Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1861-12-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 décembre 1861 15 décembre 1861
Description : 1861/12/15 (A6,N132). 1861/12/15 (A6,N132).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203285d
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/06/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MERS. 387
Naturellement, il ne peut pas être question ici de
l'intérêt commercial : cette question est vidée. Elle a
été solennellement et contradictoirement jugée dans
les vingt-deux meetings représentant les classes ma-
ritimes, industrielles et financières de la Granie-
Brétagne, toutes ses principales cités manufactu-
rières, et déclarant unanimement que le canal de Suez
était hautement avantageux à la prospérité du com-
merce britannique.
Les opposants anglais se sont dès lors retranchés
sur le terrain politique ; ils ont évoqué les fantômes
de la peur et de la défiance; ils ont prétendu que,
politiquement et par rapport à sa puissance orien-
tale, l'Angleterre serait affaiblie par une route qui
abrégeait de moitié son trajet vers l'Orient, et offrait
à ses navires une ligne de navigation continue de-
puis Liverpool et Portsmouth jusqu'au fond du golfe
de Tartarie. Voyons les faits.
Au plus fort des répugnances de lord Palmerston
une formidable révolte éclate au sein de l'Inde; il
faut en toute hàte expédier des renforts à la poignée
de soldats insuffisante pour faire face à l'insurrection.
Dominé par ses préjugés, ne voulant pas fournir un
argument au projet du canal de Suez, le premier
ministre, au lieu d'envoyer ces renforts par l'Egypte,
se résigne à leur imposer le pénible et long contour
par le cap de Bonne-Espérance. Cette décision le rend
dans le Parlement l'objet de toutes les attaques ; la
puissance de la situation l'oblige à revenir à la
route la plus directe et la plus courte, à la route
par l'Égypte; mais cette route elle-même, par son
état actuel, par la nécessité des transbordements, des
débarquements et des rembarquements, présente en-
core les inconvénients les plus graves, et l'Angleterre
est avertie pratiquement une première fois de l'im-
mense utilité que lui offre pour les nécessités de son
empire dans l'Inde le passage par l'isthme de Suez.
Que de sang, d'argent, de fatigues et de souf-
frances pour ses soldats n'aurait-elle point écono-
misés, si dès les premiers jours de la révolte ses vais-
seaux eussent pu communiquer en quinze jours ou
trois semaines par la Méditerranée et la mer Rouge
avec Calcutta et Bombay !
Rappelons en passant un épisode antérieur. Pen-
dant la guerre de Crimée, lorsque l'armée anglaise
était si cruellement décimée, un corps de troupes
européennes fut appelé en toute hàte de l'Inde pour
épaissir les rangs des soldats de lord Raglan. Ce
corps, pour plus de rapidité, dut prendre la route
d'Égypte. Cette fois, il s'agissait pour l'Angleterre
non d'une expédition d'Europe aux Indes, mais d'une
expédition des Indes en Europe.
Ces deux épreuves cependant ne suffisent pas et
la guerre de Chine survient. Une troisième fois, l'An-
gleterre apprend les services que peut lui rendre le
canal de Suez, et comme la France, son alliée dans
cette lutte lointaine, elle a dû vivement ressentir la
privation d'un moyen de communication qui lui eût
permis d'envoyer directement et écoromiquemmt en
Chine tout le matériel et tout le personnel qu'elle y
a transporté péniblement et à tant de frais.
Après la guerre de Chine un nouveau danger s'est
révélé pour l'Angleterre. Déjà, les États-Unis par la
Californie tournaient ses positions de l'Inde et me-
naçaient constamment ses communications avec
l'Australie et le Céleste-Empire; mais les Russes, par
leurs progrès, sont venus aggraver singulièrement
ces dangers. Déjà maîtres de l'embouchure de l'A-
mur, les Russes se sont fait céder par le gouverne-
ment chinois, indépendamment d'une vaste zone
de la frontière de terre, 50 lieues de côtes sur
le golfe de Tartarie. De là, ils aspirent à la domi-
nation du Japon. Leurs flottes, protégées par les
forteresses de l'Amur, peuvent sur un signe du télé-
graphe se répandre dans les mers de la Chine, por-
ter un coup terrible au commerce anglais et donner
la main aux forces californiennes pour attaquer l'Aus-
tralie et les Indes. Il n'y a encore qu'une atténua-
tion possible à ce péril : c'est pour l'Angleterre l'éta-
blissement d'une route plus prompte vers ce théâtre
des complications futures et peut-être imminentes, et
cette route maritime, elle ne peut l'obtenir que par
le canal de Suez.
