Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-08-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
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Description : 15 août 1863 15 août 1863
Description : 1863/08/15 (A8,N172). 1863/08/15 (A8,N172).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203251m
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
344 L'ISTHME DE SUEZ,
une alliance européenne ont été mises en danger, ne
puisse être combattu heureusement par les seules forces
de la nature.
» Ces Anglais ont oublié que la diplomatie, toute puis-
sante qu'elle semble, n'altère pas le niveau des mers ;
que le sultan peut se soumettre, sans pour cela per-
suader à la mer Rouge de faire des concessions ; que
la vase garde la persévérance qu'a perdue sir Henri
Bulwer.
) Cette erreur n'est pas extraordinaire; car les au-
teurs du projet ont enfin, après des années de recher-
ches, trouvé un grand'ingénieur anglais pour donner
à leur entreprise une approbation très-réservée. Saïd-
Pacha, effrayé des demandes incessantes qui lui étaient
adressées pour un concours plus actif et, pendant qu'il
était en Angleterre, blessé par le défaut mal avisé d'at-
tention dont il fut l'objet de là part de nos autorités
officielles, invita M. Hawkshaw, l'ingénieur anglais,
à lui adresser un rapport impartial; et ce gentleman,
non sans être influencé peut-être par l'espérance de
corriger Robert Stephenson, en présenta un prudemment
favorable. Prenant en^considération le peu de travail
déjà exécuté et la possibilité de l'existence d'un rocher
à l'embouchure de Suez, il ne vit aucune difficulté in-
surmontable à compléter le canal pour 250 millions
de francs. Nous n'en voyons pas non plus. Nous avons
toujours admis que, pourvu que la question orientale
restât en repos, pourvu que les Égyptiens ne se révol-
tassent pas, que la population ne fût pas épuisée, que
le pacha voulût risquer une quantité suffisante de ses
récoltes, et que M. de Lesseps vécût, il serait possible
de creuser, de draguer et de pratiquer par la mine un
fossé profond à travers 80 milles de boues, de sables,
de rocs et d'infiltrations superficielles. Alexandre a
navigué dans l'isthme, et M. de Lesseps a déjà une
tranchée qui, sur un espace de 30 milles, peut porter
un bateau plat. La question n'est pas de savoir si le
canal peut être creusé, mais si, étant creusé, il pourra
servir comme canal maritime. Le niveau des deux
mers est identique, le mouvement des marées est à
peine perceptible, et le sable à chaque entrée forme de
longs et dangereux écueils. Il n'y a pas de courants
possibles, même pour des ingénieurs français. Il n'y a
pas de résistance possible à l'accumulation des sables
s'agglomérant sans cesse au point que les dragueurs
abandonnent. La tendance du fossé stagnant sera et
doit être un atterrissement perpétuel, et le labeur de
le tenir ouvert sera en fait l'équivalent d'une recons-
truction annuelle du canal lui-même, ne laissant aux
actionnaires d'autre choix que le délaissement de leur
œuvre ou son éternel renouvellement. Qu'on se rappelle
qu'une interruption, quelque courte qu'elle soit, telle
par exemple, que l'échouement d'un steamer de la
Compagnie péninsulaire et orientale, pesant 5,000 tonnes
suffirait pour détourner le cours du trafic, qui en lui.
même sera toujours limité au très-petit nombre de
produits pouvant supporter les dépenses du fret par la
voie de vapeur, et pour lesquels, par conséquent, les
frais de rompre charge, la seule opération économisée,
sont imperceptibles. Les droits de passage représenteront
cinq fois cette économie.
» Quant aux navires à voiles, le rapport hollandais
est aussi concluant maintenant qu'il l'était avant que
M.. Hawkshaw eût fait son rapport ou que sir Henry
Bulwer eût rendu les armes. Les patrons hollandais
perdront plus de temps et dépenseront plus d'argent à
battre le golfe dangereux que nous appelons la mer
Rouge qu'à naviguer autour du cap.
