Titre : L'Isthme de Suez : journal de l'union des deux mers / gérant Ernest Desplaces
Éditeur : [s.n.] (Paris)
Date d'édition : 1864-02-15
Contributeur : Desplaces, Ernest (1828-1893?). Directeur de publication
Notice du catalogue : http://catalogue.bnf.fr/ark:/12148/cb34430392j
Type : texte texte
Type : publication en série imprimée publication en série imprimée
Langue : français
Format : Nombre total de vues : 4673 Nombre total de vues : 4673
Description : 15 février 1864 15 février 1864
Description : 1864/02/15 (A9,N184). 1864/02/15 (A9,N184).
Description : Collection numérique : Bibliothèques d'Orient Collection numérique : Bibliothèques d'Orient
Description : Collection numérique : Collections de l’École... Collection numérique : Collections de l’École nationale des ponts et chaussées
Description : Collection numérique : Thématique : ingénierie,... Collection numérique : Thématique : ingénierie, génie civil
Description : Collection numérique : Corpus : canaux, écluses,... Collection numérique : Corpus : canaux, écluses, navigation intérieure
Description : Collection numérique : Corpus : ports et travaux... Collection numérique : Corpus : ports et travaux maritimes
Droits : Consultable en ligne
Identifiant : ark:/12148/bpt6k62033153
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 4-O3b-240
Conservation numérique : Bibliothèque nationale de France
Date de mise en ligne : 21/05/2012
JOURNAL DE L'UNION DES DËtJX MERS. 105
il n'a jamais fait de notes diplomatiques, vous n'en trou-
verez pas une seule; il a toujours mis la Porte en avant.
Mon Dieu, je lui en fais ua mérite. Mais il y a une ex-
plication pour la politique anglaise.
Savez-vous où je la trouve? ce n'est pas dans le Blue-Book,
c'jsst dans le Peerage, où vous savez qu'on trouve l'âge
de tous les lords de l'Angleterre. Quand on ouvre le Pee-
rage, et qu'on voit que. les nobles lords qui sont au
pouvoir ont soixante-dix, soixante-quinze, quatre-vingts ans,
on comprend mieux qu'à côté de leur vieille expérience,
ils aient le cœur un peu froid ; on comprend le calme de
leurs sentiments pour les causes les plus généreuses. (On
rit.) On s'explique que l'aristocratique Angleterre soit ve-
nue dire à la face de l'Europe, qu'elle ne donnerait
ni un homme ni un shilling poui- les causes les plus
grandes et les plus justes, pour l'Italie, pour la Pologne.
(Bravo! bravo! — Applaudissements.)
Ne croyez donc pas, messieurs, que ce même gouver-
nement en vienne jamais jusqu'à Yultima ratio pour com-
battre une. cause parfaitement juste. Ne vous imaginez pas
que l'Angleterre viendrait combattre contre l'isthme de
Suez ! Allons donc ! ce sont là des arguments, ce ne sont
pas des raisons, cela n'est pas vrai, et c'est ici que j'aime à
rappeler la distinction que je faisais tout à l'heure entre le
peuple anglais et son gouvernement. Le gouvernement
anglais, qui a abandonné des droits basés sur l'histoire
et les traités; le gouvernement anglais, qui aura peut-être
des remords pour avoir fait défection à ces deux grandes
causes que j'indiquais tout à l'heure ; le gouvernement an-
glais, qui a abandonné cette noble cause de la Pologne,
oserait entraîner son pays da- une guerre à cause du ca-
nal de Suez? Allons donc! Voulez-vous que je vous dise
toute ma pensée? S'il l'osait (il ne l'osera jamais), ce n'est
pas nous qui aurions à nous défendre contre lui, c'est lui
qui aurait à se défendre contre le peuple anglais. Il tom-
berait sous son mépris, sous ses risées. (Bruyants applau-
dissements.) Cela n'est pas sérieux.
