Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-06-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 juin 1863 15 juin 1863
Description : 1863/06/15 (A8,N168). 1863/06/15 (A8,N168).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203247q
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DEUX MER?. 22")
réclamée par la Porte n'a pas déjà reçu la sanction du
concert européen.
» Restent les deux derniers faits qui, selon la dépêche,
ont attiré la plus sérieuse attention de la Porte, et sur
lesquels nous avons surtout à nous expliquer. En pre-
mier lieu, le gouvernement turc se plaint qu'au mépris
d'un décret qui aurait aboli la corvée dans l'empire,
vingt mille fellahs soient arrachés tous les mois aux
travaux de l'agriculture, et contraints par l'administra-
tion égyptienne d'aller travailler au canal de Suez Il
y a donc un décret qui a supprimé la corvée dans l'em-
pire turc et par conséquent en Egypte ; ce décret, nous
ne le connaissons pas, mais s'il existe, comme on l'af-
firme, comment justifier ce qui se passe en ce moment
encore à Suez, où la Compagnie péninsulaire et orientale
anglaise emploie, pour le chargement et le décharge-
ment de ses marchandises, des ouvriers égyptiens tra-
vaillant par force et sans salaire et qui font par conséquent
pour elle une véritable corvée? La corvée est un régime
barbare, et nous ne la défendons pas plus en Egypte
qu'en France. Mais quel rapport y a-t-il entre ce régime
et celui qui est appliqué par la Compagnie aux travaux
du canal ? La corvée, telle qu'elle a été pratiquée de
tous temps en Egypte, c'est non-seulement le travail
frcé, mais le travail gratuit. Le régime auquel sont
soumis les ouvriers indigènes employés à la construc-
tion du canal, c'est le travail obligatoire sans doute,
mais c'est le travail réglé, rémunéré d'après un tarif
établi par un traité passé entre le vice-roi et la Com-
pagnie. Le salaire que les ouvriers reçoivent en échange
du travail modéré qu'on leur impose est supérieur à
celui qu'ils auraient partout ailleurs. Toutes les mesures
ont été prises pour leur assurer en même temps qu'une
nourriture saine et abondante, les soins médicaux qui
leur sont nécessaires. Le seul rapport qui existe entre
ce régime et la corvée se réduit donc à ce point : le
travail est forcé. Le travail forcé, voilà le grand mot
qui figure avec un égal succès dans la dépêche ottomane
et dans les discours de lord Palmerston, sans que l'on
puisse dire s'il e't passé de la dépêche dans les discours,
ou des discours dans la dépêche. Mais ni l'éloquence
de lord Palmerston, ni la dialectique d'Aali Pacha n'em-
pêcheront que le travail obligatoire ne soit légitime en
Egypte, puisqu'il y est le seul possible; et que le gou-
vernement local n'ait pas le droit de l'employer et d'en
autoriser la pratique, puisqu'il ne peut s'en passer. En
fait, aujourd'hui comme au temps des Pharaons, le tra-
vail obligatoire est le seul moyen que l'état moral de
la population indigène et l'apathie invincible du fellah
permettent aj gouvernementégyptiend'appliqueràl'exé-
cution des travaux publics, le seul moyen qu'il ait de
pourvoir à l'entretien des canaux qui sillonnent le pays,
et dont le bon état importe essentiellement à la fertilité
du sol et à l'alimentation publique. En sorte que sup-
primer le travail obligatoire, ce serait ruiner et affamer
l'Egypte. Que si le travail obligatoire et rémunéré, qui
n'est pas la corvée, ainsi que l'a formellement reconnu
le nouveau vice-roi dans son allocution aux consuls
européens, si ce travail est dénoncé comme un abus
désastreux, intolérable quand il s'applique au canal de
Suez, on devrait expliquer pourquoi le travail obliga-
toire et gratuit, qui est la corvée pure et simple, a été
trouvé bon, excellent, irréprochable alors qu'il s'ap-
pliquait à certaines entreprises recommandées, sinon
commandées par l'Angleterre, et notamment à la cons-
truction du chemin de fer qui sert au transport de la
malle et des voyageurs de l'Inde.
» A le considérer en lui-même, le travail obligatoire
amendé, régularisé, comme on vient de le dire, ne peut
sans doute être accepté comme un idéal en matière é-
conomique ; mais il est un progrès véritable, une con-
dition essentielle à l'œuvre de civilisation que l'Angle-
terre, autant que la France apparemment, veut encou-
rager et favoriser en Egypte; car il est le meilleur
moyen d'initier graduellement les fellahs a l'intelli-
gence, à la pratique et aux procédés de l'industrie eu-
ropéenne. Quant à cette autre allégation de la dépê-
che, que les ouvriers du canal, à la fin de leur tâche
mensuelle, sont obligés de retourner chez eux à leurs
frais, il nous suffira de constater qu'elle est matérielle-
ment inexacte. La vérité, c'est que les ouvriers qui
sont amenés sur les chantiers de l'isthme par les che-
mins de fer et les batéaux à vapeur aux frais du gou-
vernement égyptien, sont reconduits dans leurs foyers
par les mêmes moyens.
