Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1862-07-01
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 01 juillet 1862 01 juillet 1862
Description : 1862/07/01 (A7,N145). 1862/07/01 (A7,N145).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203299f
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 215
reusement pas nécessaire, et, l'eût-il été, la loyauté de
M. de Lesseps ne lui eût pas permis de l'employer.
D Je serai court en ce qui concerne l'état des travaux.
Comme vos lecteurs n'ont pas la carte sous les yeux,
mes explications seraient peu intelligibles. Je me con-
tenterai de vous dire qu'il y a en ce moment
vingt-cinq mille hommes employés aux travaux, et
qu'il y en aura bientôt quarante mille. Ce chiffre
vous donne une idée de l'activité avec laquelle on
procède. Dans quinze mois, une rigole pratiquée pour
les besoins du service ira d'une extrémité à l'autre
de l'isthme, et, dans trois ans, le passage sera ou-
vert aux navires; 30 millions ont été déjà dépensés.
Vous savez que l'on a évalué la dépense totale à 200
millions, et que c'est à ce chiffre que s'est élevée la
souscription.
» Je profiterai de l'occasion pour détruire un préjugé
sur l'Egypte que nous avons tous puisé dans les livres
d'histoire et dans l'enseignement des collèges. Je veux
parler des fameuses inondations du Nil. Les inondations
n'existent pas. Le Nil, dont la pente est très-rapide, se-
rait, s'il inondait réellement les terres, un fléau des-
tructeur d'une puissance irrésistible. Il coule entre des
rives très-élevées, qu'il ne franchit pas même aux
époques de crue. Seulement, des canaux ont été prati-
qués pour amener, à l'époque de la crue, ses eaux dans
d'immenses bassins. Elles y séjournent et se retirent
quand le Nil décroît, en laissant une boue noirâtre sur
laquelle, sans qu'il soit besoin du moindre labourage,
on jette le grain, qui donne une récolte au bout de trois
mois.
» Les résultats du percement de l'isthme seront de deux
sortes. Il y a les résultats matériels et financiers ; il y
en a d'autres d'un ordre plus élevé, des résultats géné-
raux et pour ainsi dire humanitaires. Les premiers,
d'après les plus modestes prévisions, seront magnifiques.
Si l'on évalue seulement à 4 millions de tonneaux le
mouvement annuel de transit du canal on obtient, à
raison de 10 fr. par tonneau, une somme de 40 millions.
Remarquez que cette évaluation sera probablement de
beuucoup dépassée. Le chiffre de 4 millions de tonnes
est celui du mouvement commercial de Marseille ; il
est inférieur à celui du port de Liverpool, qui est de
5 millions de tonneaux. Ce dernier chiffre représente le
mouvement de transit du détroit de Gibraltar et du dé-
troit des Dardanelles, qui aboutit à une mer fermée,
la mer Noire.
» On peut, au même point de vue, faire ressortir l'é-
norme plus-value qu'acquerra la partie de l'Egypte tra-
versée par le canal. Cette contrée, autrefois la plus riche
et la plus fertile du royaume, n'attend que des habi-
tants pour retrouver son ancienne splendeur. Ils n'y
feront pas défaut quand le canal fonctionnera. En outre,
trois villes nouvelles seront créées par la force des
choses. L'une existe déjà, c'est Port-Saïd. Les autres
seront Timsah, au centre de l'isthme, et, à l'autre ex-
trémité, Suez qui, considérablement agrandie, deviendra
un port de premier ordre.
» Quant aux résultats généraux, vous les pressentez;
c'est la diffusion plus rapide et plus facile de la circu-
lation européenne et de la religion chrétienne sur l'O-
rient; c'est l'abaissement des barrières entre ces deux
parties du monde ; c'est la Chine ouverte bien plus en-
core que par nos armes: c'est la Cochinchine colonisée;
c'est l'extension des relations commerciales, faisant
pénétrer nos mœurs, nos idées, chez des peuples main-
tenus, par une sorte de séquestration, dans un état de
barbarie politique, intellectuelle et matérielle.
» Ce sont là quelques-uns des points développés par
M. de Lesseps dans son improvisation. J'en ai sans doute
omis beaucoup d'autres, mais je n'ai voulu vous rendre
que l'esprit de la conférence. On l'a écoutée non-seule-
ment avec intérêt, mais avec une sympathique émotion.
M. de Lesseps n'est pas un orateur suivant l'acception
littéraire du mot. C'est un homme d'action et de con-
viction ; il s'exprime avec abondance, netteté, et souvent
avec finesse. En outre, vous comprendrez aisément
qu'un homme qui a consacré sa vie à une œuvre comme
celle-ci atteigne, lorsqu'il en parle, à cette éloquence
naturelle et communicative qui attache et entraîne un
auditoire.
