Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1863-05-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 mai 1863 15 mai 1863
Description : 1863/05/15 (A8,N166). 1863/05/15 (A8,N166).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k6203245w
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 26/11/2012
170
L'ISTHME DE SUEZ.
Il s'est passé dans la circonscription un fait qui mé-
rite d'être pris en considération. Au Cap, se trouvait un
chantier chargé d'enlever les terres, qui sont assez éle-
vées sur ce point. C'était à la fin. de mai dernier; le
canal n'étant pas encore endigué sur certaines parties
basses, on avait dû retenir les eaux de la rigole par un
barrage fait au Cap même. Là s'arrêtaient les barques
et les transports venant de Port-Saïd. Les Arabes du
chantier faisaient leurs ablutions dans cette rigole. Mal-
gré toute la surveillance possible, ils allaient souvent
satisfaire des besoins d'un ordre tout opposé. Ces eaux
n'ayant plus leur pente nécessaire, ne tardèrent pas à
se putréfier. Sans écouter les avis réitérés du médecin,
les travailleurs s'étaient installés à l'abri des terrains
du Cap et sous le vent de la rigole, de telle sorte que
les émanations portaient sur le campement. Les mias-
mes s'y accumulèrent, et des cas de fièvre bilieuse ne
tardèrent pas à se déclarer en assez grande quantité.
Le campement fut immédiatement transporté au-dessus
du barrage et sur le vent. On fit écouler une partie des
eaux de la rigole, et ces fièvres disparurent.
Les travaux exécutés à Kantara, comme à Port-Saïd,
cette année, constituent une large expérience sur la sa-
lubrité ou l'insalubrité du travail. L'expérience faite dans
les lacs, dans les terrains bas, humides ou inondés, estcon-
cluante. La rigole, creusée l'an dernier, et où des mil-
liers de mètres cubes de terre et de vase avaient été
remués, nous avait déjà convaincus de l'innocuité de
ces opérations ; cette année, on compte par millions les
mètres cubes déblayés, et la santé s'est maintenue, je
ne dirai pas seulement bonne, mais meilleure que dans
les pays de l'Europe, même les plus salubres. A Kan-
tara, la seule chose qui manquât, c'était l'eau du Nil en
abondance ; elle y sera vers la fin de mai.
Circonscription du seuil d'El-Guisr.
Cette circonscription ne compte que 15 kilomètres.
C'est elle qui a réuni cette année le plus grand nom-
bre de travailleurs, et où le service de santé a été le
plus actif. En neuf mois, cent cinquante-mille hommes
ont passé dans ses chantiers et ont tranché à coups de
pioche le principal obstacle à la réunion des deux
mers. Près de 5 millions de mètres cubes de terre ont
été transportés à dos d'hommes dans des couffes. Un
canal de 15 mètres amène les eaux de la Méditerranée
dans le lac Timsah. Ce travail a donné naissance à la
ville du Seuil. On a compté sur ce point jusqu'à cinq
cents Européens et quinze cents Arabes en résidence fixe.
Le service de santé, vu l'importance du travail et
l'agglomération des individus, se composait de deux
médecins européens et deux médecins arabes, d'un
pharmacien-économe, d'un aide-pharmacien et de trois
effendis (aides-médecins). La maison de santé pour les
Européens et les Arabes était installée au Seuil, centre
des services; sur les chantiers, il y avait deux ambu-
lances; les Arabes malades étaient traités à l'ambu-
lance. On n'envoyait à la maison de santé que les Arabes
blessés et les Européens. Ce service a très-bien fonc-
tionné et a pu suffire dans toutes les circonstances,
gràce au zèle et à l'activité du personnel. Nous dispo-
sions de dix lits pour les Européens et de cinquante
pour les Arabes. Pendant la période des travaux, il n'y
a eu que cinquante malades européens à la maison de
santé, et parmi les Arabes des contingents qui se sont
élévés à cent quarante et un mille sept cents hommes,
il n'y a eu que onze cent vingt-sept malades.
Les Arabes sédentaires et les Européens étaient prin-
cipalement traités à domicile ou à la consultation. De
tout ce personnel et matériel, il ne reste plus qu'un
médecin chargé du service dans cette circonscription, le
reste a été transféré soit à Ismaïlia, soit à Toussoum,
soit à Geneffé.
Les travaux exécutés au Seuil n'ont été que des tra-
vaux de terrassements, sables et glaises à remuer et il
transporter, le tout dans de telles conditions de sé-
cheresse qu'on ne trouvait des traces d'humidité qu'au
niveau de la mer.