Mais jusque-là nous ne soupçonnions pas que
l'Angleterre allait avoir h traverser de nouveaux
embarras, et que ces embarras lui viendraient non
du côté de la mer des Indes, mais du côté de l'Atlan-
tique. La guerre civile a éclaté aux Etats-Unis ; la
formidable famine du coton a été suspendue comme
une hideuse menace sur la tête des manufactu-
riers du Lancashire. La panique a été complète à
Liverpool et à Manchester ; le travail a été immé-
diatement ralenti ou interrompu dans les fabriques.
Des milliers d'ouvriers ont été repoussés des ateliers
ou ont dû voir réduire leurs salaires. La disette du
coton américain court risque de se prolonger, et l'An-
gleterre anxieuse a interrogé les quatre coins de l'ho-
rizon pour savoir comment elle pourrait parer à ces
désastreuses circonstances. Elle a vu qu'elle ne pou-
vait , pour longtemps du moins, s'adresser, afin de
combler ce déficit, qu'à la large production de l'Inde;
mais plus d'un obstacle contrarie ses espérances.
Les Indes produisent surabondamment tout le coton
qui lui serait nécessaire s'il n'était considérablement
renchéri par les frais du transport intérieur et par
les frais du transport maritime. Pour le premier
point, de grandes améliorations s'exécutent. Le gou-
vernement des Indes n'a pas seulement, par une
mesure que nous avons récemment signalée, appelé
les capitaux et l'intelligence de l'Europe à la pos-
session et à la culture des terres indoustanes. Il a,
de plus, organisé un vaste système de perfectionne-
Naturellement, il ne peut pas être question ici de
l'intérêt commercial : cette question est vidée. Elle a
été solennellement et contradictoirement jugée dans
les vingt-deux meetings représentant les classes ma-
ritimes, industrielles et financières de la Granie-
Brétagne, toutes ses principales cités manufactu-
rières, et déclarant unanimement que le canal de Suez
était hautement avantageux à la prospérité du com-
merce britannique.
Les opposants anglais se sont dès lors retranchés
sur le terrain politique ; ils ont évoqué les fantômes
de la peur et de la défiance; ils ont prétendu que,
politiquement et par rapport à sa puissance orien-
tale, l'Angleterre serait affaiblie par une route qui
abrégeait de moitié son trajet vers l'Orient, et offrait
à ses navires une ligne de navigation continue de-
puis Liverpool et Portsmouth jusqu'au fond du golfe
de Tartarie. Voyons les faits.
Au plus fort des répugnances de lord Palmerston
une formidable révolte éclate au sein de l'Inde; il
faut en toute hàte expédier des renforts à la poignée
de soldats insuffisante pour faire face à l'insurrection.
Dominé par ses préjugés, ne voulant pas fournir un
argument au projet du canal de Suez, le premier
ministre, au lieu d'envoyer ces renforts par l'Egypte,
se résigne à leur imposer le pénible et long contour
par le cap de Bonne-Espérance. Cette décision le rend
dans le Parlement l'objet de toutes les attaques ; la
puissance de la situation l'oblige à revenir à la
route la plus directe et la plus courte, à la route
par l'Égypte; mais cette route elle-même, par son
état actuel, par la nécessité des transbordements, des
débarquements et des rembarquements, présente en-
core les inconvénients les plus graves, et l'Angleterre
est avertie pratiquement une première fois de l'im-
mense utilité que lui offre pour les nécessités de son
empire dans l'Inde le passage par l'isthme de Suez.