» Quand je suis sorti, il y avait dans la cour de l'É-
cole de médecine plus de mille personnes qui n'avaient
pu entrer dans l'amphithéâtre. Je sais que M. de Lesseps
a recommencé sa conférence devant une assemblée
nouvelle et aussi nombreuse que la première.
» Avant de finir, je crois pouvoir vous donner quel-
ques renseignements sur une émission d'obligations
particulières à laquelle la Compagnie va proeéder. Lors
de la grande et première souscription, une partie assez
considérable du capital fut souscrite par le vice-roi
d'Egypte. Le montant dejcette souscription, qui est au
moins de 50 millions, ne fut pas versé à la Compagnie ;
le Trésor égyptien en a seulement servi les intérêts à
10 0/0, ce qui était, comme vous voyez, assez avanta-
geux. Cependant, la Compagnie ayant besoin du capital
pour subvenir aux dépenses des travaux, s'est arrêtée à
une combinaison ingénieuse et toute spéciale. Elle
émettra pour 50 millions d'obligations à 400 fr., rem-
boursables en trente années à 500, et portant un intérêt
de 8 0/0 par an, soit 32 francs par titre. Cet intérêt ex-
ceptionnel sera prélevé sur les 10 0/0 que le Trésor
égyptien sert à la Compagnie. L'écart de 2 0/0 pour-
voiera surabondamment à l'amortissement du capital
et au paiement de la prime de 100 francs attribuée à
chaque obligation remboursée.
D L'opération sera donc avantageuse pour la Compa-
gnie, entre les mains de laquelle elle mettra un impor-
tant capital disponible, et pour les souscripteurs de ces
obligations du Trésor égyptien ; c'est ainsi, je crois,
qu'elles seront désignées.
» Je ne vous garantis pas l'exactitude absolue de tous
ces détails, bien que j'aie tout lieu de les regarder
comme fondés. J'ai pensé qu'accompagnés des réserves
nécessaires en pareille occasion, ils auraient de l'intérêt
pour les actionnaires du canal (nombreux à Rouen),
auxquels, si je ne me trompe, une préférence serait
accordée dans cette nouvelle émission de valeurs.
» Croyez-moi votre bien-dévoué collaborateur et ami.
» Ernest BOYSSE. »
reusement pas nécessaire, et, l'eût-il été, la loyauté de
M. de Lesseps ne lui eût pas permis de l'employer.
D Je serai court en ce qui concerne l'état des travaux.
Comme vos lecteurs n'ont pas la carte sous les yeux,
mes explications seraient peu intelligibles. Je me con-
tenterai de vous dire qu'il y a en ce moment
vingt-cinq mille hommes employés aux travaux, et
qu'il y en aura bientôt quarante mille. Ce chiffre
vous donne une idée de l'activité avec laquelle on
procède. Dans quinze mois, une rigole pratiquée pour
les besoins du service ira d'une extrémité à l'autre
de l'isthme, et, dans trois ans, le passage sera ou-
vert aux navires; 30 millions ont été déjà dépensés.
Vous savez que l'on a évalué la dépense totale à 200
millions, et que c'est à ce chiffre que s'est élevée la
souscription.
» Je profiterai de l'occasion pour détruire un préjugé
sur l'Egypte que nous avons tous puisé dans les livres
d'histoire et dans l'enseignement des collèges. Je veux
parler des fameuses inondations du Nil. Les inondations
n'existent pas. Le Nil, dont la pente est très-rapide, se-
rait, s'il inondait réellement les terres, un fléau des-
tructeur d'une puissance irrésistible. Il coule entre des
rives très-élevées, qu'il ne franchit pas même aux
époques de crue. Seulement, des canaux ont été prati-
qués pour amener, à l'époque de la crue, ses eaux dans
d'immenses bassins. Elles y séjournent et se retirent
quand le Nil décroît, en laissant une boue noirâtre sur
laquelle, sans qu'il soit besoin du moindre labourage,
on jette le grain, qui donne une récolte au bout de trois
mois.
» Les résultats du percement de l'isthme seront de deux
sortes. Il y a les résultats matériels et financiers ; il y
en a d'autres d'un ordre plus élevé, des résultats géné-
raux et pour ainsi dire humanitaires. Les premiers,
d'après les plus modestes prévisions, seront magnifiques.
Si l'on évalue seulement à 4 millions de tonneaux le
mouvement annuel de transit du canal on obtient, à
raison de 10 fr. par tonneau, une somme de 40 millions.