Aussi ces travaux n'ont-ils exercé aucun effet sur la
santé. Quelques cas de congestions cérébrales ont eu
lieu aux mois de juillet et d'août; ils auraient pu être
attribués à la nature du travail. Une enquête faite par
le médecin, apprit que les travailleurs, pendant les
heures de repos, dormaient en plein soleil au fond de
la tranchée ; que souvent ils se réveillaient avec de
violentes douleurs de tête et éprouvaient des vertiges, et
que ceux qui avaient succombé s'étaient trouvés dans
ces conditions. D'après cette indication, l'ordre fut donné
de ne plus dormir dans la tranchée, et les congestions
disparurent.
Une des causes qui a le plus contribué à maintenir
la santé des travailleurs, c'est l'abondance et la qua-
lité de l'eau; une rigole partant du canal d'eau douce
qui arrive à Ismaïlia, apportait l'eau du Nil jusqu'au
pied des travaux ; de là, elle était distribuée dans tous
les chantiers; pendant l'été, nul n'a manqué de cette
eau du Nil dont la réputation est justement méritée, et
dont nous avons pu constater les bons effets; aussi,
cette année, les affections du tube intestinal ont été
moindres ; les embarras gastriques, fréquents l'année
dernière, ne se sont presque plus présentés.
Pendant l'exécution de la tranchée du Seuil, un inci-
dent grave est survenu sur lequel je dois d'autant plus
m'arrêter que l'on a tenté de s'en servir pour élever des
doutes sur la salubrité de l'isthme et la bonne organi-
sation du travail, tandis qu'au contraire il a achevé de
démontrer l'une et l'autre.
Au mois de mai, à l'arrivée du contingent de Kénè
(haute Égypte), une assez grande quantité de travail-
leurs de ce contingent tombèrent subitement malades.
Bientôt un examen attentif fit reconnaître aux méde-
cins des symptômes typhoïques; quelques individus
moururent dans un état comateux. On put constater
que l'on avait affaire à une espèce de typhus ou de fiè-
vre typhoïde, se présentant sous une forme particu-
lière due à la race et au climat; de plus, nous apprîmes
que ce contingent avait laissé en route des malades
et des morts. Des précautions furent prises, les mala-
des furent disséminés sous des tentes et dans des bara-
ques. Le contingent qui avait apporté la maladie sans
L'ISTHME DE SUEZ.
Il s'est passé dans la circonscription un fait qui mé-
rite d'être pris en considération. Au Cap, se trouvait un
chantier chargé d'enlever les terres, qui sont assez éle-
vées sur ce point. C'était à la fin. de mai dernier; le
canal n'étant pas encore endigué sur certaines parties
basses, on avait dû retenir les eaux de la rigole par un
barrage fait au Cap même. Là s'arrêtaient les barques
et les transports venant de Port-Saïd. Les Arabes du
chantier faisaient leurs ablutions dans cette rigole. Mal-
gré toute la surveillance possible, ils allaient souvent
satisfaire des besoins d'un ordre tout opposé. Ces eaux
n'ayant plus leur pente nécessaire, ne tardèrent pas à
se putréfier. Sans écouter les avis réitérés du médecin,
les travailleurs s'étaient installés à l'abri des terrains
du Cap et sous le vent de la rigole, de telle sorte que
les émanations portaient sur le campement. Les mias-
mes s'y accumulèrent, et des cas de fièvre bilieuse ne
tardèrent pas à se déclarer en assez grande quantité.
Le campement fut immédiatement transporté au-dessus
du barrage et sur le vent. On fit écouler une partie des
eaux de la rigole, et ces fièvres disparurent.
Les travaux exécutés à Kantara, comme à Port-Saïd,
cette année, constituent une large expérience sur la sa-
lubrité ou l'insalubrité du travail. L'expérience faite dans
les lacs, dans les terrains bas, humides ou inondés, estcon-
cluante. La rigole, creusée l'an dernier, et où des mil-
liers de mètres cubes de terre et de vase avaient été
remués, nous avait déjà convaincus de l'innocuité de
ces opérations ; cette année, on compte par millions les
mètres cubes déblayés, et la santé s'est maintenue, je
ne dirai pas seulement bonne, mais meilleure que dans
les pays de l'Europe, même les plus salubres. A Kan-
tara, la seule chose qui manquât, c'était l'eau du Nil en
abondance ; elle y sera vers la fin de mai.
Circonscription du seuil d'El-Guisr.
