les terres, une immense acclamation
s'éleva: c'étaient des bravos, des cris d'enthousiasme;
l'émotion avait pénétré tous les cœurs. J'ai vu des lar-
mes couler sur des figures bronzées par le soleil; j'ai
entendu les hourrabs répétés des représentants de l'An-
gleterre, se mêlant franchement à ceux de tous les
assistants. La musique jouait l'air national d'Egypte,
les ulémas, debout, invoquaient Allah à haute voix
et les chefs lisaient le fetwa, espèce de procès-verbal
religieux qui constate ce grand fait, et dont il sera
donné lecture dans toutes les mosquées de l'Egypte.
Tout en la voyant, on croyait à peine à cette Médi-
terranée mugissante se précipitant dans le lac et
marchant à la rencontre de la mer Rouge.
Que dire après un tel spectacle ? La ville du seuil
même, si curieuse, bâtie au milieu du désert, ne
nojis présenta plus qu'un intérêt secondaire. Un Te
Deum y fut chanté, dans la chapelle du seuil, par
l'évêque d'Egypte. Tous les Européens, quel que fût
leur rite, y assistaient; je crois même y avoir vu
quelques Arabes.
Pour terminer la fête, une table de cent cin-
quante couverts réunissait les travailleurs européens,
les chefs arabes, les invités, tous les fonctionnaires
et employés présents au seuil. Dans ce banquet
M. de Lesseps demanda qu'il ne fût porté qu'un seul
toast, celui du vice-roi d'Egypte, Mohammed-Saïd :
« Messieurs, dit-il, le fait parle seul et la journée a été
» trop solennelle pour que nous fassions des discours :
» devant ce qui vient de se passer je ne saurais
» comment m'exprimer et élever mes paroles au
» niveau du fait. Je ne puis que laisser parler un
» poëte de Marseille, M. Cauvin, qui m'adresse les
» vers suivants :
Les Pharaons dressaient dans leurs sables stériles
Leurs cinquante tombeaux, monuments immobiles,
Et s'immortalisaient, éternisant la mort.
Plus illustre et plus grand, Saïd, malgré l'envie,
Va s'immortaliser, éternisant la vie,
Et son souffle puissant va ranimer ce bord.
Oui, nous irons dans l'Inde, objet de tant de rêves,
Non point en conquérants, fléaux armés de glaivee,
Mais portant à la main le rameau de la paix.
Ces parfums et cet or, ces trésors de Golconde,
Source de tant d'horreurs, brilleront dans le monde
Et répandront partout d'innombrables bienfaits.
Alexandre, Timour, la Compagnie anglaise,
Nadir, faisant de l'Inde une immense fournaise,
Ne fondrent plus ni l'or ni l'homme au même feu ;
Mais le commerce actif, l'incessante industrie
Feront du monde entier une seule patrie,
Et les peuples, poussés par le souffle de Dieu,
Entonneront en chœur l'hymne de l'espérance 1
Le drapeau de la paix déployé par la France
Sera béni par tous dans un divin transport;
Tous les peuples amis suivront la nouvelle arche.
Malheur à qui voudrait s'opposera leur marche !
Soudain des Pharaons ils subiraient le sert.
Notre siècle entre tous resplendit de merveilles.
Pour cet enfantement que d'ardeurs et de veilles!
Comparons hardiment nos ouvrages profonds
Aux œuvres des vieux temps stériles ou timides ;
Les sommets orgueilleux des vieilles pyramides
N'ont jamais contemplé des travaux si féconds.
« Après ces paroles du poëte je ne puis, mes braves
» compagnons de travail, que vous remercier de l'ar-
» deur et de l'intelligence que vous avez montrées
» pour accomplir cette partie de notre œuvre. Por-
»' tons un toast au promoteur du canal. Car, sans lui,
» sachezle-bien, le canal était impossible. A Moham-
» med-Saïd, vice-roi d'Egypte!»
Une salve d'applaudissements accueillit ce toast.
On allait se retirer lorsque le commandant Mansell
se leva et s'adressa en françaisà M. de Lesseps dans
les termes suivants : « Malgré votre désir, monsieur
» le président, permettez-moi de vous remercier du
» bon accueil que vous m'avez fait, ainsi qu'à mes com-
» patriotes. Depuis sept ans je suis avec le plus vif
» intérêt l'affaire du canal de Suez. Je la connais-
» sais seulement par Port-Saïd. J'y étais sympa-
» thique; mais je dois vous avouer que je ne croyais
» pas à une réussite aussi grande, aussi complète et
» aussi avancée. Je suis étonné de tout ce que je viens
» de voir et je crois que vous accomplirez votre œuvre.