Je me résume. Vous avez un droit incontestable, vous le
tenez de l'Egypte, continuez vos travaux. Vis-à-vis de la
Porte, vous n'avez rien à voir, cela ne vous regarde pas;
c'est la question politique, et quand la Porte voudra faire
soutenir ce qu'elle croit son droit par des actes, ce sera
affaire à discuter. Quant à cet épouvantail de l'Angle-
terre, ne vous en préoccupez pas. Vos ennemis, vos adver-
saires peuvent parler de cela. Quant aux hommes du
canal, ils n'ont pas à s'en préoccuper, et je défie le gou-
vernement de ce grand pays d'Angleterre d'entraîner la
nation dans une hostilité sérieuse contre le canal. (Très-
bien! très-bien!)
Je reprends mon historique de la mission de Nubar-
Patha. Arrivé à Paris, et se basant sur des irrégularités (je
crois avoir prouvé et indiqué que ces irrégularités n'existent
pas, et que si elles existaient, il serait interdit à l'Egypte
plutôt qu'à tout autre de les faire valoir), s'appuyant sur
ces irrégularités, il est venu vous faire trois propositions.
Il vous a proposé de faire le canal d'eau douce; le canal
d'eau douce est fait, c'est pour cela, probablement, qu'il
vous a proposé de le terminer. Il vous a demandé l'abandon
des terrains, moyennant indemnité. Enfin, il vous a pro-
posé l'abolition de la corvée, l'abolition, non, je me trompe.
Il vous a proposé de la réduire de 20,000 hommes à 6,000
hommes.
Eh bien, admettons, ce qui n'était pas possible, que ces
propositions eussent été acceptées par vous, et jetons un
coup d'œil vers l'avenir; car l'homme d'Etat, et ceux qui
s'occupent de ces entreprises sont des hommes d'Etat, doit
songer à l'avenir; et jamais rien de plus grand, de plus
noble, de plus utile n'a été entrepris et n'a mieux mérité
d'être le but d'un grand pays. Jetons un coup d'œil sur
l'avenir et voyons ce qui arriverait. J'admets que les propo-
sitions de Nubar eussent pu être acceptées par vous. Il arri-
verait quelque chose de bien triste. D'abord, la Compagnie
serait ruinée, mais qu'à cela ne tienne ! je sais que c'est
le but désiré; passons là-dessus. Le canal se ferait-t-il? Non.
Je suis convaincu de l'impuissance de ces pays orientaux,
et je vous dis nettement, non ! le canal Be serait pas fait.
Le vice-roi que j'aime, que j'honore profondément ; de l'a-
mitié duquel je suis fier, et auquel je conserve un bon
souvenir pour l'accueil qu'il m'a fait et l'amitié qu'il m'a
témoignée ; le vice-roi se croit de bonne foi, capable de faire
le canal ; il se trompe. Tout à l'heure je serrais la main
de quelqu'un, de M. Mougel-Bey, qui a fait le barrage du
Nil. Savez-vous ce que c'est que le barrage du Nil? M. Mougel
a dépensé vingt millions pour le faire, c'est-à-dire pour
maintenir le niveau du Nil à une hauteur variable à vo-
lonté, pour inonder les terrains environnants par un im-
mense barrage.
Vous savez que la fertilité de l'Egypte est en raison di-
recte de l'eau dont on peut disposer pour irriguer les terres.
Il y a dix ans qu'il est terminé, achevé complètement,
sauf peu de chose, sauf des portes. Voilà tout ce qui y
manque, et il faudrait pour cela dépenser un million,
quinze cent mille francs au plus. Eh bien, ces portes, on
ne les place pas, et le barrage est inutile. Le gouverne-
ment égyptien est comme un homme qui perdrait ses
pantalons, parce qu'il ne sait pas y coudre un bouton. (Hi-
larité.)