Cette circonscription ne compte que 15 kilomètres.
C'est elle qui a réuni cette année le plus grand nom-
bre de travailleurs, et où le service de santé a été le
plus actif. En neuf mois, cent cinquante-mille hommes
ont passé dans ses chantiers et ont tranché à coups de
pioche le principal obstacle à la réunion des deux
mers. Près de 5 millions de mètres cubes de terre ont
été transportés à dos d'hommes dans des couffes. Un
canal de 15 mètres amène les eaux de la Méditerranée
dans le lac Timsah. Ce travail a donné naissance à la
ville du Seuil. On a compté sur ce point jusqu'à cinq
cents Européens et quinze cents Arabes en résidence fixe.
Le service de santé, vu l'importance du travail et
l'agglomération des individus, se composait de deux
médecins européens et deux médecins arabes, d'un
pharmacien-économe, d'un aide-pharmacien et de trois
effendis (aides-médecins). La maison de santé pour les
Européens et les Arabes était installée au Seuil, centre
des services; sur les chantiers, il y avait deux ambu-
lances; les Arabes malades étaient traités à l'ambu-
lance. On n'envoyait à la maison de santé que les Arabes
blessés et les Européens. Ce service a très-bien fonc-
tionné et a pu suffire dans toutes les circonstances,
gràce au zèle et à l'activité du personnel. Nous dispo-
sions de dix lits pour les Européens et de cinquante
pour les Arabes. Pendant la période des travaux, il n'y
a eu que cinquante malades européens à la maison de
santé, et parmi les Arabes des contingents qui se sont
élévés à cent quarante et un mille sept cents hommes,
il n'y a eu que onze cent vingt-sept malades.
Les Arabes sédentaires et les Européens étaient prin-
cipalement traités à domicile ou à la consultation. De
tout ce personnel et matériel, il ne reste plus qu'un
médecin chargé du service dans cette circonscription, le
reste a été transféré soit à Ismaïlia, soit à Toussoum,
soit à Geneffé.
Les travaux exécutés au Seuil n'ont été que des tra-
vaux de terrassements, sables et glaises à remuer et il
transporter, le tout dans de telles conditions de sé-
cheresse qu'on ne trouvait des traces d'humidité qu'au
niveau de la mer.
Aussi ces travaux n'ont-ils exercé aucun effet sur la
santé. Quelques cas de congestions cérébrales ont eu
lieu aux mois de juillet et d'août; ils auraient pu être
attribués à la nature du travail. Une enquête faite par
le médecin, apprit que les travailleurs, pendant les
heures de repos, dormaient en plein soleil au fond de
la tranchée ; que souvent ils se réveillaient avec de
violentes douleurs de tête et éprouvaient des vertiges, et
que ceux qui avaient succombé s'étaient trouvés dans
ces conditions. D'après cette indication, l'ordre fut donné
de ne plus dormir dans la tranchée, et les congestions
disparurent.
Une des causes qui a le plus contribué à maintenir
la santé des travailleurs, c'est l'abondance et la qua-
lité de l'eau; une rigole partant du canal d'eau douce
qui arrive à Ismaïlia, apportait l'eau du Nil jusqu'au
pied des travaux ; de là, elle était distribuée dans tous
les chantiers; pendant l'été, nul n'a manqué de cette
eau du Nil dont la réputation est justement méritée, et
dont nous avons pu constater les bons effets; aussi,
cette année, les affections du tube intestinal ont été
moindres ; les embarras gastriques, fréquents l'année
dernière, ne se sont presque plus présentés.
Pendant l'exécution de la tranchée du Seuil, un inci-
dent grave est survenu sur lequel je dois d'autant plus
m'arrêter que l'on a tenté de s'en servir pour élever des
doutes sur la salubrité de l'isthme et la bonne organi-
sation du travail, tandis qu'au contraire il a achevé de
démontrer l'une et l'autre.
Au mois de mai, à l'arrivée du contingent de Kénè
(haute Égypte), une assez grande quantité de travail-
leurs de ce contingent tombèrent subitement malades.
Bientôt un examen attentif fit reconnaître aux méde-
cins des symptômes typhoïques; quelques individus
moururent dans un état comateux. On put constater
que l'on avait affaire à une espèce de typhus ou de fiè-
vre typhoïde, se présentant sous une forme particu-
lière due à la race et au climat; de plus, nous apprîmes
que ce contingent avait laissé en route des malades
et des morts. Des précautions furent prises, les mala-
des furent disséminés sous des tentes et dans des bara-
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