Remarquez que cette évaluation sera probablement de
beuucoup dépassée. Le chiffre de 4 millions de tonnes
est celui du mouvement commercial de Marseille ; il
est inférieur à celui du port de Liverpool, qui est de
5 millions de tonneaux. Ce dernier chiffre représente le
mouvement de transit du détroit de Gibraltar et du dé-
troit des Dardanelles, qui aboutit à une mer fermée,
la mer Noire.
» On peut, au même point de vue, faire ressortir l'é-
norme plus-value qu'acquerra la partie de l'Egypte tra-
versée par le canal. Cette contrée, autrefois la plus riche
et la plus fertile du royaume, n'attend que des habi-
tants pour retrouver son ancienne splendeur. Ils n'y
feront pas défaut quand le canal fonctionnera. En outre,
trois villes nouvelles seront créées par la force des
choses. L'une existe déjà, c'est Port-Saïd. Les autres
seront Timsah, au centre de l'isthme, et, à l'autre ex-
trémité, Suez qui, considérablement agrandie, deviendra
un port de premier ordre.
» Quant aux résultats généraux, vous les pressentez;
c'est la diffusion plus rapide et plus facile de la circu-
lation européenne et de la religion chrétienne sur l'O-
rient; c'est l'abaissement des barrières entre ces deux
parties du monde ; c'est la Chine ouverte bien plus en-
core que par nos armes: c'est la Cochinchine colonisée;
c'est l'extension des relations commerciales, faisant
pénétrer nos mœurs, nos idées, chez des peuples main-
tenus, par une sorte de séquestration, dans un état de
barbarie politique, intellectuelle et matérielle.
» Ce sont là quelques-uns des points développés par
M. de Lesseps dans son improvisation. J'en ai sans doute
omis beaucoup d'autres, mais je n'ai voulu vous rendre
que l'esprit de la conférence. On l'a écoutée non-seule-
ment avec intérêt, mais avec une sympathique émotion.
M. de Lesseps n'est pas un orateur suivant l'acception
littéraire du mot. C'est un homme d'action et de con-
viction ; il s'exprime avec abondance, netteté, et souvent
avec finesse. En outre, vous comprendrez aisément
qu'un homme qui a consacré sa vie à une œuvre comme
celle-ci atteigne, lorsqu'il en parle, à cette éloquence
naturelle et communicative qui attache et entraîne un
auditoire.
» Quand je suis sorti, il y avait dans la cour de l'É-
cole de médecine plus de mille personnes qui n'avaient
pu entrer dans l'amphithéâtre. Je sais que M. de Lesseps
a recommencé sa conférence devant une assemblée
nouvelle et aussi nombreuse que la première.
» Avant de finir, je crois pouvoir vous donner quel-
ques renseignements sur une émission d'obligations
particulières à laquelle la Compagnie va proeéder. Lors
de la grande et première souscription, une partie assez
considérable du capital fut souscrite par le vice-roi
d'Egypte. Le montant dejcette souscription, qui est au
moins de 50 millions, ne fut pas versé à la Compagnie ;
le Trésor égyptien en a seulement servi les intérêts à
10 0/0, ce qui était, comme vous voyez, assez avanta-
geux. Cependant, la Compagnie ayant besoin du capital
pour subvenir aux dépenses des travaux, s'est arrêtée à
une combinaison ingénieuse et toute spéciale. Elle
émettra pour 50 millions d'obligations à 400 fr., rem-
boursables en trente années à 500, et portant un intérêt
de 8 0/0 par an, soit 32 francs par titre. Cet intérêt ex-
ceptionnel sera prélevé sur les 10 0/0 que le Trésor
égyptien sert à la Compagnie. L'écart de 2 0/0 pour-
voiera surabondamment à l'amortissement du capital
et au paiement de la prime de 100 francs attribuée à
chaque obligation remboursée.
D L'opération sera donc avantageuse pour la Compa-
gnie, entre les mains de laquelle elle mettra un impor-
tant capital disponible, et pour les souscripteurs de ces
obligations du Trésor égyptien ; c'est ainsi, je crois,
qu'elles seront désignées.
» Je ne vous garantis pas l'exactitude absolue de tous
ces détails, bien que j'aie tout lieu de les regarder
comme fondés. J'ai pensé qu'accompagnés des réserves
nécessaires en pareille occasion, ils auraient de l'intérêt
pour les actionnaires du canal (nombreux à Rouen),
auxquels, si je ne me trompe, une préférence serait
accordée dans cette nouvelle émission de valeurs.
» Croyez-moi votre bien-dévoué collaborateur et ami.
» Ernest BOYSSE. »
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