» Le dernier grief énoncé dans la dépêche porte sur
la concession faite à la Compagnie par le gouverne-
ment égyptien de certains territoirts. Le cabinet otto-
man interprète cet article du contrat, comme si la con-
cession s'étendait a l'universalité des terrains situes
aux abords des canaux à construire, et comme si les
droits attribués sur ces terrains à la Compagnie étaient
autre chose que des droits purement civils, comme s'ils
constituaient une atteinte à la souveraineté du sultan, à
l'indépendance et à l'intégrité de l'empire ottoman. Une
pareille préoccupation, si elle est sincère, est pure-
ment chimérique, et n'a de fondement ni dans la lettre
ni dans l'esprit du contrat. L'acte de concession porte
que « le gouvernement égyptien abandonne à la Com-
» pagnie la jouissance de tous les terrains incultes n'ap-
» partenant pas à des particuliers, qui seront arrosés et
» mis en culture par ses boins et à ses frais; » il ajoute
que ces terrains « seront exempts de tout impôt pen-
» dant dix ans, à dater de leur mise en rapport, et que,
» passé ce terme, ils seront soumis pendant le reste de
» la concession aux obligations et aux impôts auxquels
» seront assujettis, dans les mêmes circonstances, les
» terres des autres provinces. »
» Les termes de cette clause ne laissent aucune prise
à l'équivoque; il en résulte clairement, d'une part, que
l'étendue des terrains concédés à la Compagnie n'est
pas illimitée; d'autre part, que les droits qui lui sont at-
tribués sur ces terrains n'ont rien de commun avec les
droits politiques, et qu'ils ne préj udicient en rien aux
droits inhérents à la souveraineté, puisque les droits de
la souveraineté sont formellement réservés.
» On remarquera de plus que ce n'est pas la propriété
perpétuelle et absolue, mais la simple jouissance de
ces terrains qui est abandonnée à la Compagnie. Il n'y
a donc ni motif ni prétexte à la crainte que le gouver-
ne ment turc exprime de voir « les villes de Suez, de
réclamée par la Porte n'a pas déjà reçu la sanction du
concert européen.
» Restent les deux derniers faits qui, selon la dépêche,
ont attiré la plus sérieuse attention de la Porte, et sur
lesquels nous avons surtout à nous expliquer. En pre-
mier lieu, le gouvernement turc se plaint qu'au mépris
d'un décret qui aurait aboli la corvée dans l'empire,
vingt mille fellahs soient arrachés tous les mois aux
travaux de l'agriculture, et contraints par l'administra-
tion égyptienne d'aller travailler au canal de Suez Il
y a donc un décret qui a supprimé la corvée dans l'em-
pire turc et par conséquent en Egypte ; ce décret, nous
ne le connaissons pas, mais s'il existe, comme on l'af-
firme, comment justifier ce qui se passe en ce moment
encore à Suez, où la Compagnie péninsulaire et orientale
anglaise emploie, pour le chargement et le décharge-
ment de ses marchandises, des ouvriers égyptiens tra-
vaillant par force et sans salaire et qui font par conséquent
pour elle une véritable corvée? La corvée est un régime
barbare, et nous ne la défendons pas plus en Egypte
qu'en France. Mais quel rapport y a-t-il entre ce régime
et celui qui est appliqué par la Compagnie aux travaux
du canal ? La corvée, telle qu'elle a été pratiquée de
tous temps en Egypte, c'est non-seulement le travail
frcé, mais le travail gratuit. Le régime auquel sont
soumis les ouvriers indigènes employés à la construc-
tion du canal, c'est le travail obligatoire sans doute,
mais c'est le travail réglé, rémunéré d'après un tarif
établi par un traité passé entre le vice-roi et la Com-
pagnie. Le salaire que les ouvriers reçoivent en échange
du travail modéré qu'on leur impose est supérieur à
celui qu'ils auraient partout ailleurs. Toutes les mesures
ont été prises pour leur assurer en même temps qu'une
nourriture saine et abondante, les soins médicaux qui
leur sont nécessaires. Le seul rapport qui existe entre
ce régime et la corvée se réduit donc à ce point : le
travail est forcé. Le travail forcé, voilà le grand mot
qui figure avec un égal succès dans la dépêche ottomane
et dans les discours de lord Palmerston, sans que l'on
puisse dire s'il e't passé de la dépêche dans les discours,
ou des discours dans la dépêche. Mais ni l'éloquence
de lord Palmerston, ni la dialectique d'Aali Pacha n'em-
pêcheront que le travail obligatoire ne soit légitime en
