Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-08-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 août 1862 15 août 1862
Description : 1862/08/15 (A7,N148). 1862/08/15 (A7,N148).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203302g
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 259
La population rurale, épuisée par de longues guerres,
avait pris le service militaire en horreur à ce point
que, pour y soustraire les enfants, elle mutilait presque
tous les nouveau-nés. Enfin, le Trésor était aux abois,
et, pour subvenir à ses besoins, il était réduit à pres-
surer les contribuables.
» Le premier soin de Mohammed-Saïd a été d'abolir
les monopoles, de distribuer les terres disponibles en-
tre les chefs de famille, et de rendre aux fellahs, avec
la pleine liberté de leur personne, la libre disposition
de leur travail et des fruits de leur travail. L'organisa-
tion judiciaire a été réformée sur un plan qui ferme
les voies au trafic de la justice; le service militaire,
qui pesait exclusivement sur la classe pauvre, a été
rendu commun à tous indistinctement, et réglé d'a-
près un système de recrutement qui fait passer suc-
cessivement toute la jenne population sous les dra-
peaux. Dans les finances, même esprit de réforme sage-
ment libéral et progressif: en même temps qu'il rem-
plaçait l'impôt en nature par l'impôt en argent, le
vice-roi s'appliquait à fonder le crédit de son pays sur
la bonne gestion des revenus publics et sur sa fidélité
scrupuleuse à remplir les engagements du passé. Au-
jourd'hui l'épreuve est faite, et l'Egypte peut compter
parmi les États dont le crédit est le mieux assis, ainsi
que le démontre le succès de l'emprunt de 40 millions
que le gouvernement égyptien vient de contracter à
Londres pour liquider une partie de sa dette flottante.
» Ces différentes réformes, aussi judicieusement con-
çues que -résolùment exécutées, ont ouvert pour l'É-
gypte une ère do prospérité véritable. Mais Mohammed-
Saïd s'est acquis un titre tout particulier à la sympa-
thie de la France et à l'accueil hospitalier de son gou-
vernement. Ce titre, que tout le monde connaît et que
nous tenons surtout à rappeler aujourd'hui, c'est le
patronage puissant et généreux que le fils de Méhé-
met accorde à la grande entreprise dont notre compa-
triote, M. Ferdinand de Lesseps, poursuit l'exécution
avec une si rare persévérance, et dont le succès semble
de plus en plus assuré, même en Angleterre. La popu-
lation de Paris saluera dans le prince libéral, éclairé,
qui la visite en ce moment, le protecteur-né du canal
de Suez, le fondateur de cette œuvre qui doit profiter
à toutes les nations civilisées, mais dont l'honneur
appartiendra presque tout entier à la France.
» L. Allourt. » 7
LONDON REVIEW.
« Mohammed-Saïd est né en 1822; il est le quatrième
fils de Mohammed-Ali par une de ses femmes légitimes.
Cette dame était Circassienne, supérieure peut-être par
les qualités de l'esprit et du caractère à la plupart des
femmes orientales, car elle se dévoua tout entière à la
première éducation de son unique enfant. Son père,
voulant appuyer sa nouvelle dynastie par l'activité
personnelle de ses princes, eut soin de bien élever
Mohammed-Saïd pour le service public. Après lui avoir
fait apprendre tout ce que pouvaient lui enseigner les
docteurs de la loi et de la théologie musulmanes, après
lui avoir fait pratiquer les règles et les exercices pres-
crits par les coutumes turques, il confia son éducation
à Kœnig-Bey ou Matthieu-Auguste Kœnig, Français éta-
bli depuis plusieurs années au Caire comme professeur
de littérature et de sciences françaises au collége de
Djiliad-Abad. Ce précepteur familiarisa le prince, alors
âgé de douze ans, avec la connaissance de la langue
française et de l'histoire de l'Europe, ainsi qu'avec celle
des sciences mathématiques et physiques, principale-
ment dans leur application avec la tactique militaire.
Quoique déployant beaucoup d'aptitude pour ces études,
le jeune homme désira bientôt une occupation plus
active. Son père ayant remarqué que le roi d'Angle-
terre alors régnant, Guillaume IV, avait commencé par
servir comme aspirant de marine dans la flotte an-
glaise, engagea Mohammed-Saïd dans la profession na-
vale. A bord des frégates égyptiennes au port d'Alexan-
drie, dans des croisières sur l'Archipel et le long des
côtes de Syrie, il fit le même service que ses cama-
rades, portant le même uniforme, et obéissant à la
même discipline. Mohammed-Saïd n'avait pas encore
vingt ans lorsque éclataient en Syrie les événements
de 1840. On sait qu'à cette époque la Syrie et l'Arabie
furent enlevés à la domination de Mohammed-Ali, mais
que la vice-royauté héréditaire d'Egypte lui fut garan-
tie pour lui et pour ses fils.