Que de sang, d'argent, de fatigues et de souf-
frances pour ses soldats n'aurait-elle point écono-
misés, si dès les premiers jours de la révolte ses vais-
seaux eussent pu communiquer en quinze jours ou
trois semaines par la Méditerranée et la mer Rouge
avec Calcutta et Bombay !
Rappelons en passant un épisode antérieur. Pen-
dant la guerre de Crimée, lorsque l'armée anglaise
était si cruellement décimée, un corps de troupes
européennes fut appelé en toute hàte de l'Inde pour
épaissir les rangs des soldats de lord Raglan. Ce
corps, pour plus de rapidité, dut prendre la route
d'Égypte. Cette fois, il s'agissait pour l'Angleterre
non d'une expédition d'Europe aux Indes, mais d'une
expédition des Indes en Europe.
Ces deux épreuves cependant ne suffisent pas et
la guerre de Chine survient. Une troisième fois, l'An-
gleterre apprend les services que peut lui rendre le
canal de Suez, et comme la France, son alliée dans
cette lutte lointaine, elle a dû vivement ressentir la
privation d'un moyen de communication qui lui eût
permis d'envoyer directement et écoromiquemmt en
Chine tout le matériel et tout le personnel qu'elle y
a transporté péniblement et à tant de frais.
Après la guerre de Chine un nouveau danger s'est
révélé pour l'Angleterre. Déjà, les États-Unis par la
Californie tournaient ses positions de l'Inde et me-
naçaient constamment ses communications avec
l'Australie et le Céleste-Empire; mais les Russes, par
leurs progrès, sont venus aggraver singulièrement
ces dangers. Déjà maîtres de l'embouchure de l'A-
mur, les Russes se sont fait céder par le gouverne-
ment chinois, indépendamment d'une vaste zone
de la frontière de terre, 50 lieues de côtes sur
le golfe de Tartarie. De là, ils aspirent à la domi-
nation du Japon. Leurs flottes, protégées par les
forteresses de l'Amur, peuvent sur un signe du télé-
graphe se répandre dans les mers de la Chine, por-
ter un coup terrible au commerce anglais et donner
la main aux forces californiennes pour attaquer l'Aus-
tralie et les Indes. Il n'y a encore qu'une atténua-
tion possible à ce péril : c'est pour l'Angleterre l'éta-
blissement d'une route plus prompte vers ce théâtre
des complications futures et peut-être imminentes, et
cette route maritime, elle ne peut l'obtenir que par
le canal de Suez.
Mais jusque-là nous ne soupçonnions pas que
l'Angleterre allait avoir h traverser de nouveaux
embarras, et que ces embarras lui viendraient non
du côté de la mer des Indes, mais du côté de l'Atlan-
tique. La guerre civile a éclaté aux Etats-Unis ; la
formidable famine du coton a été suspendue comme
une hideuse menace sur la tête des manufactu-
riers du Lancashire. La panique a été complète à
Liverpool et à Manchester ; le travail a été immé-
diatement ralenti ou interrompu dans les fabriques.
Des milliers d'ouvriers ont été repoussés des ateliers
ou ont dû voir réduire leurs salaires. La disette du
coton américain court risque de se prolonger, et l'An-
gleterre anxieuse a interrogé les quatre coins de l'ho-
rizon pour savoir comment elle pourrait parer à ces
désastreuses circonstances. Elle a vu qu'elle ne pou-
vait , pour longtemps du moins, s'adresser, afin de
combler ce déficit, qu'à la large production de l'Inde;
mais plus d'un obstacle contrarie ses espérances.
Les Indes produisent surabondamment tout le coton
qui lui serait nécessaire s'il n'était considérablement
renchéri par les frais du transport intérieur et par
les frais du transport maritime. Pour le premier
point, de grandes améliorations s'exécutent. Le gou-
vernement des Indes n'a pas seulement, par une
mesure que nous avons récemment signalée, appelé
les capitaux et l'intelligence de l'Europe à la pos-
session et à la culture des terres indoustanes. Il a,
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