Egypte, puisqu'il y est le seul possible; et que le gou-
vernement local n'ait pas le droit de l'employer et d'en
autoriser la pratique, puisqu'il ne peut s'en passer. En
fait, aujourd'hui comme au temps des Pharaons, le tra-
vail obligatoire est le seul moyen que l'état moral de
la population indigène et l'apathie invincible du fellah
permettent aj gouvernementégyptiend'appliqueràl'exé-
cution des travaux publics, le seul moyen qu'il ait de
pourvoir à l'entretien des canaux qui sillonnent le pays,
et dont le bon état importe essentiellement à la fertilité
du sol et à l'alimentation publique. En sorte que sup-
primer le travail obligatoire, ce serait ruiner et affamer
l'Egypte. Que si le travail obligatoire et rémunéré, qui
n'est pas la corvée, ainsi que l'a formellement reconnu
le nouveau vice-roi dans son allocution aux consuls
européens, si ce travail est dénoncé comme un abus
désastreux, intolérable quand il s'applique au canal de
Suez, on devrait expliquer pourquoi le travail obliga-
toire et gratuit, qui est la corvée pure et simple, a été
trouvé bon, excellent, irréprochable alors qu'il s'ap-
pliquait à certaines entreprises recommandées, sinon
commandées par l'Angleterre, et notamment à la cons-
truction du chemin de fer qui sert au transport de la
malle et des voyageurs de l'Inde.
» A le considérer en lui-même, le travail obligatoire
amendé, régularisé, comme on vient de le dire, ne peut
sans doute être accepté comme un idéal en matière é-
conomique ; mais il est un progrès véritable, une con-
dition essentielle à l'œuvre de civilisation que l'Angle-
terre, autant que la France apparemment, veut encou-
rager et favoriser en Egypte; car il est le meilleur
moyen d'initier graduellement les fellahs a l'intelli-
gence, à la pratique et aux procédés de l'industrie eu-
ropéenne. Quant à cette autre allégation de la dépê-
che, que les ouvriers du canal, à la fin de leur tâche
mensuelle, sont obligés de retourner chez eux à leurs
frais, il nous suffira de constater qu'elle est matérielle-
ment inexacte. La vérité, c'est que les ouvriers qui
sont amenés sur les chantiers de l'isthme par les che-
mins de fer et les batéaux à vapeur aux frais du gou-
vernement égyptien, sont reconduits dans leurs foyers
par les mêmes moyens.
» Le dernier grief énoncé dans la dépêche porte sur
la concession faite à la Compagnie par le gouverne-
ment égyptien de certains territoirts. Le cabinet otto-
man interprète cet article du contrat, comme si la con-
cession s'étendait a l'universalité des terrains situes
aux abords des canaux à construire, et comme si les
droits attribués sur ces terrains à la Compagnie étaient
autre chose que des droits purement civils, comme s'ils
constituaient une atteinte à la souveraineté du sultan, à
l'indépendance et à l'intégrité de l'empire ottoman. Une
pareille préoccupation, si elle est sincère, est pure-
ment chimérique, et n'a de fondement ni dans la lettre
ni dans l'esprit du contrat. L'acte de concession porte
que « le gouvernement égyptien abandonne à la Com-
» pagnie la jouissance de tous les terrains incultes n'ap-
» partenant pas à des particuliers, qui seront arrosés et
» mis en culture par ses boins et à ses frais; » il ajoute
que ces terrains « seront exempts de tout impôt pen-
» dant dix ans, à dater de leur mise en rapport, et que,
» passé ce terme, ils seront soumis pendant le reste de
» la concession aux obligations et aux impôts auxquels
» seront assujettis, dans les mêmes circonstances, les
» terres des autres provinces. »
» Les termes de cette clause ne laissent aucune prise
à l'équivoque; il en résulte clairement, d'une part, que
l'étendue des terrains concédés à la Compagnie n'est
pas illimitée; d'autre part, que les droits qui lui sont at-
tribués sur ces terrains n'ont rien de commun avec les
droits politiques, et qu'ils ne préj udicient en rien aux
droits inhérents à la souveraineté, puisque les droits de
la souveraineté sont formellement réservés.
» On remarquera de plus que ce n'est pas la propriété
perpétuelle et absolue, mais la simple jouissance de
ces terrains qui est abandonnée à la Compagnie. Il n'y
a donc ni motif ni prétexte à la crainte que le gouver-
ne ment turc exprime de voir « les villes de Suez, de
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