D Les critiques français attribuent notre opposition
simplement à la jalousie anglaise, et en un point ils ont
raison. Pas un ministère entendant que l'Angleterre
conserve sa domination sur les Indes, ne voudrait per-
mettre à la France ou à toute autre grande puissance de
s'emparer de l'Égypte. La dépense de l'armée de dé-
fense de l'Inde dans de telles circonstances, rendrait
notre possession sans valeur, ne fût-ce que parce qu'un
maître européen de l'Égypte pourrait toujours être
maître de la Mecque. Mais, ce danger une fois écarté,
en fait aussi bien que dans les relations diplomatiques,
le canal n'est pas une menace et il est un avantage po-
litique pour la Grande-Bretagne. S'il échoue, comme
beaucoup d'observateurs le pensent, le projet n'a d'au-
tres conséquences que la perte pour la France de quel-
ques 250 millions d'argent et d'une énergie qui, dans ce
même temps, aurait pu faire de Paris un port de mer,
et pour l'Egypte, le sacrifice d'une vingtaine de mille
vies. S'il réussit pleinement, le gouvernement anglais
aura un droit permanent de passage à travers l'isthme,
et pourra dès lors remanier tout son système de trans-
ports. De toutes les marchandises, les soldats sont ceux
qui peuvent supporter le plus haut fret, et nous ne pou-
vons concevoir de changement tendant plus directe-
ment à consolider notre empire en Asie, que celui qui
nous donnerait le pouvoir d'expédier des troupes par la
vapeur, à Bombay, en trente jours. Si nous avions eu
ce pouvoir en 1857, la moitié des désastres de la révolte
aurait été évitée. La même faculté, il est vrai, appar-
tiendrait à la France ; mais jusqu'à ce que la France ait
gagné la domination de la mer, elle ne pourra mena-
cer le détroit de Bab-el-Mandeb sans la permission de
l'Angleterre. Si l'une des entrées du canal est commandée
par ceux qui construisent Port-Saïd, l'autre peut être
serrée de près par ceux qui peuvent dormir tranquilles
sous la protection d'Aden. Socotora nous appartient,
quoique les géographes aient presque oublié ce fait, et
l'amirauté néglige une île qui pourrait être à Aden ce
qu'Alderney est à Cherbourg; quant aux stations en de-
dans de la mer Rouge, elles ne valent pas leurs frais de
garde.
» L'argument français, en outre, qui autrefois épou-
vantait les hommes d'Etat anglais, est un argument à
deux cornes. Si la Méditerranée est rapprochée de l'Inde,
l'Inde est également rapprochée de la Méditerranée, et
l'énorme pouvoir concentré dans les mains de notre vice-
roi n'en sera que plus profitable le jour de la grande
querelle qui, à moins que l'humanité ne devienne plus
sage, doit se vider dans le Levant. Un allié qui ne peut
jamais être perfide ou imposteur, avec un revenu de
45 millions sterling?, une armée anglaise de 70,000 hom-
mes, une armée sicke de 60,000 hommes, un champ
de recrutement illimité et des moyens proportionnels
de transports sera au moins un contre-poids pour toute
une alliance européenne ont été mises en danger, ne
puisse être combattu heureusement par les seules forces
de la nature.
» Ces Anglais ont oublié que la diplomatie, toute puis-
sante qu'elle semble, n'altère pas le niveau des mers ;
que le sultan peut se soumettre, sans pour cela per-
suader à la mer Rouge de faire des concessions ; que
la vase garde la persévérance qu'a perdue sir Henri
Bulwer.
) Cette erreur n'est pas extraordinaire; car les au-
teurs du projet ont enfin, après des années de recher-
ches, trouvé un grand'ingénieur anglais pour donner
à leur entreprise une approbation très-réservée. Saïd-
Pacha, effrayé des demandes incessantes qui lui étaient
adressées pour un concours plus actif et, pendant qu'il
était en Angleterre, blessé par le défaut mal avisé d'at-
tention dont il fut l'objet de là part de nos autorités
officielles, invita M. Hawkshaw, l'ingénieur anglais,
à lui adresser un rapport impartial; et ce gentleman,
non sans être influencé peut-être par l'espérance de
corriger Robert Stephenson, en présenta un prudemment
favorable. Prenant en^considération le peu de travail
déjà exécuté et la possibilité de l'existence d'un rocher
à l'embouchure de Suez, il ne vit aucune difficulté in-
surmontable à compléter le canal pour 250 millions
de francs. Nous n'en voyons pas non plus. Nous avons
toujours admis que, pourvu que la question orientale
restât en repos, pourvu que les Égyptiens ne se révol-
tassent pas, que la population ne fût pas épuisée, que
le pacha voulût risquer une quantité suffisante de ses
récoltes, et que M. de Lesseps vécût, il serait possible
de creuser, de draguer et de pratiquer par la mine un
fossé profond à travers 80 milles de boues, de sables,
de rocs et d'infiltrations superficielles. Alexandre a
navigué dans l'isthme, et M. de Lesseps a déjà une
tranchée qui, sur un espace de 30 milles, peut porter
un bateau plat. La question n'est pas de savoir si le
canal peut être creusé, mais si, étant creusé, il pourra
servir comme canal maritime. Le niveau des deux
mers est identique, le mouvement des marées est à
peine perceptible, et le sable à chaque entrée forme de
longs et dangereux écueils. Il n'y a pas de courants
possibles, même pour des ingénieurs français. Il n'y a
pas de résistance possible à l'accumulation des sables
s'agglomérant sans cesse au point que les dragueurs
abandonnent. La tendance du fossé stagnant sera et
doit être un atterrissement perpétuel, et le labeur de
le tenir ouvert sera en fait l'équivalent d'une recons-
truction annuelle du canal lui-même, ne laissant aux
actionnaires d'autre choix que le délaissement de leur
œuvre ou son éternel renouvellement. Qu'on se rappelle
qu'une interruption, quelque courte qu'elle soit, telle
par exemple, que l'échouement d'un steamer de la
Compagnie péninsulaire et orientale, pesant 5,000 tonnes
suffirait pour détourner le cours du trafic, qui en lui.