» A votre santé, monsieur le président, et à la réus-
» site de votre entreprise! »
Les paroles du commandant anglais furent cou-
vertes de bravos.
« Messieurs, répondit M. de Lesseps, puisque M. le
» commandant Mansell a bien voulu porter un toast
» à votre président et à la réussite de notre entre-
) prise, remercions-le de sa présence au milieu de
» nous, ainsi que de celle des honorables gentlemen
» qui l'accompagnent. Leur présence ici donne à notre
» fête le caractère qu'elle devait avoir, celui de l'u-
» nion, et à notre entreprise celui de l'universalité.
» Je bois à la santé du commandant Mansell et de
» ses honorables compagnons ; je bois à l'union de
» la France et de l'Angleterre! »
Ce double toast fut accueilli par des hourrahs
et des acclamations. La musique répondit par
l'hymne national de l'Angleterre. L'enthousiasme était
Il Au nom de Son Altesse-Mohammed-Saïd, dit-il
» avec dignité, je commande que les eaux de la Médi-
» terranée soient introduites dans le lac Timsah , par
» la grâce de Dieu. »
Il y eut un moment de silence solennel; chacun
avait le regard fixé sur la digue. Mais au moment
où l'on vit l'eau s'élan cer par la coupure, grondant
et entraînant les terres, une immense acclamation
s'éleva: c'étaient des bravos, des cris d'enthousiasme;
l'émotion avait pénétré tous les cœurs. J'ai vu des lar-
mes couler sur des figures bronzées par le soleil; j'ai
entendu les hourrabs répétés des représentants de l'An-
gleterre, se mêlant franchement à ceux de tous les
assistants. La musique jouait l'air national d'Egypte,
les ulémas, debout, invoquaient Allah à haute voix
et les chefs lisaient le fetwa, espèce de procès-verbal
religieux qui constate ce grand fait, et dont il sera
donné lecture dans toutes les mosquées de l'Egypte.
Tout en la voyant, on croyait à peine à cette Médi-
terranée mugissante se précipitant dans le lac et
marchant à la rencontre de la mer Rouge.
Que dire après un tel spectacle ? La ville du seuil
même, si curieuse, bâtie au milieu du désert, ne
nojis présenta plus qu'un intérêt secondaire. Un Te
Deum y fut chanté, dans la chapelle du seuil, par
l'évêque d'Egypte. Tous les Européens, quel que fût
leur rite, y assistaient; je crois même y avoir vu
quelques Arabes.
Pour terminer la fête, une table de cent cin-
quante couverts réunissait les travailleurs européens,
les chefs arabes, les invités, tous les fonctionnaires
et employés présents au seuil. Dans ce banquet
M. de Lesseps demanda qu'il ne fût porté qu'un seul
toast, celui du vice-roi d'Egypte, Mohammed-Saïd :
« Messieurs, dit-il, le fait parle seul et la journée a été
» trop solennelle pour que nous fassions des discours :
» devant ce qui vient de se passer je ne saurais
» comment m'exprimer et élever mes paroles au
» niveau du fait. Je ne puis que laisser parler un
» poëte de Marseille, M. Cauvin, qui m'adresse les
» vers suivants :
Les Pharaons dressaient dans leurs sables stériles
Leurs cinquante tombeaux, monuments immobiles,
Et s'immortalisaient, éternisant la mort.
Plus illustre et plus grand, Saïd, malgré l'envie,
Va s'immortaliser, éternisant la vie,
Et son souffle puissant va ranimer ce bord.
Oui, nous irons dans l'Inde, objet de tant de rêves,
Non point en conquérants, fléaux armés de glaivee,
Mais portant à la main le rameau de la paix.
Ces parfums et cet or, ces trésors de Golconde,
Source de tant d'horreurs, brilleront dans le monde
Et répandront partout d'innombrables bienfaits.
Alexandre, Timour, la Compagnie anglaise,
Nadir, faisant de l'Inde une immense fournaise,
Ne fondrent plus ni l'or ni l'homme au même feu ;
Mais le commerce actif, l'incessante industrie
Feront du monde entier une seule patrie,
Et les peuples, poussés par le souffle de Dieu,
Entonneront en chœur l'hymne de l'espérance 1
Le drapeau de la paix déployé par la France
Sera béni par tous dans un divin transport;
Tous les peuples amis suivront la nouvelle arche.