» Ibrahim, son premier héritier présomptif, ne fit
qu'occuper la régence peu de mois, pendant la maladie
de Mohammed-Ali ; il mourut en 1848, tandis que
Mohammed-Ali languit jusqu'en 1849.
» Son successeur immédiat fut Abbas, fils d'Ibrahim.
Abbas-Pacha mettait des colliers de diamants autour
du cou de ses chiens favoris, mais il détruisit impi-
toyablement tous les établissements utiles fondés par
son grand-père. Les ateliers de coton furent abandonnés
et leurs machines furent jetées dans un grenier de
Boulaq comme de la vieille ferraille. On abandonna à
la ruine le canal de Mahmoudié en le laissant s'obstruer
par les sables et les vases; on renonça à continuer le
grand ouvrage de l'érection des barrages et des écluses
à la tête du Delta, pour régulariser les irrigations du
Nil; les écoles que Mohammed-Ali avait créées furent
fermées et les élèves en furent dispersés. Bien plus, il
fut difficile de détourner ce prince de briser les vais-
seaux de sa propre flotte. Pendant ce temps, les paysans
étaient sans merci livrés en proie à la cruauté et aux
extorsions d'une horde d'employés corrompus. Il n'y
avait pas d'esclaves, il n'y avait pas de bétail, qui
souffrissent un traitement plus inhumain que ces pauvres
fellahs, lorsque le nazir ou percepteur des taxes fondait
sur l'un de ces misérables villages formés de huttes de
boue, avec une demande exorbitante et à laquelle
toutes leurs ressources ne pouvaient satisfaire; les chefs
de ces villages étaient alors souvent traînés à des cen-
taines de milles loin de leurs foyers, battus des heures
entières, et garrottés ensuite pour languir sans nourri-
ture sous un soleil brûlant.
» Le moment vint enfin où, par la mort d'Abbas-Pa-j
cha, en juillet 1854, la vice-royauté échut à Mohammed-
Saïd, en qualité de fils survivant, le plus âgé, de Mo-
hammed-Ali. Ce prince était connu comme fort incliné
aux réformes ; son accession était hautement redoutée
par le parti fanatique et rétrograde, et par ceux qui
La population rurale, épuisée par de longues guerres,
avait pris le service militaire en horreur à ce point
que, pour y soustraire les enfants, elle mutilait presque
tous les nouveau-nés. Enfin, le Trésor était aux abois,
et, pour subvenir à ses besoins, il était réduit à pres-
surer les contribuables.
» Le premier soin de Mohammed-Saïd a été d'abolir
les monopoles, de distribuer les terres disponibles en-
tre les chefs de famille, et de rendre aux fellahs, avec
la pleine liberté de leur personne, la libre disposition
de leur travail et des fruits de leur travail. L'organisa-
tion judiciaire a été réformée sur un plan qui ferme
les voies au trafic de la justice; le service militaire,
qui pesait exclusivement sur la classe pauvre, a été
rendu commun à tous indistinctement, et réglé d'a-
près un système de recrutement qui fait passer suc-
cessivement toute la jenne population sous les dra-
peaux. Dans les finances, même esprit de réforme sage-
ment libéral et progressif: en même temps qu'il rem-
plaçait l'impôt en nature par l'impôt en argent, le
vice-roi s'appliquait à fonder le crédit de son pays sur
la bonne gestion des revenus publics et sur sa fidélité
scrupuleuse à remplir les engagements du passé. Au-
jourd'hui l'épreuve est faite, et l'Egypte peut compter
parmi les États dont le crédit est le mieux assis, ainsi
que le démontre le succès de l'emprunt de 40 millions
que le gouvernement égyptien vient de contracter à
Londres pour liquider une partie de sa dette flottante.
» Ces différentes réformes, aussi judicieusement con-
çues que -résolùment exécutées, ont ouvert pour l'É-
gypte une ère do prospérité véritable. Mais Mohammed-
Saïd s'est acquis un titre tout particulier à la sympa-
thie de la France et à l'accueil hospitalier de son gou-
vernement. Ce titre, que tout le monde connaît et que
nous tenons surtout à rappeler aujourd'hui, c'est le
patronage puissant et généreux que le fils de Méhé-
met accorde à la grande entreprise dont notre compa-
triote, M. Ferdinand de Lesseps, poursuit l'exécution
avec une si rare persévérance, et dont le succès semble
de plus en plus assuré, même en Angleterre. La popu-
lation de Paris saluera dans le prince libéral, éclairé,
qui la visite en ce moment, le protecteur-né du canal
de Suez, le fondateur de cette œuvre qui doit profiter
à toutes les nations civilisées, mais dont l'honneur
appartiendra presque tout entier à la France.