même sera toujours limité au très-petit nombre de
produits pouvant supporter les dépenses du fret par la
voie de vapeur, et pour lesquels, par conséquent, les
frais de rompre charge, la seule opération économisée,
sont imperceptibles. Les droits de passage représenteront
cinq fois cette économie.
» Quant aux navires à voiles, le rapport hollandais
est aussi concluant maintenant qu'il l'était avant que
M.. Hawkshaw eût fait son rapport ou que sir Henry
Bulwer eût rendu les armes. Les patrons hollandais
perdront plus de temps et dépenseront plus d'argent à
battre le golfe dangereux que nous appelons la mer
Rouge qu'à naviguer autour du cap.
D Les critiques français attribuent notre opposition
simplement à la jalousie anglaise, et en un point ils ont
raison. Pas un ministère entendant que l'Angleterre
conserve sa domination sur les Indes, ne voudrait per-
mettre à la France ou à toute autre grande puissance de
s'emparer de l'Égypte. La dépense de l'armée de dé-
fense de l'Inde dans de telles circonstances, rendrait
notre possession sans valeur, ne fût-ce que parce qu'un
maître européen de l'Égypte pourrait toujours être
maître de la Mecque. Mais, ce danger une fois écarté,
en fait aussi bien que dans les relations diplomatiques,
le canal n'est pas une menace et il est un avantage po-
litique pour la Grande-Bretagne. S'il échoue, comme
beaucoup d'observateurs le pensent, le projet n'a d'au-
tres conséquences que la perte pour la France de quel-
ques 250 millions d'argent et d'une énergie qui, dans ce
même temps, aurait pu faire de Paris un port de mer,
et pour l'Egypte, le sacrifice d'une vingtaine de mille
vies. S'il réussit pleinement, le gouvernement anglais
aura un droit permanent de passage à travers l'isthme,
et pourra dès lors remanier tout son système de trans-
ports. De toutes les marchandises, les soldats sont ceux
qui peuvent supporter le plus haut fret, et nous ne pou-
vons concevoir de changement tendant plus directe-
ment à consolider notre empire en Asie, que celui qui
nous donnerait le pouvoir d'expédier des troupes par la
vapeur, à Bombay, en trente jours. Si nous avions eu
ce pouvoir en 1857, la moitié des désastres de la révolte
aurait été évitée. La même faculté, il est vrai, appar-
tiendrait à la France ; mais jusqu'à ce que la France ait
gagné la domination de la mer, elle ne pourra mena-
cer le détroit de Bab-el-Mandeb sans la permission de
l'Angleterre. Si l'une des entrées du canal est commandée
par ceux qui construisent Port-Saïd, l'autre peut être
serrée de près par ceux qui peuvent dormir tranquilles
sous la protection d'Aden. Socotora nous appartient,
quoique les géographes aient presque oublié ce fait, et
l'amirauté néglige une île qui pourrait être à Aden ce
qu'Alderney est à Cherbourg; quant aux stations en de-
dans de la mer Rouge, elles ne valent pas leurs frais de
garde.
» L'argument français, en outre, qui autrefois épou-
vantait les hommes d'Etat anglais, est un argument à
deux cornes. Si la Méditerranée est rapprochée de l'Inde,
l'Inde est également rapprochée de la Méditerranée, et
l'énorme pouvoir concentré dans les mains de notre vice-
roi n'en sera que plus profitable le jour de la grande
querelle qui, à moins que l'humanité ne devienne plus
sage, doit se vider dans le Levant. Un allié qui ne peut
jamais être perfide ou imposteur, avec un revenu de
45 millions sterling?, une armée anglaise de 70,000 hom-
mes, une armée sicke de 60,000 hommes, un champ
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