Malheur à qui voudrait s'opposera leur marche !
Soudain des Pharaons ils subiraient le sert.
Notre siècle entre tous resplendit de merveilles.
Pour cet enfantement que d'ardeurs et de veilles!
Comparons hardiment nos ouvrages profonds
Aux œuvres des vieux temps stériles ou timides ;
Les sommets orgueilleux des vieilles pyramides
N'ont jamais contemplé des travaux si féconds.
« Après ces paroles du poëte je ne puis, mes braves
» compagnons de travail, que vous remercier de l'ar-
» deur et de l'intelligence que vous avez montrées
» pour accomplir cette partie de notre œuvre. Por-
»' tons un toast au promoteur du canal. Car, sans lui,
» sachezle-bien, le canal était impossible. A Moham-
» med-Saïd, vice-roi d'Egypte!»
Une salve d'applaudissements accueillit ce toast.
On allait se retirer lorsque le commandant Mansell
se leva et s'adressa en françaisà M. de Lesseps dans
les termes suivants : « Malgré votre désir, monsieur
» le président, permettez-moi de vous remercier du
» bon accueil que vous m'avez fait, ainsi qu'à mes com-
» patriotes. Depuis sept ans je suis avec le plus vif
» intérêt l'affaire du canal de Suez. Je la connais-
» sais seulement par Port-Saïd. J'y étais sympa-
» thique; mais je dois vous avouer que je ne croyais
» pas à une réussite aussi grande, aussi complète et
» aussi avancée. Je suis étonné de tout ce que je viens
» de voir et je crois que vous accomplirez votre œuvre.
» A votre santé, monsieur le président, et à la réus-
» site de votre entreprise! »
Les paroles du commandant anglais furent cou-
vertes de bravos.
« Messieurs, répondit M. de Lesseps, puisque M. le
» commandant Mansell a bien voulu porter un toast
» à votre président et à la réussite de notre entre-
) prise, remercions-le de sa présence au milieu de
» nous, ainsi que de celle des honorables gentlemen
» qui l'accompagnent. Leur présence ici donne à notre
» fête le caractère qu'elle devait avoir, celui de l'u-
» nion, et à notre entreprise celui de l'universalité.
» Je bois à la santé du commandant Mansell et de
» ses honorables compagnons ; je bois à l'union de
» la France et de l'Angleterre! »
Ce double toast fut accueilli par des hourrahs
et des acclamations. La musique répondit par
l'hymne national de l'Angleterre. L'enthousiasme était
Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.94%.
En savoir plus sur l'OCR
En savoir plus sur l'OCR
Le texte affiché peut comporter un certain nombre d'erreurs. En effet, le mode texte de ce document a été généré de façon automatique par un programme de reconnaissance optique de caractères (OCR). Le taux de reconnaissance estimé pour ce document est de 99.94%.
- Collections numériques similaires Thématique : ingénierie, génie civil Thématique : ingénierie, génie civil /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCthèm02"Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp11" Corpus : ports et travaux maritimes Corpus : ports et travaux maritimes /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=colnum adj "EnPCcorp16"
- Auteurs similaires Desplaces Ernest Desplaces Ernest /services/engine/search/sru?operation=searchRetrieve&version=1.2&maximumRecords=50&collapsing=true&exactSearch=true&query=(dc.creator adj "Desplaces Ernest" or dc.contributor adj "Desplaces Ernest")
-
-
Page
chiffre de pagination vue 3/24
- Recherche dans le document Recherche dans le document https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/search/ark:/12148/bpt6k62033101/f3.image ×
Recherche dans le document
- Partage et envoi par courriel Partage et envoi par courriel https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/share/ark:/12148/bpt6k62033101/f3.image
- Téléchargement / impression Téléchargement / impression https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/download/ark:/12148/bpt6k62033101/f3.image
- Acheter une reproduction Acheter une reproduction https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/pa-ecommerce/ark:/12148/bpt6k62033101
- Acheter le livre complet Acheter le livre complet https://heritage.ecoledesponts.fr/services/ajax/action/indisponible/achat/ark:/12148/bpt6k62033101
Facebook
Twitter