Les Orientaux en sont là, ils ne savent jamais coudre le
dernier bouton. Voilà dix ans qu'ils ont dépensé 20 mil-
lions pour le barrage du Nil, et ils ne profitent pas de ses
avantages : leurs terres perdent la fertilité que leur don-
nerait l'irrigation du fleuve ; ils perdent l'intérêt de l'argent
qu'ils ont dépensé; et tout cela pour ne pas savoir mettre
des portes au barrage, pour ne pas vouloir dépenser 1 mil-
lion ou 1,500,000 francs. Ne nous faisons pas illusion, voilà
la puissance ou plutôt l'impuissance orientale prise sur le
fait. Le vice-roi est de bonne foi, j'en suis sûr, il croit
pouvoir terminer le canal : il ne le terminerait pas, les
travaux se dégraderaient, rien ne se ferait, voilà la vérité.
(Très-bien ! très-bien !)
il n'a jamais fait de notes diplomatiques, vous n'en trou-
verez pas une seule; il a toujours mis la Porte en avant.
Mon Dieu, je lui en fais ua mérite. Mais il y a une ex-
plication pour la politique anglaise.
Savez-vous où je la trouve? ce n'est pas dans le Blue-Book,
c'jsst dans le Peerage, où vous savez qu'on trouve l'âge
de tous les lords de l'Angleterre. Quand on ouvre le Pee-
rage, et qu'on voit que. les nobles lords qui sont au
pouvoir ont soixante-dix, soixante-quinze, quatre-vingts ans,
on comprend mieux qu'à côté de leur vieille expérience,
ils aient le cœur un peu froid ; on comprend le calme de
leurs sentiments pour les causes les plus généreuses. (On
rit.) On s'explique que l'aristocratique Angleterre soit ve-
nue dire à la face de l'Europe, qu'elle ne donnerait
ni un homme ni un shilling poui- les causes les plus
grandes et les plus justes, pour l'Italie, pour la Pologne.
(Bravo! bravo! — Applaudissements.)
Ne croyez donc pas, messieurs, que ce même gouver-
nement en vienne jamais jusqu'à Yultima ratio pour com-
battre une. cause parfaitement juste. Ne vous imaginez pas
que l'Angleterre viendrait combattre contre l'isthme de
Suez ! Allons donc ! ce sont là des arguments, ce ne sont
pas des raisons, cela n'est pas vrai, et c'est ici que j'aime à
rappeler la distinction que je faisais tout à l'heure entre le
peuple anglais et son gouvernement. Le gouvernement
anglais, qui a abandonné des droits basés sur l'histoire
et les traités; le gouvernement anglais, qui aura peut-être
des remords pour avoir fait défection à ces deux grandes
causes que j'indiquais tout à l'heure ; le gouvernement an-
glais, qui a abandonné cette noble cause de la Pologne,
oserait entraîner son pays da- une guerre à cause du ca-
nal de Suez? Allons donc! Voulez-vous que je vous dise
toute ma pensée? S'il l'osait (il ne l'osera jamais), ce n'est
pas nous qui aurions à nous défendre contre lui, c'est lui
qui aurait à se défendre contre le peuple anglais. Il tom-
berait sous son mépris, sous ses risées. (Bruyants applau-
dissements.) Cela n'est pas sérieux.
Je me résume. Vous avez un droit incontestable, vous le
tenez de l'Egypte, continuez vos travaux. Vis-à-vis de la
Porte, vous n'avez rien à voir, cela ne vous regarde pas;
c'est la question politique, et quand la Porte voudra faire
soutenir ce qu'elle croit son droit par des actes, ce sera
affaire à discuter. Quant à cet épouvantail de l'Angle-
terre, ne vous en préoccupez pas. Vos ennemis, vos adver-
saires peuvent parler de cela. Quant aux hommes du
canal, ils n'ont pas à s'en préoccuper, et je défie le gou-
vernement de ce grand pays d'Angleterre d'entraîner la
nation dans une hostilité sérieuse contre le canal. (Très-
bien! très-bien!)