» L. Allourt. » 7
LONDON REVIEW.
« Mohammed-Saïd est né en 1822; il est le quatrième
fils de Mohammed-Ali par une de ses femmes légitimes.
Cette dame était Circassienne, supérieure peut-être par
les qualités de l'esprit et du caractère à la plupart des
femmes orientales, car elle se dévoua tout entière à la
première éducation de son unique enfant. Son père,
voulant appuyer sa nouvelle dynastie par l'activité
personnelle de ses princes, eut soin de bien élever
Mohammed-Saïd pour le service public. Après lui avoir
fait apprendre tout ce que pouvaient lui enseigner les
docteurs de la loi et de la théologie musulmanes, après
lui avoir fait pratiquer les règles et les exercices pres-
crits par les coutumes turques, il confia son éducation
à Kœnig-Bey ou Matthieu-Auguste Kœnig, Français éta-
bli depuis plusieurs années au Caire comme professeur
de littérature et de sciences françaises au collége de
Djiliad-Abad. Ce précepteur familiarisa le prince, alors
âgé de douze ans, avec la connaissance de la langue
française et de l'histoire de l'Europe, ainsi qu'avec celle
des sciences mathématiques et physiques, principale-
ment dans leur application avec la tactique militaire.
Quoique déployant beaucoup d'aptitude pour ces études,
le jeune homme désira bientôt une occupation plus
active. Son père ayant remarqué que le roi d'Angle-
terre alors régnant, Guillaume IV, avait commencé par
servir comme aspirant de marine dans la flotte an-
glaise, engagea Mohammed-Saïd dans la profession na-
vale. A bord des frégates égyptiennes au port d'Alexan-
drie, dans des croisières sur l'Archipel et le long des
côtes de Syrie, il fit le même service que ses cama-
rades, portant le même uniforme, et obéissant à la
même discipline. Mohammed-Saïd n'avait pas encore
vingt ans lorsque éclataient en Syrie les événements
de 1840. On sait qu'à cette époque la Syrie et l'Arabie
furent enlevés à la domination de Mohammed-Ali, mais
que la vice-royauté héréditaire d'Egypte lui fut garan-
tie pour lui et pour ses fils.
» Ibrahim, son premier héritier présomptif, ne fit
qu'occuper la régence peu de mois, pendant la maladie
de Mohammed-Ali ; il mourut en 1848, tandis que
Mohammed-Ali languit jusqu'en 1849.
» Son successeur immédiat fut Abbas, fils d'Ibrahim.
Abbas-Pacha mettait des colliers de diamants autour
du cou de ses chiens favoris, mais il détruisit impi-
toyablement tous les établissements utiles fondés par
son grand-père. Les ateliers de coton furent abandonnés
et leurs machines furent jetées dans un grenier de
Boulaq comme de la vieille ferraille. On abandonna à
la ruine le canal de Mahmoudié en le laissant s'obstruer
par les sables et les vases; on renonça à continuer le
grand ouvrage de l'érection des barrages et des écluses
à la tête du Delta, pour régulariser les irrigations du
Nil; les écoles que Mohammed-Ali avait créées furent
fermées et les élèves en furent dispersés. Bien plus, il
fut difficile de détourner ce prince de briser les vais-
seaux de sa propre flotte. Pendant ce temps, les paysans
étaient sans merci livrés en proie à la cruauté et aux
extorsions d'une horde d'employés corrompus. Il n'y
avait pas d'esclaves, il n'y avait pas de bétail, qui
souffrissent un traitement plus inhumain que ces pauvres
fellahs, lorsque le nazir ou percepteur des taxes fondait
sur l'un de ces misérables villages formés de huttes de
boue, avec une demande exorbitante et à laquelle
toutes leurs ressources ne pouvaient satisfaire; les chefs
de ces villages étaient alors souvent traînés à des cen-
taines de milles loin de leurs foyers, battus des heures
entières, et garrottés ensuite pour languir sans nourri-
ture sous un soleil brûlant.
» Le moment vint enfin où, par la mort d'Abbas-Pa-j
cha, en juillet 1854, la vice-royauté échut à Mohammed-
Saïd, en qualité de fils survivant, le plus âgé, de Mo-
hammed-Ali. Ce prince était connu comme fort incliné
aux réformes ; son accession était hautement redoutée
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