Je reprends mon historique de la mission de Nubar-
Patha. Arrivé à Paris, et se basant sur des irrégularités (je
crois avoir prouvé et indiqué que ces irrégularités n'existent
pas, et que si elles existaient, il serait interdit à l'Egypte
plutôt qu'à tout autre de les faire valoir), s'appuyant sur
ces irrégularités, il est venu vous faire trois propositions.
Il vous a proposé de faire le canal d'eau douce; le canal
d'eau douce est fait, c'est pour cela, probablement, qu'il
vous a proposé de le terminer. Il vous a demandé l'abandon
des terrains, moyennant indemnité. Enfin, il vous a pro-
posé l'abolition de la corvée, l'abolition, non, je me trompe.
Il vous a proposé de la réduire de 20,000 hommes à 6,000
hommes.
Eh bien, admettons, ce qui n'était pas possible, que ces
propositions eussent été acceptées par vous, et jetons un
coup d'œil vers l'avenir; car l'homme d'Etat, et ceux qui
s'occupent de ces entreprises sont des hommes d'Etat, doit
songer à l'avenir; et jamais rien de plus grand, de plus
noble, de plus utile n'a été entrepris et n'a mieux mérité
d'être le but d'un grand pays. Jetons un coup d'œil sur
l'avenir et voyons ce qui arriverait. J'admets que les propo-
sitions de Nubar eussent pu être acceptées par vous. Il arri-
verait quelque chose de bien triste. D'abord, la Compagnie
serait ruinée, mais qu'à cela ne tienne ! je sais que c'est
le but désiré; passons là-dessus. Le canal se ferait-t-il? Non.
Je suis convaincu de l'impuissance de ces pays orientaux,
et je vous dis nettement, non ! le canal Be serait pas fait.
Le vice-roi que j'aime, que j'honore profondément ; de l'a-
mitié duquel je suis fier, et auquel je conserve un bon
souvenir pour l'accueil qu'il m'a fait et l'amitié qu'il m'a
témoignée ; le vice-roi se croit de bonne foi, capable de faire
le canal ; il se trompe. Tout à l'heure je serrais la main
de quelqu'un, de M. Mougel-Bey, qui a fait le barrage du
Nil. Savez-vous ce que c'est que le barrage du Nil? M. Mougel
a dépensé vingt millions pour le faire, c'est-à-dire pour
maintenir le niveau du Nil à une hauteur variable à vo-
lonté, pour inonder les terrains environnants par un im-
mense barrage.
Vous savez que la fertilité de l'Egypte est en raison di-
recte de l'eau dont on peut disposer pour irriguer les terres.
Il y a dix ans qu'il est terminé, achevé complètement,
sauf peu de chose, sauf des portes. Voilà tout ce qui y
manque, et il faudrait pour cela dépenser un million,
quinze cent mille francs au plus. Eh bien, ces portes, on
ne les place pas, et le barrage est inutile. Le gouverne-
ment égyptien est comme un homme qui perdrait ses
pantalons, parce qu'il ne sait pas y coudre un bouton. (Hi-
larité.)
Les Orientaux en sont là, ils ne savent jamais coudre le
dernier bouton. Voilà dix ans qu'ils ont dépensé 20 mil-
lions pour le barrage du Nil, et ils ne profitent pas de ses
avantages : leurs terres perdent la fertilité que leur don-
nerait l'irrigation du fleuve ; ils perdent l'intérêt de l'argent
qu'ils ont dépensé; et tout cela pour ne pas savoir mettre
des portes au barrage, pour ne pas vouloir dépenser 1 mil-
lion ou 1,500,000 francs. Ne nous faisons pas illusion, voilà
la puissance ou plutôt l'impuissance orientale prise sur le
fait. Le vice-roi est de bonne foi, j'en suis sûr, il croit
pouvoir terminer le canal : il ne le terminerait pas, les
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